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L’affaire des stents périmés continue de faire du remous dans le monde médical. Aux dernières nouvelles, l’enquête  diligentée par l’inspection médicale de la Caisse Nationale d’Assurances Maladies (CNAM)  n’aurait permis de déceler qu’une dizaine de cas de stents périmés implantés chez des patients (péremption d’un mois selon nos sources) au cours d’ angioplasties coronaires, autant dire rien, au vu de l’ancienneté de cette pratique et selon certains, il semblerait qu’il y ait une volonté de « noyer » le poisson et d’arrêter là les frais.

Comme d’usage en pareil cas, la CNAM a décidé de suspendre le conventionnement des cliniques impliquées dans cette affaire et de soumettre leurs dossiers à la justice.

Par ailleurs, le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) aurait convoqué un éminent chirurgien cardio-vasculaire qui aurait implanté huit stents périmés, dans une clinique privée de Tunis.

En fait, cette affaire est symptomatique de l’état de délabrement moral atteint par certains secteurs dont le secteur médico-social et met à nu les dysfonctionnements graves au sein des services du ministère de la santé et de ceux de la CNAM. Ainsi, on est en droit de se poser ces questions troublantes :

Comment se fait-il que l’importation des stents en Tunisie, ne passe pas par le contrôle du circuit classique du médicament placé sous la responsabilité du ministère de la santé ?

En effet, Il est inadmissible de mettre des implants cardiaques hautement sensibles et onéreux (des stents , des valves, des pacemakers…) sans une Autorisation de mise sur le marché (AMM ou AMC) délivrée après dépôt et étude du dossier par le DPM (département de la pharmacie et du médicament),  car aussi étonnant que cela puisse l’être, aujourd’hui, n’importe quel commerçant peut importer et faire implanter tout dispositif cardiaque sans aucun contrôle technique ou vérification de conformité.

Beaucoup plus grave encore, depuis des années déjà circulent des rumeurs persistantes dans le milieu de la cardiologie interventionnelle dénonçant certains importateurs qui se sont déjà constitué leurs réseaux mafieux impliquant : des cardiologues, et des fonctionnaires véreux de la CNAM qui « faciliterait » les prises en charges, le réseau est « huilé » par des ristournes conséquentes ou des voyages d’agréments.

Pourquoi l’approvisionnement des cliniques cardiologiques en dispositifs cardiaques ne se fait pas obligatoirement et exclusivement par la pharmacie centrale  comme pour tout médicament ?

En effet, les stents étant un matériel médical hautement sensible et au coût particulièrement élevé, l’importation et surtout la distribution y est paradoxalement libre à ce jour, sans aucune traçabilité officielle, et sans aucun contrôle. Si une telle mesure avait été appliquée on aurait pu éviter ce dernier drame.

Comment se fait-il que la CNAM pourtant si « près de ses sous », quand il s’agit de réviser les tarifs médicaux ou de respecter le plafond des patients, applique-t-elle des tarifs surévalués et dépassés depuis des années pour les stents cardiaques ?

En effet, les stents sont actuellement remboursés par la CNAM au double voire au triple de leur valeur réelle !! Les tarifs avaient été négociés depuis une dizaine d’années, et entre temps leurs prix a énormément baissé, sans que les services spécialisées de la CNAM ne s’en rendent compte !

Ainsi, un stent nu est remboursé à 1000 D alors qu’il ne couterait que 200 à 300 Euros et le stent actif est remboursé 2600 D alors que son prix non négocié est de seulement…500-600 Euros !!

C’est à se demander quel est ce puissant lobby qui a rendu les services de contrôle de la CNAM « aveugles » durant de nombreuses années, et qui est responsable des millions de dinars déboursés injustement et in fine en devise sur le dos des assurés sociaux !

Espérons que cette affaire ne soit pas l’arbre qui cache la forêt dans ce secteur particulièrement « gangréné », et que le où les médecins qui y sont impliqués ne servent de boucs émissaires qui paieront pour tous, car maintenant que la boite de Pandore est ouverte, on peut se poser légitimement la question  de ce qui se passe aussi dans les structures cardio-vasculaires publiques…

Selon certains, les « réseaux » y auraient déjà implanté leurs tentacules car la CNAM rembourse aussi les stents dans le secteur public aux mêmes tarifs.

Messieurs les ministres de la Santé et des Affaires sociales feraient bien de prendre les choses en mains, car il y va de la réputation et de l’honneur de la médecine tunisienne et de celle des services médico-sociaux, et il faut que ceux qui ont mis la santé des tunisiens en danger pour s’enrichir paient, car dans cette triste affaire toutes les lignes rouges ont été largement dépassées.