L'homme d'affaire Imed Trabelsi.

Comment en effet, expliquer que ce que j’ avais fait rebaptiser Med Business Holding, n’ était plus qu’une coquille encore plus vide où il n’ y avait plus personne depuis que Imed Trabelsi avait sèchement annoncé à tous les journalistes qu’il avait débauché pour les besoins de son éphémère journal Univers Sports, sa décision de les licencier sans préavis ?

Ce ne fut pas facile d’obtenir qu’il consente à maintenir une dizaine de salariés, car l’ argument selon lequel jeter à la rue tous ces salariés ne manquerait pas d’ altérer sa réputation qui n’ en avait pas besoin se révéla totalement inopérant avec lui, et ce n’ est qu’ en invoquant la nécessité de disposer d’une équipe pour construire les sites internet de la holding et de Bricorama Tunisie que j’ eus droit à ce sursis inespéré en leur faveur.

Malgré mes efforts pour circonscrire les effets de ce licenciement massif, le torchon ne manqua pas de bruler entre Imed TRABELSI et le pseudo journaliste Senda BACCAR, qui s’était auparavant empressée de claquer la porte de Réalités Femmes, et de démolir son ancien patron Taieb ZAHAR et voulait en refaire autant, après son humiliant renvoi.

Il faut dire qu’elle avait passé son temps a martyriser le personnel et a livrer une pitoyable guerre d’influence au journaliste sportif Sami .Akermi, alors qu’elle ignorait tout de ce domaine ; et donc son départ nous débarrassa de ses gueulantes fréquentes qui remontaient du sous-sol où elle était heureusement confinée.

J’avais donc réussi a garder les infographistes, les informaticiens et quelques journalistes mais on était loin de pouvoir montrer une structure capable de générer les 70 millions (toujours ce satané 7) que Imed Trabelsi m’avait annoncé avec désinvolture lors de ma demande d’éléments de présentation du « groupe »

Or au rythme de ses soirées arrosées au Plazza, Imed m’avait allègrement chargé d’autres dossiers où j’avais réagi plus rapidement qu’il n’avait l’habitude.

Par exemple un soir alors que j’étais comme à l’accoutumée encore au bureau vers 22 h00, il me téléphona un soir avec sa voix guillerette lorsqu’ il prend du bon temps « Ahla Bel Tahfoun ! » (une appellation inadaptée à mon gabarit…mais bon c’était sa marque de sympathie, quand il était fortement imprégné…chaque soir !)

– Tu connais la bière Corona ?

– Oui bien sûr la bière mexicaine, la préférée de Chirac

– Bravo…c’est celle là, écoute le président m’a offert la licence de production de bière, je veux la faire fabriquer en Tunisie…Tu les contactes ?

– Euh vous êtes sûr ? Vous savez ce n’est pas une bière très connue par les tunisiens, et son gout est un peu spécial, pourquoi ne pas voir une autre marque.

– Non, non… Heineken c’est notre parent par alliance Boujbel qu’il l’a eue, je veux les baiser lui et Hamadi Bousbii…..vas y je sais que tu peux le faire …..et arrête de bosser viens boire un verre au Plazza. !

Je n’ avais jamais rien entendu d’aussi absurde, mais comme j’ avais mesuré sa capacité a obtenir ce qu’ il voulait de la présidence, à 1 heure du matin, j’ avais bouclé une note de synthèse sur les leaders mondiaux de la bière et bâti un plan détaillé sur le marché de la bière en Tunisie.

Dés le lendemain, quand il vint me voir à son réveil ,vers midi, je lui expliquais que la bière Corona n’était fabriquée qu’au Mexique et que même les États Unis qui représentaient la moitié du marché à l’export ne disposaient d’aucune unité….ce fût la aussi très difficile de le faire renoncer à cette idée , et là aussi je dus lui avancer ma capacité de nouer un partenariat avec Scottish & Newcastle , un des leaders mondiaux de la bière, pour y parvenir.

A vrai dire, je sentis sa volonté de tester mes capacités à travers son accord de me mettre en relation avec ce mastodonte pour qui la Tunisie appartenait à un marché « reste du monde », et encore nous étions peu de chose sur ce segment.

Néanmoins grâce à un cordial contact, la rencontre fut anticipée de quelques mois et nous fumes donc confrontés à l’arrivée prochaine du directeur des marchés RW et du Directeur Régional la même semaine que Le directeur de Bricorama.

Comment faire ?

J’avais déjà opéré le nécessaire passage d’ Univers Group à Med Business Holding (j’ avais choisi Med Alliance Holding) préférant éviter la connotation péjorative de « bezness » mais Imed Trabelsi avait tenu bon….le mot lui plaisait !

Alors première chose, décrocher du toit l’horrible enseigne rouge et noire qui représentait un planisphère surmonté du mégalomane « Univers Group ».

Maintenant la plaquette, elle m’était réclamée par SCOTTISH & NEWCASTLE., BRICORAMA…et les autres sociétés que j’avais démarchées et dont je parlerai plus loin.

Deuxième étape, faire photographier tout ceux qui étaient présents dans l’administration, on arrivait péniblement à 12 personnes en incluant tous les rescapés d’ Univers Sport que j’ avais fait maintenir en poste….un peu léger pour un groupe censé générer plus de 70 millions d’ Euros.

Le comptable dégoulinant de sueur fut chargé de me fournir toutes les boîtes archives des sociétés du groupe, à l’intérieur ?

-Des statuts et une patente au meilleur des cas , pour certaines sociétés « c’ était plus compliqué… » les papiers était encore chez Chafik Jarraya, son ancien associé avec lequel la rupture était consommée à l’époque de mon arrivée.

Bref, il fallait tout inventer, et les infographistes Majdi, Leîla, et même ma future épouse Ana furent lourdement mis à contribution pour inventer tous les logos et mettre en page les faux bilans que Majdi le comptable dégoulinant fut chargé d’ inventer lui aussi.

Mais nous manquions cruellement de têtes a faire figurer dans l’organigramme de ce groupe, ne serait ce que pour afficher un responsable par société.

Solution ? Le chantier !

Oui avec l’entrepôt de vente de bière, le chantier était la seule activité concrète du groupe, c’était le premier projet d’envergure pour lui, et il me confia qu’il avait bataillé des années auprès de sa tante ( ?) Pour réussir a obtenir de réaliser ce building qui dominerait tout le Kram où il avait vécu modestement élevé par sa grand-mère et voulait prendre sa revanche sur les bourgeois(es) de la banlieue envers lesquels(les) il nourrissait une certaine rancune.

Donc disais je, le chantier lui grouillait d’ouvriers, c’était le vivier qu’il fallait pour trouver quelques têtes potables a faire figurer sur l’ambitieuse (et fantaisiste) plaquette du groupe que j’étais désormais contraint de boucler dans les plus brefs délais.

Ce fut l’occasion de franches rigolades avec les infographistes quand il fallut faire défiler tout ce monde pour leur mettre une chemise, une cravate et une veste et les photographier, la majorité n’avaient jamais revêtu un tel accoutrement, et le supportaient mal même pour le bref temps de la pose; Majdi fut sommé de cesser de se marrer et de laisser ces braves ouvriers regagner le chantier où la tension était tous les jours à son comble !

C’est dans ces conditions épiques que des maçons eurent le privilège d’ être propulsés Directeurs Généraux de filiale pour les besoins de la plaquette, qui ne leur fut jamais montrée.

Mais ce n’était pas tout, comme dans le film la vérité si je mens, nous allions devoir faire visiter notre siège social à nos visiteurs, et il nous fallait pour cela une dizaine de figurant(e)s pour ce faire.

Suite….