Avec le premier jour du ramadan, la même question revient pour ceux qui ne font pas le jeûne : où trouver un endroit ouvert pour manger et boire ? Les internautes s’organisent sur la Toile pour répondre à cette question et contrer la tendance que certains hommes publics ont voulu imposer : selon eux, tout le monde serait concerné par le jeûne, alors qu’en réalité aucune loi n’oblige les cafés à fermer et qu’il n’est pas illégal de manger et de boire dans l’espace public.
Pour ceux qui ne font pas le ramadan, difficile de trouver un endroit en pleine journée où boire et manger quelque chose. En Tunisie, les internautes pallient au problème. Twitter et Google Maps ont été mis à contribution pour référencer les établissements ouverts durant la journée avec l’utilisation du hashtag #fater : “celui qui ne jeûne pas“.
Ceux qui en Tunisie pour quelque raison que ce soit cherche un endroit où s’alimenter en journée pdt le ramdhan, utilisez le hashtag #fater
— Emir Boulima (@emirboulima) July 10, 2013
Ainsi, le hashtag #fater a vite fait son apparition, permettant aux internautes qui ne jeûnent pas de trouver un café ou un restaurant ouvert en pleine journée. Sur Google Maps, même principe : les internautes indiquent, sur une carte, les endroits ouverts au public pendant la journée.
Taquins, les internautes n’hésitent pas à tacler au passage Adel Almi, le prédicateur à l’origine de la polémique autour du film Persepolis, qui s’est illustré lundi 8 juillet en déclarant qu’il fallait sévir contre les non-jeûneurs, qui seraient photographiés et décriés. Il avait également déclaré que la baignade en mer était un péché. Les commentaires appelant à se baigner en mangeant avaient alors fusé. Une page Facebook a même été créée, dans la nuit, sur laquelle les gens postent leurs photos, sur lesquelles ils sont en train de manger.
Certains internautes s’interrogent sur la sécurité d’une telle démarche, étant donné qu’elle rend ces établissements, encore plus facilement, de possibles cibles pour les extrémistes.
Pas de texte de loi qui interdit de manger et de boire dans l’espace public
Adel Almi considère que les personnes se livrant à des « provocations contre les musulmans se rendent coupables d’une infraction à la loi et doivent être punis ». Il en appelait donc au ministre de l’Intérieur pour que celui-ci prenne position sur la question. Adel Almi adoptait ainsi le même discours que celui de Nourreddine Khadmi, ministre des Affaires religieuses, qui a, durant une interview radio, déclaré faire référence aux « dispositions légales usuelles » et aux « principes généraux de la loi » pour défendre le fait que le jeûne soit le principe et que le fait de ne pas jeûner ne doit pas être fait de manière ostentatoire.
Mais vis-à-vis de quelle loi les non-jeûneurs sont-ils en infraction ? Contrairement au Maroc par exemple, où il existe une loi criminalisant le fait de manger dans l’espace public lors du ramadan, la Tunisie ne dispose pas de ce type de texte législatif, comme l’explique le juge Ahmed Rahmouni, ancien juge et président de l’Observatoire de l’indépendance de la justice.
« il n’y a aucun texte de loi qui interdit expressément cela en Tunisie. »
Par ailleurs, Sami Ben Abderhamen, juge au tribunal administratif, explique :
“Il n’y a pas de loi en Tunisie qui interdit l’ouverture des cafés et restaurants pendant la journée durant ramadan.”
Jusqu’au milieu des années 70, sous Bourguiba, tous les cafés et restaurants étaient ouverts, rapporte-t-il. Puis Ben Ali a permis, mais toujours sans fondement légal, à chacun de choisir s’il voulait rester ouvert ou s’il voulait fermer. Aujourd’hui le juge s’étonne de trouver la plupart des établissements fermés alors que rien ne les y contraint.
L’année dernière, une circulaire aurait été faite afin de fermer les cafés. Mais à part une descente de police dans le quartier de Ennasr à Tunis le premier jour du ramadan, qui semblait plutôt vouloir intimider les commerçants qu’appliquer une circulaire dont personne n’a démontré l’existence, les cafés qui ont l’habitude de rester ouverts ont gardé leur habitude.
« Et même si une circulaire existe, elle ne peut servir de base pour un jugement »
explique le juge Ahmed Rahmouni.
L’argument de l’islam comme religion de l’État
Pour le ministre des Affaires religieuses, le mois de jeûne « concerne tout le peuple tunisien et l’ouverture des cafés est contraire à l’identité du peuple et à la sacralité du mois ». Cette déclaration, en plus de celle du prédicateur Adel Almi qui en appelait au ministre de l’Intérieur, ont provoqué l’inquiétude chez la partie de la population qui ne jeûne pas.
Le ministre des Affaires religieuses a, lui aussi, fait appel à la “religion de l’État”, en déclarant lors d’un entretien radio que :
« en se référant aux dispositions légales d’usage, le respect de la religion, la religion du peuple tunisien et de son État, mais considérant l’importance de la paix sociale, et en considérant aussi la liberté garantie et en prenant en compte tous ces principes généraux de la loi, le jeûne est la règle et ceux qui ne veulent pas jeûner sont libres de le faire mais n’ont pas à s’exhiber. »
L’islam, selon le projet de constitution en cours, est la religion de l’État. Mais la nouvelle constitution garantit également la liberté de conscience, comme le rappelle Aziz Krichen, conseiller du président de la République, dans une déclaration sur son compte Facebook qui explique que dans la Loi fondamentale il est :« question de liberté religieuse, de liberté de conscience et d’État civil (madani), c’est-à-dire non religieux. (…) Ces articles n’ont pas été rédigés pour le décorum, ni pour faire de la promotion à l’étranger, mais pour garantir les droits et les libertés de nos concitoyens et définir le cadre juridique de notre vivre-ensemble. »
Et pourquoi un membre du gouvernement, qui doit représenter tout le peuple tunisien et agir dans l’intérêt général, se permet-il de préconiser une conduite plutôt qu’une autre ? C’est la question que pose Aziz Krichen, toujours dans sa déclaration sur son compte Facebook :
« La Tunisie est certes un pays musulman, mais on y trouve beaucoup de résidents et de citoyens qui ne sont pas musulmans. On y rencontre aussi beaucoup de musulmans non pratiquants. M. Khadmi, comme ministre de la République, leur doit à tous la même considération. Et il est tenu, de par ses fonctions, à ne pas établir de discrimination entre eux. »
Et il continue en expliquant que :
« Les musulmans pratiquants ont le droit d’exercer leur culte, et le devoir du ministre est de faire respecter ce droit. Les non pratiquants et les non musulmans ont le droit d’aller au café et au restaurant, et le devoir du ministre est de ne pas faire obstacle à l’exercice de ce droit. Ce n’est pas plus compliqué. »
Alors qu’avant le 14-Janvier, ceux qui ne faisaient pas le ramadan trouvaient facilement, à Tunis en tout cas, des lieux pour se sustenter, depuis la Révolution la chose est moins aisée. « Avant on pouvait manger sans problème en se « cachant » du regard des autres par respect, pour ne pas les déranger. On collait simplement des feuilles de journaux aux fenêtres des cafés et des restaurants… En fait il n’était pas question de se cacher, mais simplement de se respecter les uns les autres », explique une jeune fille qui ne jeûne pas.
Il n’y a donc pas de restriction légale au fait de manger dans l’espace public, mais la décence veut, simplement, que les Tunisiens se respectent entre eux, chose qu’ils ont toujours faite sans que cela ne suscite de polémique. Les déclarations de Adel Almi et du ministre des Affaires religieuses voulant garantir la « paix sociale », selon leurs dires, n’ont fait qu’alimenter la polémique et radicaliser les deux camps.
Bon papier. Merci
[…] http://nawaat.org/portail/2013/07/10/ramadan-en-tunisie-aucune-loi-ninterdit-louverture-des-cafes-et… […]
L’article n’est pas mal mais complètement hors de propos dans le sens où cela fait croire aux lecteurs que légalement ils ne risque rien. Mais vous oubliez les lois ou on doute tout comme akhla9 7amida et tachouiche fi tari9 el 3am. Lois qui laissent libre cours à la bêtises des juges et du ministère publique..
l’année dernière pendant le ramadan nous etions en visite à Bizerte, avec mes petites filles, elles voulaient faire pipi, impossible de trouver un café ouvert, heureusement une femme bien gentille nous a proposé d’aller chez elle . Pas terrible pour le tourisme !!!!
Je note qu’à aucun moment nos apprentis muphtis ne se référent au Saint Coran qui dit”nulle contrainte en matière de religion” lla ikrahha fi eddine
Mais, on sait tous, la manière avec la quelle les lois sont détournés .
On peut toujours supposer que c’est une attaque a la pudeur .
Aprés tout Amina,a été jugée, pour complot contre la sûreté de l’état !
Chmeta fi Adel Almi, j’adore !
Vivent les tunisiens libres !
La décision du ministre de fermer les cafés et restaurants contrarie les libertés individuelles garanties par la constitution. Bon, actuellement cette constitution est suspendue. Mais, Il n’y a pas de loi qui ne s’applique que pendant le mois du carême. Il faut attaquer en justice cette décision devant la juridiction compétente (T.A). Pourquoi le syndicat des cafetiers et des restaurateurs ne bouge pas!
Il ne bouge pas car ils ont peur. Peur de la police, peur des barbus…
il faut garder à l’esprit la dimension du calcul politique derrière les sorties commandées de ce charlatan inculte. mener le débat de l’opinion publique toujours autour de l’islam. donner l’impression qu’ils sont les protecteurs de l’islam et que l’islam est en danger. accentuer le clivage imaginaire entre musulmans et anti islam. ce ne sont que des débilités populistes qui font partie des outils du commerçant de la religion.
il se passe le même phénomène en France où on attise les peurs dans le but de cliver et d’accéder au pouvoir. dans ce genre d’approche on ne souci pas des valeurs. le FN se fait champion de l’islamophobie et Sarkozy était le champion de ce genre de procédé qui clive.
je pense que les tunisiens sont assez mâture pour ne pas tomber dans ce genre de foutaise. ne pas donner à ce genre d’énergumène une couverture médiatique qui ne mérite pas.
je pense qu’ennahdha et ses sbires sont en train de se mettre un doigt dans l’œil avec ce genre de comportement.
jeûner ou pas les tunisiens ont toujours été libres, il faut graver ces libertés dans notre constitution et dans nos lois pour éviter les sorties de ce genre d’imbéciles.
Qu’ils viennent faire Ramdan en Europe, toutes ces tentations alimentares,vestimentaires et j’en passe ne ne font elles pas que renforcer le pratiquant dans sa quête vers l’ascetisme? Ces musulmans “contraignants” ne font qu’assombrir le Message divin… si on y croit.
vous avez vu le cas du Marroc? c’est intéressant
http://www.youtube.com/watch?v=I4ovxpwQCsM&feature=share
sinon très bon article ! Merci
Que l’islam soit la religion d’Etat implique que le respect du jeûne du Ramadan incombe juridiquement aux seules instances étatiques comme le restaurant universitaire par exemple. L’argument de Khademi ne vaut donc pas pour des endroits de gérance privée comme un café ou un restaurant. D’ailleurs Khademi tout entier ne vaut pas pour la gestion de l’Etat, si on pouvait avoir des ministres qui ne brillent pas par leur amateurisme, ça nous éviterait les bla-bla inutiles et contre-productifs.
un debat dont certaines assertions me coupent……l appetit
le problème n’est pas la présence ou non du loi , mais le problème c’est le respect entre les gents
musulmans et le non musulmans, les pratiquants et le non pratiquants . c’est une crise éthique, c’est l’état d’esprit qui doit être changer .
[…] Ramadan en Tunisie : Aucune loi n’interdit l’ouverture des cafés et restaurants […]
6 juillet 2013, Noureddine Khademi : La fermeture des restaurants pendant Ramadan est obligatoire!! … Que se passera-t-il cette année ?
[…] Tunisian legislative texts do not explicitly criminalize the act of eating in public places during Ramadan, Ahmed Rahmouni, former judge and president for the Observatory of Judicial Independence, explained to Nawaat. […]