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C’était peu avant le 8 mars, avant donc la journée mondiale de la femme, qu’un incident est survenu à la faculté des lettres, des arts et des humanités de la Manouba. Cet incident n’est autre qu’une atteinte à l’un des symboles nationaux, qui est le drapeau tunisien. Cet événement a permis de faire ressurgir le patriotisme et le nationalisme pourtant très vif au lendemain de la ‘’Révolution’’.

Des jeunes osent déchirer le drapeau national…

Suite à la décision du Doyen de la faculté de la Manouba, Monsieur Habib Kazdaghli de déposer une plainte concernant deux étudiantes portant le niqab, des salafistes ont manifesté leur mécontentement.

Le 7 mars au matin, une cinquantaine de personnes considérées et se considérant comme ‘’salafistes’’, étant pour la plupart étudiants, sont venus contester aux portes de la faculté, la décision du doyen. Ils ont alors brandis des slogans tels que : « Dégage », mot pourtant lourd de signification compte tenu de l’année qui vient de s’écouler, à l’encontre du Doyen et ils exigeaient l’autorisation aux étudiantes portant le niqab d’assister aux cours. Ils ont également bloqué les issues. L’incident est donc survenu de la manière suivante, durant près d’une heure, le drapeau tunisien érigé à l’entrée principale de la faculté a été substitué par un drapeau noir.

C’est au début du mois de décembre 2011 que les tensions ont commencé à la faculté de la Manouba. En effet, «Ces salafistes ont quatre revendications, expliquait le Doyen, Habib Kazdaghli, qui racontait avoir été séquestré et violenté. « Ils réclament le droit de porter le niqab, une salle de prière, la fin de la mixité et des professeurs femmes pour les étudiantes. Mais notre position est claire : pas question de négocier avec cette secte religieuse !»
L’atteinte portée au drapeau a suscité l’effroi et la colère, elle constitue en effet, une offense caractérisée envers le Pays.

Une identité nationale forte !

C’est suite à la destruction de la division navale tunisienne survenue le 20 octobre 1827, pour distinguer la flotte tunisienne des autres flottes de la mer Méditerranée, qu’est né le drapeau tunisien, sous ordre d’ailleurs de Hussein II Bey. Il voit alors le jour en 1831 et ressemble à s’y méprendre au drapeau Turque car les beys étaient alors des vassaux de l’Empire Ottoman.

Les symboles nationaux sont d’une importance vitale pour une nation, car ils garantissent l’homogénéité de la population et son sentiment d’appartenance. Elément crucial pour cette Tunisie dont les origines ethniques sont diverses et dont les vagues de colonisations ont été multiples.

La culture tunisienne est riche et son identité nationale forte, c’est pourquoi, une jeune femme, s’est avancé et a défendu son drapeau. Elle se nomme Khaoula Rachidi, cette dernière s’est donc illustrée par sa bravoure et son courage, elle a fait honneur à sa patrie. Elle a également permit à toutes les tunisiennes de se sentir fière d’être femme mais surtout fière d’être une femme tunisienne. Le 8 mars célèbre donc la journée internationale des femmes, c’est une journée de manifestations à travers le monde et l’occasion de faire un bilan sur la situation des femmes dans le monde. Ainsi c’est devant l’Assemblée nationale constituante que la célébration de la journée de la femme s’est toutefois transformée en une célébration du sentiment patriotique à travers le drapeau. Plus de 2000 personnes en particulier des femmes se sont ainsi mobilisées. Khaoula Rachidi recevra une subvention annuelle de 650 dinars, pour la récompenser et rendre hommage à son courage, selon une déclaration, samedi 10 mars 2012, de Lassaâd Yaâcoubi, secrétaire général du syndicat général de l’enseignement secondaire.

Le gouvernement face à cette offense

En ce qui concerne la présidence de la République, l’acte a en effet été dénoncé, qualifié d’atteinte à l’un des principaux symboles de la nation. Il a également été jugé comme : « un acte lâche et condamnable, et un crime à l’encontre de la patrie et des martyrs ». Le Président de la République s’est quant à lui exprimé en faveur d’un « maximum de rigueur et de force afin que nul ne s’aventure dorénavant à porter atteinte au drapeau national ».

Pour certains néanmoins, le gouvernement a été trop laxiste. Ainsi, l’association Kolna Tounes dans un communiqué dénonce la passivité du gouvernement et s’indigne : « Il appelle le Président de la République et le gouvernement à une réaction ferme à la hauteur des dépassements enregistrés et qu’il n’est plus possible de tolérer.
Il appelle les élus de l’Assemblée nationale constituante, représentants du Peuple, à assumer leur pleine responsabilité ». Ainsi c’est la lenteur de la réaction du gouvernement et plus spécifiquement du ministre de l’intérieur qui a surpris. De plus, le fait que la présidence publie un communiqué sur sa page Facebook est pour le moins déconcertant, compte tenu du caractère hautement ‘’sacré’’ de la ‘’profanation’’. En Tunisie, l’article 129 du Code Pénal indique que : ”Est puni d’un an d’emprisonnement, quiconque par paroles, écrits, gestes ou tous autres moyens, porte atteinte publiquement, au drapeau tunisien ou à un drapeau étranger.”

La Turquie quant à elle, emprisonne toutes les personnes ayant porté atteinte au drapeau à 18 ans de prison.

Un incident qui en dit long sur les épreuves a venir…

En portant atteinte au drapeau, ces « jeunes » ont tout d’abord rejeté leur identité nationale, qui rappelons le est arabo-musulmane donc c’est avant un rejet du sentiment national qui doit inquiéter. En effet, certains « jeunes salafistes » portaient des drapeaux sur lesquels étaient inscrits : « il n’est point d’autre Dieu que Dieu », rapporte un journaliste présent sur les lieux. Cet amalgame et cette confusion entre l’appareil Etatique et la religion sont un danger qui laisse présager beaucoup d’autres affrontements.

Il convient également de voir qu’il y a également eut un manque de respect envers l’institution universitaire, qui avait déjà beaucoup de mal à se faire respecter. On se souvient aisément des différentes manifestations du corps professoral, comme par exemple celle du 28 janvier ou il a été question de faire front commun contre le fanatisme. La faculté de la Manouba a toujours été le porte- drapeau de la résistance contre l’atteinte aux libertés, aux principes démocratiques et le symbole de l’attachement aux libertés académiques. On se souvient également des agressions datant du 10 janvier 2012, des enseignants de la faculté de la Manouba qui ont été agressés par des salafistes, pour ne prendre que cet exemple.

La réalisation des objectifs de la Révolution

Evidemment l’incident réveille s’il ne l’était pas déjà le patriotisme et le sentiment d’appartenance et de défense de notre pays mais surtout de la vision qu’on en a et de celle vers laquelle on veut évoluer.

Néanmoins, cet incident ne doit en rien détourner l’opinion publique des vrais enjeux de cette ‘’Révolution’’ qui sont donc les objectifs de la Révolution. Rétablir les régions nécessiteuses, leur venir en aide au maximum, retrouver de la croissance et donc de l’emploi. Cette Révolution dite de la dignité ne peut en aucun cas laisser ces « jeunes » bafouer la souveraineté nationale et les fondements de notre société, mais elle ne peut non plus laisser ignorer a nouveau les principaux enjeux.