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Membre fondateur de la Banque Africaine de Développement (BAD), la Tunisie est son second bénéficiaire historique avec pas moins de 16 opérations et 24 assistances techniques pour un montant de 3,315 Milliards de dinars Tunisiens.

Au vu de la situation économique et politique du pays, la Tunisie a demandée à la BAD de formuler un nouveau plan de stratégie pour la période 2014-2015. La BAD a acceptée d’y répondre favorablement tout en tirant les leçons du plan d’action 2012-2013, en adoptant une nouvelle approche basée sur une recherche d’effet de levier et sur une incitation à recourir au Partenariat Public-Privé. Cet appui sera fourni par une assistance technique dans différents domaines. Cependant, l’appui financier en questionne ne sera pas supporté par la seule BAD .Il sera cofinancée par d’autres bailleurs de fonds, la priorité étant donnée à des partenaires privés. Ce plan stratégique bien que général met en évidence le rôle joué par la BAD comme « jumeau microéconomique » du FMI.

Justification de l’intervention

La BAD a établi un plan de stratégie intérimaire en tenant compte des difficultés politiques et économiques que serait amenée à rencontrer la Tunisie et a imposée des conditions de révision de son assistance, afin de faire pression sur les autorités pour qu’elles adoptent les réformes structurelles préconisées. Ces conditions de révision sont posées suite à la mauvaise gestion des fonds alloués, lors de la période 2011-2013. En effet ces fonds étaient destinés à l’investissement public, cependant que l’examen des comptes publics a clairement démontré leurs utilisation au profit des dépenses courantes.

Cette intervention s’inscrit dans la continuité des aides octroyées par le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale, ainsi que des rapports émanant des agences de notations américaines. Il en ressort que l’importance de cette aide est de « lever les contraintes microéconomiques » tout en stimulant la croissance du secteur privé. De ce fait, il a été décidé que l’intervention de la BAD, lors de cette période, soit axée sur la gouvernance et les infrastructures.

Approche et instruments

L’intervention de la BAD s’inscrit dans la continuité de celle du FMI. Celle-ci jouant un rôle prépondérant en matière macroéconomique, la BAD se positionne comme son pendant au niveau microéconomique et sera de ce fait le faire valoir du FMI dans la promotion des Partenariats Publics-Privés.

Par ailleurs, les activités de la BAD se feront sur deux horizons temporels : un premier à court terme permettant des améliorations économiques rapides (quick wins) et un deuxième posant les bases d’un nouveau modèle économique et social basé sur le Partenariat Public-Privé.

Ainsi, une assistance technique poussée permettant d’appuyer le développement inclusif du secteur privé sera fournie ce qui permettra le développement de plusieurs Petites et Moyennes Entreprises.

Développement du pilier « gouvernance »

L’amélioration des rendements privés passe nécessairement par une meilleure gouvernance. Il s’agira donc de reformer et de renforcer le climat des affaires tant au niveau national que local par différents moyens :

– Révisions des réglementations et des procédures administratives pour les entreprises.

– Améliorer la performance des structures d’appui au secteur privé.

– Développer le Partenariat Public-Privé.

– Développer la gouvernance des institutions en charge de l’éducation et de la formation professionnelle afin de former des compétences dans le secteur privé.

– Encourager une déconcentration administrative afin de favoriser les investissements dans les régions.

– Une assistance technique visant une réforme des marchés publics sera apportée par la BAD.

– A moyen terme, repenser et réaliser une nouvelle stratégie industrielle et impliquer le secteur privé dans de domaine de l’enseignement supérieur.

Développement du pilier « infrastructures »

Le soutien au secteur privé passera par la réalisation de programmes et stratégies d’investissement publics-privés :

– Favoriser le développement des activités productives dans les régions défavorisées à travers la mise à niveau des infrastructures de base (distribution du gaz naturel, développement rural et urbain et pistes) pour parvenir à une meilleure cohésion sociale.

– Appuyer les projets innovants (énergie solaire) ayant des répercussions sur l’ensemble du secteur privé en favorisant le Partenariat Public-Privé et fort valeur ajoutée.

– Réaliser une étude de marché sur les ports en eaux profondes.

– Élaborer des plans d’assainissement des eaux et développer un programme agricole intégré afin de relancer les investissements dans le secteur.

– Élaborer à moyen terme un nouveau plan relatif au secteur des transports.

Financement et risques

La BAD a mis en place trois scénarios de financement des projets. Ces trois scénarios ont été effectués en fonction des risques qu’encourt la Tunisie et de leurs évolutions. L’incertitude politique à court terme et un contexte régional instable sont des facteurs de risques, l’absence d’un gouvernement issu des urnes et avec une vision à long terme faisant pour l’instant défaut. Le risque économique est aussi pris en considération, notamment les déséquilibres macroéconomiques dont la BAD espère voir se résorber à travers la mise en œuvre du programme du FMI. Enfin, l’instabilité sociale découlant de l’instabilité politique et économique peuvent être un frein aux investissements dans certains projets régionaux.

Considérant ces risques, trois niveaux d’engagements sont prévus :

– Un premier de 13 millions d’Unité de Compte soit 33,15 millions de Dinars Tunisiens de dons et un plafond maximum de prêts de 50 millions d’Unité de Compte soit 127,5 millions de Dinars Tunisiens.

– Un deuxième de 10 millions d’Unité de Compte soit 25,5 millions de Dinars Tunisiens de dons et un plafond maximum de prêts de 50 millions d’Unité de Compte soit 382,5 millions de Dinars Tunisiens.

– Un troisième de 10 millions d’Unité de Compte soit 25,5 millions de Dinars Tunisiens de dons et un plafond maximum de prêts de 300 millions d’Unité de Compte soit 765 millions de Dinars Tunisiens.

A l’étude de ce plan stratégique de la BAD, il en ressort une tentative de mainmise sur le secteur microéconomique. En effet le Partenariat Public-Privé tant préconisé est un moyen subtil de privatisation du service public. En effet, des entreprises privées seront amenées à assurer certaines fonctions qui, dans l’ordre normal des choses, reviendraient à l’Etat. Ainsi, la notion de service public perdra son fondement essentiel au profit d’une recherche de gains frénétique, pouvant mener à un service public à deux vitesses. Nawaat a déjà publié un rapport démontrant tous les tenants et aboutissants d’un système de Partenariat Public-Privé en Tunisie.

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Ce plan s’inscrit donc dans la continuité des reformes préconisées par le FMI. Il apparaît clairement que depuis le Partenariat de Deauville, ce dernier joue le rôle de chef d’orchestre dans les plans stratégiques des autres institutions économiques internationales. Tant au niveau macroéconomique à travers l’Union Européenne que microéconomique à travers la Banque Africaine de Développement, le FMI impose, directement et indirectement, ses réformes à une Tunisie à la croisée des chemins.