Après avoir observé les programmes consacrés à la 15ème commémoration du décès de Bourguiba par Telvza Tv et Watania 1, le tour est à Nessma et El Hiwar Ettounsi Tv dans ce troisième et dernier volet réservé à leurs grilles du 06 avril 2015. Nessma vient confirmer la tendance générale alors qu’El Hiwar Ettounsi fait l’exception.
C’est en ouverture des News que la rédaction de Nessma a choisi de placer un reportage, d’une durée de 2 minutes et 10 secondes, sur la participation du président Béji Caid Essebsi à la commémoration du décès de Bourguiba à Monsatir. Et ce, bien avant deux autres grands titres du journal. Le premier étant l’agression de quelques responsables de Nida Tounes dans des réunions partisanes en régions. Et le deuxième est le retrait du syndicat de l’enseignement secondaire des négociations avec le gouvernement. Entre l’information présidentielle et partisane et l’information syndicale et gouvernementale, Nessma a tranché en considérant la deuxième prioritaire.
Un choix qui pourrait avoir du sens si le reportage en question aurait dépassé la simple actualité présidentielle étoffée d’un flot de témoignages élogieux recueillies auprès des visiteurs d’une exposition brièvement filmée et vaguement évoquée par la voix off. La mise en avant des activités du Chef de l’Etat, peu importe la profondeur de leur traitement, semble être un persistant mauvais réflexe hérité du temps où la dictature avait main basse sur les médias. Marginalisant des éléments instructifs au profit des déclarations dithyrambiques de citoyens anonymes (sans cartons introducteurs), le reportage et sa place en ouverture du journal dénote plus d’un suivi superficiel d’un événement éphémère que d’un intérêt particulier pour une question d’une importance capitale pour la mémoire collective. Cette indigence d’informations sur les festivités organisées en hommage à Bourguiba en témoigne. Ainsi donc, le sensationnalisme tend à dominer au détriment de la rigueur journalistique.
Et ce n’est pas le talkshow Ness Nessma News qui se démarque de cette tendance. L’animatrice de l’émission Mariem Belkadhi a en effet cédé son édito à Bourguiba (sic!) en diffusant un extrait de son discours historique au Palmarium. Tourné lors de ce speech donné le 15 décembre 1972, cette vidéo d’archive, d’une durée de 3 minutes et 40 secondes, est jetée en pâture aux téléspectateurs sans mention de la date ni retour sur le contexte. Encore une fois, les faits historiques et les choix politiques sont dépouillés de leur substance par un traitement sensationnel n’ayant aucun apport informatif ou cognitif.
De sa part, El Hiwar Ettounsi Tv s’est distingué par rapport à Nessma, Watania 1 et Telvza Tv (lire volet 1 et volet 2). En invitant l’historien Abdejlil Temimi dans l’émission 24/7 (41m50 à 73m40), elle est la seule chaîne parmi ses concitoyennes citées à réserver un traitement équilibré à l’événement intégrant l’enjeu de la mémoire collective dans sa réflexion éditoriale. Un choix qui s’exprime clairement avec le titre de cette partie de l’émission affichée en bas de l’écran : « Qu’est ce qui reste de Bourguiba : Ses exploits et ses erreurs ? ».
Les choix de programmation et les choix éditoriaux de trois sur quatre chaînes tv observées par ces trois articles ont dévoilé un paysage télévisuel dominé par une nostalgie aveuglée par le culte de la personnalité de Bourguiba, une perception faussée de l’histoire de la Tunisie indépendante et surtout un grand déficit d’esprit critique.
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