Condamné à 7 ans et huis mois de prison par contumace, pour avoir utilisé facebook “afin de nuire sciemment à un tiers ou de perturber sa quiétude”, en publiant son livre Illusion de l’Islam, Ghazi Béji a du s’enfuir de la Tunisie. Hier, 16 juillet, après trois mois en cavale, il nous a informé avec soulagement qu’il aurait enfin pu avoir le droit d’asile en Roumanie.

Ces derniers temps, les appels au meurtre en public et sur les réseaux sociaux des islamistes radicaux n’ont pas dérangé notre Justice qui s’enlise de plus en plus dans la dépendance à l’exécutif de Bhiri, le ministre d’Ennahdha. Par contre, A cause de ses écrits, Ghazi, horrifié par la montée de l’islamisme radical, a été de suite sanctionné. Son ami Jabeur Méjri, condamné pour les mêmes motifs, croupit actuellement dans la prison de Mahdia dans la peur d’être agressé par son entourage, prisonniers ou autre.

A ce sujet, la militante des droits de l’homme Louisa Toscane écrira dans un article sur le procès des martyrs de Ouardanine :

Au lendemain de la condamnation en appel d’un internaute tunisien à sept ans et huit mois d’emprisonnement pour des caricatures du prophète sur Facebook, une condamnation à cinq ans d’emprisonnement pour meurtre avec préméditation laisse de quoi s’interroger sur les arrières pensées des juges, civils comme militaires.

Certes, les propos de Ghazi ou de son ami Jabeur ont choqué certains musulmans mais les condamner à une peine aussi lourde ne renforcerait-il un sentiment d’injustice, surtout quand on sait que des meurtriers notoires et tortionnaires de l’époque de Abdallah Kallel ont été condamnés à 4 ans de prison seulement ?

Le 30 juin, après le tribunal de Première Instance et la Cour d’Appel, l’affaire est passée en cassation. Selon Ahmed Mselmi, avocat engagé par la LTDH (Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme) pour défendre Ghazi et Jabeur, cette peine ne serait qu’un jugement d’opportunité.

Avec Ghazi qui serait le premier réfugié post-Ben Ali, la Révolution n’a pas encore enfanté d’un Etat de Droit. Cependant, en cette période de construction, tout est à rebâtir. La mobilisation de la société civile et des instances relatives aux droits de l’Homme ont un devoir à accomplir en dénonçant ces jugements d’opportunité qui se multiplient au nom du sacré.

Mise à jour 17 juillet 2012:

Ghazi Béji vient de nous envoyer le document que les autorités en Roumanie lui ont livré où il est stipulé qu’il n’a eu que le statut de protection subsidiaire qui remplace l’asile territorial. M.Béji ne remplit pas les conditions de reconnaissance de la qualité de réfugié, définies entre autres par la convention de Genève du 28 juillet 1951 (article 1er A2).

Déçu après avoir compris que, finalement il n’avait pas eu l’asile, Ghazi sait pertinemment que ce statut lui assurerait un an de tranquillité. Par ailleurs, il nous a confié qu’il n’a pas de contrat de loyer et qu’il se trouve dans une situation très délicate.

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