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Chère maman,

Aujourd’hui, je vais être très bref, en ce jour de la fête des femmes du 13 août 2013, où notre jardin à tous a besoin d’être bien cultivé, bien protégé et bien arrosé de toutes nos sueurs libres et inaliénables, sans aucune forme d’esclavage, sous quelque prétexte que ce soit. Car la Tunisie n’est qu’un petit jardin, capable, en dépit de tout, de nous réunir tous, femmes et hommes.

Il y longtemps que j’estimais ne pas être qualifié, en tant qu’homme, pour parler en votre nom, ni au nom de toutes les femmes et de toutes les petites jeunes filles, comme ma sœur, ma tante, ma grand-mère, la mère des mes enfants ou encore ma voisine. Car j’ai toujours considéré que vous étiez toutes, quel que soit l’endroit où vous vous trouvez, et quelle que soit votre couleur de peau, blanche, noire ou jaune, des êtres nés libres, et que vous mourrez en femmes libres, sans la tutelle d’aucun, d’où qu’il vienne.

C’est cela, la liberté de la femme !

Certes, nos sociétés tribales ont toujours été gouvernées par la masculinité et par un paternalisme exacerbé, à la fois inique et hypocrite.

Déjà, à un âge très précoce, j’ai entendu parler de « la libération des femmes », de « l’émancipation des femmes », de « l’égalité en droits et en devoirs entre l’homme et la femme », et que sais-je encore.

Mais, ma chère maman, ne vois-tu pas que mon père avait, depuis longtemps, reconnu l’existence d’un boulet, d’une tutelle, et même d’une forme d’esclavage exercé à ton égard, comme partout ailleurs ?

Tous, parmi nos sociétés hypocrites, de Thala à Washington, de Paris à Pékin, et de l’Afghanistan au Japon, ont reconnu l’existence d’un forme insidieuse d’esclavage exercée sur les femmes, où qu’elles se trouvent, à des degrés différents, mais dont la finalité est toujours la même : maintenir la moitié de l’humanité sous le joug des hommes.

C’est en ce sens, ma chère maman, que je ne suis pas en droit de parler en votre nom. Et par là-même, je ne peux qu’implorer votre pardon pour nous tous, égoïstes que nous sommes, et par-dessus tout iniques et infatigables coureurs derrière le pouvoir, celui des apparatchiks.

Jusqu’en 1964, la femme en France ne pouvait s’adonner à une activité commerciale que si son mari l’y autorisait légalement ; et ce dernier était, de droit, gestionnaire de ses intérêts et de sa fortune, si fortune il y avait. Pourtant, cette même femme, maintenue sous la coupe de son mari, a été celle qui a fait fonctionner les usines d’armement, d’artillerie lourde et légère, les commerces et les boulangeries pour défendre le pays et nourrir ses habitants à l’occasion de la Première Guerre mondiale. Les femmes ont pris les armes, sont entrées en clandestinité, ont constitué des réseaux de résistants pour défendre la France contre l’occupation allemande pendant la Seconde Guerre mondiale.

Aux Etats-Unis, pendant que le Nord et le Sud guerroyaient pour plus de pouvoir et d’égoïsme, les uns étaient pour davantage d’esclaves parmi les noirs, les autres leur promettaient une forme d’esclavage plus insidieuse dans les usines, les chantiers et les fabriques, sous le label de « main d’œuvre libre et consentante » !

Ma chère maman, je sais que vous vouez au Zaim Habib Bourguiba un respect indescriptible. Moi aussi, j’ai beaucoup de respect pour lui, pour m’avoir envoyé à l’école de la République et fait de moi un citoyen digne de ce nom. Certes, il est vrai qu’il enlevé le voile banc de la femme, le « safsari », symbole de soumission de la femme à l’homme. Mais il n’a rien donné de plus : ni droits égaux, ni revenu propre au titre de la maternité pour préserver sa liberté. Car l’argent est le nerf de la guerre !

Aujourd’hui, les fous d’Allah entendent vous couvrir de la tête aux pieds avec la burqa, une autre forme de voile intégral de couleur noire, symbole de tristesse et d’enterrement. Ainsi, ils agissent en conformité avec la culture de la Jahiliya, où les hommes enterraient leur filles vivantes, car ils estimaient que la femme était un être maudit et honteux !

Certes, aujourd’hui l’esclavage des noirs est devenu un crime. Mais quand constituera-t-on un deuxième tribunal de Nuremberg pour juger, cette fois-ci, les crimes commis par les hommes sur les femmes ?

Quand les Nations unies créeront-elles une cour pénale internationale pour juger les crimes de ces tortionnaires, et rendre ainsi justice à l’autre moitié de l’humanité ?

Mieux encore, n’a-t-on pas dit que « la femme est à la fois l’origine du monde et son avenir » ?