Cette année, la 30e édition de la foire internationale du livre risque de ne pas avoir lieu. C’est ce qu’a décidé le ministre de la Culture, Mourad Sakli, après une réunion avec l’Union des Editeurs Tunisiens. Alors que le ministère de la Culture annonce, dans un communiqué, la tenue d’une conférence de presse, vendredi prochain, à ce sujet, l’Union des Editeurs Tunisiens nie avoir voulu bloquer la tenue de la Foire du livre.
Nous sommes les premiers perdants de l’annulation de cette foire. Nous avons tenu une assemblée générale, le 8 février, et nous avons préféré reporter la date à novembre 2014 ou attendre 2015. Nous avons, par la suite, fait part de notre décision au ministère de tutelle qui a accepté notre demande, après une entrevue avec Monsieur Mourad Sakli.
Mohamed Saleh Maalej, président de l’Union des Editeurs Tunisiens (UET)
Depuis une dizaine d’années, les éditeurs tunisiens ont pris l’habitude d’organiser la foire au mois d’avril. Une date qui leur convient parfaitement, affirment-ils, puisqu’elle coïncide avec les vacances scolaires. Depuis le 14 Janvier 2011, la foire a perdu son exclusivité sur la date.
Après la révolution, il était impossible d’organiser la foire du livre en avril, vu l’agitation et l’instabilité du pays et de toute la région arabe. Nous l’avons organisé alors en octobre. Mais au bout de la deuxième session, nous nous sommes rendus compte des pertes et des inconvénients.
Mohamed Saleh Maalej, président de l’UET
Le principal obstacle à la réussite de la foire, dans cette période, est selon Nouri Abdi, directeur de la maison d’édition « Dar Mohamed Ali », « la rentrée scolaire qui ne permet pas aux familles de venir dépenser leur argent dans l’achat des livres. En plus, l’Etat n’a plus de budget pour les grands achats qui nous aide à faire des recettes. » En effet, selon les éditeurs, les autres dates ne sont pas viables puisqu’elles coïncident avec d’autres foires importantes. En octobre, se tient la foire de l’Algérie, importante destination arabe pour les éditeurs de la région. En février et mars, les deux foires de l’Egypte et du Maroc ne laissent pas la chance à une troisième foire, surtout pas en Tunisie, pays considéré comme un petit marché par les grands éditeurs arabes et occidentaux. Sachant que les grands acheteurs de stands sont les maisons d’édition saoudites et qataries.
Au bout de deux ans, les organisateurs de la foire et principalement les éditeurs ont réalisé que leur événement doit avoir lieu absolument en avril. « Sauf que la date est réservée, non seulement pour 2014, mais aussi pour 2015. La direction du parc d’exposition internationale au Kram préfère d’autres genres d’évènements. Il a réservé, bien à l’avance, les deux dates au ministère du Commerce et de l’Industrie pour tenir sa foire », explique Nouri Abdi.
Aussi, les professionnels du secteur ont-ils demandé au ministère de la Culture de dialoguer avec celui du commerce afin de trouver un compromis. Sauf que pour le moment, les deux administrations disent qu’il n’y a pas eu d’échange sur le sujet. Mohamed Abaas, directeur de l’administration des événements à l’Office national de l’artisanat, objecte que « la date a été proposé par la direction du parc d’exposition au Kram. Nous avons accepté la date puisqu’elle correspond aux intérêts des professionnels du secteur. Sachant que nous avons réussi à réserver cette date en 2011. » La direction du parc d’exposition du Kram, affirme, par son directeur général adjoint Youssef Balma, que les demandes de l’espace sont nombreuses. « Nous ne faisons aucune faveur entre nos clients. Nous nous organisons, selon un calendrier et selon les demandes déposées. Pour la Foire du Livre, les organisateurs ont réservé une date pour novembre 2014 », assure-t-il.
Devant l’impossibilité de tenir la Foire Internationale du Livre, en dehors de l’espace du Kram, les éditeurs espèrent aujourd’hui trouver une alternative durable. « Personnellement, je préfère que la foire s’absente, encore deux ans, pour qu’on puisse acheter ou bâtir un nouvel espace permanent pour tous nos événements. Sachant que les dépenses de la Foire étaient dans la moyenne de 800 milles dinars et que les éditeurs payaient chaque année dans la zone de 550 dinars, je pense que les professionnels du domaine peuvent, s’ils s’unissent, trouver une alternative », affirme Nouri Abdi avec optimisme. Cette proposition reste, pour le moment, réservée au long terme, surtout que les éditeurs ne sont pas tous d’accord sur les décisions de l’UET qui les représente.
Pour le court terme, un événement dédié au livre « le printemps du livre tunisien » est organisé dans tous les gouvernorats tunisiens, jusqu’à fin avril. Le Tunisien, loin d’être fanatique de la lecture ne semble pas gêné par le report ou l’annulation de la Foire du Livre. Tenir la Foire comme elle était, avant ou après la révolution, ne semble pas résoudre le problème en renouant le contact avec le public.
Dans ce même sens, Wael Abid, jeune éditeur de Dar Tanouir considère que la Foire du livre en Tunisie est plutôt une exposition de livres parascolaires.
Reporter ou annuler ne servent à rien si on n’avance pas un bon programme sérieux et intéressant. Il faut chercher des nouvelles thématiques, inviter des spécialistes et attirer plus d’éditeurs étrangers. C’est un travail de fond et de forme. C’est vrai que la date du salon est importante mais n’est pas suffisante pour réussir l’événement surtout que les tunisiens achètent de moins en moins de livres, nous confie Wael.
D’une autre génération, celle qui a vécu la toute première édition du Salon du livre, Mohamed Saleh Betaieb, directeur de “Alif Editions”, nous explique que « depuis la toute première édition, cet événement n’a jamais réussi à être un vrai salon de livre avec des activités culturelles et une bonne organisation. La foire donne la place aux publications commerciales diverses. la vraie littérature est absente et les livres tunisiens littéraires et recherchés ne sont pas vendus. Personnellement, cet événement ne me dis plus rien depuis des années ». Mohamed Saleh ne participe plus à la foire, et ce depuis six ans.
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