Ces jours-ci où la Tunisie traverse une crise politique et sociale, il est essentiel de rappeler une revendication populaire dont les évènements de décembre 2010 et janvier 2011 ont été, en partie, le résultat : le chômage et l’inégalité pour l’accès au marché du travail. Mais il est malheureux de constater que la démarche de recherche d’emploi relève toujours du calvaire. Ceci est encore plus malheureux quand on regarde le processus de recrutement des différentes administrations et entreprises relevant de l’Etat alors que ces organismes doivent au contraire montrer l’exemple, plus de volontarisme et, surtout, remplir leurs obligations envers les citoyens concernant l’accessibilité, la transparence et l’égalité des chances.
Rendre obligatoire la publication de toutes les annonces sur un site unique
Dès le début, on est heurté à la manière avec laquelle les concours de recrutement sont annoncés qui rend la recherche fastidieuse. Chaque administration, représentation ou établissement y va de son bon vouloir : annonce dans la presse, dans le site web de l’administration, affichage à l’Agence Nationale de l’Emploi et du Travail Indépendant (ANETI) – Le bureau de l’emploi pour les intimes- qui pourra le publier, ou non, sur internet. N’est-il pas possible de rendre obligatoire la publication de toutes les annonces sur un site unique dans un formulaire unique qui pourrait renvoyer à plus de détails en cas de besoin. Ceci faciliterait énormément la recherche. A moins qu’on ne veuille faire perdurer le bouche à oreille…
Cependant, ces annonces là sont bien meilleures quand on sait que certaines administrations ont maintenant recours aux « bureaux spécialisés » qui sélectionnent les candidats selon leur bon vouloir. Personne ne saura ce qui s’est passé dans ce cas.
Accorder un délai raisonnable au candidat
En parallèle aux annonces plusieurs fois impossibles à trouver, on remarque le délai accordé au candidat entre l’annonce et la date limite de réponse. Quelqu’un qui a eu le tort de prendre un répit involontaire pendant trois jours peut perdre la chance de sa vie de candidater. Attention, pas d’être embauché, on n’en est pas encore là…
Simplifier au maximum le dossier de candidature
Deuxième point qu’on remarque, c’est le dossier à envoyer. On y trouve, selon le processus, des copies certifiées conformes de diplômes, des extraits de naissance, des attestations du statut de chercheur d’emploi, des inscriptions à certains ordres plus ou moins légitimes (je parle plus de précisément de l’Ordre des Ingénieurs Tunisiens, tirelire pour les évènements à organiser), des Bulletins n°3 pour prouver la virginité du casier judiciaire, des attestations d’accomplissement du service militaire, etc. Vu le nombre de dossiers à envoyer par un candidat en recherche d’emploi, on ne lui facilite vraiment pas la tâche aussi bien pratiquement que financièrement. D’autant plus que les éléments demandés peuvent rendre une candidature impossible pour cause de dépassement de délais. Ne peut-on pas se contenter d’un strict minimum et vérifier d’autres éléments en cas d’invitation au concours ou d’acceptation de dossier ? Se contenter notamment des éléments attestant la compétence technique ? On le peut surement, mais la volonté n’y est pas.
Et puis pourquoi ne pas numériser la procédure ? Déposer un dossier en ligne facilite aussi bien l’envoi pour le candidat que le tri des candidatures pour le recruteur. Tout ceci est faisable je pense en concertation avec l’ANETI qui pourrait offrir un portail de candidature dans lequel les pièces clés seront chargées et sur lequel on pourrait faire les demandes.
Un seul poste tu tenteras
Un autre constat à déplorer est l’impossibilité de candidater à différents postes lors d’un concours. Ceci est tout à fait absurde. Pouvons-nous imaginer que le baccalauréat se fasse de la sorte ? Supposons que 10 bons chercheurs d’emplois postulent à un poste donné, qui est assez attirant vu sa situation géographique ou sa nature, entre autres. Supposons encore plus qu’il n’y ait qu’un poste vacant pour ce poste. Supposons ensuite que 3 candidats de niveau assez bas relativement aux premiers postulent à un poste non attrayant lors du même concours. On aura rejeté à l’issue du concours 9 « bons » éléments. Cet exemple simpliste illustre l’absurdité de la chose. Cette pratique encourage aussi durant les concours une certaine fraude. Quelqu’un de bien placé et qui connait le nombre de candidats sur chaque poste pourrait encourager un proche à postuler au poste pour lequel il lui est plus probable de réussir au vu des autres dossiers. Il est primordial que lors d’un concours tous les postes soient ouverts et que le choix se fasse par ordre de mérite. Comme par exemple lors du concours du baccalauréat.
Tu as un travail minable que tu détestes? Garde-le!
Il est aussi à déplorer que certains concours ne soient accessibles qu’aux sans emplois ou à une certaine catégorie d’âge. Est-il normal que quelqu’un qui s’est engagé dans un travail qu’il n’aime pas ne puisse jamais le changer ? Encourage-t-on l’immobilisme dans l’attente d’un concours donné au lieu d’envoyer le message aux jeunes de tenter les chances qui se présentent et d’espérer toujours mieux ?
Accélérer les procédures
Il est déplorable que la procédure de sélection des candidats perdure à l’infini. Il est fréquent que plus de douze mois passent entre l’annonce initiale et le résultat définitif. Un tel délai est préjudiciable au candidat mais aussi au recruteur. De quel dynamisme et amélioration de performances parle-t-on quand des années passent entre l’expression du besoin de recrutement, de sa prise en compte dans le budget et la sélection. La numérisation doit aussi être centrale qu’elle soit celle du dossier ou de l’examen. On pourrait aussi mettre à disposition des centres d’examen régionaux qui éviteront aux candidats les déplacements inutiles.
Ce n’est pas aussi simple que ça
Le billet s’arrête là. Il n’y a pas été question des processus d’évaluation opaques, des priorités données aux enfants des employés ou aux habitants et encore moins des « pistons ». Aussi, il est vrai qu’il y a été surtout question de recrutement dans les établissements relevant de l’Etat. Mais beaucoup d’entreprises privées ont du chemin à parcourir et certaines critiques s’appliquent à elles aussi. On espère qu’il tombera dans les bonnes oreilles et indignera ceux qui pourront changer les choses, dans la bonne direction bien sûr. Ceci est essentiel, tout aussi socialement qu’économiquement.
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