A quelques semaines des Jeux, Amnesty envisageait de lancer une grande campagne sur les droits de l’homme en Chine. Mais celle-ci, concoctée par l’agence TBWA, a été jugée trop brutale par la direction d’Amnesty, et trop anti commerciale par celle de TBWA.

Affiche de la campagne censurée d'AI sur les JO

On reproche parfois aux publicitaires leur pondération. C’est loin d’être le cas de la dernière campagne d’Amnesty International destinée à sensibiliser l’opinion sur la question des droits de l’homme en Chine, et qui ne fait pas dans la dentelle. Concoctée par l’agence TBWA-Paris, propriété du groupe Omnicom, la campagne est visuellement superbe – brutale et sans nuances, diront certains. Elle a aussi le mérite de s’écarter très largement de la propagande traditionnelle sur les prétendues valeurs sportives diffusées d’ordinaire par la publicité : les affiches mêlent diverses disciplines olympiques et les tortures perpétrées en Chine.

Affiche de la campagne censurée d'AI sur les JOCampagne choc

L’agence à l’origine de cette campagne choc a réalisé gratuitement ces affiches. Le hic, c’est que si les créatifs ne se sont pas bridés pour faire passer le message, la direction internationale d’Amnesty, à Londres, a décidé de ne pas l’exploiter. « Le résultat ne correspondait pas aux messages que l’on essaye d’associer à notre campagne pour les JO » a déclaré récemment Josefina Salomon, porte-parole d’Amnesty, au Wall Street Journal.

Amnesty souhaitait un message plus doux

La direction d’Amnesty n’a, en effet, pas caché son sentiment de malaise face à la brutalité des images. L’association humanitaire ayant décidé en amont d’avoir une approche plus douce et plus positive – en appelant, par exemple, les autorités chinoises à des changements de comportement – vis-à-vis de la Chine à l’approche des Jeux, notamment après le tremblement de terre du Sichuan selon le site Aujourdhuilachine.com. «Douceur, droits de l’homme, Chine. Cherchez l’intrus» aurait pu dire Desproges…

Affiche de la campagne censurée d'AI sur les JOLes internautes chinois appellent au boycott des produits TBWA

Selon le site Mediapart, la campagne aurait suscité de vives réactions de la part des internautes chinois « qui enragent et appellent au boycott des produits mis en pub par TBWA à mesure que celle-ci se répand inexorablement sur la Toile». Les affiches ont d’autant plus choqué que si le marché de la publicité explose en Chine, du point de vue créatif, on en reste au niveau de la réclame. Un martèlement très très répétitif…

Une campagne primée à Cannes

Pour autant, la campagne fait déjà le tour du web et a été primée aux Lions de Cannes, ce qui a achever de placer l’agence dans une situation complexe : TBWA est également présente en Chine et l’agence ne peut se permettre de s’aliéner le marché chinois. D’autant que le secteur de la publicité chinois s’est développé avec un taux de croissance annuel près de 40% ces 20 dernières années !

TBWA: Plus jamais ça !

Pas folle, la direction de TBWA à New York a déclaré ne pas avoir été au courant de la campagne pour Amnesty avant d’ajouter qu’elle n’aurait jamais dû être réalisée. Tom Carroll, chief executive de TBWA Worldwide, a même déclaré que l’agence enquêtait en interne sur l’affaire « pour que cela ne se reproduise jamais ». Amnesty, ou comment une campagne destinée à démontrer aux opinions occidentales les atteintes à la liberté d’expression en Chine finit par apporter de précieux éclaircissements sur les ambigüités d’un capitalisme mondialisé, contraint sous les pressions commerciales de réprimer son ardent désir de communication… Un coup de maître.

Affiche de la campagne censurée d'AI sur les JO

Souce : Marianne2.fr