Une transaction est en cours de finalisation entre Tunisie Télécom et son partenaire Emirates International Telecommunications LLC (EIT) concernant la vente de l’opérateur téléphonique maltais Go. Le groupe émirati s’apprête à vendre l’intégralité de ses parts dans l’opérateur maltais à Tunisie Télécom pour un montant de 300 millions d’euros. Menée dans la plus grande discrétion, cette opération plus qu’hasardeuse semble s’effectuer sous la bénédiction du gouvernement tunisien, apparemment incapable d’en comprendre les enjeux.
Actionnaire de Tunisie Télécom à hauteur de 35% du capital, EIT se trouve actuellement dans un besoin pressant de liquidité. La vente de Go apparaît comme une tentative de vendre à la hâte « les bijoux de familles ». Des bijoux en toc, au regard du peu d’engouement que suscite la vente de la société maltaise, acquise par EIT durant les années fastes du secteur des télécommunications. Sous les conseils du Crédit Suisse, EIT décide de se tourner vers Tunisie Télécom. Il ne s’agit plus alors que de convaincre M. Nooman Fehri, ministre des Technologies de l’information et des communications, et M.Nizar Bouguila, PDG de Tunisie Télécom. Chose qui semble avoir réussi puisque l’ancienne équipe managériale a démissionné début août 2015 suite à des tensions avec le ministère.
Aggravation de la dette publique
Croissance au point mort, cash-flow négatif chez plusieurs opérateurs et plans de licenciement : tous les spécialistes s’accordent sur la situation catastrophique du secteur des télécoms en Europe. Concurrencés par les services de télécommunications en ligne – dits « Over the top » (OTT) – les opérateurs européens sont sous pression. Ce qui les pousse notamment à chercher d’autres marchés, en Afrique, nouvel eldorado des télécommunications, ou à réduire leurs coûts d’exploitation en partageant les réseaux.
Dans ce contexte, Tunisie Télécom nage à contre-courant en faisant l’acquisition d’un micro opérateur européen (moins de 300 000 abonnées[1]), sur un territoire qui ne compte que 450 000 habitants et où la pénétration mobile est déjà supérieure à 130%. D’autant plus que Go n’est pas en grande forme. Endetté à hauteur de 40 millions d’euros, son BFR [besoin en fond de refoulement, fond destiné à couvrir les besoin en trésorerie Ndr] accuse aussi un déficit de 6 millions d’euros supplémentaires. A 300 millions d’euros, l’opérateur maltais est donc largement surévalué. A titre d’exemple, Maroc Télécom s’était rendu acquéreur de 6 opérateurs africains pour un montant de 571 millions d’euros.
Cette acquisition est d’autant plus absurde quand on connaît la situation difficile que traverse actuellement l’opérateur national. En perte de vitesse sur le marché tunisien, les comptes de TT sont dans le rouge depuis deux ans. Le crédit de 300 millions d’euros à 8% que Tunisie Télécom s’apprête à contracter sur 30 ans auprès du Crédit Suisse ne va pas arranger les choses. D’autant plus que le remboursement de cet emprunt se fera en devise, selon un taux de change fixe prévu sur 5 ans par le Libor[2].
Il se pourrait même que l’entreprise connaisse une crise semblable à celle de 2006, consécutive à sa privatisation avec, en prime, le risque d’une faillite accélérée. De son côté, l’État tunisien qui dispose toujours de 65% du capital de Tunisie Télécom, devra en subir les conséquences. Si les comptes de l’opérateur ne s’améliorent pas, il lui reviendrait de payer les pots cassés. En attendant, cette opération devrait d’ores et déjà aggraver le taux d’endettement national de près de 1%.
Conflit d’intérêts
Economiquement suicidaire, le rachat de Go frôle également le conflit d’intérêt. En effet, c’est à Emirates International Telecommunications, deuxième actionnaire de Tunisie Télécom, que reviendra les bénéfices de la transaction. Cela s’avère problématique lorsque l’on sait que plusieurs personnalités à des postes clé sont directement liées au groupe émirati. Le cas le plus flagrant est celui d’Olivier Contagrel, négociateur en chef de la transaction, nommé directeur général adjoint de Tunisie Télécom le 30 décembre 2015, et représentant d’EIT au conseil d’administration.
De même que Philippe Montourcier, actuel directeur financier de TT depuis avril 2012, qui occupait le même poste à EIT jusqu’en mars de la même année. Enfin, Deepak Padmanabhan, président du conseil d’administration de Go mais surtout directeur général d’EIT, est aussi représentant du groupe émirati au conseil d’administration de Tunisie Télécom. Ayant placé ses soutiens aux postes stratégiques de la négociation, EIT s’assure de pouvoir vendre l’opérateur maltais au meilleur prix. Au détriment de Tunisie Télécom et dans l’indifférence totale de la Commission d’assainissement et de restructuration des entreprises à participation publique (CAREPP).
Stratégie à la carte
Dans l’indifférence également du gouvernement, qui ne semble pas s’offusquer qu’une entreprise – dont il reste le principal actionnaire – décide unilatéralement un développement à l’international, alors que rien ne le prévoyait dans son plan stratégique. Engager une telle opération en dehors de toute stratégie et en un temps record relève au mieux de l’incompétence, au pire de la compromission. Tout se passe comme si un accord avait été passé entre Nooman Fehri, Nizar Bouguila et EIT pour garantir, chez Tunisie Télécom, une stratégie à la carte au service de la trésorerie du groupe émirati. A se demander si Monsieur le ministre n’accorde pas plus d’intérêts à flatter ses soutiens de Dubaï qu’à l’avenir de l’opérateur national et, à fortiori, du pays.
L’expérience montre que le plus grand problème de Tunisie Télécom est le management ; et la nomination de M. Bouguila n’y a rien changé. Cela est encore plus flagrant dans la gestion de ses filiales tunisiennes et étrangères. En témoigne l’état de l’opérateur Mattel (Mauritanie) et de la Société tunisienne d’entreprises et de télécommunication (SOTETEL), toutes deux au bord de la faillite. Dès lors, Tunisie Télécom a-t-elle réellement la capacité de gérer un opérateur régi par les règles des marchés financiers européens ? La chute de 16% de l’action de Go le jour même de l’annonce de son rachat apporte déjà un élément de réponse.
Mauvaise destination
Si après avoir perdu son combat en Tunisie, l’entreprise cherche véritablement la croissance par acquisition, l’Europe n’est pas la bonne destination. Au lieu de se risquer dans une telle opération, pourquoi ne pas plutôt investir dans l’opérateur Mauritanien Mattel, dont Tunisie Télécom a gelé tout investissement depuis 5 ans sous la pression d’EIT ? Pour 40 millions d’euros – soit environ un septième du prix de Go – l’entreprise pourrait récupérer la totalité des parts de la société et s’assurer un investissement beaucoup plus sûr. A l’inverse, cette transaction hasardeuse, autorisée si ce n’est encouragée par le gouvernement, finira par achever Tunisie Télécom. Elle aurait aussi des conséquences dramatiques sur le secteur des TIC, qui représente en 2014 près de 7,2% du PIB, soit presque autant que celui du tourisme.
L’affaire de TT-EIT-Go risque de faire couler beaucoup d’encre. Le 9 juin, le député Imed Daïmi s’est saisi de l’affaire en demandant que le ministre des TIC soit auditionné par une commission parlementaire. La réaction ne s’est pas faite attendre puisque le lendemain, le site Businessnews offre au PDG de TT une longue tribune qui n’apporte aucune réponse tangible aux faits qui lui sont reprochés.
Notes
[1] Le site de Go Malta annonce 500 000 clients ; l’ecart s’explique par le nombre de cartes SIM vendues et celles réellement actives.
[2] Taux de référence du marché monétaire fixé à plus ou moins long terme afin d’offrir une garanti à la fluctuation des devises.
كم أنت كبير أيها الشعب الفيّاس البصّاص الغفّاص. كم أنت كبير جداااااا
Un scandale catégorie poids lourd.
“Commission d’assainissement et de restructuration des entreprises à participation publique (CAREPP).” ça me fait rire.
“en dehors de toute stratégie.” ! et bien si, la stratégie est bien claire … en tout cas la stratégie des gagnants, qui sont corps à corps avec le système de la finance mondiale en libre navigation et à transaction malicieuses, c’est tout simplement augmenter les angles de l’endettement afin de retirer les soutiens en cas !!! Tout est lié à l’avenir politique en Tunisie, il faut qu’il reste dans la droite ligne des objectifs de la finance mondiale… Démocratie, justice sociale, souveraineté sur la finance publique, sont les ennemies; et il faut les mettre à genoux. Karkena, Tala, hay Ettahamen, El Mallassine, le basin minier, ou El Jem, Ben Gardene ou l’Agareb, … silence le monde appartient aux grands.
Pour rester dans la “dynamique” de l’économie, combien d’emplois vont être crées par cette transaction? ou bien c’est pour quand un plan de restructuration de TT, et des licenciement à gogo? Quelles sont les capacités de “notre” TT de gagner des millions d’abonnés en dehors de la Tunisie?
On ne voit pas le mal partout, c’est juste une autre grosse affaire de corruption.
Et cela ne s’arrêtera pas de si tôt en Tunisie tant que la culture du bakchich et des pots de vin ne sera pas considérée comme Le Fléau ayant donné naissance a toutes nos dérives sociales et notre catastrophe économique.
Il faut combattre la corruption n’ont pas comme est combattu le terrorisme, mais plus fort et pire encore car sans la corruption une grosse portion du terrorisme n’aurait pu ni naître ni proliférer.. Alors sans parler de la situation économique, des emplois perdus et de tous ces milliards en devises et en dinars à jamais perdus chaque année depuis des décennies au profit de sociétés étrangères (orientales ou occidentales) et grâce à des intermédiaires tunisiens véreux et assassins devenus millionnaires du jour au lendemain.
La non-corruption c’est une question de survie et de pérennité qui va chercher ses fondements dans l’éducation et les principes moraux d’une personne.
Une société corrompue n’a aucune chance de survivre. Elle pourrira et mourra.
Tant qu’il y’aura de la corruption en Tunisie, il y’aura des spoliés, des faillites, des pauvres, des terroristes et des morts. Il y’aura tout cela avant la chute dans laquelle il n’y aura plus rien a corrompre ni a voler. Le chaos.
C’est une guerre d’un autre genre a l’origine de la majorité des maux sociaux et économiques de la Tunisie.
Réagissez car le point de non-retour est tout proche, on le voit, et bien souvent il nous arrive de lui tourner autour!
Un article tres bien ecrit, bien etofe, mais dont les propos si il s’averent veritables sont tres inquietants.
Notre pays qui croulent deja sous les dettes peut il s imposer une aventure qui se retournera contre le peuple???
Cela m inquiete terriblement !!!
Ils ( cette vermine) poussent Tt vers la faillite et ils seront les premiers rettribues lors d un futur rachat. Classique
Magnifique MM 👍
ALLOOOOO la CASBA Ya QQU’1 !!!!!!
Encore TT a la page ce matin avec son PDG a Express FM: Si j’ai bien entendu le crédit est de 300 Millions d’EURO sur 5 ans.
Alors à vos calculettes !!!!
Pour un taux de crédit annuel de 8%, sur cinq ans le total devient 372 Millions Euros.
Dans les meilleurs des cas GO va générer et distrubier 10 M EUROS, donc 50 MEUROS sur le 5 ans.
TT doit se débrouiller pour rembourser le reste qui est 322MEUROS sur le cinq ans.
Si on considère le glissement du DNT devant l’EURO seulement de 10% par an (glissement depuis le début de l’année 2016 est de 10%)
La somme totale à rembourser devient : 354 MEUROS donc 794Millions Dinars sur le 5 ans.
Donc en moyenne près de 160 Millions de Dinars par an.
Comme TT ne génère pas du cash il faut que l’Etat tunisien vole à son secours et débourse 160 Millions Dinars par an pour permettre à des petits amateurs de jouer et faire la main sur le marché international et surtout pour générer du cash frais a EIT notre partenaire SYMPATHIQUE !!!!!!!!
En attendant TT ne peut rien investir dans le pays et va jouer au cache-cache avec la faillite !!!!
Courage petits …la Tunisie est sans gouvernance EN ROUE LIBRE !!!!!!
Question subsidiaire : Comment la Tunisie va faire pour faire face à cette dépense supplémentaire en devise.? mais bon personne n’est là pour répondre….les ministres et leur chef cherchent tous des places dans le gouvernement en composition, et le reste on verra apres …;(
عزيزي توفيق، الغلطة ما يتحملهاش الوزير والحكومة والسياسيين والموظفين السامين بمن فيهم مدير عام اتصالات تونس. الناس هاذم ما جاوش من المرّيخ! هاذم أولاد شعبنا الجيعان، المتحيّل والمنافق! السرقة والقلبة تربّاو عليها منذ نعومة أظافرهم وكبرت معاهم ورضعوها في الحليب. والمال السايب يعلّم السرقة! المشكلة ماهيش “غياب الحوكمة الرشيدة” وإلا “سوء التصرّف”، هذيكة مشاكل تتصلّح في بلدان محترمة عندها شعوب واعية وعندها قيم ومبادىء. المشكلة هي عقلية شعب كامل، شعب كان يهزّ في القفة للطرابلسية ويرى فيهم مثال يحتذى بيه (في السرقة والقلبة والتحيل) ويتمنى لو كان يكون كيفهم يدّو منها للخزينة العامة! وكيف جات الفرصة والناس ولّى عندها حرية الاختيار، اختارو أفسد عباد ربي -دساترة/تجمّعيين وخوانجية- بش يحكمو. وما غير ما نحكي ع اللي باع صوتو بعشرة دينارات (أو بالأحرى باع البلاد بعاشور) وع اللي تهمّو “الوهرة والضخامة” قبل “نظافة اليد والكفاءة” واللي مستعد يقلب البلاد على واحد فاطر رمضان ولا زوز باسوا بعضهم قال شنوة “حرام وعيب والإسلام في خطر” أما ما يقلقوش “حماية الفاسدين” و”التعذيب” و”رهن السيادة الوطنية” و”تخريب البلاد والاقتصاد”، إلخ، إلخ ،إلخ. عزيزي الرعيّة، هؤلاء هم العربان ما دخلوا مدينة الا خرّبوها ونثروا الملح على أرضها. وبش تعيش معاهم: وافق أو نافق أو فارق الديار والله يرحمك يا ابن خلدون ويخفّف عليك التراب الثقيل. كنت بالحق سابق عصرك
Pays gouverné par des incompétents et des voleurs leur objectif est de s’enrichir davantage sur le dos des pauvres marginalisés bien sur ils paieront la facture finale.
Bellehi arrêtons avec cette naïveté (ou cynisme ???) qui empêche de comprendre les enjeux en parlant d’incompétence. Ces gens là, les PDG, ministres etc sont de grands diplômés, qu’ont connus les grandes entreprises, qui savent bien comment fonctionnent les grands réseaux, le lobbying … bref la “corruption légale”, ils ont tout compris (et sans doute tout organisé) et c’est pour ça qu’ils toucheront sans doute leur petite rétro-commission sous la table.
Ce n’est pas de l’incompréhension ou de l’incompétence ça s’appelle “The revolt of the elites and the betrayal of democracy” Christopher Lasch.