Raja, 35 ans, mariée depuis 11 ans, commence sur un ton anecdotique par parler des conseils du médecin Rim Abdelmalek, professeure en maladies infectieuses qui avait appelé les couples à ne plus partager le lit conjugal pour éviter la contamination. « A l’entendre, on n’a plus droit à rien », ricane-t-elle. Ce n’est pas qu’elle regrette de ne plus avoir une vie sexuelle mais qu’elle juge une telle interdiction « inconcevable » entre époux. « Entre les tâches ménagères, les enfants et les infos déprimantes à la télé, ce n’est pas l’envie sexuelle qui me manque », lâche-t-elle. Ce n’est pas le cas de son mari, 42 ans. En tout cas, au début du confinement. « Au départ, on a trouvé que c’était bien de se retrouver plus longtemps ensemble. Tous les deux ne travaillant plus et étant plus reposés. Je prenais du plaisir à cuisiner. Lui à me voir plus disponible pour une relation sexuelle. Mais, on a fini par s’en lasser petit à petit. Moi de la cuisine, lui du sexe. On attend qu’une chose : qu’on reprenne notre vie d’avant », raconte-t-elle.
Proximité et isolement, armes à double tranchant
Pour le docteur Olfa Dakhlaoui Belcadhi, psychiatre, sexologue et thérapeute de couple, le confinement passe par trois phases qui « sont à peu près superposables au syndrome général d’adaptation qui est la réponse de l’organisme aux agressions auxquelles il est exposé (agent stresseur). En l’occurrence, la situation sanitaire et le confinement », souligne-t-elle. Et d’expliquer : « A la phase de début ou phase d’alarme, on peut assister à une augmentation du désir sexuel sous tendu probablement par l’angoisse d’en manquer. On essaie en quelque sorte de « s’approvisionner » comme ce qui peut se passer pour la nourriture et autres besoins fondamentaux. A la phase de résistance, on arrive à mettre en place des stratégies d’adaptation à cette « nouvelle vie » où la sexualité peut retrouver un certain équilibre. A la phase d’épuisement, généralement les capacités d’adaptation sont dépassées et des troubles sexuels peuvent se voir notamment, une baisse du désir sexuel ».
Travaillant dans l’agroalimentaire, Mehdi, 35 ans, marié, préfère parler de ses journées épuisantes entre un travail stressant en contact avec les gens et un retour à la maison qui n’est pas de tout repos. « J’ai une fille en bas âge et j’attends un autre enfant alors entre les pleurs de ma fille, la peur de contaminer ma femme enceinte et le stress général, ce n’est pas la sexualité qui me taraude en ce moment ». L’appartement de Mehdi est au dessus de celui de ses parents, alors c’est chez eux que le couple passe la majeure partie de sa soirée. « La maison de mes parents est plus spacieuse. Ma fille est bichonnée par tout le monde, je ne suis plus le seul à m’en occuper », lance-t-il, amusé. Et de poursuivre : « Comme pendant la période de la révolution, toute la famille s’est retrouvée : on cuisine ensemble, on passe la soirée ensemble, c’est plus chaleureux, plus réconfortant. On ne rejoint notre appartement que pour dormir », nous confie-t-il.
Pour Olfa Dakhlaoui Belcadhi, « l’effet du confinement sur la sexualité peut être différent : autant il peut être positif en offrant plus de temps et de disponibilité, deux composantes essentielles au désir sexuel ; autant il peut être négatif par l’état de stress qu’il induit et qui serait en revanche source de baisse de désir sexuel ». Et d’ajouter : « Les couples qui se voient obligés de vivre en permanence ensemble dans un espace parfois réduit, dans une proximité physique, peuvent voir leur désir émoussé. Ces effets dépendent également des conditions de vie : le manque d’intimité, la présence permanente des enfants ou d’autres membres de la famille et le manque d’espace propice peuvent rendre la pratique sexuelle difficile ».
Séparés mais toujours aussi proches
Pour Asma, 28 ans, et son mari, 30 ans, le Covid-19 a été l’occasion de se retrouver. Pris par le travail impliquant des voyages à l’étranger, le couple est amené à travailler à distance : « On renoue avec une proximité perdue par le travail », s’extasie Ahmed. N’ayant pas d’enfants, le couple cherche à faire passer le confinement par « des petits plaisirs en dehors du boulot », disent-ils. Ceci passe par du jardinage, la cuisine, regarder une série ou un film et des ébats sexuels plus fréquents : « On se comporte comme deux amis. C’est ce qu’on était avant le mariage. On retrouve cette phase de notre relation. Quant à la sexualité, on est tous les deux très ouverts sur le sujet. Il n’y a pas de tabous entre nous », raconte Ahmed. Pour Asma, « c’est le plaisir d’une intimité entre amoureux ». Et de lâcher : « ça permet de décompresser aussi face au stress ambiant ».
C’est ce qu’explique Dr Dakhlaoui Belcadhi : « Le sexe peut permettre d’évacuer les tensions et le plaisir peut avoir un effet anxiolytique et apaisant tant recherché dans ce genre de situation » en insistant sur le fait que le confinement ne créé par de « miracle » car la nature de la relation dépend des types de couple (fusionnel, indépendant, amical…), de la qualité de leur relation, (entente, harmonie, communication, conflits, violence…), de leur vie sexuelle antérieure au confinement, relève-t-elle. « On comprendra ainsi que la capacité d’adaptation au confinement sera plus ou moins facile, très difficile, voire source d’aggravation de problèmes préexistants », précise-t-elle. Et d’ajouter : « Le confinement est une expérience humaine exceptionnelle à laquelle on doit apprendre à faire face. On peut réinventer sa vie de couple, la penser autrement. Mettons de côté en cette circonstance les conflits et les différends pour favoriser la bienveillance, la communication et l’affection. Malgré la proximité imposée, essayons de garder chacun de son côté son espace personnel, son moment à lui, d’entretenir la séduction et de cultiver l’imaginaire érotique qui serviront de moteur au désir sexuel. La sexualité demande du temps, de la disponibilité, de la créativité. Soyons inventifs! », plaide la sexologue.
Engouement pour le porno
Le confinement général a également chamboulé l’intimité des couples non mariés. C’est le cas d’Amine, 35 ans. « J’ai une copine. Avant, je la voyais de temps en temps. Avec le confinement, ce n’est plus possible. Je ne suis pas assez aventureux pour risquer une amende de la police ou une contamination », ironise-t-il. Le jeune homme s’adonne alors aux plaisirs solitaires en ayant recours au porno : « C’est ce que je faisais avant mais, actuellement, c’est plus fréquent », se dévoile Amine. Il n’écarte pas le facteur de la solitude dans la recrudescence de ses plaisirs solitaires. « Quand tu n’as plus de vie sociale, cloîtré toute la journée seul chez toi, c’est encore plus anxiogène. Alors pour se détendre, on se défoule comme on peut », explique-t-il.
Comme Amine, beaucoup se réfugient dans le porno. Ce qui a fait grimper le trafic de l’une des plateformes les plus connues, le site Pornub. « Le trafic mondial vers Pornhub continue d’être beaucoup plus élevé qu’il ne l’était avant la propagation de la pandémie de coronavirus dans le monde », souligne le site en question, le 14 avril. Publiant des statistiques sur le niveau de trafic, Pornub enregistre ainsi un pic de plus de 25% le 25 mars dernier à titre d’exemple. Olfa Dakhaloui Belcadhi explique que la distance est « une épreuve » pour les couples vivant une abstinence forcée. « Le sexe est pour beaucoup de personnes un lien, un attachement à l’autre, une forme d’amour où les sentiments ne sont pas encore extériorisés. L’éloignement physique obligé représente alors une menace pour ces personnes ».
Elle préconise d’inventer d’autres formes d’échanges pour maintenir les liens comme « favoriser le dialogue, les échanges profonds, parler de leur intimité, de leurs fantasmes, et éventuellement partager une sexualité virtuelle à travers des sextos, des images ou des vidéos. Je voudrais également soulever un point important lié à cette situation particulière qui est celui de l’angoisse de perdre l’autre, ou de ne plus retrouver l’intimité d’avant le confinement ». Pour y remédier, elle conseille de « favoriser la communication, les échanges, les dialogues, renforcer le lien, exprimer les sentiments, les frustrations, les désirs, se projeter ensemble dans l’après confinement ».
Les victimes collatérales du confinement
Dès le début du confinement, plusieurs associations féministes ont alerté sur la hausse des violences conjugales en Tunisie. Ces violences revêtent différentes formes parmi elles, le viol conjugal. Insidieuse, cette violence est plus difficile à cerner, même par la victime, l’ayant intériorisé comme faisant partie de ses devoirs conjugaux. Ainsi, quand Raja évoque les demandes incessantes de son mari pour avoir des relations sexuelles, elle en parle comme une fatalité, mais non dénuée d’amertume. « Il est vrai qu’un moment donné, il y en a marre. Je m’occupe toute la journée des enfants, je cuisine, je nettoie et je suis stressée alors je n’ai ni l’envie, ni le plaisir à le faire. Mais il insiste. Alors, je laisse faire. C’est son droit après tout », dit-elle. La sexologue alerte sur les effets pervers de toutes formes de violences, y compris les rapports sexuels non consentis. « Le confinement est malheureusement une situation idéale pour l’agresseur pour avoir une totale emprise sur sa victime », affirme-t-elle.
Aussi alarmant que les viols conjugaux, les rapports sexuels non protégés. Dans ce cadre, plusieurs associations ont pointé du doigt « l’abandon du soutien aux structures de première ligne y compris les consultations de santé maternelle et néonatale et les services de contraception et d’avortement, aggravé par la fermeture de certains centres de l’Office National de la Famille et la Population (ONFP). Le manque de matériel de protection du personnel dans les structures de prestation de gynécologie et d’obstétrique dans le secteur public (le matériel allant en priorité aux structures dédiées aux soins pour le Covid-19), l’absence d’informations adéquates sur le virus et sur les procédures de protection, la non généralisation de la diffusion des directives et des conduites à tenir (qui n’ont pas touché tout le personnel de première ligne), ont abouti au refus de services aux femmes qui se présentent aux consultations,
Elles ont également tiré la sonnette d’alarme sur le risque d’accouchements à domicile et ce qui en découle dans le contexte du couvre-feu. Elles rappellent aussi qu’il y a 210 mille naissances par an, presque un million ou plus de visites prénatales, et environ 50% des femmes qui ont recours à la planification familiale pour la contraception dans une conjoncture marquée également par la diminution du recours à la contraception, le refus de certaines structures publiques ou privées de pratiquer l’avortement et les ruptures de stocks récurrents des pilules oestro-progestatives, de la pilule du lendemain et des produits d’avortement médicamenteux.
Bonjour les couples bien sûr qui sont proches le seront toujours confinement ou de confinement et ceux qui ne le sont pas trouveront n’importe quel prétexte pour se séparer, parceque si le covid impose une distance a respecter c’est hors foyer et si l’on veut pratiquer cela chez soi il faudrait que nos demeures aient au moins une superficie de 400 m2 et plus et cela pour 05 personnes ce qui est féerique, donc se séparera physiquement ceux qui en ont envie point /