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La journée mondiale de la femme est une occasion pour nous les femmes de recevoir les vœux sincères ou non, pour une vie de femme meilleure et plus équitable. C’est aussi, une des rares journées où nous sommes épargnées par les polémiques machistes sur notre intelligence, notre physique et notre intimité. Même s’il semble que les blagues de ce genre (ci-dessous) déclinent.

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Et les photos comme celles-ci sont moins partagées.

Mais c’est seulement en ce jour du 8 mars que tout le monde (hommes et femmes) observe une petite pause et oublie le sexisme. En cette fête internationale, chacun fait un bilan de la situation d’égalité du genre dans son pays. Entre chiffres, observations et diagnostic d’acquis ou de pertes, j’ai choisi de faire un résumé des grands moments forts du machisme en Tunisie entre mars 2013 et mars 2014. Pris sur le vif, dans les médias, sur les réseaux sociaux, ou à travers les faits divers, le traitement de certains évènements et polémiques, est pour le moins avilissant pour la femme.

– Affaire de « Meriem Ben Mohamed » violée par trois policiers :

Tout le monde a soutenu Meriem lors de la révélation de son viol. Des centaines de personnes étaient devant le tribunal, le ministère de la femme, et devant le ministère de l’intérieur pour manifester leur colère et indignation. Violée par trois policiers en mars 2012, l’affaire de Meriem traîne encore au tribunal de première instance de Tunis. Avec le temps, les gens ont oublié Meriem et l’ont laissé seule face à son destin. Seulement quelques activistes et ses avocats continuent à militer pour que justice soit faite. Un des avocats de Meriem nous a confié que la classe politique (opposition et majorité) évite résolument d’évoquer le sujet. Selon lui, certains pensent même que Meriem voulait « neutraliser » ses adversaires en les accusant de viol. Des propos choquants pour certains, mais qui constituent l’avis d’une majorité écrasante des tunisiens.

– Affaire d’Amina Femen :

Harcelée par le pouvoir qui a tenu à tous les coups à l’incarcérer, Amina fut surtout victime de trolls, caricatures, sketchs, chanson de rap et lynchage dégradants de la majorité des tunisiens. Hommes et femmes, « progressistes » et conservateurs, jeunes et vieux, tout le monde a condamné la nudité d’Amina sur la toile. Hormis les critiques plus ou moins acquises aux actions d’Amina (les photos sur facebook ou le tag à Kairouan), l’acharnement contre la jeune activiste était machiste par excellence. Selon d’autres, la jeune fille n’aurait pas dû montrer ses seins parce qu’elle n’est pas aussi belle que les Femen ukrainiennes et européennes. D’autres ont accusé Amina de folie, appelant à la « protéger  du mal qu’elle se fait » dans un asile psychiatrique.

– Attaques régulières contre des femmes militantes ou connues:

La médiatisation des campagnes de lynchage contre les femmes n’est pas nouvelle en Tunisie. On rappellera toutes les attaques contre des femmes juste parce qu’elles sont femmes, comme celles menées contre Lina Ben Meheni, Bochra Bel Haj Hmida, Olfa Riahi, Raja Ben Slama et d’autres. En 2013, les victimes étaient principalement Bassma Khalfaoui, épouse du martyr Chokri Blaid, Maya Ksouri, chroniqueuse à l’émission de télévision « Klem El nass », Sihem Badi, Amel Karboul et Amel Mathlouthi. Ces femmes qui font les Unes des journaux, étaient l’objet de polémiques et débats sexistes. Les attaques étaient rarement justifiées par des critiques. Par exemple, beaucoup pensent que Sihem Badi n’était pas une bonne ministre parce qu’elle n’est pas assez « sexy » pour représenter la Femme Tunisienne. Ainsi, a-t-elle eu droit, durant des mois, à des remarques machistes telles que : « Elle est moche », « Son sourire n’est pas charmant », « Elle n’est pas chic »… La beauté physique ferait-elle d’une femme une compétence nationale ? Une question que la majorité des tunisiens zappe, face au charme d’Amel Karboul qui n’était pas épargnée, elle non plus, par des critiques sur ses tenues vestimentaires, « libérales » selon certains.

– Une présentatrice licenciée du Journal Télévisé à la Chaîne nationale à cause de son poids :

Le 17 janvier 2014, cette information passe inaperçue dans la presse nationale. A cause de quelques kilos de plus, Nawel Zargaoui, n’avait plus le droit de présenter le JT. La question n’a jamais été évoquée pour les présentateurs hommes du journal télévisé ; dans cette même chaîne (pourtant je me rappelle avoir vu un présentateur plus fort de taille que Nawel). La direction de la chaine a expliqué ce limogeage par une chute d’audience durant les passages de la journaliste. Inquiète pour son audience, la chaîne publique s’égare ainsi et s’éloigne de son rôle pédagogique pour miser, aujourd’hui, sur l’image de la femme-objet.

– La jeune fille assassinée par deux libyens à Sousse

On se souviendra tous de ce drame, quand le 10 août 2013, deux hommes d’origine libyenne ont poussé une jeune file du 3ème étage après l’avoir tabassé toute la nuit. Les deux réactions révélatrices concernant cette affaire sont, d’abord celle du voisinage qui a renoncé à aider la fille alors qu’elle n’a pas arrêté de demander l’aide, ensuite celle de l’opinion publique qui considérait en grande partie la victime comme coupable. En effet, le voisinage et l’opinion publique d’une façon générale considèrent la victime plutôt comme une prostituée qui salit l’image du pays et qui ne mérite même pas son droit à la vie.

Il est certain que les blagues de mauvais goût, les remarques sexistes, et la plupart du temps insultantes, ne vont jamais disparaître en Tunisie ni ailleurs dans le monde. Cependant, un débat national sur l’égalité du genre doit être ouvert, loin de l’instrumentalisation politique et la déformation médiatique.

Dans ses Cahiers des charges relatifs aux radios et télévisions privées et associatives, présentés jeudi dernier, la Haute autorité indépendante de la communication audiovisuelle (HAICA) stipule « la rupture avec les stéréotypes sur les femmes dans les médias ». C’est un bon début.

Bonne fête à toutes les Femmes de mon pays.