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Un phénomène de demande de révision des nominations dans l’administration consulaire et dans les hautes fonctions de l’état atteint ces derniers jours son apogée avec des pétitions nominatives et des demandes de limogeage sans aucun autre justificatif que l’appartenance partisane sélective.

Nous, citoyens tunisiens de la diaspora, intellectuels, militants, élus de l’immigration, membres ou dirigeants de diverses structures associatives ou politiques, sommes interpellés par cet appel qui prétend parler en notre nom. C’est donc pour nous l’occasion de réaffirmer les principes qui nous sont chers au sujet des nominations dans l’administration et de la mission de ses cadres :

1- La neutralité des cadres de l’administration ne saurait justifier le viol de la liberté de conscience et des droits politiques

La neutralité est une exigence naturelle que nous attendons tous de l’administration. Par conséquent, le devoir de réserve s’impose à tous les agents de l’Etat dans le cadre de leurs fonctions. A l’inverse, en dehors de ses fonctions, chacun d’entre eux peut jouir de ses droits politiques et de sa liberté de conscience. Il s’agit là d’un des droits politiques les plus élémentaires inscrit dans notre constitution. L’extension de la neutralité à la sphère personnelle et privée relèverait d’une curieuse neutralité de conscience que personne ne pourrait vérifier. On voit les dérives vers lesquelles cela pourrait mener.

2- La priorité d’une société démocratique est d’ériger une administration enfin au service du citoyen

Par ailleurs la neutralité de l’administration, aussi importante soit-elle, ne fait pas un projet à elle seule. Le principe de fonctionnement ne construit pas la finalité du projet collectif. Or, l’administration d’un pays démocratique ne saurait se fixer comme autre but que celui d’être au service du citoyen. C’est ici, nous semble-t-il, que nous devrions placer le débat et non sur celui des calculs politiques étroits. Ces derniers ne riment qu’à prendre en otage une administration qui raterait alors une autre occasion d’être modernisée.

Car, oui, nous le voyons tous les jours, cette institution qui hérite du lourd passifs de la dictature – avec ses cohortes de népotisme, de corruption et de mépris du citoyen – n’a jamais été habituée à mener une réflexion de fond sur son efficacité pas plus que sur sa capacité à fournir à tous les citoyens un service digne de leurs attentes.

Et oui encore, nous devrions parier sur nos forces vives pour reformer progressivement l’institution selon les règles du droit et à travers le dialogue. Ce pari ne peut réussir que par l’engagement de tous, agents, autorités de tutelle, organisations syndicales et société civile.

3- Le bilan et l’efficacité sont les seuls critères de maintien ou non en poste

En ce qui concerne l’utilisation de l’administration pour un avantage quelconque dans le déroulement des élections. Il serait plus opportun de travailler à une méthode qui permettrait d’éradiquer ces risques et qui permettrait de protéger l’administration de toutes ces tentations. En particulier, pour ce qui est de la crainte légitime de l’utilisation d’une base des données des tunisiens à l’étranger pour des fins électorales, nous pensons qu’il revient à l’ISIE seule de mettre en place des dispositifs permettant à toutes les parties prenantes de pouvoir envoyer de façon équitable de l’information à tous les électeurs.

La réforme de l’administration ne saurait se faire sans la mise en place de réelles procédures d’évaluation de son efficacité. Ces procédures permettront d’évaluer d’une manière objective le rendement des agents et non plus sur leur capacité à se soumettre aux désirs et répondre aux pressions de leurs supérieurs qui aujourd’hui déterminent leurs notations de manière complètement subjectives. Les cadres administratifs et les personnes nommées seront quant à eux jugés sur le rendement global des administrations qu’ils chapotent. Il conviendra donc de définir la mission de l’institution afin de d’évaluer objectivement si celle-ci à l’atteint ou non. Ce sont ces seuls critères qui permettront de maintenir ou non une nomination.

C’est en ces termes que nous pourrons réellement aborder une réforme saine de l’administration qui n’a que trop servi volontairement ou non la dictature. Depuis le début de la transition la Tunisie a évité le piège de la chasse aux sorcières et de la division par une conviction forte dans les droits humains. Nous ne pouvons cautionner aujourd’hui un retour en arrière ni de la part de ceux qui les défendent ni de ceux qui les ont bafoués durant les années de dictature.

Signataires

Nabil Addad, militant politique
Mohamed Ali Alloulou, enseignant chercheur
Yassine Ayari, militant écologiste
Yassine Ayari, militant associatif et Blogueur
Khaled Ben mohamed, conseillé municipal Vitry
Hela BouDabous, militante associative
Dafralah Chafai, militant associatif
Mohamed Dhaoui, militant associatif
Sonia Djelidi, activiste et militante des droits de la personne
Amine El Beji, militant politique
Mouaffak Kaabi, militant politique et associatif
Amin Karker, militant associatif
Wahbi Jomaa, Universitaire, Ettakatol
Wajdi Limam, militant associatif
Béchir Nefzi , élu France 1 CPR
Sayida Ounissi, Doctorante Paris Panthéon Sorbonne
Nayla Romdhani, Maire adjointe de Cergy chargé de la politique de la ville
Mondher Snoussi, médecin, militant politique
Nadia Tarhouni, militante associative
Fethi Abdelbaki, militant associatif