Réservoir d’eau potable de la Daghra

Au-delà des polémiques qui animent les débats politiques, des citoyens tunisiens ont d’autres préoccupations. Depuis plus de dix jours, le réservoir d’eau qui alimente les délégations Al Mengar, Boulaaba, Om Alchrat et la cité universitaire de Kasserine a été changé par la SONEDE. Passant de celui de Ain Caid à celui de Doghra, l’eau du robinet n’est plus la même pour les habitants. Avec son goût amer et sa couleur jaunâtre, l’eau est imbuvable. Pourtant, pour les responsables de la SONEDE de Kasserine, cette eau est considérée comme potable.

L’eau du robinet est jaune depuis plus d’une semaine !

Ahmed Bartouli est un habitant de Kasserine, de la délégation Al Mongar. Depuis une semaine, l’eau du robinet a changé de couleur chez lui.

«L’eau est jaune et sa couleur varie parfois entre le jaune et le rouge. J’ai mis cette eau dans une bouteille et après quelques heures, j’ai été surpris de voir de la terre au fond.»

En parallèle du changement de réservoir, l’épouse de M. Bartouli ainsi que sa sœur ont commencé à avoir la diarrhée depuis quelques jours. Ils se sont donc rendus à l’hôpital. Le docteur qui les accueillis leur a demandé si leur alimentation avait changé. M. Bartouli a répondu que seule l’eau était devenue imbuvable.

Dans ce même hôpital à Kasserine, Mme Aziza Jebrane, aide soignante, avait remarqué aussi le changement de l’eau du robinet chez elle à la cité universitaire et même dans son lieu de travail.

«Même à l’hôpital nous utilisons cette eau jaune. Une eau imbuvable, on dirait que nous buvons d’une flaque par terre » confirme-t-elle

Les habitants se plaignent de la couleur de l’eau et des résidus qu’elle contient.

La famille de Mme Jebrane est composée de six personnes. Depuis une semaine, ils se sont retrouvés dans l’obligation d’acheter de l’eau minérale pour éviter d’avoir à boire l’eau du robinet.

«Il n’y a que moi et ma sœur qui travaillons. Moi je suis rémunérée 500 dt par mois tandis que ma sœur travaille «al hadhayer»,… Nous achetons 9 bouteilles d’eau par jour, c’est trop !»

Abdel Hafidh Guermazi est un autre habitant de Kasserine, de la délégation Boulaaba, qui atteste également que cette eau a changé depuis une semaine.

«Ce n’est pas la première fois que cela arrive. Nous avons protesté la dernière fois il y a quelques mois, et la SONEDE nous a remis de l’eau normale. Récemment, ce problème a resurgi à nouveau. Nous ne voulons pas faire des manifestations! Les autorités nous disent que le Ministère de la santé atteste que l’eau est buvable. Ce n’est pas vrai, elle est jaune et il y a de la terre dedans. Même son goût est amer et désagréable.»

Un autre témoin, M. Guermazi, chauffeur de bus, nous a informés qu’il est allé voir le vice-président au gouvernorat, puisque le gouverneur était absent. «On nous a demandé de revenir lundi … Nous attendons encore de le voir…»

Un responsable à la SONEDE : “L’eau est potable, mais les habitants ne sont pas habitués à son goût”

Nous avons contacté M. Raouf Fraj, responsable à la SONEDE de Kasserine. D’après lui, la SONEDE a relié l’ancien réseau à un nouveau, changeant bien le réservoir de Ain Caid à celui de Doghra.

«L’eau est potable. C’est juste que les habitants ne sont pas habitués à son nouveau goût, c’est tout! Sachez aussi que le ministère de la santé nous a donné le feu vert. Il n’y avait aucun problème avec cette eau» se défend M. Fraj.

Ministère de la Santé, aucune réponse

Suite à ces nombreux témoignages et plaintes des habitants des délégations de Kasserine susmentionnées, nous avons contacté le Ministère de la Santé d’après les numéros inscrits sur le site du gouvernement mais l’appel est resté sans réponse.

A Kasserine, l’insatisfaction et la frustration gagne les habitants. M. Mohamed Baraketi et Bacem Sehli, deux jeunes actifs au Forum des jeunes pour la culture de la citoyenneté, se sont engagés à faire passer une pétition aux kasserinois pour la transmettre à la direction régionale de la santé à Kasserine et afin qu’il y ait une vérification sérieuse de l’eau du robinet.