Ces dernières décennies ont vu la multiplication des publications sur Ibn Arabî et son école [1] : traductions et essais se succèdent à une cadence accélérée et la doctrine d’Ibn Arabî est commentée, analysée, disséquée, avec plus ou moins de bonheur selon les cas.
Ces dernières décennies ont vu la multiplication des publications sur Ibn Arabî et son école [1] : traductions et essais se succèdent à une cadence accélérée et la doctrine d’Ibn Arabî est commentée, analysée, disséquée, avec plus ou moins de bonheur selon les cas. Force est de constater toutefois qu’aucun travail d’envergure n’a été effectué jusqu’ici sur l’oeuvre poétique d’Ibn Arabî dans son ensemble. Certes, dès 1911, Nicholson publiait à Londres l’édition et la traduction du Tarjumân al-ashwâq [2] et, plus récemment, quelques spécialistes n’ont pas craint de s’aventurer dans le Dîwân d’Ibn Arabî imprimé à Bûlâq [3] . Mais, au regard de ce qui reste à défricher, ces téméraires incursions représentent bien peu. Elles ne permettent pas en tout cas de saisir la place éminente qu’occupe la poésie dans l’oeuvre d’Ibn Arabî et moins encore de comprendre le rôle majeur qu’il lui assigne comme support doctrinal. Je n’ai certes pas la prétention de combler cette lacune ; mon propos est, plus modestement, de donner un bref aperçu de cette terra incognita et des richesses qu’elle recèle.
Le voyage est un thème récurrent chez les mystiques musulmans et un grand nombre de termes du lexique technique du tasawwuf s’y rapporte, sans qu’on y prête toujours attention : sulûk, tarîq, mi‘râj, mawqif, etc… sont autant de vocables pour désigner et décrire ce qu’est fondamentalement la quête de Dieu : un long périple qui engage le viator dans les profondeurs obscures de son être pour le conduire vers l’éclatante lumière de l’Un sans second. Chez Ibn Arabî, la notion de voyage est omniprésente et les cinq cent soixante chapitres des Futûhât ne sont, en définitive, qu’une invitation réitérée à chaque page de lever l’ancre sans plus attendre puisqu’aussi bien il nous faudra tôt ou tard accomplir l’inéluctable traversée [4] : “Nous appartenons à Dieu et c’est à Lui que nous retournons”(Cor 2:156).
Des multiples voyages que décrit Ibn Arabî, c’est celui auquel il nous convie dans le chapitre 8 des Futûhât que je voudrais évoquer [5] . Le Shaykh y évoque longuement la “Terre de la Réalité” (ard al-haqîqa) qui fut modelée, nous dit-il, à partir du surplus de l’argile d’Adam. Elle se situe dans le Monde Imaginal (âlâm al-khayâl) et fait donc partie du barzakh, “l’isthme” qui conjoint tous les ordres de réalité. Dans cette terre spirituelle, où les corps sont d’une consistance subtile tandis que que les intelligibles s’y revêtent d’une forme, on ne pénètre que par “l’esprit” ce qui ne veut nullement dire par l’imagination au sens commun du mot, laquelle n’est apte qu’à combiner les images recueillies dans le monde sensible. Ces explications préliminaires, que j’ai sommairement résumées, sont suivies du témoignage de quelques voyageurs spirituels qui, tel Dhu-l-Nûn al-Misrî, ont eu le privilège de parcourir cette contrée prodigieuse : cités d’or, d’argent, de safran, de musc, fruits d’une saveur inouïe, océans de métaux précieux qui se joignent sans que se mêlent leurs eaux. Le caractère “fantastique” de ces descriptions ne doit pas nous abuser ; la ard al-haqîqa n’est pas un royaume mythique. Elle a beau être “ma‘nawiyya”, spirituelle, elle n’en n’est pas moins aussi réelle que le sol que foulent nos pieds. Elle est d’abord et avant tout la Terre de l’Adoration la plus pure rendue à Dieu [6] . Et c’est sans doute pour nous rappeler cette vérité essentielle qu’Ibn Arabî rapporte ensuite qu’il a vu dans ce monde, une Ka’aba, dépouillée de son voile, parler à ceux qui accomplissent les tournées rituelles et leur octroyer des sciences spirituelles.
Mais le témoignage suivant nous plonge dans un univers qui n’est pas sans rappeler certaines peintures surréalistes :
J’ai vu dans ce monde, rapporte le Shaykh, une mer de sable aussi fluide que l’eau ; j’ai vu des pierres, petites et grandes, mutuellement attirées les une vers les autres, tel le fer vers l’aimant. Jointes les unes aux autres, elles ne peuvent se dissocier à moins qu’on n’intervienne directement, de la même façon que l’on sépare le fer de l’aimant sans qu’il puisse s’y opposer. Mais, si on s’abstient de le faire, ces pierres continuent d’adhérer les une aux autres sur une distance déterminée. Lorsqu’elles sont toutes unies, cela constitue la forme d’un navire. J’ai moi même vu ainsi se former une petite embarcation et deux nefs. Quand un vaisseau est ainsi constitué, les habitants le mettent à l’eau, puis ils embarquent pour voyager où bon leur semble. Le plancher du navire est fait de particules de sable ou de poussière soudées les une aux autres de manière spécifique. Jamais je n’ai rien vu d’aussi merveilleux que ces vaisseaux de pierre voguant sur un océan de sable ! Toutes les embarcations ont la même silhouette ; le vaisseau possède deux flancs à l’arrière desquels se dressent deux énormes colonnes plus hautes que la taille d’un homme. Le sol du navire à l’arrière est à hauteur de la mer sur laquelle il s’ouvre sans qu’un seul grain de sable pénètre à l’intérieur. [7]
Etrange récit que l’on classerait volontiers sous la rubrique des ajâ‘ib, ces mirabilia dont regorge la littérature arabe. Toutefois, une lecture attentive du vocabulaire employé par Ibn Arabî dans ce passage fait apparaître que cette “histoire fantastique” masque un enseignement doctrinal subtil. Non qu’il s’agisse d’une simple allégorie. Dans le Mundus Imaginalis , où un carré peut être rond, où ce qui est petit peut contenir ce qui est grand, Ibn Arabî a certainement été le témoin émerveillé de cette singulière navigation. Mais la relation de cette expérience est moins pour lui l’occasion de nous étonner que le moyen de nous instruire discrètement d’un principe initiatique dont la scène qu’il décrit est, à ses yeux, l’expression concrète [8] . Aussi a -t-il emprunté les termes-clés qui ordonnent ce récit à un lexique spécifique de la linguistique arabe. Si bahr est le terme couramment employé pour signifier la mer, il est aussi celui qui, dans le lexique de la poétique arabe, sert à désigner le mètre d’un poème. De même, ramal, qui, dans l’usage courant, signifie “sable”, est la dénomination de l’un des seize mètres que compte la prosodie arabe classique. L’emploi d’une terminologie empruntée au lexique de la poétique arabe n’a évidemment rien de fortuit. Située dans ce contexte, l’histoire des vaisseaux de pierre qui voguent sur une mer de sable n’a plus rien d’un délire onirique : le vaisseau (safîna) représente la qasîda, le poème arabe classique ; les pierres indissociables, ce sont les kalimât, les mots qui, assemblés les uns aux autres, forment des vers dont la totalité constituent le poème ; les deux flancs du navire figurent les deux hémistiches du vers et les deux colonnes renvoient aux deux “piliers”, watad, de la métrique arabe. Ainsi, dans un langage à peine crypté, Ibn Arabî nous signifie que la poésie est le moyen privilégié de “voyager” dans le monde imaginal dont elle véhicule les réalités spirituelles (haqâ’iq) qui, par nature, sont supra-formelles.
Un autre texte d’Ibn Arabî, inédit celui-là, corrobore l’interprétation que je propose de ce passage des Futûhât. Il s’agit du Dîwân al-ma‘ârif al-ilâhiyya et, plus précisément, de la longue préface qui inaugure ce vaste “Recueil des connaissances divines” [9] . J’ai déjà eu l’occasion, ailleurs [10], de décrire ce Dîwân d’après les trois manuscrits recensés par Osman Yahyia [11] . Des diverses conclusions auxquelles ont abouti mes investigations, je rappellerai simplement ceci : lorsqu’il entreprit la rédaction du Dîwân al-ma‘ârif, l’intention du Shaykh al-akbar était, selon ce qu’il explique au début du texte, de rassembler dans une somme unique l’intégralité des vers qu’il avait composés et dont il conservait le souvenir ou la trace écrite [12] . Mais la réalisation de ce colossal projet, auquel il n’était pas en mesure de consacrer tout son temps, nécessita de nombreuses années. Aussi, des recensions partielles de la Somme en cours de rédaction ont-elles commencé à circuler avant qu’elle ne soit totalement achevée- si tant est qu’elle le fût jamais [13] – de sorte que, de cet opus magnum, nous ne possédons plus que des multiples fragments.
Les remarques qui suivent n’épuisent pas, loin s’en faut, les nombreux commentaires et les développements doctrinaux qu’appellerait la préface du “Grand Dîwân”. Elles démontreront à tout le moins, j’espère, l’intérêt qu’il y a pour les spécialistes d’Ibn Arabî et tous ceux qui sont attachés à son enseignement à regrouper leurs efforts en vue de reconstituer ce monument de la poésie mystique arabe.
Louange à Celui qui a créé l’homme et lui a enseigné l’éloquence (bayân) et qui a fait descendre les quantités (maqâdîr) et les mesures (awzân)…
Ibn Arabî n’est pas homme à s’encombrer de préambules conventionnels et si la doxologie est une règle du discours musulman- pieusement répétitive chez la plupart des auteurs- elle est tout autre chose chez lui que l’execution d’une figure obligée. Dès la première ligne, il prend la Révélation à témoin [14] pour énoncer, discrètement certes, que les principes majeurs qui régissent la poétique arabe- l’éloquence, l’harmonie, la symétrie- sont d’institution divine. Et de poursuivre par des considérations cosmologiques plus explicites : Dieu a doté l’univers, souligne -t-il, d’une structure analogue à celle qui ordonne le bayt al-shi‘r, le vers d’un poème [15] . Il repose, comme lui, sur deux “cordes” (sabab, terme qui désigne l’un des principaux éléments de la métrique arabe) ; l’une, “légère”, qui est le monde spirituel, l’autre, “épaisse”, qui est le monde corporel ; deux “piliers” (watad qui est le second élément métrique majeur) le soutiennent également : l’un est la constitution et la génération des choses, l’autre, leur décomposition et leur dissolution. En somme, observe le Shaykh al-akbar, le monde est une parole toute de rythme et de rime.
De ces quelques lignes, dont la puissante densité doctrinale ne laisse pas d’étonner, retenons cette idée essentielle : en tant que ses fondements participent de la Sagesse divine, la poésie est un art sacré et proprement universel, l’écho terrestre d’une divine harmonie. Reste à déterminer sa fonction dans l’économie du langage ; Ibn Arabî s’y emploie aussitôt. Dieu, affirme—t-il, a disposé les joyaux des connaissances spirituelles et des secrets seigneuriaux dans la prose et la poésie. Il a confié ce trésor aux ârifûn, les gnostiques, lesquels, par crainte des pillards, ont dissimulé ces secrets sous le voile de termes allusifs et symboliques. Autrement dit, le langage poétique est spirituellement nécessaire à l’humanité déchue en ce qu’il constitue le support privilégié des connaissances sapientiales dont il assure la transmission pérenne à l’usage exclusif des gnostiques. Et c’est en rappelant que le Prophète est le Maître du langage, le détenteur de la “somme des paroles” que le Doctor maximus conclut cette singulière khutba.
Ayant démontré et la légitimité et la nécessité, pour les mystiques, de recourir au langage poétique, Ibn Arabî entreprend de présenter son Dîwân. De manière globale, tout d’abord, en affirmant que cette somme poétique procède intégralement d’une inspiration divine et que la pensée spéculative n’y a pas la moindre part ; de manière détaillée ensuite, par l’énumération d’une longue série de termes techniques, relatifs aux catégories d’hommes spirituels, leurs sciences, leurs états, leurs degrés…etc, qui constitue, en quelque sorte, la table des matières du Dîwân. Ces termes, convient le Shaykh al-akbar, sont abscons ; ils constituent une espèce de code- et, observe—t-il, chaque discipline a le sien- dont usent délibérément les awliyâ afin d’interdire aux non-initiés l’accès aux sciences qu’il transmet.
Au terme de ce prologue, l’auteur expose les motifs qui l’ont conduit à s’adonner à la poésie d’une part, à réunir, d’autre part, l’ensemble de ses vers dans un recueil. Au vrai, cette introspection nous livre- à condition de décrypter toutes les allusions doctrinales et autobiographiques qui la sous-tendent- la clé de lecture de ce “Recueil des connaissances divines”.
Trois visions, survenues à des années d’écart les unes des autres, sont, d’après ce témoignage, à l’origine de la vocation poétique du Shaykh al-akbar. La première évoque une étape cruciale de la conversion, stricto sensu , du mystique andalou : Après une période d’”ignorance”,
durant laquelle je ne différenciais pas entre la science véritable et celle qui ne l’est pas, Dieu m’accorda Son secours et m’envoya dans mon sommeil Muhammad, Jésus et Moïse. Jésus m’exhorta à l’ascèse et au dépouillement ; Moïse me donna le “disque du soleil” et me prédit l’obtention de la “science de chez-Moi” [16] parmi les sciences du tawhîd, tandis que Muhammad m’ordonna :”Cramponne-toi à moi, tu seras sauf !”
Si, parmi les innombrables visions qui ont ponctué son itinéraire spirituel, le Shaykh al-akbar a retenu celle-ci, ce n’est pas seulement parce qu’elle détermina ses débuts dans la Voie [17] . D’autres rencontres “imaginales” ont été au moins aussi décisives pour sa vie spirituelle, notamment celle qui, en 1190, à Cordoue, le mit en présence de tous les prophètes envoyés aux hommes. C’est, me semble -t-il, parce que cet épisode met en lumière un aspect fondamental de la mission assignée au Sceau de la sainteté muhammadienne qu’Ibn Arabî en fait état dans cette préface au Dîwân al-ma‘ârif.
On remarque que les trois prophètes qui viennent à la rencontre d’Ibn Arabî- et, soulignons-le, lui portent assistance- sont les représentants des trois traditions majeures issues de la tradition abrahamique. On sait par ailleurs que, dans la perspective de l’hagiologie akbarienne, le Sceau muhammadien est l’héritier par excellence de tous les prophètes et, a fortiori , de ces trois Envoyés. Que cette vision réfère précisément au statut du Sceau muhammadien en tant que wârith, héritier des prophètes et plus particulièrement de Muhammad, Jésus et Moïse, c’est plus que probable. Mais elle suggère aussi, de manière discrète, que les trois communautés -musulmane, chrétienne et juive- que ces prophètes représentent sont plus particulièrement concernées par son magistère. Autrement dit, le Sceau muhammadien a pour vocation- en contrepartie, pourrait-on dire, du soutien que lui ont prodigué ces envoyés- d’assister à son tour leurs communautés respectives, notamment en préservant, par son enseignement, les vérités essentielles et immuables qui fondent les traditions auxquelles elles se rattachent.
Cette triple intervention prophétique survient, selon ce que j’ai montré ailleurs, avant 1184 et décide Ibn Arabî à s’engager dans la suhba, le compagnonnage des maîtres spirituels.
C’est presque vingt ans plus tard que se situe le second épisode, mentionné ici de façon succincte, au cours duquel Ibn Arabî voit célébrée son union nuptiale avec chacune des étoiles du ciel et chacune des lettres de l’alphabet. Dans le Kitâb al-bâ, où il relate longuement cette mystérieuse cérémonie [18] , Ibn Arabî précise qu’elle eut lieu à Bougie, au mois de ramadân (juin) 1201, et qu’un onirocrite en fit l’interprétation suivante :”Cela est la mer sans fond ; celui qui a eu ce songe recevra une part des sciences célestes, des sciences cachées et des mystères des astres telle que personne d’autre n’en a obtenu à son époque.”
Cette vision, il importe de le souligner, coïncide avec une étape charnière dans la destinée d’Ibn Arabî : ayant fait ses adieux à l’Andalus, il se dirige vers Tunis d’où il partira définitivement pour l’Orient. Divers événements spirituels majeurs ont marqué cette “période occidentale” de sa vie qui est sur le point de s’achever : en 1190 à Cordoue, Ibn Arabî assiste à une assemblée générale des prophètes venus le féliciter- selon Jandî [19] – d’avoir été désigné pour assumer la fonction de Sceau de la sainteté muhammadienne. En 1198, à Fès, Ibn Arabî a confirmation de cette élection au cours de son “ascension céleste”(mi‘râj), ce voyage spirituel, qui, à la suite du Prophète, le conduit de ciel en ciel jusqu’à la Présence divine et dont le Kitâb al-isrâ est le témoignage brûlant. Enfin, quelques mois avant sa halte à Bougie, en novembre 1200, il accède à la station de la Proximité (maqâm al-qurba), laquelle, selon lui, se situe immédiatement en dessous de la station de la prophétie légiférante [20] .
Envisagées sous cet angle, les noces célestes d’Ibn Arabî à Bougie revêtent une signification des plus claires. Les astres et les lettres qui sont au centre de ce récit renvoient expressément aux sciences ésotériques et sacrées que sont, dans la tradition islamique, la science des lettres (ilm al-hurûf) et l’astrologie (ilm al-nujûm). Rappelons que, pour Ibn Arabî comme pour beaucoup de soufis, la science des lettres appartient en propre aux âwliyâ, aux saints, et constitue un des signes les plus probants de l’authenticité de leur réalisation spirituelle [21] . En outre, Ibn Arabî rapporte dans un de ses poèmes qu’un “messager” (rasûl) vint le trouver à Seville pour lui annoncer sa qualité d’héritier (wirâtha) et lui déclare notamment :”La science des lettres est pour nous la preuve que tu es l’Imâm.” [22] Autant d’indices qui autorisent à penser que la vision de Bougie s’inscrit dans le cycle des révélations touchant à l’élection d’Ibn Arabî comme Sceau de la sainteté. Elle nous dévoile, au surplus, un autre aspect de la charge qu’il est appelé à assumer : le Sceau muhammadien est le dépositaire et le gardien des sciences ésotériques dont il doit assurer la pleine et entière transmission aux saints qui lui succéderont jusqu’au Jour Dernier.
Les indications suivantes, qui ne figurent pas dans les autres textes relatifs à la vision de Bougie, nous ramènent, de façon inattendue, au coeur du problème débattu dans la khutba du Dîwân al-ma‘ârif. Au cours de ces noces, raconte Ibn Arabî,
Dieu me fit entendre dans ma poitrine le grincement des Calames (sarîf al-aqlâm)[qui inscrivent les destinées des créatures] [23] ; c’était une mélodie à deux ou trois temps, selon que le rythme doit décroître ou croître. “Qu’est-ce que ce refrain ?” demandai-je. “C’est l’audition poétique (al-samâ) !” me fut-il répondu. “Et qu’ai-je à faire de la poésie ?”- ” Elle est l’origine (asl) de tout ; le langage poétique est l’essence immuable (al-jawhar al-thâbit), tandis que la prose est la conséquence immuable (al-far al-thâbit) !”
Dialogue fulgurant qu’Ibn Arabî met à profit pour revenir sur l’omniprésence de l’art poétique dans la Création ; il n’est dans la nature, remarque t-il, de son qui ne soit régulièrement rythmé, d’architecture qui ne soit ingénieusement ordonnée. Soit. Mais quel rapport entre ceci et cela, entre le caractère providentiel du langage poétique et la fonction du Sceau muhammadien telle que la figure- selon moi- l’union d’Ibn Arabî avec les étoiles et les lettres de l’alphabet ?
Le récit de la troisième et dernière vision mentionnée dans cette préface du Dîwân al-ma‘ârif donne tout son sens au récit précédent :
La raison, explique Ibn Arabî, qui m’a amené à proférer de la poésie est que j’ai vu en songe un ange qui m’apportait un morceau de lumière blanche. On eût dit un morceau de la lumière du soleil. “Qu’est-ce que cela ?” demandai-je. “C’est la sourate al-shu‘arâ (Les Poètes)” me répondit-on. Je l’avalai et je sentis un cheveu (sha‘ra) qui remontait de ma poitrine à ma gorge, puis à ma bouche. C’était un animal avec une tête, une langue, des yeux et des lèvres. Il s’étendit jusqu’à ce que sa tête atteigne les deux horizons, celui d’Orient et celui d’Occident ; puis il se contracta et revint dans ma poitrine. Je sus alors que ma parole atteindrait l’Orient et l’Occident. Lorsque je revins à moi, je déclamai des vers qui ne procédaient d’aucune réflexion ni d’aucune intellection. Depuis lors, cette inspiration n’a jamais cessé. Et c’est en raison de cette contemplation sublime que j’ai collecté tous les vers dont je me souviens. Mais bien plus nombreux encore sont ceux que j’ai oubliés ! Tout ce que renferme ce recueil n’est donc, grâce à Dieu, que [le fruit] d’une projection divine, d’une inspiration sainte et spirituelle, d’un héritage céleste et splendide.
Il y a dans ce texte un terme que le lecteur assidu des Futûhât ne manquera pas de repérer : celui de sha‘ra, “cheveu”. Il figure, en effet, dans le prologue qui inaugure cette oeuvre majeure et dans lequel Ibn Arabî décrit la vision au cours de laquelle, en 1202 à la Mecque, le Prophète Muhammad en personne le consacre Sceau de la sainteté muhammadienne. Or, lors de ce cérémonial, le Prophète lui déclare : “il y a en toi un cheveu (sha‘ra) de moi qui ne peut plus supporter d’être loin de moi et qui gouverne ta réalité intime.” [24] Coïncidence ? On se résignerait volontiers à cette explication si ce même vocable n’apparaissait également dans un autre texte des Futûhât, relatif lui aussi au Sceau muhammadien :”Son statut par rapport à l’Envoyé de Dieu, déclare Ibn Arabî dans le chapitre 382, est celui d’un cheveu (sha‘ra) de son corps par rapport à son corps tout entier.” [25] A ces deux textes, il faut ajouter une mention elliptique du chapitre 2 des Futûhât dans lequel Ibn Arabî emploie de nouveau sha‘ra pour illustrer le rapport subtil qu’il entretient avec le Prophète [26] .
Ainsi, à trois reprises, le Shaykh al-akbar a recours à l’image du “cheveu” pour rendre compte de la relation entre le Sceau muhammadien et le Prophète. Encore ne serais-je pas surprise qu’un examen minutieux du vocabulaire poétique d’Ibn Arabî fasse apparaître d’autres occurrences de ce terme. Quoiqu’il en soit, il est permis de penser que le “cheveu” qui, dans la vision évoquée précédemment, émerge de sa poitrine pour devenir un être vivant et s’accroît jusqu’à embrasser les “deux horizons” avant que de réintégrer sa personne, symbolise précisément le lien subtil qui rattache le Sceau Muhammadien à la “Réalité muhammadienne” (haqîqa muhammadiya), laquelle est la source de toute sainteté (walâya) [27] . Son extension préfigure d’autre part, ainsi qu’Ibn Arabî le remarque, la propagation de la doctrine akbarienne. Enfin, cette vision annonciatrice du rayonnement de son oeuvre ressortit de toute évidence à la dimension proprement universelle du magistère du Sceau de la sainteté muhammadienne.
Ce n’est pas tout. Une étroite parenté relie entre eux, est-il besoin de le préciser, les termes de shu‘arâ, titre de la sourate qu’Ibn Arabî absorbe, de sha‘ra, le “cheveu” qui procède de cette “communion”, et de shi‘r, la poésie que cette vision enfante. Tous ces vocables sont en effet issus de la racine sh‘r qui exprime l’idée de “connaître”, “percevoir”, de façon à la fois immédiate et globale. Le titre même du Dîwân al-ma‘ârif est en relation évidente avec cette signification première.
Qui plus est, le recoupement de divers textes fait apparaitre que cette relation morphologique se double d’une relation sémantique plus subtile qui s’entrecroise avec la notion de Sceau muhammadien. Le commentaire qui accompagne l’affirmation du chapitre 382 des Futûhât- selon laquelle le statut du Sceau muhammadien par rapport au Prophète est analogue à celui d’un cheveu en comparaison du corps- est à cet égard fort instructif :
…C’est pour cela, explique Ibn Arabî à propos du Sceau, qu’on ne le perçoit (yush‘aru) que de façon globale sans le connaître (cette fois : yu‘lamu) de manière distinctive, exception faite de ceux auxquels Dieu le fait connaître ou de ceux auxquels il dévoile lui-même son identité et qui le croient. Aussi a-t-il été désigné comme un “cheveu” (sha‘ra) en relation avec le shu‘ûr, la perception subtile. Cette perception est analogue à celle qui nous permet devant une porte close […] de détecter un mouvement qui signale la présence dans cette maison d’un animal sans que l’on puisse savoir précisément à quelle espèce il appartient ou de percevoir (à nouveau yush‘aru) qu’il s’agit d’un individu sans que nous soyons en mesure de déterminer son identité […] C’est en raison de ce caractère ténu que l’on désigne cela comme shu‘ûr, perception subtile (et non comme ilm) [28].
Autrement dit, la présence du Sceau muhammadien en ce monde demeure nécessairement discrète et n’est guère plus “palpable” que ne l’est un cheveu entre les doigts.
Revenons-en au langage poétique ; n’a t-il pas précisément pour fonction de nous faire pressentir de subtiles vérités sans les formuler ouvertement et distinctement ? C’est ce qu’énonce Ibn Arabî dans les lignes qui précèdent immédiatement le récit de la vision de la sourate al-shu‘arâ :
Il n’a pas été interdit au Prophète d’user de la poésie parce qu’elle serait par nature méprisable, ou d’un rang inférieur, mais parce qu’elle est fondée sur des allusions (ishârât) et des symboles (rumûz), car la poésie relève de la connaissance subtile (shu‘ûr). Or, il incombe à l’Envoyé d’être clair pour tout le monde et d’employer des expressions aussi limpides que possibles.
Enfin, il importe de souligner que le “cheveu” qui symbolise le statut du Sceau muhammadien en tant que manifestation de la face “cachée” du prophète, celle de sa walâya absolue, naît d’une sourate du Coran qu’Ibn Arabî a préalablement engloutie et, par conséquent, proprement intégrée dans sa personne. Il s’ensuit, si l’on adopte la conclusion qu’Ibn Arabî tire de cette vision, que sa parole, c’est-à-dire son enseignement, qui est appelé à se répandre sur l’univers, se nourrit littéralement du Coran où il puise sa source. Que des 114 sourates du Coran, ce soit la vingt-sixième, celle qui porte le titre al-shu‘arâ, qui lui ait été offerte ne laisse pas de suggérer que la poésie représente une part essentielle de cet enseignement tout comme cela sous-entend que la poésie en question n’a strictement rien d’une poésie “profane”.
Un autre texte d’Ibn Arabî confirme, si besoin en était, le rôle déterminant de la sourate 26 dans le développement de sa vocation poétique. Il s’agit de l’intitulé du chapitre 358 des Futûhât- lequel correspond à la sourate 26 [29] – tel qu’il est énoncé dans la table des matières qui figure au début des Futûhât :
De la connaissance de trois secrets dont les lumières sont diverses … C’est à partir de cette “demeure” [=sourate 26] que je me suis mis à proférer de la poésie, au cours d’une retraite que j’ai effectuée et au cours de laquelle j’ai atteint cette “demeure”. [30]
Nous savons par ailleurs, grâce à l’une des copies du Dîwân al-ma‘ârif [31] dont la préface contient certaines informations qui ne figurent pas ailleurs, que la vision de la sourate al-shu‘arâ survint alors qu’Ibn Arabî effectuait une retraite. Qu’il s’agisse de la même que celle qui voit son accession à la “demeure” de la vingt-sixième sourate [32], ne fait, pour moi, guère de doute.
Quoiqu’il en soit, il est remarquable que dans cette recension Ibn Arabî met l’accent sur les trois premiers versets de la sourate que lui apporte l’ange, ce qui sous-entend vraisemblablement que ces trois versets contiennent, de manière synthétique, l’essence de la “demeure” correspondant à la sourate 26. Comment, dès lors, ne pas faire un rapprochement entre les “trois secrets” du chapitre desFutûhât relatif à la sourate 26, les trois premiers versets de cette même sourate qui sont au coeur de cet événement, et les trois visions qui jalonnent la préface du Dîwân al-ma‘ârif ? Plus encore, le premier des trois versets de la sourate al-shu‘arâ est composé de trois lettres “lumineuses” (Tâ-Sîn-Mîm) et la première des trois visions mentionnée dans la préface se subdivise en trois visions, celles des trois prophètes, Muhammad, Jésus, Moïse [33] …
On entrevoit mieux, en recoupant ces textes, le parallèle qu’établit Ibn Arabî entre la fonction du Sceau muhammadien et la fonction du langage poétique. Les Envoyés, ayant essentiellement pour mission d’”appeler” les hommes à l’adoration du Dieu unique et à l’observance de Ses lois, se doivent d’employer un langage clair, accessible à chacun. L’usage de la poésie, qui est, par essence, un langage allusif pourvu d’expressions symboliques et donc ambivalentes, est formellement incompatible avec une telle mission.
Le rôle du Sceau muhammadien, en revanche, est plus secret [34] . “Gardien du trésor”, selon une expression de Qâshânî, il veille à ce que les vérités sapientiales qui sous-tendent la révélation prophétique- et que la corruption des coeurs et des moeurs interdit de dévoiler au grand jour- demeurent intactes et vivantes jusqu’à la Fin des Temps. Silencieux sans être muet, transparent sans être absent, le Sceau muhammadien assure dans l’ombre la transmission intégrale du “Dépôt sacré” à l’usage de ceux qui ont su en rester digne. De même que ses interventions dans la sphère de la sainteté empruntent des modalités subtiles, de même c’est par allusions et symboles qu’il s’exprime, afin que nul regard impie ne profane le secret message qu’il destine aux awliyâ des “deux horizons”. Foncièrement ambivalent, le discours poétique offre, plus que tout autre forme de langage, les garanties indispensables d’inviolabilité : seules les âmes pures savent déchiffrer avec succès les énigmes et les symboles qui le nourrissent.
On voit bien, en définitive, quelle subtile logique relie les noces d’Ibn Arabî à Bougie qui l’instaurent comme “gardien des sciences sacrées” au mystère du langage poétique auquel il est initié à cette occasion. Entre le Sceau des saints et la Poésie, la complicité est étroite : tous deux possèdent le même statut subtil, tous deux partagent la même fonction puisqu’aussi bien l’un et l’autre ont pour vocation de préserver le “Dépôt sacré”.
De la lecture que je propose de ces trois récits qui inaugurent les poèmes du Dîwân al-ma‘ârif, deux points essentiels sont à retenir. En premier lieu, chacun des événements visionnaires qu’ils relatent éclaire un aspect particulier de la fonction du Sceau muhammadien et correspond en même temps à une étape précise de l’odyssée qui, depuis sa conversion en Andalus conduit Ibn Arabî au faîte de la sainteté, à la Mecque, en 1202.
En second lieu, cette préface où le Shaykh al-akbar dit ouvertement ce qu’il insinue à mots couverts dans le chapitre huit des Futûhât, nous offre un exposé aussi dense que remarquable sur la fonction proprement initiatrice qu’il assigne à la poésie. D’un bout à l’autre de ce texte, invoquant tantôt des arguments dogmatiques, tantôt sa propre expérience spirituelle, Ibn Arabî s’attache à montrer que la poésie est le vecteur privilégié des connaissances spirituelles à l’égard desquelles elle est à la fois un mode d’accès et un mode d’expression. De même que le Monde Imaginal pourvoit les purs intelligibles d’une consistance formelle, de même la poésie, qui y prend sa source, parvient à saisir les fulgurantes haqâ’iq pour les inscrire, l’espace d’un instant, dans une forme graphique et sonore. Ibn Arabî n’est assurément pas le seul mystique musulman à considérer le langage poétique comme le mode de discours le plus apte à suggérer ce qui, par nature, est indicible et, par conséquent, échappe à la représentation intellectuelle. D’autres spirituels musulmans, tels Ibn al-Fârid ou Rûmî, ont compris que la puissance incantatoire du rythme poétique et l’envoûtement que produit l’écho sonore de la rime sont propres à abolir les limites empiriques de l’espace et du temps au-delà desquelles se situent précisément les réalités spirituelles. Mais il revenait à Ibn Arabî de proclamer avec force que la poésie est par excellence le “vaisseau” qui renferme le trésor du bayt al-walâya et qui assure son voyage sur les eaux tumultueuses des siècles, contre vents et marées.
Notes :
[1] Voir les articles de Martin Notcutt in Journal of the Ibn Arabî Society, Vol.III, 1984, et vol. IV, 1986, et Muhyiddin Ibn Arabî, A commemorative volume, ed. par S. Hirstenstein et M. Tiernan,Shaftesbury, 1993, pp.328-339.
[2] Plus récemment, M. Gloton a traduit l’intégralité du Tarjumân al-ashwâq et du commentaire qu’en fit Ibn Arabî ; Cf :L’interprète des désirs, Paris, Albin Michel, 1996.Voir aussi la traduction partielle de Sami-Alî, Le Chant de l’ardent Désir, Paris, Sindbad, 1989.
[3] Voir R. Austin, “Ibn al -Arabî, Poet of Divine Realities”,in Muhyiddin Ibn Arabî : A Commemorative Volume, pp.181-190 ; R. Deladrière, “Le Dîwân d’Ibn Arabî” in Journal of the Ibn Arabî Society,vol. XV,1994, pp. 50 sqq.
[4] Fut., III, p.223 ; sur la notion de voyage chez Ibn Arabî cf.Le Dévoilement des effets du voyage (K. al-isfâr an natâ’ij al-asfâr), ed. critique et trad. française par D. Grill, Ed. de l’éclat, 1994.
[5] Fut., I, pp.126-131. Certaines sections de ce chapitre ont été traduites par H. Corbin in Corps spirituel et Terre celeste, Paris, 1979, p. 164 sqq.
[6] A ce sujet cf. Fut., III, p. 224, où Ibn Arabî rapporte que seul celui qui a réalisé la servitude pure réside en ce monde, en lequel lui-même adore Dieu depuis 45 ans.
[7] Fut., I, p.129.
[8] On notera au passage qu’une expression semblable à celle dont use Ibn Arabî dans ce passage, celle de “mer aréneuse” ou encore de “mer gravelle” se trouve dans des descriptions chrétiennes médiévales du “royaume du Prêtre Jean”, lequel, bien sûr, appartient au âlam al-khayâl. Cf., Jean Delemeau, Une histoire du paradis , Paris, 1992, pp. 103 et 109.
[9] Ms. B.N. 2348, f. 35b-38 ; Ms. Fâtih, 5322, f. 213-214b.
[10] C. Addas, “A propos du Dîwân al-ma‘ârif d’Ibn Arabî” in Studia Islamica , vol. 81, 1995, p. 187sqq.
[11] Histoire et classification de l’oeuvre d’Ibn Arabî, Damas, 1964, R.G. 101 ; de ces trois manuscrits, celui de Paris, BN 2348, qui compte 239 folio-s est le plus complet.
[12] Le “Dîwân Ibn Arabî” imprimé à Bûlâq constitue vraisemblablement le prolongement du Dîwân al-ma‘ârif, également intitulé par Ibn Arabî le “Grand Recueil” (al-Dîwân al-kabîr).
[13] En effet, rien ne permet à ce jour d’affirmer qu’il existe une recension complète du “Grand Dîwân” d’Ibn Arabî ; O. Yahia constate pour sa part (R.G. 102) que toutes les copies qu’il a consultées sont incomplètes.
[14] Les termes de bayân, awzân, maqâdir sont en effet chargés de réminiscences coraniques ; pour bayân cf.Cor 55:4 ; pour maqâdir (plur. de miqdâr) cf. Cor 13:8 ; pour awzân de la même racine que mîzân cf. Cor 55:7.
[15] En prosodie arabe “bayt al-shi‘r” désigne proprement le vers par analogie avec le “bayt al-sha‘r” qui signifie litteralement la “maison de poil” c’est-à-dire la tente, de même que les dénominations binaires des éléments métriques fondamentaux sont empruntées aux matériaux qui participent à la structure de la tente : les deux “cordes”, (sabab), les deux piliers (watad) les deux cloisons (fâsila) ; cf. EI 2 s.v. arûd.
[16] La “Science qui se trouve auprès de Moi”(al-ilm al-ladunnî) est la science propre à Khadir, l’interlocuteur de Moïse dans l’épisode coranique de la sourate de la Caverne ( Cor.18:65 ) et le prototype des âfrâd ; Sur ce sujet, voir M. Chodkiewicz, Le Sceau des saints, Paris, 1986, chap.7.
[17] Sur les circonstances et les conséquences immédiates de cette vision dans la destiné d’Ibn Arabî, voir C. Addas, Ibn Arabî ou la Quête du Soufre Rouge , Paris, 1989, pp.61-63.
[18] Kitâb al-bâ, Le Caire, 1954, pp.10-11. Voir également le Kitâb al-kutub in Rasâ’il , Hayderabad, 1948, p.49.
[19] Sharh fusûs al-hikam, Mashhed, 1992, p. 431.
[20] Fut., II, p.261.
[21] Sur cette question voir D. Gril, La Science des lettres in “Les Illuminations de La Mecque”, Paris, 1989, chap. 8, pp.385-487.
[22] Dîwân Ibn Arabî , p.348.
[23] L’expression de sarîf al-aqlâm figure dans plusieurs recensions qui relatent l’ “ascension céleste” du Prophète (mi‘râj) ; cf. Muslim, imân, 263.
[24] Fut .,I, p.3
[25] Fut ., III, p.514.
[26] Fut., I, p.106.
[27] Il est même probable que c’est en référence à cette vision- qui se situe au plus tard en 594h., date à laquelle Ibn Arabî rédige le Kitâb al-isrâ qui comporte de nombreux poèmes- qu’Ibn Arabî emploie par la suite ce terme. Tout ceci démontre à quel point “le choix d’un mot chez Ibn Arabî n’est jamais fortuit, sa répétition moins encore”, ainsi que le remarquait M. Chodkiewicz, cf. Un Océan sans rivage , Paris, 1992, p.105.
[28] Fut ., III,514 ; sur la distinction qu’opère Ibn Arabî entre ilm et shu‘ûr, voir également III, p.458.
[29] Sur la correspondance entre les 114 chapitres de cette section et les 114 sourates du Coran, cf. Un Océan sans rivage , chap.3.
[30] Fut., I, p.22.
[31] Il s’agit du ms. de Berlin 7746, spr 1108, dont le second folio reproduit, avec des indications supplémentaires qui ne figurent pas dans les deux autres manuscrits, le récit relatif à cette vision
[32] Rappelons que chez Ibn Arabî les 114 sourates du Coran sont autant de “demeures spirituelles”, d’étapes successives vers la connaissance suprême ; cf.Un Océan sans rivage, chap.3.
[33] Soulignons que le chap. 358 contient plusieurs ternaires ; il est notamment question des trois prophètes, Moïse, Jésus, Muhammad.
[34] Voir à ce sujet, M. Chodkiewicz, Le Sceau des saints , chap. 9.
Source :
The Muhyiddin Ibn ’Arabi Society.
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