Pas peu à été dit à propos de la constitution tunisienne en cours de mise en place depuis bien plus de deux ans. Ce qu’il y avait à dire a été dit et n’a toujours pas perdu de véracité et d’urgence, soit que la Tunisie est plus que la référence à une seule religion, la Tunisie porte témoignage d’une riche histoire, d’une culture diverse d’un état d’esprit ouvert et modéré et d’une curiosité avide sur le monde. Ce dont il n’y a aucun doute c’est que la sphère du politique a besoin d’un codex éthique, la restriction de l’abus de pouvoir, la restriction de l’arbitraire, la restriction de la corruption, la restriction du trafic d’influence, la restriction du pot de vin. En plus je ne doute pas que les jeunes qui ont mené la révolution rêvent de justice sociale, d’esprit ouvert et d’une modernité responsable.
Pourtant contrairement à ce que cherche toujours encore à suggérer les hommes qui prétendent représenter la religion, de mettre l’islam à la charge de l’état soit d’introduire la charia directement ou indirectement comme source de législation, ne réussira pas, non seulement, à réaliser ces buts mais finira par servir à accentuer les abus. Car la charia n’est nullement l’œuvre d’un Dieu sublime mais le résultat d’interprétation de générations de ulamas dont le niveau d’instruction a stagné durant les dernières 500 ans, à ne pas parler des contradictions dans les textes sacrés qui ne permettent pas de consensus mais bien au contraire à un potentat d’interpréter les déclarations selon son plein grès et au dégât de la société qu’il cherche tout simplement à opprimer. Tant que la religion continue à être mise à la charge de l’état qui se gère comme protecteur du sacré le danger d’une dictature théocratique n’est toujours pas repoussé.
Si finalement nous voulons vraiment nous démouler du jougs de l’oppression il n’y aura aucun autre moyen que d’avoir recours à des méthodes rationnels, bien entendu elles-mêmes sans cesse susceptibles à l’amélioration et au développement, comme la séparation des pouvoirs (pas seulement en apparence mais dans la substance), la garantie inconditionnée de droits, comme celle à l’information et à la publication soit la liberté d’expression de l’opinion non restreinte, comme au droit au travail syndical et politique. En bref seulement un effectif contrôle du contrôleur est apte à long mesure de contenir les dérives des hommes au pouvoir. Dans une démocratie c’est le peuple qui tient le pouvoir final en main, certe il délègue les affaires d’état à un groupe de représentants mais en fait il ne peut jamais se permettre de rester passif et inattentif, car le danger d’un détournement d’intérêt reste en permanence donné. Pour ce qui est de l’éthique, s’il nous est de si grande importance, et en fait il est indispensable pour le fonctionnement constructif d’une société, il devient temps de le vivre et de l’enseigner et non d’attendre à ce qu’il soit ordonné pas des personnes aussi faillant que nous-mêmes.
Pour autant ce processus d’établissement d’une constitution est fortement exaspérant en vue de son importance immanente pour l’avenir non seulement des Tunisiens mais de tout le monde musulman. Avenir qui décidera de maturité, autodétermination, liberté responsable ou geôle continuel jusqu’à la fin des temps, soumission et mise au pas, mais non au profit d’un Dieu clément et sage comme prétendu, mais au profit d’être mortel avide de pouvoir et d’avantage sur leur équivalent en nature humaine.
N’est-il pas temps de rappeler les vers du poète tunisien Aboulkacem Chebbi que les jeunes révolutionnaires ne se sont pas lassés de répéter durant les semaines avant la chute du régime de Ben Ali et qui ont été extrait d’un poème extrêmement pertinent :
La volonté de vivre
Lorsqu’un jour le peuple veut vivre,
Force est pour le Destin, de répondre,
Force est pour les ténèbres de se dissiper,
Force est pour les chaînes de se briser.
Avec fracas, le vent souffle dans les ravins,
au sommet des montagnes et sous les arbres
disant :
“Lorsque je tends vers un but,
je me fais porter par l’espoir
et oublie toute prudence ;
Je n’évite pas les chemins escarpés
et n’appréhende pas la chute
dans un feu brûlant.
Qui n’aime pas gravir la montagne,
vivra éternellement au fond des vallées”.Je sens bouillonner dans mon cœur
Le sang de la jeunesse
Des vents nouveaux se lèvent en moi
Je me mets à écouter leur chant
A écouter le tonnerre qui gronde
La pluie qui tombe et la symphonie des vents.
Et lorsque je demande à la Terre :
“Mère, détestes-tu les hommes ?”
Elle me répond :
“Je bénis les ambitieux
et ceux qui aiment affronter les dangers.
Je maudis ceux qui ne s’adaptent pas
aux aléas du temps et se contentent de mener
une vie morne, comme les pierres.
Le monde est vivant.
Il aime la vie et méprise les morts,
aussi fameux qu’ils soient.
Le ciel ne garde pas, en son sein,
Les oiseaux morts et les abeilles ne butinent pas
les fleurs fanées.
N’eût été ma tendresse maternelle,
les tombeaux n’auraient pas gardé leurs morts”.
Ne s’agissait-il pas de cela, n’avions nous pas voulu être libres, qu’est-ce qui nous fait hésiter à une marge prêt d’aboutir au but, a-t-on fini par nous réduire à des esclaves qui ont fini par chérir leurs chaînes?
Ce même Aboulkacem Chebbi mort beaucoup trop jeune mais remplis d’une soif avide de liberté responsable a dit :
Ô tyran oppresseur…
Ami de la nuit, ennemi de la vie…
Tu t’es moqué d’un peuple impuissant
Alors que ta main est maculée de son sang
Tu abîmes la magie de l’univers
Et tu sèmes les épines du malheur dans ses éminencesDoucement ! Que ne te trompent pas le printemps,
La clarté de l’air et la lumière du jour
Dans l’horizon vaste, il y a l’horreur de la nuit
Le grondement du tonnerre et les rafales du vent
Attention ! Sous la cendre, il y a des flammes
Celui qui plante les épines récolte les blessuresRegarde là-bas où tu as moissonné les têtes humaines
et les fleurs de l’espoir
Et tu as englouti de sang, le cœur du sol et tu l’as abreuvé de larmes à l’ivresse
Le flot, torrent du sang va te brûler
Et l’orageux brûlant va te dévorer.Aboulkacem Chebbi
Nous avons en main de prévenir une nouvelle dictature, ne gâchons pas cette opportunité qui ne se présente pas fréquemment …
Courage à la société civile tunisienne, ne perdez pas le souffle.
Quel contraste! entre la violence libératrice des poèmes de Chabbi, la beauté pacifiquement suave de l’illustration et le bégaiement suintant les bons sentiments du reste. Le Néant, pourquoi pas! Mais le Néant plus le chaos, c’est insupportable.
C’est vrai, le peuple est une force phénoménale, et il peut creer des miracles. Mais il est lent à réagir et il est facilement manipulable. Les Tunisiens ont supporté Bourguiba durant plus de 30 ans. Ils ont subi Ben Ali durant 23 ans. Et ils ont supporté les Islamistes durant 3 ans.
Sa grande faiblesse est qu’il est naif et faible. Les Islamistes lui ont fait un lavage de cerveau et lui ont refilé leur islam rétrograde. Et qui sait comment sera le nouveau pouvoir aprés la disparition des islamistes. Gramsi à démontré que les intellectuels organiques peuvent éveiller le peuple. Mais ou sont-ils depuis la révolution? S’ils n’ont pas vendu leur âme aux islamistes ou à la religion, ils sont éblouyis par les chimères des slogans de la civilisation occidentale comme laiberté absolue, la liberté d’expression, la démocratie. et d’autre balivernes similaires.