Bonjour, c’est moi Aïcha*, je n’ai plus 12 ans, je ne vis plus dans l’immense villa aux berges du lac… je vis dans la rue…
Mes années villa se sont écoulées très lentement, entre la vaisselle, le ménage et les marmites, rythmées par les cris de la maitresse de la maison, les coups de gueule de monsieur et les caprices des gamins. Quatre longues années où mon seul réconfort était la brève visite mensuelle de mon père, quelques minutes de répit où je retrouvais mon enfance perdue, quelque minutes que j’attendais impatiemment chaque mois rien que pour voir son sourire, l’entendre dire que Mohamed va bien, que je n’étais pas là pour rien, que mon calvaire quotidien faisait vivre mon frère…c’est pour lui que j’y étais et pour lui je resterais encore…
Les seuls moments de plaisir dans ma vie tunisoise étaient les moments où je pouvais fouiller dans les bouquins de l’ainé de la famille, j’aimais lire quand j’étais à l’école, j’avais peur qu’à force de ne pas lire, un jour je ne saurais plus le faire. C’était ma seule lueur d’espoir, mon unique rêve, celui de pouvoir un jour regagner l’école et qui sait…peut être…peut être … devenir médecin.
Plus les jours passaient, plus je comprenais que les portes de l’école m’étaient fermées à jamais, ce que je ne comprenais pas c’était que plus les jours passaient, plus mon corps se métamorphosait et plus le regard de Monsieur changeait. Ce passage à l’adolescence que j’ai dû affronter loin de ma mère, loin d’une copine qui aurait pris un plaisir fou à me chuchoter dans l’oreille ce qu’elle savait et j’ignorais encore en rigolant entre chaque deux mots, faisant semblant de tout connaitre sur la vie des adultes, une vie dont je ne connaissais rien, encore réfugiée dans mon enfance que je voulais retrouver à tout prix, je ne voyais pas que la nature ne faisait pas pareil avec mon corps. Je n’ai pas eu besoin de ma mère, je n’ai pas eu besoin de mes copines. J’ai tout appris d’un coup, le temps d’une nuit, une nuit où Monsieur a ouvert la porte de ma chambre et s’est glissé dans mon lit….
Depuis cette nuit, mon calvaire diurne s’est prolongé et a envahi mes nuits aussi…Les visites de mon bourreau, freiné par l’œil vigilante de sa femme, fussent rares mais il était constamment là, son odeur était là, je sentais ses mains sur mon corps, son haleine qui puait l’alcool dans mon oreille. Chaque nuit, il envahissait mon sommeil, transformait mes rêves en cauchemars, je ne pouvais plus rêver, même pas du visage de ma mère, elle m’a abandonnée encore une fois, d’abord dans les mains de mon négrier et maintenant dans celles de mon tortionnaire.
Mon secret nocturne pesait lourd sur mes petites épaules, même les visites de mon père ne me distrayaient plus, mes sentiments oscillaient entre la honte et la haine. La honte de ce qu’on m’a fait et la haine vis-à-vis du monde entier. Deux sentiments qui me dévoraient lentement aussi bien que me dévoraient les regards du « maître ». Lentement aussi, je me transformais en un être inerte, sans vie, sans sentiments, sans émotions, sans demain, sans futur, sans envies, sans vie… jusqu’au jour où j’ai vu l’inquiétude envahir la villa, le jour où j’ai vu la peur dans les yeux de mes maîtres, une bande de voyous semait le trouble dans le pays et leurs intérêts se trouvent menacés. Cette bande de voyous redonna la vie à mon corps momifié. Ils étaient jeunes pauvres comme moi, démunis comme moi, sans avenir comme moi. Ils osèrent dire non, exposèrent leurs poitrines nues à la mort ! Ils sont sortis unis dans la rue pour crier justice, pour dire halte, ça suffit, y’en a marre…J’en ai marre, je veux que ça s’arrête, je ne veux plus de cauchemars ni la nuit ni le jour, j’ai envie de dire non, ça suffit, j’ai le droit de vivre moi aussi, vivre ou mourir une fois pour toute, comme tous ceux que je voyais mourir tous les jours. Leur mort redonnait sens à ma vie. Notre guerre était la même. Celles de ceux qui n’ont rien contre ceux qui ont tout. Ils affrontèrent la mort, et moi ? Puis-je affronter mon visiteur de nuit ?
Cette bande de voyous ne cessa de grandir jour après jour. Tout le peuple se transforma en voyous. Qu’est-ce que j’aurais aimé l’être moi aussi ! Le matin du 14 janvier, toute la famille était réunie devant la télévision. Moi aussi j’y étais. J’ai vu la foule se rassembler à Tunis, crier d’une seule voix « Dégage », dégage, dégage, dégage la misère, dégage l’injustice, dégage la pauvreté, dégage l’inégalité, j’avais envie de crier moi aussi, crier jusqu’à ne plus avoir de voix, crier pour faire sortir cette haine qui me détruit, cette culpabilité qui me dévore, crier pour renaitre, revivre, redevenir, pour que mon frère ait le droit à la guérison comme tout le monde, que mon père ait le droit au travail, pour que mes sœurs ne quittent jamais l’école, pour que je puisse à nouveau dormir contre la poitrine de ma mère sans peur, sans crainte, sans odeur d’alcool dans les narines…Ma place était là-bas, à l’avenue, avec tous mes semblables. Ma place n’était surement pas ici, plus ici. Prise par une sensation de triomphe, de gloire, une sorte de transe jubilatoire, j’ai ouvert la porte et j’ai quitté l’enfer.
Je n’ai pas réussi à rejoindre la foule à l’avenue mais j’en ai trouvé d’autres, les rues bouillonnaient, l’odeur de la liberté se dégageait de tous les coins de la ville et je la senties me remplir les poumons. Je marchais parfois, je courais d’autre fois, je rigolais, je criais, je chantais, je respirais, …je vivais.
En partant à jamais, la journée a emporté avec elle « Ben Ali ». Nous avons triomphé, nous les pauvres, nous l’avons battu, nous les pauvres. Mais l’heure de gloire n’était pas encore arrivée. A la tombée de la nuit, les rues désertes silencieuses sauf des bruits de coup de feu qu’on entendit de temps à autre me rappelèrent mes poches et mon ventre vides, mes pieds épuisés et … le couvre-feu. J’étais seule, mes compagnons de la rue regagnèrent leurs maisons. Traversée par une panique soudaine, j’ai repris la route vers la villa. Tiraillée par la peur d’être cueillie par un sniper et celle de retrouver ma prison dorée. Un pas m’emmena en avant et un pas en arrière jusqu’au moment où mes yeux aperçurent l’énorme maison plongée dans le noir et le silence. Mes années de calvaire se défilèrent devant mes yeux. La balle d’un sniper me parut soudain comme un soulagement, comme on soulage un chien mourant où une proie agonisante. Je fis demi-tour. Parfois, il faut choisir la mort pour retrouver la vie. Ce soir-là, j’ai choisis la rue.
Aujourd’hui, deux ans et demi après, je suis toujours dans la rue. Je ne suis pas la seule, nous sommes nombreuses à dormir sous les étoiles. Je n’ai pas de nouvelles de ma famille, je n’ai pas envie d’en avoir. J’ai peur d’apprendre que de ma faute, Mohamed est mort où que Salma prit ma place dans la villa. Le jour, je fais la manche dans le métro ou devant les mosquées, je fouille les poubelles pour manger. Le soir, je me réfugie devant les mosquées où dans les entrées des immeubles. J’ai appris à donner mon corps pour un sandwich ou une cigarette, ce corps qui de toute façon n’était plus le mien. Il appartenait désormais aux enfants de la nuit, aux flics du quartier, aux rodeurs inconnus…ils ont tous la même odeur, la même haleine qui pue l’alcool.
Aujourd’hui, plus de deux après mon jour de gloire, les riches sont toujours riches et les pauvres sont encore plus pauvres, rien n’a changé. La vie continue comme elle a toujours été, l’injustice n’a pas changé de visage, elle a juste changé de nom et le 14 janvier est devenue une mauvaise blague dont je rigole de temps en temps avec mes copines de la rue.
il faut jamais baisser les mains !!! n’importe quel révolution donne ces fruits un peu tard , mais il faut battre et battre encore ! nous sommes un peuple cultivé et bien instruit nous sommes conscients de tout les risques qu ils nous entourent ,mais on peut surmonter on peut réussir!! très optimiste et je le serai tjrs pour MOI pour la Tunisie de Demain!!!!!!!
une pure invention d’imagination ne peut pas être aussi émouvante. Aîcha existe bien; si ce n’est pas dans nos rues, ce serait dans nos cœurs affligés. merci pour ce texte au goût de notre déception amere.
texte émouvant, j’ai les larmes aux yeux parce que les Aichas existent bel et bien et en grand nombre et elles existent surtout chez les citoyens qui se targuent d’etre des défenseurs des droits des enfants , le droit a une vie digne , a la santé et surtout le droit d’aller a l’école et d’y rester, malheureusement c Aichas la n’ont pas eu la chance,et quelle chance, de fuir leurs bourreaux
Une sacree soupe melodramatique et cousue de fil blanc. Plus infantile que ceci, tu meures!
AAicha est plus honnete de ce que tu dit , la vraie pauvretée c’est ne pas avoir des enfants; parceque tu as volé la petite AAicha dés sa naissance ; Moi je suis fonctionnaire, attaché d’administration , élevée dans une grande villa de mon père à Ezzahra , mon villa d’elMourouj est plus charmente que la tienne ;
j’ai remarqué ,qu’il cite une histoire de la pauvreté chez les gens de BEJA , AAICHA c’est vrai elle a 12 ans , dés sa naissance ,son père et toi ,vous l’avez volé , son père m”a apporté un cadavre d’une autre nouveau néé on me disant que AAICHA est morte , or qu’il te l’a donné et tu l’a nommé MARIEM , rends à ta connaissance que la maman de AAICHA est aattachée d’adminnistration titulaire,, ces enfants les trois Cadre , si AAICHA était avec eux dés sa naissances elle serai aussi cadre , elle ne serait jamais ce que tu l’a dis ;
comme tu cite une histoire d’un écrivains du livre la charitée ,mais pour les gens de BEJA , je suis trés fièrte d’etre de cette gouvernorat, la véritée de AAICHA , c’est que tu l’a volé de sa maman dés sa naissance, elle a une soeur ABIR et deux frères , j’ai un salaire fixe , on a jamais vecu la pauvreté , je possède 2 machines à tricoté , pour moi c’est un plaisir , l’histoire que tu le publie de AAICHA prouve aussi que tu as peur de la vérité de MMMMMMMMMMMMMMMMMMMariem ma fille;
A Aïcha, à son créateur, à toutes les petites Aïcha,
je suis si triste, que faire pour vous aider ?
MMMMMMMMMMMMariem Hachicha , tu es AAAAAAAAAAAAAAAAicha Mimouni ils m’ont dis que tu es morte , j’ai un certificat de décés, nous avons beaucoup pleuré ta mort , 12 ans ont passé , ton père parle de toi à ta soeur ABIR on disant si AAICHA est vivante elle serai de la meme age que MARIEM la fille de son patron Fethi Hachicha …..On a fait des recherches et on a su que MARIEM dans la vérité est AICHA , ma fille je ne te laisse pas avec un homme étranger , je te reprend ,ma fille , je te reprend ,
n7eb n9oul lelli kteb l 9essa 3ala 3aycha : ken jé rajel raw 3awen bnet ennes mch yekteb 3lehom fel 9isas w y3awed
Fiction paints reality but knowing tunisia as i do:
the story moves even the dead hearts and creates a flood of tears
in sahara eyes.
nothing is ever invented but discovered by those that know how to get there
or access knowledge.
how true the nightmare tunisians lived and still live.
Aicha is every tunisian; plowed the soil,planted the seeds but the rain
hasn’t arrived yet but will do so one day.
nothing worse than loosing hope aicha even if that is only a dream.
Merci pour l’écrivain même si c’est un devoir de parler des ces gens..j ai plus de deux ans que j’essaye de faire quelque chose pour ces filles et ces gars qu on voit souvent à l’avenue Bourguiba et partout dans les villes, mais en vain. D’après une étude et quelques témoignages , on a constaté que ces gens sont des victimes soit de leurs parents qu’y trouvent une source de financement, soit des patrons qui exercent tout genre de pouvoir sur ces pauvres .
pour ceux qui pensent vraiment qu’on peut les aider et qui sont prêts pour le faire, n’hésitez pas de me contacter.
Sana, j’aimerais bien prendre contact avec toi pour voir ce que je peux faire. dis moi comment, merci.
Il est temps de mettre fin à cet esclavagisme moderne et travail forcé d’enfants
كلنا عائشة
كثر هن العائشات الميتات في بلدي
لقد قرأت المقال وقد انتابني شعور بالحزن والألم أشكر صاحب المقال عن حساسيته المرهفة وأشكر أيضا ملتقط الصورة
نصيحتي أوجهها إلى أطراف عدة. الى كل من يشغل فتياة صغيرات: إنكم مثلكم مثل العائلات التي تفرط في فلذات أكبادها وتقتات من وراء عرقهم لا تزيدون عنهم قدرا ولا تنقصون حساسيتكم حساسيتهم ومكركم مكرهم ويحكم ألا تعلمون أن تشغيل الأطفال جريمة يعاقب عليها القانون ومكارم الأخلاق إلى كل والد ووالدة: أتنجبون الأطفال لضمان شيخوخة مرهفة كيف يمكنكم أن تقدموا على بيع أبنائكم ألا تعلمون أن أبنائكم هم أمانة في أعناقكم وأنه من واجبكم توفير كل مستلزمات الأطفال من عطف ورعاية. إن ما تفعلونه لهو المكر بعينه تعلمون أطفالكم مبادئ خاطئة وتغتنمون نبلهم ومثاليتهم لتوظفيها لصالحكم ألا تخجلون من أنفسكم عندما تنظرون إلى بواطن أنفسكم . إلى كل مسؤول عمدة كان أو رئيس شعبة معتمد أو وال وزيرا أو رئيس حكومة أنتم أيضا شركاء في جريمة ما تعانيه عائشة والعائشات الكثر في بلدي.
إلى كل إنسان متحضر يعمر داخله طفل صغير أقول لا تشتروا بضائع يعرضها الأطفال للبيع ولا تقدموا نقودا لهم لأن ورائهم سباع
تنتهش أبدانهم الضعيفة بل اشتروا لهم أحذية أو بعض المأكل أو الملبس واعطفوا عليهم وقولوا لهم قولا كريما ثم أعلموا السلط الأمنية
القريبة من تواجدهم
أختم قولي إلى عائشة يابنتي يا عزيزتي لست وحدك في هذا العالم فالكثير يكن لك حبا جما ويتمنى لك الخير كل الخير غدا تشرق شمسك
انهضي ولا تيأسي ولا تفقدي الأمل إلى النور فالنور عذب جميل إلى النور فالنور ظل الإلاه
سلامي إلى كل عائشة
Oui des cas comme celui là existent malheureusement,ces vies brisées ,ces enfants martyrisés,j’en ai les larmes aux yeux ,ne laissons plus des histoires pareilles se reproduire ,Je me joins à toi sana .