Avec le vent de liberté qui a renversé les carcans de la dictature, au lendemain du 14 janvier 2011, la question des libertés académiques s’est retrouvée, à nouveau, au cœur du combat de l’université. Car cet espace de discussion, de débat ouvert, de recherche, d’innovation et d’élévation de l’esprit tarde encore à faire sa révolution.
C’est dans ce cadre que l’Association Tunisienne de Défense des Valeurs Universitaires (ATDVU) a tenu son premier colloque international sur les libertés universitaires en Tunisie le 27 et 28 février dernier, à la Bibliothèque Nationale de Tunis.
Rétablir l’université dans son rôle
Un des premiers constats : La place dérisoire accordée aux valeurs et libertés académiques par l’Etat tunisien, alors que l’université est censée occuper un rôle central dans la santé intellectuelle, financière, culturelle voir même théologique de la nation. Force est de constater que ce lieu de dialogue, d’éducation, de recherche et d’information n’occupe pas son rôle comme il se doit. Comme le disait si bien Francis Bacon : « Le savoir, c’est le pouvoir ». L’ancien régime l’avait bien compris en ôtant à l’université son essence première : le savoir comme base de l’esprit critique et analytique. Aussi, nous retrouvons-nous, aujourd’hui, face à une institution qui panse ses plaies, avec des enseignants et des étudiants qui ne disposent pas des libertés nécessaires à l’évolution de la société. Il est donc urgent de restaurer ce pilier de la société. Pour se faire, une prise de conscience est primordiale. Cette prise de conscience doit tout d’abord toucher les étudiants, premiers récepteurs de l’enseignant « créateur de savoir », ceux-ci considérant l’université comme « un lieu d’incarcération » et non pas comme un espace universel d’apprentissage. Les inscrire dans les discussions sur la teneur des libertés universitaires et les sensibiliser aux intérêts communs les liant à leurs enseignants est désormais incontournable. Cette prise de conscience doit aussi toucher les enseignants eux-mêmes, lesquels doivent redevenir ces « créateurs de savoir » et d’idées nouvelles. Elle doit enfin toucher l’Etat dans son approche à l’université et qui se doit de reconnaitre sa responsabilité de protéger l’université tout en respectant les libertés académiques et l’autonomie institutionnelle de celle-ci.
Autonomie, mais aussi sécurité
Il faut aujourd’hui encourager l’esprit critique ce qui nous mènera à plus de stabilité et à une plus grande responsabilisation politique. Pour se faire, l’université doit pouvoir être une passerelle reliant la communauté du savoir à la société. Pour y parvenir, il faudra en finir avec l’implication excessive du politique dans le monde universitaire. L’université doit être un lieu libre et indépendant qui ne devrait être sous le joug d’aucune idéologie, religion ou parti politique. Elle doit acquérir aujourd’hui son autonomie vis-à-vis de l’Etat, du marché et de la théologie. Ce n’est qu’en étant autonome que l’université peut devenir un instrument de l’Etat notamment à travers le renforcement du savoir.
Afin de parvenir à cette autonomie et à cette sécurité de l’université, il était important de constitutionnaliser la liberté académique, ce qui a été fait dans l’article 33, disposant :
Les libertés académiques et la liberté de la recherche scientifique sont garanties.
L’État fournit les moyens nécessaires au développement de la recherche scientifique et technologique.
Article 33 de la Constitution tunisienne
Ainsi cet article permet d’appuyer la recherche et la publication garantissant le droit à l’information à chaque citoyen.
Cependant, des réformes juridiques doivent maintenant être apportées. En effet, l’autonomie institutionnelle et la neutralité de l’espace universitaire n’ont pas été inscrites dans cette constitution, ce qui est une menace pesant sur l’université tunisienne. Pire encore, dans une interprétation restrictive cet article peut être conçu pour contrôler le monde académique et non pour l’appuyer.
L’autonomie institutionnelle et la neutralité universitaire sous-entendent une autonomie politique de l’université. En effet, l’université doit pouvoir s’affranchir de toute pression politique et être nous plus tutélaire du ministère de l’Enseignement Supérieur, mais bien un partenaire de celui-ci. Certes, depuis janvier 2011 de nombreuses avancées ont eu lieu : la police universitaire a été exclue des enceintes des facultés, les étudiants arrêtés et détenus sous Ben Ali ont été libérés et réintégrés, enfin le principe d’élection a été étendu au conseil scientifique et aux organes directeurs des universités. Cependant l’immixtion du politique au sein de l’université n’a pas été abolie. En effet, la tentative gouvernementale de faire participer le personnel administratif, et même les ouvriers, aux élections du conseil scientifique a suscité une véritable bronca, mais fort heureusement, jetée aux oubliettes face à l’engagement de la société civile.
De plus, c’est le conseil des universités, composé des présidents des universités et des directeurs généraux de l’administration centrale, sous la présidence du ministre de l’Enseignement supérieur, qui fixe le programme de la formation et de la recherche scientifique. Alors que, une gestion centralisée de l’université tunisienne, telle qu’elle existe aujourd’hui, mène indubitablement à une politisation poussée de l’espace vital de l’universitaire.
L’autonomie institutionnelle et la neutralité universitaire sous-entendent également une autonomie budgétaire. En effet l’université est confrontée elle aussi à des défis économiques. Les financements du secteur privé tendent petit à petit à remplacer les financements du secteur public, ce qui pousse les universités à s’orienter vers des pôles d’intérêts du secteur privé privilégiant la formation professionnelle. Ainsi, le financement de la recherche et du savoir va en décroissant. Il est donc impératif que l’université tunisienne recherche de nouvelles sources de financement orientées vers la pensée critique et intellectuelle à tendance holistique prenant en compte la globalité de l’individu. Elle doit pouvoir s’écarter du pouvoir de l’argent qui prend le dessus sur les valeurs humanistes incombant à l’université.
Valeurs universitaires et discours religieux
Enfin, l’autonomie institutionnelle et la neutralité universitaire sous entendent une autonomie idéologique et/ou religieuse. La question de l’autonomie religieuse en Tunisie s’est posée notamment à travers la liberté ou non de porter le voile intégral au sein de l’université. En l’absence de lois claires consacrant cette liberté, c’est le règlement interne de chaque université qui en fixe les modalités suivant les différentes jurisprudences du Tribunal Administratif. Cependant la question est épineuse. Cette liberté découle d’autres libertés fondamentales à l’instar de la liberté d’expression (le choix vestimentaire étant une expression individuelle bien que soumis à un idéal sociétal), du droit à la vie privée, de la liberté de conscience ou de religion. Cette liberté n’est donc pas absolue et reste soumise à l’ordre et la sécurité publique de l’université. L’exemple français est peut être le plus abouti en la matière. L’université étant un espace de débat et de dialogue évolutif, la restriction de la liberté religieuse ne s’y pose pas. En effet, la loi du 15 mars 2004 relative au port de signes religieux ostentatoires ne s’applique par à l’université. Mieux encore, la loi du 11 octobre 2010 consolidée en avril 2011 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public n’a pas été adoptée dans le cadre universitaire pour des raisons religieuses, car ce serait remettre en cause un mode de communication existant et ayant fait ses preuves. En d’autres termes, lors des travaux préparatoires à l’adoption de cette loi, la primauté de la communication, de l’échange et du dialogue au sein de l’université avait prévalu sur tout discours religieux et sécuritaire. Il en est de même au sein de l’enseignement et de la recherche, où il n’existe pas d’inspection dans les universités françaises, au sein desquelles la liberté d’expression est assurée de façon absolue, l’œuvre de l’esprit étant subordonnée à la responsabilité de son diffuseur.
Enfin, il serait judicieux aujourd’hui que le discours sur les valeurs universitaires ne s’oppose avec la religion, comme cela a longtemps été le cas. En effet, les valeurs universitaires doivent aujourd’hui repenser la place du religieux. Ce n’est qu’à travers cette approche que science et religion, à défaut d’avoir des méthodologies compatibles, soient en mesure de cohabiter.
Afin de parvenir aux idéaux posés par les valeurs et libertés universitaires, leurs codifications s’avèrent obligatoires. Une charte universitaire doit voir le jour. Celle-ci doit être le fruit d’un consensus entre Etat, enseignants/chercheurs et étudiants et doit se fonder sur le respect de valeurs éthiques et déontologiques. Bien que, loin d’être parfait, le modèle algérien pourrait être pris en considération comme base de départ d’une telle charte.
En conclusion, l’état des lieux des valeurs et libertés universitaires, aujourd’hui, en Tunisie, n’est pas très reluisant. L’action de la société civile et de certaines associations à l’instar de l’Association Tunisienne de Défense des Valeurs Universitaires, tend tout de même à faire bouger les choses. Cependant, il est aujourd’hui primordial à la suite de l’adoption de la nouvelle Constitution du 27 janvier 2014, de faire en sorte que l’université reconquiert ses titres de noblesse.
Cet article se veut être un appel pour que des réformes s’opèrent rapidement, un appel pour que se tiennent les états généraux de l’université tunisienne, afin de la remettre dans son rôle de recherche et de diffusion du savoir, de guide de la société et de lieu de « préservation de la mémoire collective et de l’archivage du savoir ».
Ces “soi-disant” défenseurs des libertés académiques ne sont-ils pas les instruments de l’ancien régime? N’ont pas été les instigateurs de la réclusion et de l’emprisonnement des islamistes? Ils voulaient nier tout existence des personnes qui n’adoptent pas leurs valeurs francophones de médiocrité académique, la preuve en aie le rang dans les différents classements des universités françaises dans les classements de Shangai de Times High Education ranking,… Demander à ces défenseurs combien d’articles scientifiques à comité de lecture et à impact factor ils publient pas an. Je vous dirai le nombre sans grande surprise ZERO!!!
Ont-ils gagné une nouvelle virginité scientifique et académique tout à coup? Quels instruments utilisent-ils pour remettre la main sur le destin de l’université tunisienne? Un syndicat de l’enseignement supérieure corrompue, remplie d’arrivistes et d’incompétents. La preuve le SG du BS de l’université de Tunis El Manar a été pris la main dans le sac en plagiant les travaux de son collègue et il a été débouté par l’éditeur du journal mais le président de l’université au lieu de renvoyer ce gars et en train de comploter avec lui pour un nouveau mandat vue qu’il contrôle un troupe de brebis qui le suivent et suivent les consignes syndicales pour recevoir des bonbons s’ils sont disciplinés et surtout réélire un ancien du syndicat comme président. Il n’est en aucun cas le plus compétent. Sa lègue pour l’université et la recherche….. NADA, NAYET, RIEN!!!
Les islamistes retrogrades, ne doivent pas rajouter aux malheurs de nos universites decimees par ben ali…leur projet islamique diabolique, destructeur, qui bloque l’esprit, meme de la femme de menage…chirrr !
Je reprends là où l’article s’est arrêté pour joindre ma voix à celles et ceux qui appellent pour des états généraux de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Ni la constitution, ni les volontés d’individualités, fussent-elles des notoriétés nationales en la matière, ne peuvent refaire gagner à l’Université tunisienne ses titres de noblesse. C’est une question de diagnostic d’abord, puis de consensus et d’engagement moral et intellectuel qui doit s’opérer par tous dans une approche bottom-up pour tenter de reconstruire l’agora universitaire. Il faut bien admettre aussi et sans complexe, que l’universitaire tunisien – dans sa dimension citoyenne – a hérité, dans un bon nombre de cas, de valeurs sociétales encombrantes qui ne l’immunisent pas contre des dérives morales et intellectuelles déplorables : laxisme intellectuel, logique du moindre effort, matérialisme abusif, égoïsme scientifique, concurrence déloyale, combine, planque professionnelle, obsolescence scientifique, etc. Je ne généralise pas bien sur et je ne blâme pas les individus non plus, mais je pointe du doigt un système corrosif d’une machine complètement déraillée qui pendant des décennies a fait perdre à l’université tunisienne son lustre d’antan. Il y a beaucoup d’individualités académiques de très haut niveau en Tunisie, certes, mais il y a aussi un bon paquet d’enseignants qui, pour des raisons autres que celles de compétences motivant les comités de sélection, remplissent les classes et les amphi de l’Université tunisienne sans aucune vraie valeur ajoutée … et pour encore très longtemps, aussi jeunes sont-ils souvent et parfois sans ambitions ni projets autre que la planque professionnelle. Le cumul et la dérive sur beaucoup de ces points deviennent tels que la machine universitaire (autant pour l’enseignement que pour la recherche) devient de plus en plus grippée et même la tenue des états généraux ne pourrait à mon sens qu’aider partiellement à remettre les pendules à l’heure. Un vais choc réglementaire devrait refonder l’université à sa base, notamment pour mettre des gardes-fou contre toute forme de dérive éthique, déontologique, morale, idéologique ou même scientifique. C’est ambitieux, utopique … peut être naïf aussi, mais mériterait d’être tenté.
Il y a vraiment beaucoup à dire sur ce sujet sans besoin de tomber dans la critique individuelle ni les prises de positions politiques partisanes. C’est beaucoup plus une question de système, de règlementation et de législation que de tensions idéologiques. On a connu une université tunisienne plus violente sur le plan idéologique pendant les années 70 et 80, avec des tensions politiques atteignant leur paroxysme (i.e. Manouba 1981) sans qu’elle perde pourtant son aura intellectuelle et scientifique. La décadence a commencé à se profiler depuis le pseudo-changement de 1987.