La Cité de la culture de Tunis. Un projet tout autant en agonie que le secteur culturel.

Par le Syndicat Tunisien Libre des Organisateurs de Spectacles (STLPOS)

Après 6 mois de vaines tentatives auprès du Ministère de la Culture, le Syndicat Tunisien Libre des Organisateurs de Spectacles (STLPOS) a décidé de porter ses revendications directement à l’attention des partis politiques.

Par-delà une profession particulière, il est avant tout question de favoriser l’essor et la modernisation de l’offre et de l’industrie culturelle, au bénéfice de notre population.

Force est de constater que les réformes structurelles qu’appelle notre pays ne sont toujours pas à l’ordre du jour, ni pensées ni engagées !…

La Culture va mal !

A l’heure où la Tunisie nouvelle travaille à la mise en œuvre d’une société enfin démocratique et ouverte, où les notions d’égalité et de transparence doivent retrouver tout leur sens et leur réalité, chaque secteur professionnel et sociétal est conduit à réfléchir aux réformes structurelles à introduire.
La culture, parce qu’elle est une condition essentielle de l’épanouissement individuel et collectif, ne peut, moins encore qu’aucun autre secteur, échapper à cette réflexion.

Notre profession, acteur pourtant essentiel de ce développement pour le spectacle vivant, a longtemps souffert de règles opaques et discriminantes, appliquées au gré d’intérêts particuliers, clientélistes ou mafieux ; elles ont fortement handicapé et retardé l’essor et la professionnalisation de l’industrie culturelle dans notre pays.

Nous demandons que soient refondées des règles de bonne gouvernance, alors que les faveurs et les passe-droits se perpétuent jusqu’à ce jour.
Ni clientélisme, ni corporatisme, mais une transparence des procédures, une clarification des responsabilités et une véritable égalité de traitement, pour ouvrir la voie à la diversité et à la densité de l’offre culturelle, pour faire vivre sa créativité et sa modernité !

Pour un assainissement et une professionnalisation du secteur :

– Distinguer les catégories d’intervenants à travers l’attribution de licences spécifiques (producteur, organisateur, manager, exploitant de salle, activité principale ou secondaire, permanente ou temporaire…) ;

– Mettre fin à l’improvisation des statuts et à la confusion des activités en faisant obligation de recourir aux organisateurs ou producteurs de droit tunisien résidents et agréés quelque soit l’organisme agissant (privé, public) ;

– Respecter les agents certifiés des artistes pour leur programmation ;

– Ne plus permettre à des activités culturelles concurrentielles de se soustraire à ces obligations en s’abritant derrière tel organisme public ou associatif ou diplomatique.

Pour une suppression de la « commission mixte » :

– La commission administrative en charge des autorisations était en vérité un juge de l’opportunité des événements et des manifestations ;

– Elle était de la sorte une porte ouverte à la censure, à l’arbitraire et à la protection des positions acquises ;

– Il est temps que les agréments préalables soient désormais accordés au regard d’un cadre strictement objectif et réglementaire, et dans le cadre de la loi commune, par la création par exemple d’un guichet unique qui ferait plutôt office de dépôt et d’examen des dossiers dans des délais prescrits.

Pour une véritable protection des droits d’auteur :

– Refonder une Société des Droits d’Auteurs dont la vocation sera véritablement la défense des créateurs, et non plus un instrument de censure et de blocage des initiatives concurrentielles comme sous l’ancien régime ;

– Elargir les assujettis (état, activités commerciales, musique enregistrée,…) et élargir les bénéficiaires (artistes tunisiens) ;

– Clarifier et stabiliser l’assiette pour la perception des taxes ; protéger les créateurs sans porter préjudice aux efforts d’investissements en qualité ;

– Respecter enfin, pour l’image et l’honneur de notre pays, les engagements pris avec les organismes étrangers et les rétrocessions qui leur sont dues ;

– Retirer l’OPTDA de la commission mixte.

Pour une fiscalité adaptée aux échanges et à l’ouverture au monde :

– La sur-taxation des spectacles et des artistes étrangers, exorbitante et pénalisante, était conçue avant tout comme un outil discriminant et sélectif, au bénéfice des quelques privilégiés qui en étaient exonérés ;

– Cette mesure est pourtant toujours en vigueur ; elle handicape la création et le développement de manifestations internationales, freine l’ouverture au monde de la population, empêche les effets de stimulation de la création artistique locale ; elle fait obstacle enfin à l’animation touristique dans le pays ;

– A cet effet, nous demandons l’instauration d’une taxe unifiée de 5% payable sur la base des contrats signés par tous les opérateurs, qu’ils soient publics ou étatiques, culturels ou touristiques (en lieu et place des taxes existantes ainsi que de la TVA sur la billetterie des spectacles culturels).

Pour un recentrement des prérogatives de la puissance publique

– Le Ministère de la Culture n’a pas vocation à se faire organisateur de manifestations et producteur de spectacles, ce n’est ni son rôle, ni sa compétence, il doit s’en désengager ;

– Il lui revient de créer les conditions nécessaires à la professionnalisation et à la vitalité du secteur culturel, et de travailler à la démocratisation de l’accès à la culture. Les priorités publiques nationales ne manquent pas !… (1)

Gérer la culture implique une ambition globale et sociétale, une volonté de refonder un secteur trop longtemps négligé délibérément.

Le secteur culturel a souffert d’un manque de stratégie et d’investissements structurants ; il a été la proie d’un clientélisme échevelé quand il n’était pas offert à l’appétit vorace et abrutissant des familles régnantes et de leurs affidés…

Les initiatives individuelles et obstinées d’opérateurs privés ou publics, louables et constructives mais fragiles et dispersées ne pouvaient suffire à combler ses défaillances.

Le Ministère de la Culture doit aujourd’hui tout à la fois recentrer et restaurer ses prérogatives véritables et ses missions essentielles. Où se nichent les priorités culturelles et structurantes du Ministère de la Culture, où sont les réformes qui traduiraient sa volonté de replacer la culture au cœur de la citoyenneté ?

Le Syndicat Tunisien Libre des Organisateurs de Spectacles (STLOP) est à la disposition des partis politiques qui le souhaiteront pour approfondir ces différents points auxquels nous accordons la plus extrême des vigilances, pour soutenir le développement de l’offre culturelle dans notre pays, sa créativité, son inventivité et son apport au monde .

(1) appuyer la création artistique ; promouvoir l’offre et l’industrie culturelle ; développer les formations artistiques et techniques ; aider à faire émerger et à équiper un réseau de salles de spectacles dignes de ce nom dans le pays ; soutenir la décentralisation des activités ; travailler à l’instauration d’une assurance sociale spécifique pour les artistes et techniciens du spectacle compte tenu des intermittences de la création ; etc.