Les Observateurs : Violences à Sidi Bouzid après une tentative d’immolation

Confrontations entre manifestants et forces de l'ordre à Sidi Bouzid.

Vendredi 17 décembre, un jeune d’une vingtaine d’années a tenté de s’immoler en plein jour devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid, dans le centre-ouest de la Tunisie. Ce geste désespéré a provoqué un mouvement de révolte dans la ville qui est devenu le théâtre de confrontations violentes entre habitants et forces de l’ordre.

Depuis trois jours, les internautes tunisiens commentent les images des violents affrontements qui ont éclaté vendredi dans la ville de Sidi Bouzid, à 265 km au sud-ouest de Tunis. Des images d’émeutes contre les forces de l’ordre et de voitures brûlées qu’il est rare de voir dans un pays verrouillé par les autorités. Les sources officielles nient totalement l’existence de cet événement, qui est par ailleurs absent des titres de la presse nationale. Les Tunisiens le suivent donc par Twitter à travers le fil #sidibouzid. Les internautes dénoncent un “black-out total” des médias avec ironie : “Il n’y a pas d’émeutes à Sidi Bouzid, des Américains tournent un film d’action”. Les affrontements avec les forces de l’ordre et les arrestations sont par ailleurs relayés sur Facebook ainsi que sur les blogs d’activistes.

Enclavée, la région de Sidi Bouzid n’a pas bénéficié de la même politique de développement économique que d’autres régions du nord du pays. La ville de Sidi Bouzid souffre d’un taux de chômage élevé chez les jeunes et d’une grande précarité socio-économique. Autant d’éléments dénoncés par les habitants qui se révoltent depuis vendredi. Malgré une trêve observée depuis ce matin, la ville est toujours sous tension et les forces de sécurité maintiennent un cordon de sécurité.

En juillet, nous avions publié un billet sur des manifestations d’agriculteurs de la région de Sidi Bouzid qui soupçonnaient une banque de s’être livrée à des malversations pour les déposséder de leurs terres.

Manifestants dans les rues de Sidi Bouzid. Photo publiée sur la page d'un groupe de soutien sur Facebook.
Pneus brûlés dans les rues de la ville. Même source.

“Ce sont les propres enfants de ce régime qui se retournent contre lui”

Slimane Rouissi vit à Sidi Bouzid. Il a manifesté devant le siège du gouvernorat, la plus haute autorité administrative régionale, après la tentative d’immolation de Mohamed Bouazizi.

Slimane Rouissi
C’est la tentative d’immolation de Mohamed Bouazizi, vendredi en fin de matinée devant le siège du gouvernorat de Sidi Bouzid, qui a tout déclenché. Ce jeune homme a arrêté l’école assez tôt (niveau collège) pour venir en aide à sa famille qui compte huit personnes. Son oncle avait essayé de lancer un projet agricole à R’gueb, dans la région de Sidi Bouzid, et toute la famille est partie s’installer sur place pour travailler la terre. Mais le projet n’a pas pu aboutir à cause d’une affaire de corruption où les autorités régionales étaient impliquées. Il a donc fini par retourner à Sidi Bouzid pour y travailler comme marchand ambulant de fruits et légumes.

Mohamed achetait sa marchandise en contractant des dettes. Or, comme tous les marchands ambulants, il n’avait pas le droit de vendre. Les fonctionnaires de la mairie venaient régulièrement lui confisquer sa brouette. Il perdait alors tout son capital. Vendredi matin, il venait juste d’acheter à crédit pour 300 dinars de marchandises [environ 130 euros] quand ils sont encore une fois venus réquisitionner sa brouette. Mais cette fois, les fonctionnaires de la mairie étaient également accompagnés d’agents du commissariat de la police municipale (des agents de police mis au service de la mairie). Ils ont saisi sa marchandise et l’ont molesté. Le jeune homme n’en pouvait plus de cette situation. Il est donc parti au siège du gouvernorat pour faire part de sa situation au gouverneur, pensant qu’il s’adresserait au bon interlocuteur. Mais Mohamed a été refoulé à l’entrée et empêché de rencontrer les responsables. Désespéré, il s’est procuré deux bidons de diluant dans une quincaillerie du quartier et a tenté de s’immoler.

Il a été transporté d’urgence à l’hôpital puis transféré vers le service des grands brûlés d’un hôpital de la région du Grand Tunis. Il est brûlé au 3e degré sur 70% de la surface de son corps et souffre de problèmes cardiaques. Son cas est vraiment très grave.

Ce malheureux événement a provoqué la colère de la population locale. Des amis de la victime, eux-mêmes commerçants ambulants, sont allés jeter leurs marchandises devant le siège du gouvernorat. Les habitants se sont ensuite réunis à cet endroit pour crier leur colère. Certains, comme le montrent les images, ont essayé de pénétrer à l’intérieur du bâtiment mais ils en ont été empêchés. A ce moment là, la situation n’avait pas encore dégénérée. Mais le soir même, le directeur de la sûreté nationale a été dépêché sur les lieux (il y est encore à l’heure où je vous parle). Le lendemain, la marche organisée par les habitants a été réprimée par les forces de police à coups de bombes lacrymogènes. C’est à partir de là que la situation a commencé à s’envenimer : des affrontements ont eu lieu dans toute la ville, des barricades ont été dressées et des voitures brûlées. On estime le nombre d’arrestations à une cinquantaine. Beaucoup de citoyens arrêtés puis relâchés affirment avoir été torturés. Des renforts sont arrivés dimanche : près d’une centaine de policiers à moto ainsi que des fourgons. Il est clair que les autorités ont opté pour une politique de répression et ont dépêché leurs agents de sécurité au lieu d’envoyer sur place les responsables des politiques de développement que nous souhaitions voir.

Ce qui me frappe dans ces événements, c’est que beaucoup de ceux qui sont descendus dans la rue sont de la génération de 1987 [année de l’accession au pouvoir du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali]. Ce sont les enfants qui ont grandi avec ce régime qui se retournent contre lui.”

Manifestations devant le siège du gouvernorat.


Des manifestants tentent de pénétrer à l’intérieur du siège du gouvernorat en escaladant la porte d’entrée.


Accrochages avec les forces de l’ordre.


Affrontements nocturnes et pneus brûlés.

Cet article a été rédigé en collaboration avec Sarra Grira, journaliste à France 24.
Article publié initialement sur www.observers.france24.com

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8Comments

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  1. 1
    منير.ش/سوسة

    هذه ليست انظمة و انما مافيات اختطفت الدولة و حولت سواقيها الى مسابحها الخاصة و ضياعها
    تلاعبت بالارزاق …و عذبت و قتلت و رهنت المتقبل كممتةالافواه و جعلت حياتنا بلا حياة
    …لو بقينا نصرخ فيها الف عام لن يرف لها جفن لذا كفانا لهثا وراء السراب…. الحرية لا توهب و انما تكتسب و مهرها ….الد

  2. 2
    salem ben mahmoud

    من الغرائب أن تتجند بعض الأقلام المغرضة لتصب سمومها ضد تونس البلد الهادىء الذي يشق طريقه بكل هذوء نحو مزيد التقدم و الرفاهية لشعبه.
    الحدث الأليم الذي تمثل في إحراق شاب نفسه يجعلنا نأسف له و نتألم لشاب في مقتبل العمر أن يصل به اليأس لهذه الدرجة,
    فبقدر أسفنا فإننا نرفض ركوب البعض مثل هذه الأحداث و توضيفها سياسيا و هؤلاء، في عملية تضليل واضحة، يعلمون علم اليقين بإن هذه الحادثة لا علاقة لها بالسياسة و لا هي متعلقة بحقوق الإنسان، هذه الحقوق التي هي بدورها زج بها في غياهب لا علاقة لها بها,
    إن تونس رغم غياب الثروات الطبيعية شقت طريق النمو بفضل خياراتها الصائبة و رهانها على الإنسان و بلغت مراتب عليا بشهادة العديد من المنطمات الدولية المستقلة، قدرها أن ننعرض لبطش بعض أبنائها الذين علمتهم ثم انقلبوا عليها، لا يتركون فرصة تمر إلا و حاولوا النيل منها بمعية بعض الأطراف الأجنبية التي تحن إلى زمن قد ولى و اندثر,
    و الحمد لله أن هذه الشرذمة قلة قليلة لم تلاقي إلا التنديد من الشعب التونسي الأبي و قد خيب آمالها بالتصدي لها كل من موقعه.
    و هاهي الحادثة الأليمة بسيدي بوزيد توظف بدورها من طرف هؤلاء الذين يريدون إشعال الفتنة و قيام الفوضى و مرة أخرى يقف الشعب المقدام صفا واحدا في وجهها و يسفه أحلامها.
    طبعا في مقدمة هذا الشعب الأبي متساكني سيدي بوزيد الذين عملوا على تهدءة الأوضاع و هم أدرى من أي كان بما تبذله الدولة من مجهود تنموي
    حيث بلغت قيمة الإستثمارات منذ التغيير 2350 مليون دينار.

  3. 3
    Mohammed

    Monsieur Salem Ben mahmoud:

    Les tunisiens qui critiquent le régime de Ben Ali, sont les vrais patriotique. Ils risquent tous, surtout les plus braves entre eux. Il y en quelques dizaines que le gouvernement embauche des centaines de policiers en civils pour les harceler la ou ils vont…Je vais nommer un seul: Boukaddous. Ces gens aiment la Tunisie, plus les profiteurs et “applaudisseurs”..

    En passant vous avez lu les wikileaks sur la Tunisie? Ca c’est l’allie du gouvernement tunisien.

  4. 4
    son of carthage m l australia

    TWIDDLE LEE DI CONFER WITH WITH TWIDDLE LEE DAH:
    That translates into ZIBLA SPEAK TO HIS PRIME MINISTER.
    twiddle lee di is hissing the other twiddle to a hausse a
    hissement to hiss hosse hossery hossage.
    A LANGUAGE from planet clairvoyance.
    I’LL try to bring that speak to our worldly level: my
    comprehention of it is.:if the second twiddle galvenise
    more police to that side of the country,that would facilitate
    more arrests and the liquidation preferably resulting in a
    smaller number,those that survive will have higher standard and biggerslice of the cake.
    FOR those that aren’t satisfied of my interpretation: i can’t
    blame you as i find the speak of the tunisian twiddles zibla
    and co beyond my capacity.
    You may make a better sense of it he is asking his prime min
    to unblock the resources of private secter further to the
    south west,east,north,middle,alaska,south pole……got it?.

  5. 5
    son of carthage m l australia

    LOOK SALEM BEN UNMAHMOUD?
    YOU SHOULD BE GRATEFULL YOU ON A SITE THAT TOLERATE
    EVERYTHING.
    Refer your articles to zibla son in law shit papers and
    feel at home there?. mr brainless divide 2350 inflated
    number by 23 years,then by 400 000 population over that
    number,equal it to you intelligence,equal it to zibla
    democratic achievements,equal it torespect of law by
    current institutions will result at zero equal to your
    values,understandind and intelligence.
    your argument missed the train keep walking clown

  6. 6
    son of carthage m l australia

    CAN SALEM TELL US HOW MUCH IS SWINDLED
    BY THE TRABELSI,B A ZIBLA,BROTHERS,HIS
    CHILDRENS AND SON IN LAWS?.
    Since you seem to know about a number tossed as a self
    defence tool to glorify themselves.
    DO you really believe their crap? or are you a clinger on?.
    benefitting from their largesse,if so you are a collaborater
    with the crims.
    Better run for your life and get to those boats on some deserted beach,then sink or swim as we will have a clean up of your genre.
    No one need to collaborate with foreigners for demanding some
    basic rights in his country.
    The only collaborater is zibla who sucks up to the french,the
    yanks, the jews,the italians and the rest.
    HAS HE EVER defended tunisians that fell into trouble overseas?.
    The likely thing he will do ;is punish them further.
    FINE to respect the rule of law in a lawful country not in a
    place where rules are what zibla wants them to be.
    Why aren’t the municipalities doing the basic of their duties
    like cleaning streets,building,repairing roads,doing gutters for water run off in state of chasing a young man trying to
    scratch a living and gain a bread crust for his family.
    WHAT’S the unlawful thing the young man being doing to warrant
    that treatment and dismissal of his cries?.
    The thuggery by this regime,the treatment of it’s citizens as
    if they are not worthy even to a hearing.
    What the hell a turd of zibla calibre can withhold citizens
    from obtaining a passeport or treat them as piece of shit.
    Brain washed or benefactor of zibla you are void of morality
    like him and his vulture of a families.
    Have you got compassion for those that got broken bones
    done by the thugs policemen or those that had their lives
    ruined for the simple reason of vengence done by ZIBLA.
    A person is responsable for his actions in a lawful state,
    but zibla is responsible for 10 million tunisians and he
    failed them miserably.
    Look anywhere in tunisia and ask about the barbarity of his
    cops,where have read about this?: nawaat or wikileaks or sidi bouzid
    which wasn’t even mentioned for 3 days there at the tn press.
    The train accident aof hammam lif is caused by weather.do
    we believe in fairies,what a bout gafsa,redeyef,the border
    town with libya and the many more.Do they ever even mention the
    discontent or the illegal cutting off of these towns plus harassement of thier populations?.
    make all of what i said into a cassecroute and chew on it or
    make a bsissa of it and hiss tunisian to be law abiding
    a favourite word of zibla when he cousels his prime minister.

  7. 7
    Amir

    Salem ben Mahmoud:
    Tu feras un bon présentateur a Tunis 7, tu as déja le vocabulaire. Ici a Nawaat tu as la liberté d expression, tu peux dire ce que tu veux (meme tes eloges a un gouvernement policier, mafieux, corrompu) pas la meme chose a Tunis 7.

  8. 8
    Ahmed

    In le Quotidien d’Oran d’aujourd’hui – http://www.lequotidien-oran.com/?news=5147128

    UN PAYS MODELE

    par K. Selim
    La Tunisie voisine accumule les bonnes notes dans les classements économiques. Le FMI la présente volontiers comme un bon élève. Les maîtres de Davos y voient un exemple à suivre en terme de compétitivité économique.

    Et de fait, nos voisins sont mieux classés en terme de compétitivité que nombre de pays européens. Et pas seulement les ex-pays socialistes. La Tunisie, qui s’installe à la 32e place mondiale, dépasse franchement l’Espagne et l’Italie. Les investissements directs étrangers qui boudent l’Algérie – hors hydrocarbures – s’y sentent bien. A l’échelle régionale, et en prenant en compte le classement global élaboré par la Banque mondiale et la SFI (Société financière internationale), la Tunisie distance tout le monde. La 55e place en 2011 contre la 114e pour le Maroc et une triste 136e place pour l’Algérie. Elle a donc tout pour plaire cette Tunisie.

    Pourquoi lui reprocher son absence de démocratie, sa presse aux ordres et le retour en pointillé de la présidence à vie quand on est si bien vu ? Peut-être justement le fait qu’elle a, avec son économie si performante aux yeux des investisseurs, tous les atouts pour aller tranquillement vers une démocratie sans fard, sans ajouts «spécifiques» qui la réduisent et en définitive l’annulent même.

    Nos sociétés savent, sans nul besoin de discours, qu’une «démocratie responsable» n’est pas une démocratie du tout et qu’elle peut être une autocratie plus ou moins molle ou plus ou moins abrupte. La Tunisie «modèle», tout comme l’Algérie ou le Maroc, a eu son lot d’appréciations diplomatiques américaines crues via le déversoir WikiLeaks. On peut même dire que la Tunisie a eu droit à une littérature encore plus particulière sur une économie de la corruption envahissante, «l’éléphant dans la pièce» que tout le monde voit et subit sans en parler. Ces câbles en parlent comme d’un phénomène qui exacerbe les tensions et crée un climat social détestable.

    Il faut être un diplomate américain pour déceler, derrière les satisfecit, les stratégies de protection imaginées par les entrepreneurs pour échapper à la dîme. Elles ont un coût pour l’économie, ces stratégies de sécurisation.

    Les voyageurs algériens ont pu constater que, peu à peu, dans la Tunisie «laïque», de plus en plus de gens s’en remettent à la religion… Il n’y a pas que la littérature WikiLeaks qui pourrait être cataloguée comme l’expression de «vues personnelles» des diplomates américains. Il y a aussi cette réalité d’une contestation sociale diffuse, principalement chez les diplômés, qui finit, par exacerbation, par effleurer à la surface.

    C’est arrivé ces dernières heures à Sidi Bouzid, après un acte désespéré d’un jeune homme – Mohamed Bouazizi – diplômé de l’université, exerçant comme marchand ambulant et qui a tenté de s’immoler devant le siège du gouvernorat après avoir subi une «hogra».

    Alors que les Tunisiens du Net montraient, photos à l’appui, des scènes d’émeutes, à Tunis on semblait laisser entendre que rien ne s’est passé, avant de se résigner à parler d’incident isolé et de dénoncer des «parties» qui chercheraient à «l’instrumentaliser», à «le dévier de son véritable contexte et à l’exploiter à des desseins politiques malsains».

    La «performance» du discours officiel laisse vraiment à désirer. A force de vouloir présenter l’image d’un pays lisse, les autorités ne savent pas comment gérer la respiration d’une société en mal d’expression. La Tunisie, comme les autres pays du Maghreb, a besoin d’une vraie ouverture politique. L’auto-contrôle des systèmes est une fiction. La corruption est l’enfant naturel des systèmes verrouillés qui, en fermant les portes des évolutions pacifiques, font le lit des violences.

    La Tunisie , il ne s’agit pas de condamner , dispose de beaucoup d’atouts pour y aller et pour devenir, enfin, un vrai modèle. Pour peu que ceux qui décident comprennent que l’immobilisme politique est le vrai danger.

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