Six morts et treize blessés : depuis la nuit du 15 au 16 janvier, date à laquelle la police a ouvert le feu sur la population de Ouardanine, les familles des victimes manifestent pour que des poursuites soient engagées contre les assassins de leurs proches. La procédure qui a été initiée le 19 janvier en est actuellement au stade de l’instruction.
Dès le lendemain de la fusillade, les familles ressentent un triple malaise ; car en dépit des allégations de l’armée qui dit avoir arrêté les policiers en fuite dans la ville voisine de Msaken, les habitants de Ouardanine affirment que certains des policiers qui étaient à bord des véhicules interceptés dans la nuit du 15 au 16 janvier auraient repris leur emploi. Seconde interrogation, Kaïs Ben Ali, le neveu du président déchu, que d’aucuns affirment avoir vu à bord d’un des véhicules de police, ne figure pas au rang des personnes arrêtées. Enfin et surtout, la famille de Moezz Ben Salah dit que ce dernier a été atteint par plusieurs balles, des allégations reprises par la personne qui a préparé le défunt pour les funérailles et a repéré plusieurs orifices correspondant à des impacts de balles, or le certificat médical initial délivré par le médecin de l’hôpital Fattouma Bourguiba, ne fait état que d’un seul tir « 1) L’examen du corps du nommé Moez Ben Mohamed Ben Salah a permis de montrer une plaie de la région lombaire gauche (partie basse du dos). […] 3) L’aspect de la lésion décrite ci-dessus est celui d’un orifice d’entrée d’un projectile d’arme à feu. 4) Il s’agit vraisemblablement d’un tir opéré à plusieurs mètres, dont le projectile dans le corps d’arrière en avant, selon un angle presque perpendiculaire au plan de la peau » [1]
Les familles de quatre morts et sept blessés vont porter plainte le 22 janvier.
Une somme de 20 000 000 de dinars est attribuée aux familles des défunts par le ministère de l’Intérieur dès le 26 janvier.
Témoignage de la famille de Moez Ben Salah
Le juge Jamil Ben Ayed, du premier bureau d’instruction près le Tribunal de première de Monastir, instruit l’affaire et procède à des auditions, les témoins, familles et personnes présentes sur les lieux de la fusillade de Ouardanine, ainsi que des blessés en état de se déplacer, ou des parents des blessés hospitalisés. Le 2 février, il engage des poursuites contre trois agents de la police et Kaïs Ben Ali, tous en fuite, pour « homicide volontaire et tentative d’homicide pour dissimuler une personne dont il y a lieu de penser qu’elle a commis un crime ou un délit passible d’une peine d’un an de prison, pour les premiers, et la quatrième pour participation aux faits » [3] et ce, « en vertu des dispositions des articles 32 et 204 du Code pénal » [4]
Le 2 février, le dossier de l’affaire est confié par le Procureur de la République au Tribunal de Première Instance de Sousse, en vertu de la compétence territoriale, puisque les arrestations ont été opérées à Msaken et les véhicules ont brûlé à Msaken. C’est le juge Ridha Baazaoui, du 2ème bureau d’instruction [5], qui poursuit le travail de son confrère, notamment auprès de l’armée qui a procédé aux arrestations de policiers, dont certains, blessés, ont été emmenés à l’hôpital de Sousse. Les 7 et 8 février, des policiers sont alors interrogés, accusés de « complot contre la Sûreté de l’Etat, d’attentat ayant pour but d’exciter les habitants à s’armer les uns contre les autres ou de porter le désordre, le meurtre et le pillage sur le territoire tunisien »[6], notamment, ainsi qu’en vertu de l’article 204 [7] et trois sont écroués. Leur version des événements est bien différente : « Nous sommes sortis en patrouille pour maintenir la sécurité et nous nous sommes retrouvés accusés dans une affaire d’exfiltration de Kaïs Ben Ali […] » Ils allèguent la vengeance d’un repris de justice, une attaque en règle de la population à laquelle ils ont répliqué en légitime défense. Quant à « Kaïs », ce serait le nom d’un des policiers, auquel ils se seraient adressés, d’où la méprise. Enfin à la question des six personnes décédées, ils répondent par la présence d’un « véhicule rouge » qui serait passé par là « avant ou après » eux et dont les occupants, armés, auraient tiré [7].
La colère des familles ne faiblit pas. Le 21 février, six membres de la famille de Moez Ben Salah contestent auprès du Procureur de la République près le Tribunal de Première instance de Monastir le rapport du médecin légiste faisant état d’un seul tir. Le 8 mars, les familles, excédées, investissent le tribunal.
Le dossier est alors confié à un nouveau juge d’instruction, Mondher Ben Belgacem, qui se met au travail à partir du 15 mars : il fait procéder à l’arrestation de onze policiers,-portant le nombre de policiers écroués actuellement à quatorze,- ainsi qu’à l’exhumation des dépouilles de Moez Ben Salah et Mohammed Zaabar, et ordonne une contre expertise médicale par le médecin légiste de Sousse. Cette dernière met en exergue l’ « erreur » du médecin légiste de Monastir en ce qui concerne Moez Ben Salah et confirme les affirmations des témoins et des proches du défunt quant au triple tir. Une différence lourde de conséquences et qui confirme le caractère délibéré de l’homicide. Reste à savoir pourquoi un faux a été produit.
Enfin, la quantité d’armes saisies dans les voitures de police amène le juge d’instruction à s’assurer qu’il s’agit bien, -et uniquement- des armes de service des policiers, une vérification qui est en principe simple puisque chaque arme affectée à un fonctionnaire de police est dûment répertoriée par les services du ministère de l’Intérieur.
A ce stade des investigations, il ressort également que deux des personnes décédées auraient été atteintes par des tirs de l’armée à Ouardanine, et non de la police. Dans la confusion régnante, l’armée aurait tiré par erreur sur des personnes quittant les lieux dans un camion avec à son bord des blessés pour les évacuer. Une seconde affaire devrait donc s’ouvrir, relevant de la justice militaire. Cette dernière n’a pas encore travaillé, attendant les résultats de l’instruction menée par le Tribunal de Première Instance de Sousse.
La plus grande opacité entoure toujours la présence alléguée de Kaïs Ben Ali à bord d’un des véhicules des policiers, ces derniers, comme l’armée, niant catégoriquement sa présence et partant, son arrestation. Et l’intéressé, lors d’une interview en arabe sur France 24 quelques jours plus tard, a nié catégoriquement s’être trouvé à Ouardanine la nuit du 15 au 16 janvier dernier, mais il n’a pas été arrêté à ce jour. Le 10 avril dernier, son père, Slah Ben Ali, aurait été arrêté à Sousse.
Notes :
1- République Tunisienne, Ministère de la Santé Publique, hôpital universitaire « Fattouma Bourguiba » Monastir, Service de médecine légale ; Rapport d’examen médico-légal ; ML 5144, 16.01.2011.
2- Affaire n°103/2011/1
3- République Tunisienne, Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, TPI de Monastir, Premier Bureau d’Instruction, affaire n°103/2011/1, décision de clôture de l’information.
4- Art 32 : « Sont considérés et punis comme complices : 1) Ceux qui, par dons, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machinations, artifices coupables, ont provoqué à l’action ou donné des instructions pour la commettre ; 2) ceux qui, avec connaissance du but à atteindre, ont procuré des armes, des instruments ou tout autre moyen qui a servi à l’action ; 3) Ceux qui ont, dans les mêmes conditions, aidé ou assisté l’auteur ou les auteurs de l’action dans les faits qui l’ont préparée ou facilitée, ou dans ceux qui l’ont consommée, sans préjudice des peines spécialement portées par le présent code contre les auteurs de complot ou de provocation intéressant la sûreté intérieure ou extérieur de l’Etat, même dans le cas où le crime qui était l’objet de la conspiration ou de la provocation n’a pas été commis ; 4) Ceux qui, sciemment, ont prêté leur concours aux malfaiteurs pour assurer, par recel ou tout autre moyen, le profit de l’infraction ou l’impunité à ses auteurs ; 5) Ceux qui, connaissant la conduite criminelle des malfaiteurs, exerçant des brigandages ou des violences contre la sûreté de l’Etat, la paix publique, les personnes ou les propriétés, leur ont fourni habituellement logement, lieu de retraite ou de réunion »
Art 204 : « L’homicide volontaire est puni de mort lorsqu’il a précédé, accompagné ou suivi une autre infraction comportant la peine d’emprisonnement ou lorsqu’il a eu pour objet, soit de préparer, faciliter ou exécuter cette infraction, soit de favoriser la fuite ou d’assurer l’impunité de ses auteurs ou complices »
5- Affaire n°14196/2
6- Articles 68 et 72 du Code pénal.
7- Ecchourouk, 1er février 2011 : « kharajna fi dawria lihafdh elamn fawajadna anfousna muttahimin fi qadhia tehrib Kaïs Ben Ali »
il s’agissait bien d’une opération pour faire fuiter kais ben avec la complicité d’un commissaire de ouardanine qui a travailler déjà a m’saken et qui connait bien tout les collègues au commissariat,la fuite est orquestrer par les 2 commissariat de m’saken et de ouardanine,le commissaire de m’saken s’appelle Youssef hnaini il parait qu’il a été tuer lors d’un échange de tirs,kais a été bien arrêter a m’saken par des gens de la ville a bien été remis a l’armée qui l’a transfèrer a la caserne de ouardanine puis remis au commissariat de monastir,le commissaire a monastir l’a relâché,il ne faut pas oublier que kais avait la main basse sur tout et n’importe quoi a monastir et tout le monde est a ses ordres a monastir c’est tout a fait normale qu’il a pu bénéficier de beaucoup de complicité pours’en fuir.
Les gens qui ont remis kais a l’armée a m’saken sont catégorique qu’il s’agissait bien de lui certains le connaissait TRES TRES bien car il opérait beaucoup dans la ville chez des commerçant avec qui il trafiquotai.
Lorsqu’il s’agit d’accuser un service de ou des agents de l’Etat il faudra toujours s’attendre à de la réticence de la part du gouvernement et ce indépendamment de la situation actuelle de la Tunisie. Par ailleurs on se doutait bien que le système n’allait pas se métamorphoser en une nuit parce que le dictateur est parti. Il nous faut rester vigilant et surveiller le travail du gouvernement en l’absence d’un véritable parlement dont c’est normalement le rôle.
Une affaire exemplaire des errements organisés, le plus souvent, par des “Provisoires”, à tous les étages de la maison Tunisie, qui déploient une énergie énorme pour couvrir les uns, blanchir les autres, et faire en sorte que presque rien ne change.
Merci Madame pour cette ténacité. La vérité finira par s’établir car les victimes, leurs familles et les démocrates comme vous ne baisseront pas les bras.
Commentaires perdus ?
WE CERTAINLY PRODUCE MONSTERS in tunisia
and we have a nice name for them: police force.
fathered by these corrupt goverments,these children will
be protected by them.It is only natural.
my question to some mothers are you proud of these monsters
policemen and can they be called tunisians? and sons of yours
and the nation.
when will we ever get justice?.
Que Dieu receuille l’âme de nos Martyrs, et que la vérité soit faite sur cette sombre affaire. L’un de ceux qui ont arrêté Kais Ben Ali m’a assuré bien le connaitre et que c’est bien lui qu’ils ont arrêté, après une histoire digne d’un western… Merci, Luiza Toscane, pour ce que vous faites pour la Tunisie.
Allah Yarhimhom wi sakkenhom el jannat .ses assassins il faut qu’il paye et justice doit être rendu .
Mouvement des ambassadeurs: encore une preuve de la persistance des ombres de l’ancien régime dans notre diplomatie: aprés R Farhat N Mistiri M BenRouhma et Chleiffa Karim Bchir remplace son beau-frère Abbes Mohsen (inutile de vous le présenter) à La Haye. No comment
Ce sont tous des cadres du Ministère des Affaires Etrangères connus pour le compétence et leur amour pour leur pays. Ils exercent depuis plus de 25 ans et c’est tout à fait normal qu’ils soient choisis pour représenter notre chère Tunisie dans les pays frères et amis. Arrêtez donc vos critiques futiles et vos allégations mensongères.
Comment ca se fait que les criminels qui ont attaqués les policiers n’ ont pas réussi à arreter Kais Ben ali, Quel est l’ avantage des militaires présents ce soir là (de simple soldats) à cacher la verité, pourqoui les policiers ont attendu 45 minutes au lieu de quitter les lieux sur le champ, pouquoi dans les videos sur youtube de l’ incident on n’ ENTEND JAMAIS LE NOM DE KAIS BEN ALI …..Ittaquiw allah ya nas..simple citoyen tunisen fiere de sa révolution