La polit-revue: 2013, Une entame sur les chapeaux de roues

polit-revue#16

Le pouvoir le sait : la période du 17 décembre au 14 janvier est synonyme d’entrée dans une zone de turbulences. Même s’il est l’émanation d’une Assemblée élue, l’actuel gouvernement n’échappe pas à la poussée de fièvre révolutionnaire coïncidant avec une période chargée en symboles. C’est pourquoi il tente d’anticiper la grogne sociale et politique par un remaniement imminent. Une reconfiguration sous le signe de l’apaisement qui cache mal cependant un durcissement autoritaire dans une série d’affaires judiciaires hautement politisées. 2013 siffle-t-il la fin de la récréation ?

L’actualité politique de la première semaine de janvier 2013 est donc indissociable de l’actualité judiciaire. Noureddine Bhiri l’annonçait fin décembre lors d’un meeting des Jeunesses de son parti : « Les contre-révolutionnaires passent à la vitesse supérieure, et nous passons nous-mêmes bientôt à la vitesse supérieure dans la guerre tous azimuts contre la corruption et l’héritage de l’ex régime ».

Sans vouloir verser dans le procès d’intention à l’égard du pouvoir judiciaire, un 3ème pouvoir à l’indépendance aujourd’hui plus que discutable, force est de constater que la prédiction du ministre de la Justice se vérifie au gré des verdicts : plusieurs feuilletons judiciaires surmédiatisés connaissaient les 3 et 4 janvier une accélération et un dénouement qui envoie invariablement les signaux d’un durcissement.

Affaire Cactus / Sami Fehri

l’ex associé de Belhassen Trabelsi reste en prison après son recours en cassation, et conformément à la demande du parquet qui a requis des mandats de dépôt, ce sont pas moins de 5 ex PDG qui l’y rejoignent pour avoir « dilapidé l’argent public », dont l’ex ambassadeur en Corée du Sud, Mustapha Khammari.

Affaire Ayoub Massoudi

Peine alourdie en appel pour l’ex conseiller du président Marzouki chargé de l’information. La justice militaire le condamne à 1 an de prison avec sursis, après avoir écopé de 4 mois en première instance.

Affaire Olfa Riahi / « Sheratongate »

rafik-bdessalem

L’avocat Fathi Laayouni, chargé des contentieux de l’Etat, annonce qu’il poursuivra la blogueuse pour diffamation. Samedi 5 janvier, une interdiction de quitter le territoire est émise à son encontre.

Procès Habib Kazdaghli : l’universalisme s’organise

Crédit photo: Seif Soudani | Nawaat.org
Crédit photo: Seif Soudani | Nawaat.org

Plus complexe car impliquant plusieurs procès à la fois, l’affaire Kazdaghli est aussi plus sensible. Le procès, qui connait d’interminables atermoiements, en était à son 4ème acte jeudi. L’enjeu dépasse en l’occurrence clairement le fait divers d’une gifle présumée sur une étudiante en niqab.

L’enjeu, c’est la jurisprudence : une condamnation d’un doyen (historien connu pour sa défense des minorités et sa sensibilité politique de gauche), sous le mandat du plus à droite des ministres d’Ennahdha, Moncef Ben Salem, créerait un précédent de taille, avec en toile de fond le niqab associé à une liberté individuelle qui transcende les règlements intérieurs des facultés.

La 3ème audience avait vu une affluence inattendue des soutiens des deux plaignantes niqabées, qui supplantèrent en nombre ceux du doyen.

Au jeu des pressions, les partisans du doyen n’ont cette fois rien voulu laisser au hasard. Son comité de soutien, international, convoquait une conférence de presse mercredi au siège de l’UGTT. Une mise en garde y fut adressée par la fédération syndicale de l’Enseignement supérieur à l’exécutif « contre toute tentation d’interférence ». Un appel est aussi lancé aux démocrates et aux ONG pour se mobiliser en nombre.

Moins médiatisé, le volet Wissem Othmane, procès dans le procès, est presque passé inaperçu. C’est pourquoi nous avons voulu donner la parole à ce meneur du sit-in des salafistes, poursuivi à son tour par le doyen de la Fac de Lettres pour avoir perturbé les cours.

Pour cette audience consacrée aux plaidoiries et susceptible d’aboutir à un verdict, les universalistes amis du doyen, sensibles au retentissement international de l’affaire, ont activé leurs réseaux, notamment en Europe. Etaient donc présents aux abords du tribunal des représentants du Snesup, le PCF, parmi d’autres intellectuels et syndicalistes de diverses nationalités.

Et cela ne plait pas à tout le monde : ce n’est en tout cas pas du goût de Wissem Othmane, qui dans une déclaration aux vagues accents d’antisémitisme dénonce ce qui est selon lui « la présence d’organisations juives ».

Tour de vis médiatique

« En sursis » selon nos sources à la TV du secteur public, depuis ses plateaux tendus avec des ministres de la troïka, l’animatrice vedette Amel Chahed voit son émission politique quotidienne considérablement amputée. La nouvelle grille des programmes 2013 prévoit une diminution du temps imparti à son émission : 2 émissions hebdomadaires au lieu de 4, des durées plus courtes et des horaires moins regardées.

Dans une vidéo du Tunis Center For Press Freedom, elle revient sur les motivations de cette « semi censure » qu’elle impute au fait que la ligne éditoriale de son équipe n’a pas plu en haut lieu.

Remaniera, remaniera pas…

gouvernement-tunisie

Aujourd’hui dimanche 6 janvier a lieu une réunion tripartite déterminante pour les modalités du remaniement pressenti pour le 2ème anniversaire de la révolution, sanctionnant le bilan d’une année de gouvernance.  L’info provient de Néjib Gharbi, chargé de la communication à Ennahdha, confirmée par un site proche du parti islamiste.

Mais fin décembre, on découvrait l’une des probables causes du retard du remaniement tant attendu. Contre toute attente, d’étonnantes dissensions internes se font jour à l’ANC entre deux courants jusqu’ici officieusement opposés au sein même d’Ennahdha : la tendance dure incarnée par Rached Ghannouchi et Habib Khedher, et le courant plus modéré formé autour de Hamadi Jebali.

Lors d’une scène surréaliste qui laisse médusée même la vice-présidente de l’Assemblée, le neveu de Ghannouchi porte une charge d’une violence verbale que même l’opposition n’avait pas osé employer contre la politique du Premier ministre, présent et visiblement irrité.

Le camp Ghannouchi montre-t-il un signe de faiblesse en étalant ainsi ses conflits au grand jour ? Il y a lieu de le penser lorsque Lotfi Zitoun, un autre proche de l’homme fort d’Ennahdha, se sent suffisamment sur le départ à la Kasbah pour défendre son propre bilan.

Dans les prochains jours, la bataille de la réforme du règlement intérieur de l’ANC constituera un autre théâtre des hostilités entre la frange radicale d’Ennahdha et l’opposition. Les propositions concoctées par le même rapporteur général de la Constitution choquent jusque dans les rangs des alliés CPRistes, en ce qu’elles favorisent la majorité.

Nidaa Tounes, en terrain conquis

Meeting de Nida Tounes à Ksar Helal  sur des terres du Sahel historiquement acquises à la cause du bourguibisme.
Meeting de Nida Tounes à Ksar Helal sur des terres du Sahel historiquement acquises à la cause du bourguibisme.

Pendant ce temps-là, les néo-destouriens prêchaient des convaincus à Ksar Helal. Lors d’un meeting décrit comme étant « une réussite » sur des terres du Sahel historiquement acquises à la cause du bourguibisme, Taieb Baccouche déclarait sur le même mode identitaire : « Personne ne pourra tuer la culture en Tunisie parce que la culture chez nous a des racines profondes dans notre Histoire », avant d’enchainer sur le leitmotiv de « la compétence » pour invoquer la nécessité d’un gouvernement de technocrates.

Plus controversé encore s’agissant de velléités normalisatrices, un « acte noble » mettait en émoi les réseaux sociaux. Borhene Bessaies (l’ex propagandiste de Ben Ali) et le fils Chiboub s’affichaient aux funérailles de l’homme d’affaires Tarak Mekki, décédé des suites d’un infarctus à 54 ans.

Constatant l’absence de la classe politique aux funérailles de l’ex vidéaste mégalomane, certains surenchérissent en réclamant des funérailles nationales. Est-ce bien raisonnable, lorsqu’on sait que le défunt avait depuis longtemps sombré dans un style populiste qui lui a aliéné jusque l’opposition, dont aucun membre ne trouvait grâce à ses yeux.

Seif Soudani

Politics

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2Comments

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  1. 1
    Ali

    vous avez dit vrai, jusqu’à votre passage à propos de “Amel Chehd” qui n’est ni animatrice ni vedette et encore moins une journaliste, elle est que dalle!

  2. 2
    mandhouj

    Nida tounis dégage.
    hedi baccouche=la 5ème roue, la roue de secours. Après les événements du 26 janvier 1978 (ugtt/psd ou gouvernement), on a vu hedi baccouche à la tête de l’ugtt, nommé bien sur par le trio sanguinaire de cette journée 26 janvier 1978 (Bourguiba, hedi nouira et Mohamed essayah) et depuis son parcours politique est connu à tout le monde.
    – ksar-hellal une ville symbolique pour la famille destourienne, clan bourguiba, (la maison de ben ayade le 2 mars 1934), cela parle à tout le monde, le fameux putsch politique de Bourguiba pour récupérer ce qui n’a pas construit et s’emparer du parti destour.
    – mr baccouche parle du caractère de l’état (civil). Le peuple a pris tout son temps pour bien voir et subir la république et l’état civil de bourguiba et de ben Ali (dictature, sans libertés, spoliation, mafia, division de la société, discrimination des populations des régions intérieures… la liste est longue).
    – la troïka n’a pas tenu ses promesses: -la nouvelle constitution est entre les mains du peuple, il la discute, voulez-vous autre chose ? Il vous manque rien, vous êtes bien nourri bien logé. Vous avez pensé durant 60 ans aux autres. La famille destourinne psd/rcd/nida devrait se faire oublier pendant 10/20 ans, jusqu’à qu’ils deviennent à l’état des royalistes en France. -Pour ce qui est de la constitution : Personnellement j’e n’ai pas envie d’une constitution sous forme d’un texte juridique incompréhensible où les interprétations peuvent aller dans tous les sens et surtout les plus pervers. La constitution doit être l’humain d’abord et les droits démocratiques d’abord avec tout le respect aux singularités religieuses partagées et qui font société de vivre mieux et intelligemment ensemble. Il est vrai que le procédé (écoute des experts, consultation de la société civile, consensus sur l’essentiel ou la totale des articles,… débats populaires) engagé pour l’écriture est très long. On verra au procédé de l’adoption. – la gouvernance de la Troïka : aucun de ces partis n’eu la majorité à lui tout seul. Ils ont accepté de gouverner ensemble sur les bases d’un accord et non pas sur les bases de leurs programmes, là tout le monde le sait, et ça ne serre à rien de faire des enchères ni au cpr pour ses discours avant campagne 23 octobre 2011 autours de la justice transitionnelle. Il s’est avéré que ce n’est ni rapide ni vite fait, car la révolution n’est pas là pour diviser la société mais pour punir les criminels et les spoliateurs, donc il faut du temps pour instruire les dossiers, la justice par inquisition on en vaut pas. Ni à ennahdha autours de leurs 365 points, déjà ça ne marchera pas pour les année bisextilles  , et les deux autres alliés n’ont pas les mêmes choix en développement. Ni demander à ettakatoul le pourquoi du non réalisation des 7 régions toutes donnant sur la mer, ok, car le découpage territorial intervient à travers une complexité d’indicateurs de cohérence, et non pas que terre/mer/montagne.
    Cette gouvernance à 3 tout de même c’est une réussite qui a mis en avant la gouvernabilité du pays en situation de chaos économique et de dislocation du tissu social. Que les manières dont étaient conduites les politiques publiques en matières de sécurité, d’emploi, de développement ont manqué d’une certaine vigueur, ok. Mais la Tunisie aujourd’hui est débout. Par contre la troïka à ma connaissance s’était jurée de ne pas faire rappeler les méthodes sécuritaires de ben Ali (elle a raison, mais la situation sur nos différents territoires était mal analysée et les complots sont venus de tous les bords et sans pitié, la contre révolution a agit comme elle a voulu, et la contre bande a trouvé le terrain propice pour son économie parallèle). Il ne fallait pas confondre lutte contre l’insécurité et sécuritaire. En plus l’administration publique (corps policier et administration civile) n’était pas acquise dès le 15 janvier 2011 à la révolution, il ne faut pas oublier ces situations. Mais voila notre stabilité aujourd’hui on la doit à plusieurs sacrifices aussi. Bce et les rcdistes ont tout fait pour saboter la révolution, et aujourd’hui ils se réunissent dans un parti politique, franchement ils doivent remercier Dieu, notre peuple qui n’est pas haineux et les partis au gouvernement qui veillent à l’application de la loi. Cette tolérance du jamais vu dans une révolution et après une révolution. Mais il ne faut pas que parmi eux des anciens tortionnaires et spoliateurs, et que la justice transitionnelle va arriver et qu’il ne faudra pas qu’ils disent oppression politique, parce que tout le peuple va rigoler et le monde entier avec lui. -À mon sens et d’autre part la troïka s’est mêlée les pattes dans l’ordre des priorités, n’empêche, qu’il y a pas mal des avancées en terme de stabilité sur le plan de la sécurité dans le pays qui sont palpables, en environnement propice plus ou moins aux investisseurs-il reste le cadre juridique-, la croissance est de retour de -2 à l’époque de bce jusqu’à + 3 aujourd’hui, les avancées en matière de création d’emploi, mais là, dommage l’état a fourni des pièges pour lui-même pour plus tard, les nombres des fonctionnaires a augmenté. Nous voulons une Tunisie moderne qui dépasse les vieux ordres conservateurs où c’est l’état qui fait tout (le régalien et le social), nous aspirons à une Tunisie décentralisée, où la participation politique des citoyens gagne en proximité. Mais voila on peut comprendre la colère des personnes sans emploi, et plus tard l’état est dans l’obligation d’engager une grande réforme au service public, si non c’est la mort définitive de l’état social conservateur, et sans reforme c’est une deuxième révolution assurée, elle ne sera pas sanguinaire, mais elle donnera les leçons à ceux qui n’ont pas compris la nécessité d’un état moderne décentralisé.
    -la pression de l’opposition était sous forme de fabriquer l’échec et de finir avec l’expérience démocratique, l’histoire se souviendra et donnera son propre jugement.
    – la pression légitime de la rue (attente des projets, des meilleurs accords entre la Tunisie et la Libye surtout pour une meilleure circulation de la marchandise, la justice transitionnelle…) était entachée et allongée par les faits des sit-in et d’arrêt des unités de production.
    Les chantiers en Tunisie sont énormes (environnement, développement, nouvelles lois, familles et territoires en précarité grave grave…), les urgences sont multiples, la troïka assumera sa responsabilité. Les difficultés rencontrées sur le terrain ont fait que le budget de l’état jusqu’à fin novembre n’a était écoulé que au niveau de 41%. C’est la responsabilité des citoyens aussi qui ont empêché certaines avancées. l’ugtt (l’équipe dirigeante) et les partis de l’opposition joumhouri, front populaire, et la bande rcdiste de nida bce, se sont alliés objectivement pour finir avec ce gouvernement, pour le moment, partie perdue, mais les jours qui viennent, il est de la responsabilité de la troïka de faire avancer les choses rapidement, jusqu’aux nouvelles élections et le plutôt ce sera le mieux.
    – Nida tounis (bce, baccouche…), juste il faut que vous sachiez, que le peuple a décidé de ne plus retourner en arrière, et vivre encore une fois le caractère civil de l’état psd/rcd, même redoré. La tunisie est rentrée dans une ère où plus jamais un parti qui fait au même temps (parti/état/société) ne pourra arriver au pouvoir et gouverner notre pays. les partis politiques n’ont de place que dans leurs programmes politiques, mais jamais ils nous imposeront un ordre sociétal qui divisera la Tunisie comme ont fait Bourguiba et issarek elharib ben Ali. La Tunisie deviendra et pour toujours un état civil dans l’ordre du droit et des droits, mais jamais dans l’ordre d’un futur supposé zaïm akbar, bce ou baccouhe ou neijib echebbi. On vous connait assez et on n’a marre de vous et de vos discours alerte (…).

    – Nida tounis/bce/baccouche, vous pouvez toujours alerter, analyser, on n’est pas à l’époque newsdestour/psd/rcd, (elbouazzizi s’est immolé, si vous n’êtes pas au courant un certain 17 décembre 2010), et là on est dans l’après ben Ali harab un certain 14 janvier 2011, somme tout, on est en démocratie et dans un état civil avec un gouvernement des urnes et où la liberté d’expression est respectée, et vous en bénéficiez, mais le jour des urnes, ses résultats sont : le peuple est souverain. Vive la révolution. Ben Ali harab. Mandhouj Tarek.

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