Après un congrès national plutôt calme, le nouveau bureau national de la Ligue tunisienne des droits de l’homme traverse sa première crise, entre les convoitises de présidence et les soupçons d’ingérence venant d’un parti politique. Les 25 membres se sont divisés en deux clans. Le premier clan, majoritaire, est constitué de 14 membres et le deuxième rassemble 11 membres. Ce sont les deux listes gagnantes des élections, qui n’ont pas pu aboutir à un consensus, durant le congrès national.
Un bras de fer entre deux clans
Selon Béchir Labidi, membre du bureau national, du groupe des 11, la principale objection est l’ordre du jour de la première réunion. « Nous avons proposé que le bureau national patiente jusqu’à la tenue du congrès national et la validation du règlement intérieur pour pouvoir répartir les postes et responsabilités. Nous ne pouvons pas inverser ces deux étapes car les réformes dans le règlement intérieur touchent justement la structure de la Ligue », explique Béchir Labidi. Et d’ajouter « Nous avons aussi contesté le fait qu’une partie du bureau décide, en dehors de la réunion, de nommer Jamel Msalem comme président. Nous considérons que cette démarche est dangereuse et casse l’esprit de consensus et de transparence auquel la Ligue doit s’y attacher. Mais le groupe des 14 se considère plus légitime que nous, par son nombre et l’ancienneté de ses membres ».
Bassem Trifi, nouveau membre du bureau national, appartenant au groupe des 14 explique que la réforme du règlement intérieur ne va absolument pas concerner la structure de la Ligue. « Nous considérons que le report du partage des fonctions n’a aucun sens, surtout que tous les membres du bureau étaient d’accord sur la date et l’ordre du jour de la réunion une semaine à l’avance. En plus, par la logique des choses, le nouveau bureau, avec sa nouvelle composition, sera chargé de l’organisation du congrès national qui validera les réformes du règlement intérieur », affirme Bassem Trifi qui appelle le groupe des 11 a revenir à la table du comité du dialogue et à instaurer un débat constructif.
Durant les élections du bureau national du dernier congrès, Raoudha Gharbi a été sollicitée par plusieurs membres de la Ligue pour prendre sa présidence, mais elle a décliné l’offre. Une semaine plus tard, elle semble prendre de recul et voir les choses autrement. « Au départ, je ne voulais pas prendre cette lourde responsabilité sans m’assurer qu’il y ait un consensus. Il fallait m’assurer que je serais une présidente qui rassemble et réunis tout le monde. Le président doit être accepté et encouragé par les membres de la Ligue, les autres grandes ONG, et dans la sphère politique », explique Raoudha Gharbi, qui s’est rendue compte, après le congrès, que le nombre des militants qui la soutiennent est considérable.
Une intervention politique dans les affaires de la Ligue
Constitué majoritairement de membres venus des régions, le groupe des 11 accuse un parti politique de gauche qu’il refuse de nommer de faire pression sur Raoudha Gharbi pour qu’elle renonce à la présidence de la Ligue. Alors que le groupe des 14 affirme que Mme Gharbi a expliqué son refus de présidence par des raisons personnelles, l’ancienne militante de l’ATFD confirme avoir subi des pressions de la part d’un leader politique. « Ce coup de téléphone que j’ai reçu de la part du responsable politique était marqué par un conseil que je considère déplacé. Mis à part le manque de respect envers ma personne, il est inadmissible que des partis politiques continuent à se mêler des affaires de la Ligue. Si, avant la révolution, ce genre de comportement était accepté et motivé par la dictature, aujourd’hui, il n’a pas lieu d’être », conteste Raoudha Gharbi. Pour elle, le conflit actuel est la responsabilité des tous les membres du bureau national. « La priorité ne doit absolument pas être le partage des tâches ou l’organisation du congrès. Le plus important est la solidarité entre la direction et les sections régionales, et entre les membres eux-mêmes du bureau national. En ce moment délicat, nous avons besoin d’un débat calme pour résoudre tous les quiproquos et engager un consensus sur la mission de la Ligue et ses priorités. De la discussion jaillit la lumière », explique Raoudha pour inviter ses collègues à dialoguer cartes sur table pour « sauver la Ligue ».
De son coté, Jamel Msalem, président actuel de la Ligue, affirme que des discussions internes sont en cours pour trouver un compromis à propos du partage des responsabilités entre les membres du bureau national. « Nous ne pouvons pas commencer notre mission alors que nous sommes divisés. Les discussions se poursuivent et nous allons bientôt parvenir à un accord en ce qui concerne le congrès national et la mission du bureau », affirme Msalem.
Personnellement je souhaite un bon rétablissement à notre conscience collective … Cette ligue devrait être, non pas à l’image de la réalité, mais comme élément qui pousse vers un changement de mentalité … Maintenant c’est aux 25 de jouer.