Tunis, 28 août 2013

La Coalition civile pour la défense de la liberté d’expression (CCDFEX)* réclame la libération immédiate et l’arrêt des poursuites judiciaires contre le caméraman du site d’information en ligne « Astrolab-TV », Mourad Meherzi, qui a été placé en détention dimanche 25 août, après avoir filmé un jet d’œuf sur le ministre de la culture, Mehdi Mabrouk.

La Coalition considère que la détention de Mourad Meherzi est une violation caractérisée de la liberté d’exercice de la profession journalistique, une atteinte à la liberté d’expression et une tentative d’intimidation qui vise à empêcher les journalistes d’accomplir leur devoir professionnel.

L’emprisonnement de Mourad Meherzi et les poursuites judiciaires engagées contre lui reposent sur l’arsenal juridique répressif de l’ancien régime, à l’heure où le gouvernement provisoire continue de refuser l’application du décret-loi N°115 qui énonce, dans ses articles 12 et 13 que «les opinions émises par le journaliste et les informations qu’il est amené à publier ne peuvent constituer un prétexte pour porter atteinte à sa dignité ou à son intégrité physique ou morale » et que « le journaliste ne peut être tenu pour responsable d’une opinion, idée ou information qu’il aura publiée conformément aux usages et déontologie de la profession ».

La Coalition dénonce aussi la volonté de dramatiser cet incident qui a conduit à l’emprisonnement du cinéaste Nasreddine Shili, auteur du jet d’œuf contre le ministre, un geste purement symbolique dont un grand nombre de responsables politiques à travers le monde ont souvent été la cible.

Sur un autre plan, la Coalition civile pour la défense de la liberté d’expression dénonce les tentatives de marginalisation du rôle de la Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA). La dernière tentative en date est l’annonce, le 22 août courant, par la présidence du gouvernement, de la mise en place d’une commission mixte entre la HAICA et le gouvernement pour «unifier la lecture juridique du décret-loi 116», ce qui constitue une immixtion dans les affaires de la HAICA et une tentative de porter atteinte à son indépendance.

Tout en exhortant la HAICA à s’acquitter pleinement de la mission qui lui est dévolu en matière de régulation du paysage audiovisuel, et à défendre son indépendance, la Coalition demande instamment aux autorités publiques de doter la HAICA de tous les moyens logistiques et humains nécessaires à l’accomplissement de sa mission. Elle insiste également sur la nécessité de cesser toutes les tentatives de marginaliser la HAICA, de la dénigrer et de l’instrumentaliser dans les querelles politiques et partisanes opposant le pouvoir à ses opposants et critiques.

La Coalition estime que les tentatives de marginalisation de la HAICA visent essentiellement à perpétuer la situation d’anarchie résultant du lancement, hors la loi, d’un certain nombre de chaînes de radio et de télévision, conçues comme une sorte de pactole à partager entre les milieux de l’argent et de la politique.

La Coalition appelle tous les journalistes et les professionnels des médias à resserrer les rangs, en vue de réduire à néant les efforts visant à contrôler le secteur, à étouffer la liberté d’expression, et à bafouer le droit du citoyen d’accéder à l’information.

La Coalition appelle, également, toutes les composantes de la société civile à soutenir les efforts des professionnels des médias, et à redoubler de vigilance pour déjouer les plans dressés par l’alliance des pouvoirs de l’argent et de la politique pour mettre la main sur le secteur de l’information, ce qui risque de mettre en péril le processus de transition démocratique.

*Créée en avril 2013, la Coalition civile pour la défense de la liberté d’expression (CCDFEX) est composée de :

– La Ligue Tunisienne pour la défense des Droits de l’Homme (LTDH)
– Le Syndicat national des Journalistes Tunisiens (SNJT)
– Le Syndicat général de la culture et de l’information relevant de l’UGTT
– Le Syndicat Tunisien de la Presse Indépendante et de la presse des Partis (STPIP)
– Le Syndicat Tunisien des Radios Libres (STRL)
– L’Association « Yakadha » pour la démocratie et l’État civil
– Le Centre de Tunis pour la Liberté de la Presse (CTLP)