Il semble donc que Jalloul a repris sa déclaration de membre de Nidaa Tounes pour la transformer en intitulé de conférence dans le cadre de l’ITES, instrumentalisant ainsi une institution de l’Etat pour de la propagande partisane. La rencontre, qui a eu lieu sur le campus de l’Institut des Hautes Etudes Commerciales à Carthage (IHEC) a réuni une poignée d’anciens ministres et conseillers de ministres, dans des panels 100% masculins. Chaque paneliste est mis au défi de présenter des solutions pour sortir la Tunisie de la crise en six mois.
Seulement, et c’est sans doute fort heureux pour eux, aucun des panelistes présents ne s’est plié à l’exercice en bonne et due forme, arguant du caractère irréaliste d’une telle échéance. Toutefois, tous ont reconnu le caractère sans précédent de la crise qui touche le pays et dès lors, la nécessité de « réviser le rôle de l’Etat » ou encore « de faire table rase du mode de gouvernance actuel ». Les diagnostics en tout genre se sont succédés, bien souvent centrés sur l’économie, considérée comme le problème majeur auquel le pays fait face aujourd’hui. Jalloul Ayed, ancien ministre des Finances (janvier 2011 – décembre 2011), par exemple, résumera le problème à ses yeux en une formule : « Un secteur public boulimique, un secteur privé brimé et un secteur off-shore peu efficace ». Quant à Hakim Ben Hamouda, qui a aussi été ministre des Finances (janvier 2014 – février 2015), il pointera du doigt des dysfonctionnements du côté de l’administration, notamment « le manque de cohérence des décisions entre les divers ministères » et « le caractère éclaté de la gouvernance ».
Du côté des solutions proposées, une pléthore de réformes à entreprendre et de décisions à prendre était au rendez-vous : amélioration du recouvrement, réforme de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), lutte contre la contrebande, amélioration des infrastructures, mais encore rationalisation des ressources humaines dans le secteur public, un meilleur ciblage des politiques de compensation, plus d’investissement etc. Il était d’ailleurs assez curieux de voir à quel point les intervenants proposant des solutions prenaient souvent le soin de se démarquer voire d’affirmer explicitement leur rejet des solutions imposées par le Fonds Monétaire International dans le cadre des « réformes économiques ».
Mais en fin de compte, la rencontre avait le goût d’une valse des impuissances : le consensus règne en matière de diagnostic, mais à entendre ces anciens ministres et conseillers de ministre, la capacité d’agir, de faire, n’était pas entre leurs mains, à l’instar d’un Hammadi Jebali, chef de gouvernement se demandant « où est le gouvernement ? ». Comme si les décisions prises s’évaporaient dans l’air aussitôt décidées. La balle renvoyée aux partis, à l’étroitesse de leur vue et à leurs agendas purement électoralistes n’enlève rien au fait qu’il existe une carence criante d’analyse des dysfonctionnements au sein des administrations publiques, analyse qui gagnerait à être entreprise de manière systématique. En son absence, la valse des impuissances continue, attendant éternellement son miracle ou son homme providentiel.
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