Le Père Marek Rybinskisalésien, économe d'une école religieuse privée située dans la région de Tunis, a été retrouvé mort égorgé et mis dans un dépôt de l’école

Par Fatma Bouamaied Ksila

Dans la nuit du 17 au 18 février dernier, dans la ville de Mannouba, un des trois gouvernorats du grand Tunis, un prêtre polonais âgé de 34 ans, Le Père Marek Rybinskisalésien, économe d’une école religieuse privée située dans la région, a été retrouvé mort égorgé et mis dans un dépôt de l’école.

Quelques heures plus tôt, un groupe d’intégristes extrémistes a organisé devant la grande synagogue de Tunis une manifestation raciste au cours de laquelle ces individus ont scandé des slogans haineux, extraits du moyen âge, hostiles à tout ce que notre révolution a réalisé de plus cher : le droit à la différence, la liberté de culte et la démocratie.

Je ne sais pas s’il y’a un lien direct entre les deux évènements, ou si ce sont les mêmes groupes obscurantistes qui ont frappé ici et là, mais tous deux portent les mêmes marques de haine aveugle qui a conduit cette fois au crime et au meurtre.

Pareils à des rats d’égout, ces individus n’existaient pas avant la révolution, preuve d’un grand courage politique que nous envions, ils vivaient comme leurs idées dans le noir, hors temps et hors histoire …. Quelques unes de nos villes et de leurs habitants les ont découvert après le 14 janvier avec leurs discours extrémistes qui ont provoqué un sentiment d’effroi parmi les populations présents, partout où ils se sont manifestés.

La Tunisie a vécu plus d’un demi siècle dans le déni de toute citoyenneté et les tunisiens qui se sont battus pour la reconnaissance de leurs droits à la liberté et à la dignité ont souffert le martyr des décennies durant et se sont vus privés des moindres droits humains. Les premiers de ces droits et de ces libertés fondamentaux sont sans doute le droit à la différence et la liberté de
conscience….Ce sont les abc des droits humains garantis par tous les textes et traités universels de défense des droits.

Et maintenant, alors que le vent de la liberté a soufflé sur notre pays brisant nos chaînes pour faire de nous des femmes et des hommes libres, mais différents et c’est ce qui fait notre force parce que notre différence est un facteur d’enrichissement et de complémentarité…..

Non, la Tunisie d’aujourd’hui ne peut cautionner un tel discours ou une telle pratique, contraire aux valeurs d’ouverture et de tolérance qui spécifient notre peuple et identifie notre pays. La réputation de notre Tunisie, terre d’accueil et d’hospitalité depuis des millénaires, a été une fois de plus renforcée par notre révolution qui appartient à toutes les tunisiennes et tous les tunisiens, sans exception, sans distinction aucune, religieuse soit-elle, ethnique ou sexuelle ….La Tunisie appartient à tous ses enfants, qu’ils adoptent l’Islam, le Judaïsme, le Christianisme ou l’Athéisme, nous sommes toutes et tous égaux et libres dans l’exercice ou non des cultes.

Et pour que des tels crimes ne se produisent plus et que des tels pratiques soient sévèrement punies , il est primordial que ces lieux hautement symboliques de culte soient protégés, ce qui ne s’est pas fait jusqu’à maintenant alors que tout le monde sait le risque encourue en cette période critique de la vie de notre pays….Le ministère de l’Intérieur assume toute sa responsabilité dans ce qui vient de se passer. Aux premières heures de la révolution, nous avons
entendu des forces de la police se défendre d’être des tueurs, tortionnaires ou milices… Où sont ces forces qui se disent prêts à servir la révolution ?….

Il est temps de se mettre au service de notre révolution et de protéger les acquis de notre révolution en garantissant la protection de nos minorités, car nous ne pouvons prétendre la liberté quand des citoyens tunisiens vivent dans la menace et la peur.

Enfin, soyons toutes et tous vigilants afin que des telles pratique qui nuisent à l’image de la Tunisie libre cessent , il y va de la crédibilité et des acquis de notre révolution.

Paris, le : 20/02/2011