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Mouna Ben Nasr n’a pas respecté la décision de retrait de l’Assemblée constituante que notre parti a prise le lendemain de l’assassinat politique de Mohamed Brahmi. Elle ne fait plus partie d’Al Moubadara (L’Initiative) nous a affirmé le député Karim Krifa.

Pour la députée, le bien commun de la Tunisie ne serait pas dans la dissolution de l’Assemblée Constituante, une vision que son parti ne partage pas.

Pour Mouna Ben Nasr, le bien commun exige la poursuite des travaux de l’Assemblée

Contrairement à ses collègues, la députée Mouna Ben Nasr a refusé, mardi 6 août, lors de la plénière à l’Assemblée dédiée au défunt Mohamed Brahmi, de respecter la décision de son parti. Pendant que les quatre autres élus étaient devant l’ANC avec les députés qui se sont retirés, Mme Ben Nasr a préféré être “à l’intérieur”.

Je ne suis pas plus patriote que mes collègues, mais nous n’entendons pas les choses de la même manière. Si je suis là, c’est pour répondre à l’appel du soldat blessé qui a exhorté tous les partis à l’union pour faire prévaloir le bien commun du pays. a-t-elle déclaré devant les 135 députés présents à l’ANC

D’après Mme Ben Nasr, les sit-in doivent être suspendus pour que les forces de l’ordre puissent assurer la sécurité du pays dans ce contexte tendu, notamment après que les soldats sont devenus la cible des terroristes en Tunisie.

Pour le parti Al Moubadara, le bien commun exige la dissolution de l’Assemblé

Pour M. Krifa, l’intervention de Mme Ben Nasr « sous-entend que les 60 autres députés en retrait ne seraient pas patriotes ».

N’est-ce pas de notre devoir, nous aussi, de sauver le pays ? s’est-il interrogé avec étonnement.

Dans son communiqué du 26 juillet, Al Moubadara a demandé la dissolution de l’Assemblée constituante, qui a dépassé le rôle pour lequel elle avait été mise en place. Il a aussi proposé un comité d’experts qui puisse réaliser le consensus pour finaliser l’écriture de la Constitution.

Le dilemme de la légitimité dans une période de transition démocratique

Poursuivre les activités de l’Assemblée est devenu un sujet de division entre députés, voire entre ceux issus du même parti, comme celui d’Al Moubadara, souvent jugé sympathisant des caciques du parti dissous RCD. Chacun semble avoir sa vision du “bien commun” de la Tunisie.

Quelques heures plus tard, après l’intervention de Mme Ben Nasr, le président de l’ANC, Mostapha Ben Jaafer, a déclaré la suspension des activités de l’Assemblée, sans qu’il ait la prérogative d’une telle décision, comme l’atteste le constitutionnaliste Kais Saïd.

Bien qu’il fasse partie de la Troïka, M. Ben Jaafer a contraint par son initiative ses partenaires, CPR et Ennahdha, à un dialogue national, pour mettre fin à cette crise.

Alors que la Troïka parle généralement de la « légitimité des urnes », d’autres, notamment dans l’opposition, rappellent que les élections du 23 octobre 2011 ont été faites pour durer une année seulement, et que cette assemblée a largement dépassé [1], dès la rédaction de la loi sur l’organisation provisoire des pouvoirs publics, sa mission, à savoir la rédaction de la Constitution, pour laquelle elle a été mise en place.

Plusieurs facteurs ont conduit vers le “dilemme de la dissolution de l’Assemblée constituante” :

Tous ces rendez-vous manqués ont creusé le manque de confiance dans l’Assemblée, au point de voir apparaître deux types d’élus du peuple : ceux qui se réclament de la légitimité, et ceux qui ne la reconnaissent plus.

Par ailleurs, le contexte de transition démocratique que vit actuellement la Tunisie rend la question du consensus politique plus importante encore que la légalité des institutions pour atteindre “le bien commun” de la Tunisie et sortir de la crise.

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[Notes]
1- Les autres attributions de l’Assemblée sont :

  • Représenter le pouvoir législatif ;
  • Contrôler les actions du gouvernement.