Le plus petit commun dénominateur de la pensée économique actuelle est que la petite et moyenne entreprise sauvera la Tunisie. Cette idée fortement ancrée, a acquis véritablement un statut dominant chez l’essentiel des économistes des partis siégeant dans l’hémicycle. On en trouvait déjà la trace déjà dans la plupart des programmes.
Tachons tout d’abord d’en restituer la logique et le raisonnement qui va avec.
Il suffirait d’augmenter la capacité de financement (épargne ou emprunt) de l’orienter vers la petite et moyenne entreprise (existante ou en création), pour que celle-ci forte d’une espérance de gain créé l’emploi en nombre et en qualité suffisants.
Le raisonnement est simple, presque évident, recette qui plus est et aux dires des experts a fait ses preuves dans l’histoire économique récente du pays.
Moi –même j’avais fini par y croire quelque peu, ayant observé la densification du tissu économique depuis l’indépendance, densification bien plus forte que celle observée chez nous voisins. Pour autant est-ce la solution miracle, la voie unique vers la résolution du sous emploi et du chômage ?
Ouvrons et refermons vite une parenthèse. L’actualité récente propulse la PME de nouveau sur le devant de la scène. Les bruits courent sur la place de Tunis que les chefs d’entreprise rechigneraient à investir dans le climat de méfiance actuelle. Pire l’absence de reprise de l’investissement pourrait tout bonnement mener le pays dans une impasse grave au cours de l’année 2012 : celle de la dégradation rapide des équilibres macro-économiques débouchant sur une possible crise économique et sociale sans précédent : Recul massif des réserves de devises entrainant des difficultés d’approvisionnement d’une part et de remboursement de la dette d’autre part.
Scénario catastrophe auquel on peut bien évidemment accorder quelque crédit. Mais tel n’est pas l’objet de ce papier, qui focalise sur la dynamique de moyen terme.
Croire et faire croire que la petite entreprise peut impulser et entrainer, -aux infrastructures près- une nouvelle phase de développement est soit d’une naïveté déconcertante, soit d’une duplicité dangereuse.
Nos experts sont, soit, victimes d’une sorte d’amnésie de l’histoire économique récente du pays, soit intellectuellement incapables de s’extraire d’une pensée dominante reproduisant des schèmes qui n’ont plus aucune véracité ni pertinence.
Amnésie de l’histoire ? De fait, plus de quarante ans de promotion de l’initiative privée mériterait mieux que la simple affirmation de son efficacité.
Observons de plus près sa démographie : son taux de natalité, les caractéristiques de sa croissance et les modalités de son développement.
Son taux de natalité a indubitablement varié : faible dans les années soixante, élevé au cours des trois décennies suivantes pour de nouveau se stabiliser à un niveau dramatiquement faible dans la dernière décennie : à peine quelques milliers par an n’absorbant qu’une fraction toujours plus faible de la demande additionnelle d’emploi arrivant sur le marché du travail et n’offrant aussi qu’une très faible proportion des emplois qualifiés demandés. Tous les chiffres concordent en tendance.
S’agissant de sa croissance et de son développement ce petit capital va emprunter le chemin des « lignes de moindre résistance » : production locale de produits banalisés de substitution aux importations disposants préalablement d’un marché solvable, relayé et accompagné par l’exportation de produits de base. La petite entreprise absorbe jusqu’à 80% de la demande totale d’emplois, et 40% des emplois qualifiés, L’Etat faisant le reste, laissant subsister un taux de chômage de l’ordre de 10%.
Avec le temps et l’intensification de la concurrence tant intérieure qu’extérieure, la petite initiative privée ayant grandie se voit confronter à des contraintes plus fortes, la poussant pour sa survie et sa pérennité vers une extraversion plus poussée sur fond de fléchissement de la solvabilité domestique. Les choix de politique économique y sont aussi pour quelque chose. Le désengagement de l’Etat de l’économie comme des régions, le recul de sa demande, l’ouverture des frontières, poussent inexorablement vers une recherche de solvabilité extérieure. Compétitivité ne signifie plus alors que réduction drastique des coûts. Le recours au marché du travail change de nature. La petite entreprise privée n’absorbe plus que 60% des sorties du système scolaire, et en dépit d’une montée en gamme, l’offre d’emplois qualifiés fléchit encore, à seulement 30% de ces sorties. L’Etat désengagé, réduit aussi ses capacités d’embauche. Le sous emploi s’aggrave et le chômage des « jeunes diplômés » s’accentue. Le taux de chômage franchit le cap des 15%.
Imperceptiblement et lentement, « concurrence et compétitivité », enferme cette initiative privée dans le carcan de la solvabilité immédiate, l’obligeant à intensifier en capital son processus de production, ne disposant, par là, que d’une seule variable d’ajustement celle du salaire et de l’emploi.
Que dire aussi du bas de la pyramide des âges, autrement dit des grands groupes locaux encore emprunt de familialisme-clanisme, opaques à souhait, peu conquérant, hors de leur niche, n’offrant des emplois qualifiés qu’en nombre infinitésimal.
Que dire enfin, pour clore cette démographie, du taux de mortalité de ce tissu désormais soumis à la loi de la taille critique, taux reflété par une destruction de plus petites entités ou les rejetant dans l’espace de l’économie informelle. Il est vrai pas un seul chiffre.
De fait, la capacité d’analyse et de diagnostic de nos experts donne l’impression d’avoir été anesthésiée par une overdose de consommation des dogmes libéraux. Pire leur discours présent, par ailleurs fort bien relayé dans l’opinion publique, est emprunt de cette inéluctabilité, se résignant et renonçant du même coup à imaginer autre chose que cette fuite en avant du « tout PME ». On peut décemment faire mieux !
L’initiative privée est bien trop familiale, bien trop petite, bien trop faible pour franchir à elle toute seule ce nouveau stade de développement du pays. Il faudra bien faire ce que les démographes appellent la transition démographique !
Faut-il dégouter pour autant cette initiative privée et la soumettre à de nouveaux carcans. Surement pas. Mais celle-ci doit s’adosser à une initiative publique, voire parapublique rénovée et puissamment réarmée.
Du « travail » a dit la révolution, alors de grâce messieurs les experts, un peu d’imagination !!!
je ne sais pas si j ai bien compris votre papier (instructif) mais la doctrine “economique” n a pas changé et ne changeras pas!! plus de dettes courir derriere la “croissance”…….le “liberalisme” le “tout” privé a montré les limites (chomage,desertefication,consommation a outrance,des regions entieres delaisseés, productions a la demande du marché europeen ..etc……)Que faire? quelle economie,? je crois que les nouveaux maitres de la tunisie ont donné la reponse: meme recette (plus un zeste de finance islamique pour faire avaler l’amere”potion”) A ecouter ces “specialistes” de l eco a la tele et ailleurs: la revolution eco n a pas et n auras pas lieu(ils pleurent sur le tourisme ces investisseurs etrangers “qui ne vont pas venir” cette banque nationale qui veut tout “teleguider”(fmi; suivez mon regard)…et et..)!!! Que voulons NOUS ?? deja discuttons la DETTE; le role de l’etat(energie education santé transport…..)la place de la region(decision et action) la fiscalité,la formation et la recherche…..
Monsieur, je ne partage pas du tout votre vision du libéralisme économique car vous vous référez à l’expérience Tunisienne de l’ère ZABA pour juger le modèle libéral, alors que le système bâtard adopté par le clan BENALINE est plus proche d’une aristocratie du business basé sur des liens familiaux, dopé aux sauces des initiatives étatiques (plan quinquennal…)
Je vous rappel que le libéralisme se base sur une économie de marché, et qu’une économie de marché suppose des règles concurrentielles et des échanges libres! L’intervensionisme de l’état Tunisien et de la famille régnante fait que le marché Tunisien était loin d’être libre et concurrentiel et de ce fait, je réfute l’idée que l’expérience qu’a connu la Tunisie s’apparente à du libéralisme: le réduire au simple fait de vendre quelque société étatique est méconnaître le libéralisme!
Cdt
Lucille34Middleton says
The business loans suppose to be very useful for people, which would like to organize their organization. By the way, that’s easy to receive a short term loan.
L’histoire économique de la Tunisie vue par le démographe : instructif !: http://t.co/wubE4UiC
living on a borrowed money is living on borrowed time.
tunisia shuffles between bankruptcy and loaning for the next one.
yet to understand what wealth generating projects means.
simple solution suit simple minds.
DEMED says
@L’auteur
BRAVO EXELENT ,admirable
@ L’auteur de l’article
Avec tout le respect que je dois à vos multiples titres, je me permets d’attirer votre attention sur les dommages causés par notre DÉPENDANCE industrielle (c’est le cas de tous les pays arabes) où sont nos machines outils, nos inventions, nos voitures, nos avions, les brevets de nos laboratoires pharmaceutiques et autres, nos exportations industrielles???
A mon humble avis, sans une relative indépendance industrielle, point de salut, seule une relative indépendance industrielle nous procurera une aussi relative indépendance économique et un tant soit peu politique, de produire de vrais emplois, de résorber le chômage à long terme.
Je suis un simple citoyen qui cherche à comprendre pourquoi devrions-nous continuer à vivre au dessus de nos moyens tout en aggravant continuellement notre dette en nous faisant croire à des solutions bricolées qui ne le sont pas? A moins que nous soyons condamnés à n’être qu’un pays de services!
D’avance merci de bien vouloir m’éclairer.
L’histoire économique de la Tunisie vue par le démographe : instructif ! http://t.co/1L288i7q
“@plaizir: L’histoire économique de la Tunisie vue par le démographe : instructif ! http://t.co/9STAa4IG”
Dans le contexte de l’ économie capitaliste , il est possible d’avoir une entreprise à titre personnel. Il s’agit alors d’une entreprise individuelle, c’est-à-dire que l’entrepreneur exerce directement et en son propre nom l’activité économique. L’exercice d’une activité sous forme d’entreprise individuelle concerne en général les très petites entreprises .
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