Et d’abord d’où nous viennent ces définitions “droite”, “gauche”. Quelle est l’histoire de ces mouvements et à quelles confrontations répondent-ils?
Pour être bref et concis, c’est la grande révolution française, celle qui s’est conclue par la guillotine pour le roi, Louis XVI, qui plus que toute autre révolution a donné corps à ces définitions de “droite” et “gauche”.
A l’origine il s’agit d’un simple positionnement au sein de l’Assemblée Nationale d’août et septembre 1789. Les partisans du véto royal (qui étaient majoritairement membres du clergé et de l’aristocratie) dans la future constitution se regroupèrent à droite du président. Les opposants à ce véto se rassemblèrent à gauche. Ils furent connus sous le nom de Tiers État (ceux qui travaillent).
“Oratores”, “Bellatores”, “Laboratores”.
Globalement dans l’ancien régime féodal, la société se décomposait en trois ordres : “Oratores” ceux qui prient, le clergé; “Bellatores”, ceux qui font la guerre, la noblesse; et “Laboratores”, ceux qui travaillent.
Clergé et nobles représentaient environ 20% de la population et “ceux qui travaillent” (le Tiers État), 80%.
A voir cette répartition qui date de la fin du XVIIIe siècle on est frappé (de voir) que globalement notre société tunisienne se décompose, à peu de chose près, de la même manière.
Pour élargir la comparaison, on pourrait dire que les nouveaux “Oratores” d’aujourd’hui se bousculent derrière Ennahdha et ses soeurs jumelles que les “Bellatores” (ceux qui gouvernent, font la “guerre” sociale depuis un demi-siècle) s’entassent dans la nouvelle auberge espagnole, Nida Tounes animée par un presque nonagénaire, descendant d’une lignée des basses couches de l’aristocratie beylicale et rescapé de toutes les manigances qui ont traversé le camps des possédants depuis l’indépendance.
6500 millionnaires et 75 milliardaires!
Globalement les “Oratores” et les “Bellatores” représentent 20% de la population. Font partie de leurs troupes les 6500 millionnaires et les 75 milliardaires recensés dans notre petit pays au PIB équivalent le chiffre d’affaire de la petite multinationale européenne Orange: 50 milliards de dollars.
Les “Laboratores” représentent 80%. Ce sont tous ceux qui n’ont que leur force de travail à monnayer sur la marché du travail. Ils comprennent aussi les chômeurs, cette fameuse armée de réserve, censée maintenir une pression sur ceux qui ont la chance d’avoir un emploi. Ils incluent aussi les immigrés, un dixième de la population totale, qui ayant fait le choix de l’éxil ne sont pas moins majoritairement des travailleurs.
Donc, à partir de ce petit rappel historique toute personne, tout mouvement ou groupe ou organisation qui se veut de “gauche” doit principalement défendre les “Laboratores”, le nouveau “Tiers état”.
Tout programme vraiment de gauche doit d’abord et avant tout se préoccuper des intérêts moraux et matériels des “Laboratores”.
Les autres “ordres” ont leur représentants. Ils dominent depuis au moins un demi-siècle tous les rouages de décision au sein de l’Etat (ce sont les apparatchiks tout puissants des institutions de répression (Ministère de l’intérieur, Ministère de la défense et le puissant appareil judiciaire). Ces apparatchiks sont au service d’une nouvelle classe ploutocratique bourgeoise (les fameux 6500 millionnaires et les 75 milliardaires en dollars) et que l’on nommera la “buroisie” (hybride de bureaucratie et de ploutocrates. Ces derniers sont cosmopolites. Ils détiennent le plus souvent plusieurs nationalités (occidentales de préférence). Ils se débrouillent pour mettre à l’abri une bonne partie de leurs fortunes (45% selon Global Transparency), financent des Think Tanks étrangers pour huiler leurs relations avec les dirigeants des pays où ils disposent très souvent d’un douillet pied à terre (Hôtel particulier, bel appartement dans les arrondissements chics, etc…) Donc si l’on avait à définir qui peut se considérer de gauche la réponse serait : celui qui défend bec et ongles le monde des “Laboratores”.
Toute autre posture est une trahison de la classe des “Laboratores”.
Comment est née la gauche en Tunisie ?
A l’origine, les premiers noyaux de gauche naissent suite à la révolution soviétique d’octobre1917.
La révolution française de 1789/1795 avait donné naissance à un phénomène révolutionnaire qui balaya l’ensemble européen et dont les échos se sont répandus avec les expéditions napoléoniennes jusqu’aux confins de l’empire ottoman, en Égypte particulièrement. Cette première confrontation a fait vaciller beaucoup de certitudes dans le monde arabo-musulman quant à la place de la civilisation musulmane dans le nouvel équilibre mondial et ouvert la voie à la première remise en question du despotisme ottoman.
Mais c’est surtout la démence de la colonisation qui a commencé par l’Algérie en 1830 et couvrira presque l’ensemble du monde arabe, transformant les peuples arabes en esclaves de la colonisation franco-anglaise, qui aiguisera les premiers sentiments patriotes en faveur de l’indépendance.
La révolution d’Octobre 1917 est la conséquence de la première conflagration mondiale avec la première guerre qui verra s’entretuer ceux-là même qui, durant près d’un siècle, se sont présentés comme des êtres supérieurs, drapés de certitudes rattachées aux fondements de la civilisation chrétienne.
Les jeunes maghrébins (il y eu environ un demi million de soldats nord-africains mobilisés durant la Première Guerre Mondiale) qui furent arrachés à leurs pays pour participer à cette sale guerre d’extermination, purent se rendre compte de la prétendue “supériorité” de ceux qui les maintenaient en esclavage colonial.
C’est dans leurs rangs que vont se recruter les premiers adhérents au jeune mouvement communiste.
Naissance du mouvement communiste
Ce fut tout d’abord Mohamed Ali El Hammi, fondateur de la première centrale syndicale, la CGTT qui se retrouve embarqué dans le tourbillon révolutionnaire de l’après guerre : il séjourne en Allemagne en pleine révolution. Armé d’une formation acquise dans les universités allemandes où il s’intéresse à la question des mouvements associatifs et coopératifs, il rentre en Tunisie pour fonder le premier syndicat de travailleurs tunisiens : la Confédération Générale des Travailleurs de Tunisie. La radicalité de ses positions en faveur de la défense des intérêts des travailleurs et sa remise en cause de la domination coloniale attire sur lui les foudres de la répression coloniale qui l’oblige à reprendre le chemin de l’exil où il meurt dans un accident de voiture.
A Paris, c’est dans les milieux ouvriers d’origine coloniale (indochinois, nord-africain et africain subsahariens ) que le jeune parti communiste recrute ses premiers adhérents dont Ho Chi Minh de son vrai nom Nguyên Ai Quôc, le futur dirigeant de la révolution vietnamienne.
Ce dernier anime, autour du journal Le Paria, des cercles de travailleurs anticolonialistes. C’est là qu’en juin1926, naquit l’Etoile Nord Africaine.
Animée par de jeunes maghrébins, tels l’algérien Messali Hadj ou le tunisien Khalfallah, qui fut son premier président, cette formation politique est clairement anticolonialiste. Son programme, la libération du joug colonialiste français, et la construction d’un ensemble nord-africain, englobe la lutte à l’échelle de toute la région. Le PCF en 1924 comptait quelque 8000 membres et sympathisants musulmans sur un effectif global estimé à 60 000 adhérents. Ces “musulmans” étaient considérés par la police française comme “les régiments de choc du bolchévisme”. C’est ce qui permet d’affirmer que le communisme a eu probablement plus d’impact sur le monde musulman que sur l’Amérique latine dans l’entre-deux-guerres. Les premières mobilisations de ces “nouveaux régiments de choc du bolchévisme” se font au nom de la lutte de libération nationale que mène Abdelkrim El Khattabi dans le Rif Marocain de 1921 à 1926 date de son abdication (face au rouleau compresseur des deux armées espagnole au Nord et française au sud, utilisant très largement l’arme chimique : le gaz moutarde ou gaz Ypérite).
Thermidor stalinien et trahison de la lutte de libération nationale
La victoire de la contre-révolution thermidorienne sous l’égide de Staline contre l’opposition de gauche en Union Soviétique, va se traduire au plan maghrébin par un coup d’arrêt à la mobilisation en faveur de la lutte anti-coloniale.
Le PCF ayant connu une véritable purge de ses éléments révolutionnaires internationalistes et la victoire de l’aile stalinienne avec Maurice Thorez et ses soutiens va tourner le dos aux revendications d’indépendance en expliquant que les travailleurs et les masses populaires des pays colonisés devaient attendre la réalisation de la révolution en France. Celle-ci une fois accomplie libèrera les peuples colonisés. Cette stratégie était une conclusion logique de la stratégie stalinienne qui réclamait des partis communistes affiliés au Komintern de défendre prioritairement la “citadelle du socialisme: l’Union Soviétique”.
Voilà pourquoi le communisme ne prendra pas racine et restera marginal dans le Maghreb.
Nouvelles contestations du nouveau despotisme bourguibien.
Ce n’est qu’après l’indépendance qu’au sein de la jeunesse scolarisée des noyaux de renouveau militant de gauche voient le jour avec la création de cercles autour de la revue “Perspectives”. En rupture avec le squelettique Parti Communiste tunisien, ces jeunes militants sont attirés par le vent de révolte qui souffle au sein la jeunesse mondiale et qui débouchera sur les révoltes estudiantines à l’échelle mondiale des années 1967/1968.
Aux côtés de “Perspectives” d’autres militants se regroupent autour d’une revue “El Kifah” animée par des militants qui se situent dans la sphère “trotskiste”. Voilà les conditions d’éclosion et de renouveau d’une gauche qui s’affirmera spontanément “révolutionnaire”.
Renaissance du “Marxisme”!
De ce terreau naîtront les diverses tendances du spectre “Marxiste”.
De petites organisations s’orienteront vers le Maoïsme et adopteront la dénomination de “Marxiste-Léniniste”. C’est la courte période du journal “Al Amal Ettounsi”. Au sein de cette petite nébuleuse de jeunes militants vont adopter le point de vue du dirigeant de la petite république socialiste d’Albanie: Enver Hodja. Ils se regrouperont au sein d’un groupe intitulé Echoolâ” (l’Etincelle).
D’autres jeunes liés à la Quatrième Internationale et à sa section française la Ligue Communiste Révolutionnaire se regrouperont autour d’un journal intitulé: “Révolution Socialiste Arabe”.
À côté de ce spectre de gauche on trouve des courants issus du nationalisme radical: nassériens et bathistes pro syriens et pro irakiens.
Voilà le tableau du nouveau visage des forces d’opposition au régime de la dictature bourguibienne au sortir des années 1970. Ils porteront la contestation au sein de la jeunesse scolarisée et arracheront le syndicat étudiant des mains des destouriens, au Congrès de Korba tenu à l’été 1971. La répression qui s’en est suivie ouvrira une contestation qui culminera dans le mouvement du 5 février 1972, véritable petit “Mai 1968” tunisien qui mobilisera l’ensemble de la jeunesse scolarisée.
Certains des animateurs de cette contestation lisaient assidument les écrits en provenance de France sur la Commune étudiante de Mai 1968. Il faut rappeler que certains de ces textes étaient en vente libre dans les quelques rares librairies de Tunis. C’est le cas de la collection Poche Rouge et Cahiers libres des éditions Maspéro. Nous avions des titres comme “Ce que veut la Ligue Communiste”, manifeste de la jeune Ligue Communiste ainsi que les écrits de Che Guevara ou d’Ernest Mandel et de Mao Tse Toung.
Radicalisation et syndicalisation
Pour survivre à la répression l’ensemble de cette opposition après la période scolaire se dilue dans le syndicalisme celui de la centrale unique l’UGTT. C’est ce sang neuf qui va irriguer la centrale caporalisée par le Destour mais qui néanmoins à cause de son histoire particulière ne sera jamais totalement tenue en laisse par le pouvoir. Ces nouvelles recrues jeunes ont accédé aux emplois créés dans le cadre de la nouvelle politique économique libérale qui succéda à la décade de centralisme étatique dit “Socialisme destourien”, l’arrestation et la condamnation de son promoteur Ahmed Ben Salah à 10 années de travaux forcés en 1969 et la promulgation de lois favorisant l’investissement étranger dites “Loi d’avril 1972”.
C’est ce nouveau sang syndicaliste ayant déjà une expérience de la contestation scolaire qui deviendra le fer de lance des grèves qui déboucheront sur l’appel à la première grève générale à l’appel de l’UGTT, le 26 janvier 1978. Cette nouvelle séquence politique déchaîne une répression acharnée de Bourguiba contre ses contestataires. Elle voit le secrétaire général de l’UGTT Habib Ben Achour condamné aux travaux forcés, la direction du syndicat décapitée et remplacée par une direction fantoche. Des centaines de dirigeants syndicalistes sont emprisonnés et licenciés. Cette acharnement du régime de Bourguiba signe sa future déchéance.
“Coup d’Etat médical”
Après une seconde Intifada en janvier 1984, intitulée ‘l’intifada du pain” et la répression sanglante, plusieurs centaines de morts, le régime du sénile Bourguiba sera renversé par le fameux “coup d’Etat médical” du satrape Ben Ali.
Son règne est celui d’une séquence économique caractérisée par le “laisser-faire!” et le “enrichissez-vous!”. Les 23 années de poigne “ben aliste” seront mises à profit pour une mise en coupe réglée du pays par différents cercles de ce qu’on pourrait intituler la “Buroisie”, hybride de bureaucratie étatique et bourgeoisie affairiste dont la spéculation est le maître mot. Spéculation sur le foncier qui voit les prix du mètre carré de bâti passé en deux décades de 1 dinar à 1500 dinars . Cela donne une idée de la rapidité de l’accumulation. Et cerise sur le gâteau cette guerre de l’appropriation privée a produit 75 milliardaires et 6500 millionnaires qui n’ont eu de cesse de faire un étalage au grand jour, en parfaits parvenus, du fruit de leur vols et rapines.
Face à cette minorité de riches la majorité de la population s’est trouvée contrainte de survivre par la combine. A chacun son petit lot de magouilles pour joindre les deux bouts. Mais cette situation ne pouvait durer éternellement. Le chômage en général et celui de la jeunesse, en particulier, a explosé malgré les chiffres miraculeusement bas mis en avant pas le despote.
L’Intifada du Bassin minier, une répétition générale!
La paupérisation ayant pris des proportions importantes, et le système de la débrouille connaissant sa limite extrême, le cycle des luttes va démarrer dans ce fief qu’est le bassin minier de Gafsa en janvier 2008 (encore un mois de janvier qui équivaut au mai français) et se clôturer avec la chute du dictateur le 14 janvier 2011, fruit d’une insurrection qui reconnut son premier martyr en Mohamed Bouazizi le 17 décembre 2010. Ces luttes se généraliseront à l’ensemble du pays, le bloquant littéralement, contraignant les clans et cliques au pouvoir à sacrifier l’aile la plus honnie pour tenter de ramener le fleuve de la contestation à un niveau maîtrisable. Mais la dynamique de la mobilisation des masses et les victoires sur les forces de répression en dépit des multiples vies fauchées (estimées à plus de 300) ont finalement désorienté les différents appareils de répression en bloquant leur capacité de nuire. La fuite du despote ouvre une vraie période de double pouvoir. Les clans et cliques de l’ancien régime tentent de retrouver une unité face à la déferlante contestataire. En face le mouvement de masses tente aussi de se structurer.
Kasbah1 et Kasbah 2
Mais un demi-siècle de dictature ininterrompue ne peuvent être effacé comme par magie. Malgré l’énergie débordante des forces de la jeunesse révolutionnaire qui fait tomber en moins de trois mois deux “attelages” gouvernementaux (les mobilisations connues sous le nom de “Kasbah 1” et “Kasbah 2”), les forces contre-révolutionnaires finissent par s’accorder sur le moindre mal que serait une séquence électorale. Celle-ci sera conduite de main de maître par un ancien cacique de l’ancien régime Béji Caïd Essebsi. Il commence d’abord par liquider le rassemblement des forces mobilisées autour de l’UGTT et des forces de gauche rassemblées dans le Front du 14 janvier au profit d’une commission dont les membres sont cooptés. A la tête de cette commission est nommé un professeur de droit constitutionnel, homme du sérail qui aura la haute main sur cette assemblée hétéroclite. Celle-ci nomme une structure indépendante pour l’organisation et la supervision des élections à la Constituante et dont le représentant est un vieux militant de l’aile albanaise des marxistes-léninistes (Echoola), grand ordonnateur dans l’émigration, d’associations de luttes pour les libertés démocratiques.
Béji Caïd Essebsi en profite pour ouvrir largement les vannes : ce sont plus de 130 partis qui se déclarent au Ministère de l’Intérieur. Certains de ces pseudos partis n’ont même pas de locaux ou de militants. Cette stratégie du trop plein visait à faire perdre leurs repères aux futurs électeurs qui à l’occasion des élections se sont retrouvés avec des centaines de listes se portant candidates à la Constituante. La gauche radicale qui s’était rassemblée en février 2011 au sein du Front du 14 janvier a préféré se disperser à l’occasion des élections. Elle sera affublée du sobriquet infâme de “Sfir Facel”, (zéro virgule).
Victoire d’Ennahdha et luttes sociales ininterrompues
Le résultat de cette dispersion entre des dizaines d’organisations de gauche a profité à Ennahdha qui a su contenir ses composantes et aller aux élections de manière unie. Elle a ramassé la mise en arrivant bonne première avec environ un tiers des élus la Constituante. C’est ce qui va lui permettre de s’allier à deux autres regroupements, le CPR du futur président provisoire, et Ettakatol du futur président de la Constituante, et ainsi de former un gouvernement et accéder aux affaires.
L’année 2011 n’est pas qu’une année de joute électorale.
Cette année et la suivante ont vu une véritable déferlante sociale avec 36 000 actions comptabilisées. La presque totalité des secteurs du public comme du privé ont conduit des grèves, des sit-in, des occupations. Et dans la plupart des cas, ces mobilisations se sont conclues par des victoires : embauches définitives de salariés précaires, augmentations des salaires, respect du code du travail, dans certains cas on a vu des responsables, d’administrations ou de secteurs démissionnés et replacés par un mouvement de protestation reprenant la formule qui a réussi concernant l’ancien dictature: “Dégage”.
Ces deux années laisseront des traces indélébiles dans la mémoire des salariés, des ouvriers, des employés. Les chômeurs, en particulier porteur de diplômes, aussi se sont structurés à l’échelle régionale et nationale pour appuyer leurs revendications à l’emploi : ils ont obtenu une allocation mensuelle correspondant à peu près à un SMIG.
Ennahdha et l’ingratitude des baronnies étatiques de la “buroisie”
Deux années écoulées depuis les élections du 23 octobre 2011 ont apporté la preuve que les anciennes baronnies au sein de l’Etat allaient faire de la résistance à toute transformation. Il faut reconnaître que Ennahdha n’a à aucun moment cherché à briser le cercle de fer qui a plombé ses velléités de réformettes. Bien au contraire, elle a tout fait pour rassurer et amadouer les patrons et les tenanciers de baronnies de l’Etat. Elle a même pris un malin plaisir à devancer les désirs de la “buroisie” en libéralisant l’économie, en édictant un nouveau code des investissements offrant la part belle au capital national et étranger. On peut même affirmer que si beaucoups en rêvaient du temps de Ben Ali, Ennahdha l’a fait une fois aux manettes de l’Etat.
Mais ce que n’a pas réussi, Ennahdha, c’est calmer le jeu social.
Rien que sur les 8 premiers mois de 2013, on a comptabilisé plusieurs centaines de grèves dans le public comme dans le privée, avec des entreprises de plusieurs milliers de salariés menacés de lock out par leur patron.
C’est pour cette raison que les baronnies de l’Etat ainsi qu’une grande partie du patronat se sont ligués pour tenter d’écarter Ennahdha.
A cette intention, il se regroupèrent encore une fois autour de l’ancien premier ministre, le presque nonagénaire Béji Caïd Essebsi en fondant une nouvelle organisation Nidaa Tounes (L’Appel de la Tunisie) qui sonne comme le fameux Forza Italia du richissisme Berlusconi. Le ban et l’arrière ban de la “buroisie” vont retrouver le chemin de la maison commune. Ils furent rejoint par toute une ribambelle d’ex-membres de différentes organisations de la gauche stalinienne et maoïste ainsi que d’ex- bureaucrates de l’UGTT. Ces retournés apportaient une caution de “gauche” au rassemblement de BCE.
Naissance du Front Populaire et élimination de deux de ses dirigeants
Face à cette bipolarisation Ennahdha/Nida Tounes, des franges de la gauche radicale ont pris la sage décision de se rassembler de nouveau dans un Front qui rompe le coup à la contre-révolution rampante.
La Front Populaire est né en octobre 2012. Son programme déclarait clairement refuser la bipolarisation et optait pour la continuation du processus révolutionnaire. Son mot d’ordre central affirmait son opposition à Ennahdha et à Nidaa.
L’appel d’air que cela créa, amena en masse des jeunes et des moins jeunes, des organisés et énormément d’indépendants à le rejoindre.
Beaucoup de militants avaient fait une désagréable première expérience dans les organisations qui appartiennent au spectre institutionnel. Dégoutés par des partis godillots, ils rejoignirent le Front Populaire avec la ferme volonté de participer à une organisation de combat pour la révolution.
C’est cet état d’esprit qui animera les premiers mois de l’activité de ce front. La peur dans le camp de la réaction a été tel que s’en suivi un premier assassinat d’un des plus prestigieux dirigeants: Chokri Belaïd, le 6 février 2013. La mobilisation monstre à l’occasion de ses obsèques et les deux journées de grèves générale décrétée par la centrale syndicale UGTT était un moment propice pour abattre le gouvernement de Jébali et de la Troïka. Car si le doute persiste sur l’identité exacte des donneurs de l’ordre d’assassiner, la responsabilité politique du gouvernement Nadhaoui ne faisait l’ombre d’un doute.
Le premier ministre Jébali dans une manoeuvre dilatoire se déclare démissionnaire et prêt à conduire un nouveau “gouvernement de technocrates”. L’affaire est très mal conduite par la direction du Front Populaire qui rejette cette option mais ne présente aucune alternative crédible en vue de damer le point de cette manoeuvre. Les pourparlers dans les coulisses trainent en longueur et finissent par voir Ennahdha imposait son ministre de l’Intérieur, Ali Larayedh en lieu et place de son premier ministre. Ce jeu de chaises musicales permet à Ennahdha de gagner du temps, elle cède en apparence à une vague revendication de l’opposition et nomme à l’intérieur, aux affaires étrangères, et à la justice des têtes sensées être “neutres”. L’entourloupe consiste à former autour du nouveau premier ministre Larayedh un véritable cabinet bis avec rang de ministres auprès du premier ministres pour les recalés du gouvernement. On retrouve ce cas avec l’ancien ministre de la justice Bhiri. La ficelle est un peu grosse, mais la mollesse de la riposte de l’opposition aussi bien institutionnelle que du Front Populaire laisse le champ libre aux manoeuvres dilatoires d’Ennahdha et de sa Troïka.
Six mois plus tard, en plein été, fin juillet, un deuxième dirigeant prestigieux: Mohamed Brahmi est abattu avec les mêmes méthodes par de lâches assassins. De nouveau la responsabilité politique est clairement établi et c’est Ennahdha qui est désignée sans l’ombre d’un doute. La mobilisation en ces mois de canicule est exemplaire. La revendication qui soulève tout le monde: que Ennahdha rende son tablier gouvernemental et que les constituants soient contraint à la démission.
Front Populaire ou Front du Salut National ?
Et de nouveau la responsabilité du Front Populaire auquel appartiennent les deux martyrs est grande.
Ses principaux dirigeants réuni dans un cartel de direction, loin de garder toute l’autonomie et l’indépendance au Front Populaire dans les larges mobilisations qui s’enclenchent sans discontinuité, préfèrent le saborder dans un Front contre nature avec ceux que nous désignons clairement, la veille, comme nos ennemis : Nidaa Tounes.
Ce tournant privilégiant une thématique “social-patriote” et pour “l’union sacrée” donne naissance à un fameux et fumeux “Front de Salut National” (FSN).
L’erreur des dirigeants du Front Populaire est d’imaginer griller les étapes, eux qui sont adeptes du respect de la formule “l’étapisme”, grâce à une alliance avec les “ennemis secondaires” en finir avec “l’ennemi principal”.
Le crétinisme de nos dirigeants frontistes étaient de ne même pas prendre la peine de se munir d’une “grande cuillère pour s’attabler avec le diable” comme aurait dit Lénine.
Non seulement, ils ont semé le désarroi au sein de leurs troupes, mais pire, ils se sont mis à avancer des mots d’ordre dangereux pour la continuation de la révolution. Ils se sont drapé d’un discours patriotique en défense de l’armée et des appareils de répression semant l’illusion que ces corps, dont la spécialité première est l’écrasement du mouvement social, pouvaient comme par enchantement devenir “neutres”. Pire, ils ont cru devenir des partenaires incontournables des représentants de la “buroisie”.
Et le fait que les représentants des divers impérialismes daignent se rendre dans leurs locaux était pour eux sujet de fierté.
Pauvres dirigeants qui semblent être totalement ignorant des leçons de l’histoire et qui répètent, cette fois-ci en farce, les mêmes errements de leurs ainés social-démocrates ou staliniens de l’avant et de l’après guerres mondiales.
Nouvelles séquences de la révolution
A l’occasion de la nouvelle séquence révolutionnaire qui secoue l’ensemble de notre inter-nation arabe depuis l’hiver 2010/2011, nous nous retrouvons confrontés à des questions similaires à celles que nos anciens ont du affronter.
Alors même que l’étincelle démarrant en Tunisie s’est propagée à l’ensemble arabe indiquant par là même le champs de la lutte et son périmètre, aucune initiative n’est venue donner corps à une centralisation des luttes à cette échelle géographique.
Alors même que tout indiquait que le tempo de cette révolution ne pouvait être saisi à l’intérieur des frontières des Etats nations, fruits du découpage colonial, d’aucuns continus à défendre une vision étriquée tournant le dos à la simple géopolitique régionale.
Alors même que les évènements récents du coup d’Etat de l’armée égyptienne sous la conduite du général Sissi et la destitution et l’emprisonnement du président Morsi étaient, (on le sait bien maintenant), préparés de longue date par les cercles des partisans de l’ancien régime (on a même libéré Moubarak pour mieux appuyer symboliquement le sens du coup d’Etat), nos “démocrates” et nos “frontistes” partisans du Front de l’Inkadh (le Salut) tunisiens, continuent a bénir le coup d’Etat rampant des partisans de Ben Ali.
Pour conclure, une gauche vraiment de gauche doit d’abord refuser comme la peste toute alliance avec les nouveaux/anciens clans de l’ancien régime.
La révolution est un moment où les masses laborieuses populaires prennent directement leur destinée en main.
Le peuple n’est pas métaphysicien
Le peuple des “Laboratores” n’est pas métaphysicien. Les formes nouvelles qu’il découvre dans la lutte ne sont point une création de l’esprit, une oeuvre de doctrinaires, mais le dur apprentissage des luttes, de ses victoires comme de ses défaites.
Marx le militant et c’est l’une de ses principales trouvailles avait affirmé que pour que ceux “qui ne sont rien”, les prolétaires (ce terme est plus que jamais le terme approprié pour décrire les nouvelles classes exploitées: salariés, “Yaoumistes”, paysans pauvres, jeunes diplômés ou sans diplômes chômeurs, femmes au foyer) “deviennent tout”, il n’y a pas d’autres chemins que celui du déchiffrage dans les luttes des hiéroglyphes de leur émancipation.
Autrement dit, il n’y a pas de raccourci pour mobiliser consciemment les larges masses laborieuses populaires. C’est dans les mobilisations et les luttes que ces derniers font l’apprentissage et le façonnage des instruments de leur libération des griffes de l’exploitation et de l’oppression.
Ils ne peuvent simplement ingurgiter un programme et des mots d’ordre (fussent-ils les meilleurs!) rédigés par une avant-garde auto-proclamée.
Cela devraient refroidir tout ceux qui se pensent “meneurs de troupes” et “dirigeants infaillibles”.
Ce sont les 36 000 actions menées depuis bientôt trois années du déclenchement de l’insurrection hivernale 2010/2011 qui laisseront des traces indélébiles dans la têtes de celles et ceux qui ont menés ces luttes et obtenus des victoires nombreuses. Elle seront à la base de l’auto-organisation qui dirigera l’assaut final contre la citadelle de l’Etat dictatorial qu’il faudra non seulement prendre mais aussi défaire et reconstruire sur des bases totalement inversées: de la base au sommet.
Une gauche vraiment de gauche ne devrait avoir d’autres préoccupations que d’aider à créer les ponts nécessaires pour unifier le monde des “Laboratores” (les nouveaux prolétaires). C’est à cette tâche que la gauche devra se consacrer pour réaliser la prise du pouvoir par ces derniers.
Tout le reste n’est que bavardage.
un article qui se veut profond. qui veut parler de la gauche, mais qui n’en connait rien.
Tu peux blablater 3 ou 4 autre pages, ça ne changera rien.
agree.
After reading carefully this article, I still can’t answer the question: what is tunisian left ?
hope the author may answer the question in just one line.
Ce commentaire est méchant ! hum … car il est très en dessous de la réalité. Le style est ronflant, lourd et assez imbuvable. Le fonds est complétement en harmonie avec le style : d’un autre temps. Cette comparaison avec les 3 corps de la révolution française une gageure que seule cet auteur était capable de réaliser.
Il y a une frustration qui transpire à chacune des pseudos démonstrations. Un soucis sans doute de reconnaissance par cette gauche qui essaie d’avancer, qui se trompe probablement parfois mais qui essaie et qui met à mal les limites de la tolérance de l’auteur quand à son appartenance à cette même gauche.
Finalement, un texte rigolo.
Les laboratores du 18eme étaient les bourgeois(riches commercants) et sûrement pas les fermiers pour lesquels il aurait fallu instaurer un quatrième Etat.
Je ne comprends pas comment on peut identifier Ennahda (et par extension les croyants?) au clergé français jusqu’au début du 20ème siècle.
Une coquille a malencontreusement déformé le nom d’un des fondateurs de l’Etoile Nord Africaine. Il s’agit de Khairallah, Chedly de son prénom. Il fut l’un des fondateurs du mouvement anticolonialiste et l’un des ses principaux animateurs jusqu’à l’arrivée de Bourguiba, au milieu des années trente, qui fera le vide autour de lui en éliminant ceux qui pouvaient lui faire de l’ombre: Khairallah Chédly, El Matéri Mahmoud etc…
A ma connaissance, les Tunisiens dans leur immense majorité n’ont pas l’expérience des mobilisations sociales, hormis quelques secteurs d’activité ou existe une tradition de syndicalisation et de luttes syndicales. Cela explique-t-il le relatif insuccès des tentatives de mobilisations initiées par la frange activiste des mouvements de gauche, ces derniers temps?
La société civile, si tentée qu’elle a quelque existence, semble apathique et observe avec dépit ou contentement selon les sympathies politiques, ce qui se déroule sous ses yeux sans véritable réaction.
On a le sentiment que seule la classe politicienne est en remue-ménage se disputant autour du cadavre d’un pays au bord de la banqueroute économique, et sans perspective tant les vrais enjeux demeurent ignorés au profit d’une lutte des places.
La formation d’un Front de Salut, regroupant des gens de l’extrème gauche jusqu’aux caciques du Destour ou du RCD ne semble pas mettre en péril le rasemblement Islamo-conservateurs qui poursuivent leur projet “révolutionnaire-conservateur” sans trembler.
L’UGTT, seule en mesure d’y faire barrage, a choisi de composer avec l’existant et met son talent au service d’un “Dialogue national” qui a bien du mal d’accoucher d’une quelconque solution de rechange. Au contraire, on pourrait soutenir qu’il fait la part belle aux islamistes à se cantonner dans ce role, en compagnie d’autres comme le syndicat patronal. On en attendrait qu’il exerce une pression suffisamment forte pour faire plier les récalcitrants, puisqu’il dispose de moyens et de capacités qu’il pourrait mettre dans la balance.
Nous verrons ce que sera sa position au-delà de l’échéance -après bien d’autres- du 14 décembre.
L’UGTT est attendu, et ne devrait pas craindre les critiques de ceux qui trouvent leur compte à pourfendre toute revendication des salariés, car leurs intérèts sont bien garantis par les tenants du pouvoir.
Mr Aouina, Vous pensez qu’un vrai gauchiste doit absolument declarer une guerre sans concession aux autres franges de la societe et organiser la prise du pouvoir par les masses laborieuses? haka? et comme le peuple n’aime pas la metaphysique, il faut “organiser” les ouvriers pour qu’ils “lancent l’assaut final contre la citadelle de lEtat et reeorganisent le pouvoir du bas vers le haut” manu militari…Il en resultera quoi? pas de democratie selon moi. une tres laide dictature communiste comme il y en a bcp.
En réponse à Bob; si ma littérature qui “transpire tant la frustration” vous donne un tantinet la joie de la rigolade, elle aura néanmoins accomplie une action de salubrité publique.
Volvert soulève des questions plus sérieuses et je tenterai d’y répondre. N’oublions pas que nous avons vécu durant un demi siècle sous la férule d’une dictature féroce de Bourguiba et son séismeBen Ali. Il n’y a que les fils et filles du bâtard en question qui ont passé leur vie à jouir des délices de cette période exceptionnelle où le maître mot fut “Enrichissez-vous!” qui peuvent nier l’évidence.
Ils n’arrivent toujours pas à comprendre le séisme qui a frappé notre pays et la région de la nation inter-arabe parce qu’ils ne peuvent saisir cette évidence: le cycle d’accumulations, de vols et de rapines est bel et bien clôt. Nous ne pourrions plus avoir dans le proche futur un cycle similaire dû essentiellement à la spéculation foncière, le passage de 1dinar à 1500 dinars le m2 voir plus pour le foncier. C’est fondamentalement autour de cette question que se sont construites les immenses fortunes composant les 75 milliardaires et les 6500 millionnaires que compterait notre petit pays. Le deuxième levier fut le levier bancaire. Nos milliardaires ont tous, soit en totalité, (comme Ben Yedder et Amen Bank et Assurance) soit en partie (Mabrouk et la BIAT), un levier bancaire pour démultiplier leurs levées de fonds (le fameux ratio des petits pourcentages entre 3% et 8%qui font le miracle de lever 100% de crédit). Se remémorer la féroce bataille menée par Belhassen Trabelsi pour racheter les 13% de la Banque de Tunisie.
Donc pour me résumer, il y eu une période de trois décades où notre “Buroisie” (hybride de bureaucratie étatique et de camelots de l’accumulation primitive) ont fait le tour de la question du cycle de reproduction du capital investi dans les domaines les plus lucratifs: la bouffe, parce que c’est bien connu que l’on ne peut pas se laisser mourir de faim, la tourisme de masse parce que c’était en vogue, le bâtiment parce que la fièvre de la construction est devenue la drogue dure répandue à l’ensemble des classes sociales, tout le monde désirant avoir son “chez soi”; ensuite vint la mode de la résidence secondaire et tertiaire, les modes d’aménagements et les piscines pour en mettre plein la vue à son voisin.
Dans ces trois domaines: bouffe, tourisme, bâtiment, on a épuisé le filon. Bien sûr, je n’oublie pas la privatisation de l’enseignement (écoles, lycées, universités privés), celle de la santé (cliniques privées), les joint ventures pour ce qui est de fabriquer toute sorte de quincailleries avec des partenaires étrangers, et enfin l’agrobisness (vol de terres des paysans pour les cultures d’exportations).
Là aussi les limites sont de nature géographiques et géopolitiques.
Les contingences de territoire, le fait que les frontières voisines, celle de cette Afrique du nord restent aléatoirement ouvertes (environ 5 petits pour cent d’échanges entre voisins maghrébins) complique la vie des plus malins qui auraient bien voulu exporter leur savoir-faire au-delà de nos frontières. Et cerise sur le gâteau, l’Europe à laquelle nous voulions nous arrimer est entrée dans une crise systémique de longue durée où comme le Japon nous ne verrons pas un retour d’éclaircie avant bien longtemps.
Voilà l’état des lieux tel qu’il est et non tel que d’aucuns le mythifient.
C’est le soubassement de la révolution en cours. Libres à ceux qui veulent (théologiens et laïcs) se perdre en conjectures et en bavardages. Nous devons, nous les révolutionnaires nous coltiner cette réalité pour construire un projet alternatif.
Il ne pourra pas s’élaborer et se réaliser concrètement, au contraire de ce qu’affirment les officines internationales (Banque Mondiale, FMI, etc…) sans un minimum de centralisation issue d’une planification démocratiquement élaborée et mise en oeuvre (en tenant compte des contingences écologiques).
Nous pouvons creuser ensemble, démocratiquement, trois domaines:
L’eau: parce que sans cet élément, il n’y a point de vie possible. Mettre en place des filières de captation, de récupération, de stockage, de dessalement, d’utilisation rationnelle et d’épuration.
La terre: veiller à stopper ce crime organisé qui consiste à spéculer sur la terre. Arrêter de bâtir sur les terres arables et criminaliser tout dépassement. Réhabilité la primauté de la satisfaction des besoins de l’ensemble de la population en produits de la terre produits de manière biologique et stopper la gabegie d’une agriculture tournée vers l’export qui épuisent de manière débile les réserves fossiles d’eau. Réhabilité les plants et les animaux dont les souches ont mis des siècles à s’adapter et mettre un frein à l’importation de plants et d’animaux non adaptés. Réhabilité le travail des paysans en leur garantissant par des allocations appropriées une vie digne. Ceux qui nous nourrissent ont des droits inaliénables qui doivent être garantis par la loi.
Le soleil: planifier un vaste chantier de réhabilitation des logements populaires pour isoler de manière écologique des logements construits avec des matériaux non isolants. Planifier un vaste chantier d’électrification générale de l’ensemble des logements avec des sources d’énergie solaire. Planifier un vaste chantier d’électrification des villes et villages avec les mêmes méthodes. Planifier un dense réseau de voies ferrées en lieu et place de la construction d’autoroutes (qui ne profitent qu’à une toute petite minorité) alimenté par des centrales solaires dans le Sahara.
Nous pouvons nous endetter sur plusieurs générations pour cet ambitieux programme. Cela est une garantie pour assurer l’avenir des générations futures.
Bien sûr ceci n’est que le squelette d’un ensemble programmatique à élaborer en commun, chacun dans sa spécialité et son domaine d’intérêt. Que le débat commence car il y a urgence.
Name fait la leçon, comme il y est accoutumé, pour contredire monsieur Aouina. La démocratie qui est le fin mot de son “argument” n’a pas de poids face à la misère où sont réduits des millions de personnes dont son ignorance ne se soucie point.
Les “démocrates” sont souvent de recrutement dans les classes aisées de la société. Ils exhibent de l’argument démocratique lorsque leur règne -celui des Bourgeois- est remis en question. Si habitués à considérer que leurs droits sont le “droit”, ils ont peine à comprendre ou accepter que l’on vienne déranger leurs certitudes et contester leur droit.
La “dictature communiste” dont on nous rebat les oreilles est bien plus douce que la dictature bien féroce de “l’argent-roi” ou la dictature de la propriété privée.
Un philosophe du 19ème siècle avait commis cette formule “La propriété, c’est le vol”. On devrait en faire un paradigme dans les terres de misère et d’injustice, comme la Tunisie.
Pour rappel, ce sont des jeunes qui se sont immolés par le feu, qui sont les initiateurs de cette “révolution” devenue un syntagme sans signification. Sinon, pour les petits-bourgeois lettrés et autres prédicateurs qui ont tendance à confondre leurs intérèts avec la Nation.
Rappelez-vous, monsieur, que cette insurrection est fille de la misère. Elle a vu le jour au prix du martyr d’une jeunesse abandonnée, niée, dont vous ètes loin d’imaginer jusqu’à l’existence, assis sur vos certitudes et convaincu de votre fait.
Au fond, c’est avec le règne d’un certain despotisme culturel, économique et symbolique que l’irruption de la plèbe sur la scène sociale vient signifier le divorce. Ce qui fut interprété dans le registre de l’inattendu, du surgissement, n’est en fait que le résultat du mépris et de l’avanie longtemps contenus, et qui attendaient l’occasion opportune de leur floraison.
Alors, on a assisté à un défilé d’opportunistes empressés de “ramasser la mise”. Et, assez vite, on a assisté au reflux de la plèbe, vite remplacée par les professionnels du verbe et les “légitimes”.
La prudence voudrait que l’on se souvienne, du coté des “beaux quartiers” et des tenants de la “légitimité” usurpée que le vent a tourné. Et, il peut tourner encore, jusqu’à emporter dans son élan irrésistible, y compris les certitudes qui se pensent inébranlables.
Ca y est on a trouvé Robespierre.
Bon courage pour construire une société équilibré avec des mohamed bouazizi, des comusite revanchard assoiffé de revanche sociale et de “dictature du prolétariat”.
Je comprends trés bien qu’il y ait de quoi se révolter des injustices sociales. Mais de la à vouloir les résoudre par le bas et par une forme particulièrement stupide de dictature qui a été un échec incroyable surtout pour le petit peuple partout où ca a été appliqué et qui on aboutit sur des régimes encore plus injustes socialement que ce que vous pouvez observer en Tunisie …
Vous êtes en retard de plus d’un siécle selon la police, 25 ans selon les organisateurs…
@volvert, loin de vouloir donner de lecon a personne, je commente la ou je remarque un desequilibre trop saillant. sinon, il n’y aurait pas besoin de commenter. Bon, evidemment que je ne suis pas d’accord avec ce que vous ecrivez mais ca m’arrive aussi de pas etre d’accord avec mes amis les plus proches. Le plus important est de savoir cohabiter en paix. La Tunisie est sensee etre une republique democratique depuis 56. avant de tenter le diable, commencons par instaurer cette democratie dont on est sense avoir joui tout ce tps. Un gvt de gauche s’il est elu pour un programme particulier aura tout le loisir de l’executer pdt son mandat. simple.
Juste un exemple très factuel et vérifiable en 2 minutes sur google (je veux absolument éviter de rentrer dans un débat par nature absurde lorsqu’on parle de politique du 21eme sur le tiers état de 1791 en françe, mais sur ce point vous êtes aussi sérieusement “à la masse” …).
vos 75 milliardaire n’existent pas, désole de vous décevoir !
vous avez du lire ceci par exemple
http://www.businessnews.com.tn/details_article.php?temp=1&t=520&a=33788, hors d’une par le chiffre est 75 pas 70 (bon ça on s’en fout) mais surtout il ne s’agit pas de milliardaire mais de personnes dont le patrimoine dépasse 30 millions d’USD (et ça ca fait une sacré différence) (1 à 30 ça commence a faire beaucoup …) .
Quiconque d’un peu au prise avec la réalité aurait questionné ce chiffre absurde et aurait a minima creusé et l’aurai vérifié. Vous vous l’avez pris brut, vous l’avez même amplifié comme vous l’avez fait pour tous les concepts historiques, sociaux ou religieux que vous manipulez dans ce poste.
Bref, vous êtes a coté de la plaque d’un ratio de 30 pour 1.
Je ne suis pas l’interprète de monsieur Aouina, ni son assistant, mais lui opposer “la dictature du prolétariat” pour invalider son idée de “renverser” l’ordre des hiérarchies sociales est injuste.
Je crois qu’on peut soutenir l’hypothèse que cette idée a un sens. En effet, s’il s’agit de quitter
un mode pyramidal d’organisation sociale et politique où le sommet décide pour la base, et redonner à cette base -par un procédé délibératif du 1 égal 1- voix au chapitre, autrement que par un vote consistant à confier à des professionnels et technocrates les clés du pays pour des années, ce serait revenir aux origines de la démocratie (cf Athènes du 5è siècle avant J.C.).
La démocratie représentative est, certes, le moyen de faire place à la délibération et l’expression des intérèts divers et contradictoires. Elle montre, en revanche, ses limites à ne pas parvenir à éviter l’installation d’une “quasi-classe” de professionnels vite pris dans les rèts du pouvoir et s’instituant comme proprétaires de la légitimité au service d’une catégorie ou d’un groupe .
Moses Finley montre assez clairement, dans le cas d’Athènes, comment cette démocratie “directe” ou de base n’a pas empèché les nantis et les proprétaires d’y prendre une plus large place, bien au-delà de leur poids réel.
Comment instaurer une société capable de prendre en compte tous et tout le monde, sans sombrer dans une dictature des nantis ou d’une classe, fùt elle majoritaire en nombre?
C’est aux peuples d’inventer leur monde, et leur mode d’organisation sociale et sociétale équitables, sinon justes.
Chacun, de sa place, est comptable de ce qui va advenir en Tunisie. Le moment est propice, au moins, à la réflexion. Ceux qui le peuvent, le font par l’action.
Disons que, pour commencer, le discourt de monsieur Aouina est d’un extrémisme qui n’a rien a envier aux partisants d’ansaar al charia, tant dans la forme (utilisation d’information fausse, présentées de façon trompeuse et caricaturales) que dans le fond (désignation d’ennemis héréditaire a abattre, formation de catégories homogène destinées a s’affronter, fantasme de l’oppression et nécessité d’épuration) . Seul le référentiel change.
Concernant le systéme politique, dans une société moderne, il y a besoin d’un certain professionnalisme puisque les questions a régler sont non triviales et demandent une conscience politique développée, une maîtrise technique de multiples aspect juridiques, economiques, géo politiques et institutionels, et naturellement du temps de cerveau disponible. La question de savoir comment on évite à ces professionnel de ne défendre que leurs interet propre est une question tout a fait pertinente qui n’est par réglée, je vous l’accorde.
Mais pour un pays comme la Tunisie, qui reste très loin des strandards européens, je suggère d’abord de s’y aligner, et ensuite on réinventeras le monde, sur des bases plus solides que des tergiversation d’extrêmistes en plein délire…
…” mais surtout il ne s’agit pas de milliardaire mais de personnes dont le patrimoine dépasse 30 millions d’USD”.
moi j’en connais un qui dépasse ce chiffre. Le marchand de viande Frikha ( Syphax et al …).
quant à Ben Ali Baba , sa fortune personnelle estimée par le magazine US Forbes, s’élève à US $ 6 b. juste avant sa chute. Un vrai miliardaire en $$$$ …………
La complexité des problèmes ne justifie pas, me semble-t-il, hors le recours à leurs compétences pour servir un Etat garant de l’intérèt général, de leur confier (aux professionnels de la politique ou ceux qui en font profession) le sort du pays.
Précisément, en Occident, l’on déplore le retrait du Politique face aux gestionnaires qui partagent quasiment tous le mème paradigme économiste (comprenez libéral, maintenant appelé néo-libéral) et gestionnaire (cf. La société malade de la gestion, Vincent De Gaulejac).
La Tunisie n’a pas vocation à réinventer Le Monde, mais doit, à mes yeux, inventer son monde. Elle n’a pas à s’aligner sur les pays occidentaux, puisqu’elle est dans la traine dans ce peloton, arrimée qu’elle est à leurs politiques et, d’une certaine manière, son sort est lié au leur.
On peut espérer qu’elle se montre plus ouverte à la coopération avec d’autres pays pour se ménager son propre espace, et délier son développement des aléas de ce continent entré en stagnation.
Enfin, visiblement, ce pays ne manque pas de “cerveau” ni de compétences. La démocratisation en cours, toute problématique qu’elle est, ouvre des possibles en terme de réformes institutionnelles et démocratiques capables de favoriser l’essor des intelligences et des pratiques nouvelles en rupture avec le népotisme. Du moins, peut-on l’espérer.
Dès lors, la pensée d’autrui serait à discuter et regardée comme contribution à l’intelligence du réel.
La bonne gestion du pays me semble au contraire un pré-requis.
Vous avez tord de dire que tous les hommes competants dans cet exercice sont alignes sur une idéologie néo-libérale, c’est loin d’être vrai.
Il y a peut être de l’intelligence en Tunisie mais surtout beaucoup de sectarisme qui tue cette intelligence, ce poste en est un exemple.
Je suis bien plus pessimiste que vous sur la démocratisation en cours. De mon point de vue rien n’a changé dans la culture publique du pays.
le POCT tunisien ne brille pas par sa democratie directe ou representative, il fonctionne exactement pareil que les autres partis et c’est la tete qui en impose au reste. Pour le “paradigme” de la classe regnante, je ne sais pas si le ps francais est un parti neo-liberal. Si Melenchon n’a pas fait plus de 10%, il n’ira pas imposer son “paradigme” par la force et sera conscient que c’est le choix des francais et qu’il doit l’accepter. Evidemment que la gauche a bcp a apporter a la societe, par le debat et les propositions de reforme serieuse. Ce discours revolutionnaire herite de l’epoque ou le communisme esperait justement s’imposer par la force n’est plus d’actualite. Le communisme doit aussi revolutionner son paradigme et son rapport au pouvoir et aux institutions ainsi que son discours, sans trahir son ame. Le tps des revolutions communistes est revolu.
J’attends que vienne un seul politique qui se réclamerait d’une option autre que le libéralisme, l’autre nom du capitalisme, aujourd’hui financier.
Quelles que soient les déclarations des uns et des autres, un pays endetté envers le FMI est contraint d’adopter cette idéologie. Privatisations, diminution des dépenses de l’Etat, coupes budgétaires dans les ministères “sociaux”…
Une “bonne gestion” n’a de sens politiquement que si elle permet des choix favorables au plus grand nombre. C’est ce que certains appellent la redistribution sociale. Par ce levier on garantit une protection sociale aux plus démunis, leur permettant d’accéder à un confort de vie digne d’un pays qui se veut moderne.
Je répond à Adrien qui se noie dans des contradictions insolubles où il prétend avoir découvert le fil à découper le beurre pour défoncer la gueule à ceux qui tentent de sauver l’espérance que ce monde ne finisse pas après un petit siècle de ravages organisés (en gros le vingtième).
Quant à la phrase de son dernier post: “Mais pour un pays comme la Tunisie, qui reste très loin des strandards européens, je suggère d’abord de s’y aligner, et ensuite on réinventeras le monde, sur des bases plus solides que des tergiversation d’extrêmistes en plein délire…”, elle dénote soit d’un esprit colonial bien trempé, c’est ce qu’affirmaient les Partis stalinisés aux peuples coloniaux en lutte pour leur libération, soit d’une crétine compréhension de l’évolution des peuples qui ne passent pas leur temps à “rattraper’ les standars de quoi que ce soit mais sautent les étapes dans un processus de développement dynamique, inégal et combiné… Tout le reste n’est que foutaise de ceux qui passent leur temps à pinailler, à fouilleter des chimères en se satisfaisant du monde tel qu’il va, à se “battre avec des aiguilles, alors qu’il s’agit d’utiliser des massues”.
Et je ne peux m’empêcher de reproduire cette article concernant un bouquin qui fera du bruit.
Un bouquin qui dérange
13 décembre 2013 | Par patrick rodel
Qui peut se permettre d’écrire aujourd’hui un livre dont le titre est une vraie provocation, à moins que ce ne soit tout simplement une ineptie : L’avenir du communisme ? Quand je vous aurai dit qu’il s’agit d’un prêtre, psychanalyste de surcroît et que le communisme ne lui fait pas peur, qu’il lui paraît même la seule solution pour sortir de l’abîme où nous sombrons, je devine que je vais déclencher des réactions indignées – du genre : “curé, lacanien, stalinien ! il cumule, le mec. Comment peut-on lire des trucs à ce point aberrants ?” Non seulement on peut, mais il faut lire L’avenir du communisme. Maurice Bellet, puisque c’est de lui qu’il s’agit, a derrière lui une oeuvre atypique et riche, qui n’est soumise à aucun sectarisme théologique, analytique ou politique et qui ne se soucie pas de plaire aux uns et aux autres. Son seul souci, sa seule exigence, la recherche d’une vérité ouverte et vivante.
D’entrée de jeu, Bellet se place dans une perspective thérapeutique. Le monde est malade, et sa maladie risque fort d’être mortelle ; le monde est fou, folle l’idéologie dominante qui prétend que tel est l’ordre des choses et qu’on n’y peut rien changer. Les plus conscients, jusqu’à présent, n’ont proposé que de mettre un peu de pommade sur les plaies des pauvres et sur celles de la planète. Personne n’ose s’attaquer à un changement radical de notre rapport au monde et aux autres – le rêve même de la révolution a été perverti par les marchands qui en ont fait un slogan publicitaire pour vendre leur merde. Nous n’avons le choix qu’entre l’attente fataliste de la catastrophe finale et la crispation identitaire et intégriste sur un passé révolu.
Mais il est une voie à explorer : celle du communisme. Non pas celui qu’a tué définitivement le stalinisme, et ses pitoyables avatars, mais ce qui, au départ, représentait une réelle” puissance de séduction et son lien à la grande espérance.” “L’avenir du communisme n’est pas la simple prolongation de ce qu’il en reste. C’est la reprise de l’espérance qui s’incarnait en lui et qui, dans la crise où nous sommes, est plus nécessaire que jamais.” (p.17) Au départ, la volonté de Marx était bien de se battre pour qu’on en finisse “avec l’inhumain, avec des relations humaines qui sont en fait destructrices.” (p.35) Ce qui l’amenait à “un réalisme qui critique à fond tous les arrangements, qu’ils soient de religion, de morale, de philosophie, qui sous prétexte de Dieu, de Devoir ou d’Idée, consentent en fait à un état de choses inadmissible.” C’est à une telle force inaugurale qu’il nous faut retourner, avec la lucidité que l’Histoire nous a enseignée et avec le courage d’une espérance plus forte que toutes les désespérances. “Du coup, ce qui s’annonce c’est un mode de pensée qui est fondamentalement instable, non parce qu’il s’égare dans la confusion, mais parce qu’il ne peut que basculer en avant.”(p.44)
Le monde dans lequel nous vivons et qui nous entraîne dans sa course insane vers un toujours plus qui ne se peut atteindre qu’en excluant une majorité d’hommes du simple nécessaire fonctionne sur le “mixage” pervers et mortifère entre la science, la technique et l’économie. Et certes sont sortis de là ce que l’on peut appeler des progrès (médecine, etc).” Mais le pire habite le meilleur. Il y croît, il y prospère, comme le cancer dans le corps humain. Il y prend la forme du crime organisé. Pas la bande de malfrats qui casse les banques, mais la banque, quand elle devient refuge de l’argent sale.”Le résultat est la mort de l’humain dans l’homme, le délire consumériste dont les plus pauvres ne sont pas forcément à l’abri, “la compulsion [comme] fixation de l’insatiable.” (p.61)
Nous voici donc appelés à une radicalité extrême seule à même de nous sauver de l’extrémité radicale vers où nous sommes précipités. Violence contre violence. Refus de l’inadmissible et ouverture vers un autre type de relation entre les hommes où se brise ” le cercle qui sans cesse se referme, enfermant les humains dans ce que le Pouvoir leur impose.” Le nom de cet autre type de relation entre les hommes est “amour”. “Au coeur de ce typhon, le seul lieu qui peut rester intact et se retrouver comme vierge, c’est cette donation toute primitive qu’aucun nom ne peut égaler, sauf le nom propre de ceux qui s’aiment.'(p.90) Ouvrir ce qui est clos, s’ouvrir à ce qui vient, à la création nouvelle en laquelle l’homme se risque – ” il y a une générosité de création, de partage, de donation qui donne à la vie un goût de jubilation.”(p.98) Belet reprend les termes compris jusqu’à présent dans leur sens démentiellement économique en leur donnant une tout autre portée. Ainsi de la croissance :”il faut croître beaucoup plus, mais dans la subversion de notre conception de la croissance, étrécie et finalement perverse.”(p.108)
J’entends les ricanements, je vois les épaules se lever – utopie que tout cela, rêve de vieillard. Utopie, oui, le terme est assumé, rêve aussi – on est ici proche d’Ernst Bloch et du Principe Espérance, proche du ressort essentiel du messianisme qu’il soit chrétien ou marxiste, proche de Levinas et de son interdit premier “tu ne tueras pas”. Et il ne s’agit pas d’idéalisme, la violence de cette conversion n’est pas occultée; ni d’angélisme, puisque c’est bien ici-bas que le combat se mène et que ce qui est à sauver c’est d’abord le corps de l’homme, de l’homme malade, de l’homme souffrant. “Le corps humain dans sa complexité, est plus riche et plus vaste que le reste de l’univers. Le corps éveillé de l’homme est le centre du monde, car c’est par lui qu’il y a un monde qui s’éveille hors de la torpeur sans fond des choses. La planète Terre vaut plus que tout ce que l’astronomie a pu découvrir jusqu’ici.”(p.120)
Vive l’homme de l’instabilité puisque lui seul est vivant et donne la vie ! sinon que reste-t-il sinon à aller rendre hommage aux temples de la consommation, acheter, vendre, des choses, se vendre, acheter celles ou ceux qui se vendent, des êtres humains, voler, violer, piller. ? Qu’est-ce que nous attendons ?
Oups une partie a sauté.
“Je répond à Adrien qui se noie dans des contradictions insolubles où il prétend avoir découvert le fil à découper le beurre pour défoncer la gueule à ceux qui tentent de sauver l’espérance que ce monde ne finisse pas après un petit siècle de ravages organisés (en gros le vingtième) par la lutte de tous contre tous par imploser définitivement.”
Quel souflle, et quelle fraicheur, monsieur Aouina! Les hommes, si englués dans la galerie marchande du monde capitaliste en oublient mème jusqu’à l’Autre. Réduits au statut de consommateurs, nous sommes emportés par le désir d’avoir, d’amasser, d’afficher “sa réussite sociale”, tous attributs synonymes de l’avoir, au détriment de l’ètre.
Comment voulez-vous que des individus atomisés, victimes consentantes d’un ordre mondial où le Dieu-argent a ses prètres et ses lieux de culte où s’accomplissent des offices qui régentent nos vies, puissent aborder aux rivages de votre monde?
La révolution véritable consisterait à rompre avec ce modèle Hobbesien qui chosifie l’Homme et le fait voir en son semblable un ennemi.
Cette révolution est encore à faire en Tunisie, comme ailleurs.
[…] بقوة ويفرض وجوده في الساحة السياسية ونظرا لأن مكونات اليسار كانت تفتقد إلى الثقة في النفس أيضا آنذاك فقد اختار […]