La longue liste des martyrs tunisiens s’est allongée ce mercredi 18 mai 2011 avec la mort, au champ d’honneur, du Lieutenant-colonel Tahar Ayari et du Caporal Chef Walid Hajji. Leurs noms sont, désormais, gravés, à tout jamais, en lettres d’or, dans le cœur des tunisiens. Gloire et honneur à eux !!! Et, un prompt rétablissement au sergent Seghaïer Mbarki blessé au cours des mêmes circonstances.

Nos deux militaires sont morts en accomplissant leur devoir sacré celui de la défense de l’intégrité du territoire national. Ils se sont opposés à une bande armée dont l’unique dessein est de semer la panique et la terreur dans un pays fragilisé et meurtri par tant de complots lâches et abjects.

Ces événements sanglants, qui ont secoué la paisible ville de Rouhia, ont, certes, mobilisé tout un peuple et ont ravivé ce patriotisme qu’on croyait éteint mais, force est de constater, que quelques points d’interrogation demeurent en suspens et alimentent cette suspicion toujours d’actualité.

Très tôt, cet événement, inédit et gravissime, a été rapporté, de prime abord, par les réseaux sociaux et, bientôt, relayé par tout l’espace médiatique non sans risque de désinformation et/ou de manipulation.
Ce n’est que vers midi que l’Agence Tunis Afrique Presse (TAP) publie l’information phare de la journée sur son site (http://tap.info.tn/fr/), sous l’intitulé de ” Echange de tirs à Rouhia faisant trois morts” où on peut lire in-extenso ceci: ” Deux ressortissants qui seraient d’origine maghrébine ainsi qu’un membre de l’armée nationale ont trouvé la mort lors d’un échange de tirs qui a eu lieu mercredi dans la ville de Rouhia ( SILIANA), apprend-t-on de source sécuritaire.”.

Et, le “communiqué” d’ajouter : ” Des témoins oculaires ont indiqué au correspondant de la TAP que les deux personnes s’étaient dirigées vers la station des louages ( grands taxis) dans la ville de Rouhia en possession de grandes valises, ce qui a attiré l’attention des passagers qui ont vite informé les unités de l’armée nationale. A l’arrivée de l’armée, les personnes suspectes ont pris la fuite. Elles ont été poursuivies et abattues. Les deux personnes portaient des ceintures explosives. Leur identité sera révélée par les experts en explosif attendus sur les lieux.”.

Vous avez noté, sûrement, cette concordance, à propos du nombre d’assaillants, entre la source sécuritaire et les témoins oculaires. Il s’agit, donc, de DEUX terroristes. Ce nombre va, de façon abracadabresque , changer et, là, est toute la question, à la fois troublante et légitime, POURQUOI ???

L’opacité de l’information relative aux événements de Rouhia va s’installer crescendo et de façon méthodique. Des experts s’y mêlent. Une parfaite “machination” va être montée et un vrai travail de professionnels s’opèrera, en un temps record, s’appropriant l’affaire et l’orientant délibérément. Voici les faits.

Le soir même, au cours de son intervention dans le Journal télévisé de 20 heures de la première chaine de télévision nationale, M. Nabil Abid, directeur général de la Sûreté nationale au ministère de l’Intérieur, a affirmé que les deux terroristes tués par les forces de l’ordre et l’armée à Rouhia, ne sont pas des libyens, mais des tunisiens qui font partie d’Al-Qaïda au Maghreb Islamique (AQMI). Il a, également, précisé que tous les moyens sont mis à la disposition de toutes les unités sécuritaires pour mettre la main sur le terroriste en fuite, Nabil Ben Mohamed Ben Ahmed Saadaoui.

Moins d’une heure après cette intervention, l’agence Tunis Afrique Presse (TAP) publie un communiqué du ministère de l’Intérieur reprenant les mêmes éléments langagiers évoqués précédemment. On y confirme cette version des “faits” : “Lors de ces accrochages, deux terroristes ont trouvé la mort. Le troisième a pris la fuite”. Aussi, remarquons-nous ce nouvel élément mentionné dans ledit communiqué qui dévoile que, depuis quelques jours, les forces de sécurité et de l’armée suivent les traces de groupes d’individus qui se sont infiltrés, récemment, dans le territoire tunisien. Seulement, on n’y précise ni leur nombre ni leurs identités ?!!

Le “stratagème” mis en place semble bien fonctionné, car le même soir, le ministère de l’Intérieur publie via sa page Facebook la photo de Nabil Ben Mohamed Ben Ahmed Saadaoui le qualifiant de très dangereux. “Cet homme en fuite est activement recherché par les services de sécurité pour sa participation aux affrontements de ce matin dans la localité de Rouhia (Siliana)”. Peut-on lire dans ce communiqué.

Et, couronnant cette démarche, la première chaine de télévision nationale reprend le communiqué du ministère de l’Intérieur et le diffuse quotidiennement comme si aucun doute ni le moindre soupçon n’existerait.

Nous voilà, donc, en présence d’un troisième homme très dangereux, fanatique, membre d’AQMI, vivement recherché et ayant participé à la fusillade du mercredi. Le-croyez-vous??

Aussi, essaie-t-on de nous faire avaler cette pilule malgré les témoignages concordants émanant de la ville de Rouhia réfutant la thèse officielle.

Et, malgré aussi, le reportage réalisé par la première chaine de télévision montrant le témoin principal, félicité, par ailleurs, au sein du ministère de l’Intérieur, pour bravoure et acte héroïque, qui confirme qu’ils n’étaient que deux terroristes à la gare routière.

Le terrorisme, je vous l’accorde, n’est pas, à l’heure actuelle, un épouvantail mais une réalité, une menace vraie mais on ne doit pas l’exploiter pour d’autres fins aussi obscures que louches.

Deux questions, pour conclure, me tourmentent :

– Pourquoi a-t-on ajouté un troisième homme?
– Pourquoi, précisément, le dénommé Nabil?

On a le droit de savoir même si la raison d’Etat s’y oppose!!