Un vent de panique souffle sur les places boursières dans le monde depuis la semaine dernière. Ces dernières ont poursuivi leur dégringolade spectaculaire entamée depuis lundi 8 mars, enregistrant ainsi des chutes importantes au début de cette semaine avec -5,75% à Paris ,- 5,31% à Francfort, -4,01% à Londres, -6,10 % à Milan, – 9.7% à Sydney. La bourse de Tunis a cédé également à la panique générale, poursuivant sa chute entamée la semaine dernière. L’indice de la bourse de Tunis, Tunindex, a clôturé la journée de lundi, 16 mars, dans le rouge avec -4.10%. A New York, le Dow Jones a plongé de 12,93% et le Nasdaq de 12,32%. Les spécialistes évoquent un krach boursier inédit depuis le fameux « lundi noir » du 19 octobre 1987.
Dans son dernier rapport de mars 2020, l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE) mise sur des prévisions de récession à l’échelle mondiale, passant de 2,9% à 2,4% pour 2020. Les chiffres avancés par des économistes de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (Cnuced) sont plus alarmants. Ils prévoient une croissance mondiale inférieure à 2% allant jusqu’à 0,5% dans le pire des scénarios.
Chute bénéfique du prix du baril
Le budget de l’Etat pour l’année 2020 a été élaboré sur la base d’un prix de baril autour de 65 dollars. Or, avec l’effondrement des cours du pétrole, il a atteint 29.41 dollars, lundi 16 mars. La subvention des hydrocarbures est de l’ordre de 45% du budget de la caisse de compensation, sachant que la Tunisie importe près de 40% de ses besoins énergétiques. La chute du prix du baril constitue une aubaine pour la recette de l’Etat qui bénéficiera de la diminution du budget alloué à la subvention des hydrocarbures, a estimé Mohamed Nizar Yaïche, le ministre des Finances. Or, le COVID-19 n’apportera pas que des bénéfices pour la recette de l’Etat. Dans une interview accordée le 8 mars au journal El Maghreb, le chef du gouvernement a déclaré qu’il prévoit à la baisse le taux de croissance, de 1.5% à 1%. Selon Fakhfakh, cette baisse est inévitable compte tenu de la décroissance mondiale à venir.
Gestion de crise
Cette déclaration du chef du gouvernement intervient au moment où certains produits enregistrent une forte demande et sont devenus peu disponibles sur le marché. La forte demande d’ail, de gel hydro-alcoolique et de masques a entrainé la flambée de leur prix. Le ministère du Commerce a dû intervenir pour unifier le prix de vente du gel hydro-alcoolique. Ces derniers jours ont été marqués aussi par la ruée vers des produits alimentaires comme les pâtes ou encore la farine, engendrant leur pénurie dans certains commerces.
Dans son allocution du 13 mars, le chef du gouvernement a affirmé : « Je vous rassure que les circuits de stockage et de distribution travaillent normalement dans notre pays. Il n’y pas de raisons pour avoir peur ou paniquer ». Outre la consommation des produits d’hygiène et agroalimentaires, les mesures préventives contre la propagation du coronavirus impliquent l’annulation des manifestations culturelles et sportives autres événements à travers tout le pays. Cela ne sera pas sans conséquences sur les secteurs des transports, de l’hôtellerie, de événementiel, etc.
Sacré coup pour le tourisme
Les répercussions du COVID-19 se sont manifestées d’ores et déjà dans le secteur du tourisme qui constitue environ 14,20% au PIB national. Le taux d’annulation par les touristes des réservations dans les hôtels tunisiens a atteint 45%, a fait savoir Jabeu rAttouch, président de la Fédération Tunisienne des Agences de Voyage (FTAV). Attouch alerte sur la situation précaire de plusieurs agences de voyage face l’annulation massive des réservations, pouvant atteindre 100% avec des clients d’Asie ou d’Europe. La limitation des vols vers certaines destinations et la suppression du pèlerinage de l’Omra ont enfoncé également la compagnie aérienne Tunisair. Les pertes sont estimées à 46 millions de dinars, a souligné Elyes Mnakbi, le PDG de la compagnie.
L’impact chinois
La Chine est un partenaire commercial privilégié de la Tunisie. Le déficit commercial avec ce pays s’est établi à 506 millions en janvier 2020, a fait savoir la direction générale de la coopération économique et commerciale au ministère du Commerce. Le déficit commercial avec la Chine atteint 30%. Il est le premier pays responsable du déséquilibre de la balance commerciale, suivi par l’Algérie, puis l’Italie. « On importe beaucoup de produits de la Chine : matières premières, machines, accessoires, équipements, etc. Les conséquences du COVID-19 sur les échanges commerciaux sont inéluctables. La production chinoise est perturbée depuis plusieurs semaines. Idem pour l’acheminement des marchandises vers les ports et le trafic maritime et aérien », explique Karim Siala, président de la chambre tuniso-chinoise. Et d’ajouter : « Les données changent d’heure en heure. Pour le moment, on observe, non sans inquiétudes, la situation ».
L’état d’observation prévaut également du côté de la Banque centrale de Tunisie (BCT). Contactée par Nawaat, une source de la BCT indique que l’institution financière est sur le qui-vive afin d’anticiper une éventuelle crise. « Si des secteurs seraient lourdement touchés, des décisions sectorielles seraient prises par les décideurs politiques. De notre côté, nous avons prévu un plan de crise. Le faire communiquer ne fera qu’engendrer un état de panique supplémentaire auprès des acteurs économiques et financiers », avance notre source. Du côté du gouvernement, aucune annonce n’a encore été faite concernant les mesures à prendre au profit des secteurs qui seront fortement ébranlés par la crise.
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