Louange à Dieu
Messadine le 18 février 2005
A mes chers et adorables enfants et à ma douce compagne
Kebdi ! Comme vous me manquez ! Loin de vous tous, je suis tel un arbre creux et desséché. Une profonde et grande tristesse brûle, ronge, creuse et malmène mon coeur, mon inquiètude, ma douleur et ma souffrance s’accentuent chaque instant loin de vous mes enfants.
Après chaque parloir je ne cesse de compter les jours, les heures et même les minutes qui me séparent du prochain parloir, cela devient un tic pour moi, une manière d’espérer vous revoir et jouir de ces 15 minutes.
Après chaque parloir, je retourne à la cellule abattu la gorge sèche, les yeux ternes et le temps me pèse. C’est à ce moment précis que je réalise que le temps se nourrit de ma vitalité et de tout mon corps ; par ces séparations répétées, par ces cruels adieux et je répète sans cesse cette phrase : reverrai-je ma famille la prochaine fois ? Samedi prochain ! Car rien n’est certain dans ma situation si ambigue.
Voilà plus de 13 ans que je n’ai pas eu la joie ni le plaisir de voir ni d’entendre ta si jolie voix mon fils ma fierté et toi aussi mon honneur ma dignité ma fille Ramla et toi aussi mon espoir Hamdi ainsi que mon émeraude Rahma et enfin mon inestimable et doux Sabri. Imaginez que jusqu’à ce jour, je ne connais pas ma belle fille l’épouse de mon fils Hamdi et que je n’ai pas eu ni le plaisir ni la joie de serrer contre mon coeur et d’embrasser mon petit fils Yosri.
C’est cette longue et dure séparation qui m’attire et me guide vers une impasse si sombre pleine d’embûches et d’inconnues.
Kebdi ! Mon souhait est si simple, mon désir est si abordable, je ne demande qu’à être traité comme un être humain et non comme un numéro 1465 et espérer voir la loi appliquée et trouver la Paix.
Kebdi ! Le vrai bonheur c’est la sagesse ! Et surtout ne pas oublier les déshérités et les malheureux, un peu de compassion, de tendresse, de tolérance et d’amour dans ce monde plein d’injustices, de malheurs et tout en feu.
Kebdi ! Eloignez-vous le plus loin possible de l’injustice qui viole et ternit notre si beau paysage, il faut à tout prix que nous nous corrigions et ne pas laisser les problèmes sans solutions durant longtemps, car cela est le destin des incapables. On ne peut pas modeler et arranger le présent ni le passé mais personne ne peut l’abolir et le futur dévoilerait toutes les vérités. On ne peut construire de barrages contre l’océan.
Des fois quand je regarde la télé et je vois les larmes, tant de douleurs, tant de souffrances dans ces regards hagards d’innocents enfants devant les décombres d’une maison démolie.
Une grande honte me monte au coeur devant cet horrible spectacle d’une scène de terreur et je trouve aucune excuse pour justifier cette barbarie. Je ne peux croire qu’en assassinant l’innocence, on peut réaliser une vraie Paix chez soi.
je remercie toutes celles et tous ceux qui réagissent et veulent aider tous les malheureux et les assoiffés de liberté et de paix. Je dis merci à cette belle et toujours douce France qui a accueillli mes enfants qui trouvent toutes les facilités pour terminer leurs études supérieures. Je n’oublierai jamais cette grandeur d’âme, cette générosité de cette belle terre française, terre d’hospitalité, d’accueil, de tolérance, d’égalité, de fraternité et de justice.
Enfin, il est facile de voir les fautes lorsqu’elles sont commises.
Kebdi ! en vous je trouve encore de quoi me réjouir le coeur rien qu’en contemplant vos photos.
Je termine par ces deux vers :
“Non, vous ne verrez jamais changer—Beaux yeux qui m’avez appris à aimer”
A la fin, je vous laisse et que Dieu vous guide, vous aide et vous soutienne. Une grosse bise pour vous tous mes biens aimés.
De votre père Hamadi Mohamed Abdelmalek.
Chambre 16 N°1465
Prison civile de Sousse. Messadine2.
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