Nulle doute que la question pourrait générer une confusion, nulle doute qu’elle pourrait contenir déjà sa réponse… mais loin de toute approche idéologique ou un satisfecit hypocrite, il serait intéressant de s’interroger de temps en temps sur des actes ou des événements ou des positions qui semblaient acquérir une certaine « évidence » chez certains , ce qui pourrait à leurs yeux rendre toute démarche critique, nuisible et non productive ! d’autant que poser une telle question dans la conjoncture très particulière que traverse l’opposition actuellement, pourrait toucher chez certains le stade du traître et de collabo ! Toute fois la question devrait être posée par simple souci de minimiser ou d’écarter les facteurs de risque et d’optimiser toute action saine susceptible de précipiter le changement.
Etat des lieux
La confiance demeure un acte primordial dans toute alliance ou relation bilatérale entre individus ou entités, pour la réussite et la bonne marche de leur projet. La relation que voudrait établir l’opposition avec le peuple forme la pierre angulaire de toute méthodologie de construction. Un déficit dans l’accompagnement, ou un refus, constituent les prémisses d’un échec programmé. L’opposition tunisienne a-t-elle réussi à acquérir cette confiance ? L’histoire aussi bien récente que lointaine ne semble pas jouer en sa faveur, la désaffection constatée, le désintéressement d’une frange majoritaire du peuple ne peut que s’ajouter ou expliquer cette méfiance et contribuer à son amplification.
Le pourquoi demeure une question fondamentale pour initier tout projet de changement ; toute ignorance ou marginalisation de ce problème de fond ne fait que retarder l’échéance, ou de la rendre un mirage, du moins pour cette génération !
Durant deux décennies, l’absence du peuple était flagrante, l’existence de quelques îlots de résistances ne fait que confirmer la règle, le sommeil était total ou presque, et le réveil sera long, difficile, et nécessite beaucoup de patience et beaucoup de compréhension. La devise « laisser le temps au temps » semble être d’actualité !
Cette absence et ce mutisme s’expliquent entre autre par la peur et la crainte vis à vis d’un régime qui, à travers la « correction » donnée au mouvement islamiste, voudrait envoyer un signal fort à toute la société tunisienne : l’ère d’un SMIG de liberté, constatée auparavant, est révolue, la récréation est finie et une chape de plomb est tombée… la société semblait capter le signal !
Le début de la première décennie a vu passer une croissance économique, plus ou moins intéressante selon les sources officielles, le citoyen trouvait dans « la bouffée d’air » économique une possible acceptation du « manque d’air » politique , la devise « consommes et tais toi » semblait être partagée aussi bien par le pouvoir que par la majeure partie de la société.
Ces deux facteurs importants qui expliquaient cette désaffection du citoyen, s’ajoutaient à une question fondamentale restée sans réponse : « ou est l’opposition ? » Peut-on en faite se révolter, s’exaspérer, se rebeller, manifester son mécontentement, sans un guide, sans un projet alternatif, sans un minimum de confiance dans ce qui pourrait se nommer une opposition solide et crédible ?
A la recherche du soldat perdu !
Une longue nuit hivernale a généré une longue et pénible hibernation de l’opposition, le paysage politique était majoritairement occupé par un régime aux apogées de sa fuite en avant, et une opposition de façade ; l’opposition républicaine a quitté les lieux, certains ont fuit le territoire par crainte de représailles, d’autres ont préféré y rester en assurant un minimum du parler vrai malgré l’hégémonie de l’arbitraire.
Pendant tout une période l’opposition était à la recherche de soi, occupée surtout par des questions byzantines et un dialogue de sourds, qui apparaissaient fondamentaux pour certains : peut-on inclure les islamistes dans un projet de rassemblement de l’opposition ? La divergence des propos était flagrante, La démocratie apparaît déjà sélective et réductrice, comment peut-on alors manifester son désaccord vis à vis d’un régime autoritaire alors que notre discours contient déjà les prémisses de l’exclusion ? La crédibilité de tout un projet de changement est touchée, la confiance est malmenée, l’espoir est blessé, et l’œil du peuple veille…
L’entrée en scène de l’initiative de 18 octobre apparaissait comme un ressaisi de l’opposition, la « coexistence pacifique » entre plusieurs leaders et adeptes sous le même toit et pour une revendication commune, sonnait le glas à une série de rendez-vous manqués, la chaleur des lieux et la noble cause ont fini par convaincre les plus réticents que point de salut sans un front uni de l’opposition, point de réussite avec un esprit d’exclusion et de marginalisation de l’autre.
L’image de ce rassemblement est saisissante, le succès du mouvement a marqué les esprits et l’imaginaire des Tunisiens, ce qui rend le moindre faux pas de l’opposition générateur de conséquences terribles sur sa crédibilité et sur un éventuel changement. Pour autant peut-on crier victoire, et réclamer que la confiance du peuple en son opposition est en marche ?
Les différents messages d’encouragement et de solidarité aux grévistes, la constitution de plusieurs comités de soutient à travers tout le pays et à l’étranger donnaient l’image et la conviction que la société civile bouge, et accompagnée d’un élan de solidarité intérieur et extérieur sans précédent. Toutefois certaines zones d’ombre persistent et nous obligent à beaucoup d’humilité et de réflexion… La vérité peut choquer mais on ne peut guerre bâtir une construction saine et de longue durée sans une clarté totale dans les propos et l’action.
La société tunisienne n’était pas totalement au rendez-vous, elle n’est pas descendue dans la rue, elle n’a pas non plus boudé l’événement ; mais son absence apparente est un indice révélateur que la route est encore longue et que sa participation directe pour créer l’événement ou l’accompagner n’est pas encore d’actualité.
La confiance d’abord !
La confiance est un long fleuve, tantôt tranquille, tantôt plein d’embûches, établir la confiance nécessite de part et d’autre de la patience et de la compréhension. Le peuple tunisien commence à peine et doucement à sortir d’une longue nuit de peur et de crainte, et il faudrait entretenir cette sortie, comprendre ses limites et sa lenteur, ne pas la brusquer ni la précipiter, mais plutôt l’accompagner. Il faudrait aussi favoriser les initiatives qui pourraient engendrer l’adhésion de tout un peuple, et accepter le rôle qu’il pourrait assumer, le degrés et le niveau qu’il pourrait atteindre. Une initiative, quelque soit son importance, quelque soit sa perfection, sa beauté peut être, quelque soit ses initiateurs … ne pourrait songer à la réussite sans qu’elle tienne compte de la capacité du peuple à assumer et à réagir, des moyens qu’il dispose, de son environnement proche et lointaine, de son aptitude à accepter et à coopérer.
« La confiance ça se gagne » pour cela l’opposition est condamnée à l’union, condamnée à réfuter l’exclusion, condamnée à comprendre son peuple, ne pas heurter sa sensibilité et ne pas sous estimer son aspiration au changement. Même s’il se trompe, le peuple a toujours raison ! même s’il s’absente, il est toujours présent…
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