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Débarrassée de la dictature de Ben Ali, la Tunisie semble avoir beaucoup de mal à sortir de la zone de turbulence que constitue la phase de transition démocratique.

Et pourtant ! Que de choses se sont passées, et que de changements sont intervenus, depuis le 14 janvier 2011 et l’avènement de ce qu’on a appelé, à l’époque, « la révolution du jasmin » et qualifié entre autres « d’inattendue et de pacifique ». Nous avons fait tellement de choses (inhabituelles pour un pays arabe), avec relativement peu de dégâts par rapport à d’autres, qu’on a fini par nous accorder le prix Nobel. Notre pays, la Tunisie, est aussi devenu un lieu de pèlerinage et une sorte de « laboratoire d’analyse et d’expérimentation à ciel ouvert » pour tous les observateurs, analystes et curieux du monde entier.

Le problème, c’est que le Tunisien qui, à cette occasion, s’est débarrassé, il est vrai, de son dictateur et a arraché la précieuse liberté d’expression, n’a pas vu d’autres changements significatifs dans sa vie quotidienne, à part l’insécurité, l’insalubrité de ses quartiers, le désordre et la dégradation de son niveau de vie.

L’euphorie des premières heures de la dite « Révolution » et l’espoir suscité par la chute du dictateur en 2011 semblent avoir laissé la place à une profonde désillusion, une ambiance morose, une incertitude et un scepticisme latent quant à l’avenir du pays.

Que s’est-il passé au juste ?

Nous avons mis en place une nouvelle Constitution, saluée partout comme une grande réussite et un modèle dans le genre, mais certaines de ses dispositions ne manquent pas d’ambiguïtés et la plupart de nos lois sont restées toujours les mêmes (I).

Nous avons un nouveau régime, mais il est hybride, improvisé et ne ressemble à aucun système connu. Il n’est ni parlementaire ni présidentiel, mais un peu des deux (II).

En l’espace de 6 ans, plusieurs gouvernements se sont succédés et aucun n’a réussi à réaliser les vrais objectifs de la Révolution, en s’attaquant aux problèmes cruciaux que sont le chômage, les déséquilibres régionaux, la corruption, la contrebande et l’économie parallèle (III).

La récente mise en place d’un « Gouvernement dit d’Union Nationale », suite à l’initiative du président de la République du 02 juin 2016 et autour de l’ « Accord de Carthage » signé par 9 partis politiques et 3 organisations nationales, pourrait-elle permettre de relever certains défis et commencer enfin à rassurer les Tunisiens sur l’avenir de leur pays (IV) ?

I- Aurions-nous une Constitution-alibi et cache-misère ?

A première vue, on pourrait être tenté de le penser. Car on a l’impression que, pour certains, la rédaction de la Constitution n’était qu’une étape symbolique par laquelle il fallait passer, pour se donner bonne conscience, tourner la page du passé et gagner la sympathie de la population. Mais le plus important (pour eux) était surtout de dépasser cette étape, voire de s’en servir pour aller vers l’essentiel, à savoir la prise du pouvoir, la transformation de la société et son asservissement au profit d’intérêts et de desseins inavoués.

Il faut se rappeler, par ailleurs, que la rédaction de ce texte, et surtout de certaines de ses dispositions, a souvent fait l’objet de tractations et de compromis obtenus après des tensions et des oppositions frontales et régulières sur les plans politique et idéologique entre les différentes composantes de l’ANC.

C’est donc dans ce contexte, et grâce au fameux esprit de consensus, que le texte final a pu voir le jour. Mais ceci n’a été possible (ne l’oublions pas) qu’au prix de certains arrangements sur le plan rédactionnel, quitte à ce que des interprétations divergentes et tendancieuses surviennent par la suite, sur le terrain de l’application.

S’il faut donc reconnaitre que la nouvelle Constitution est incontestablement un exemple positif et rare dans le monde arabe, force est de constater aussi qu’elle n’est toutefois pas exempte de certaines lacunes ou ambiguïtés pouvant déboucher à tout moment sur des situations imprévisibles et inextricables. De plus, elle n’a pas été complétée et renforcée par des lois conformes à son esprit. Ce qui fait que son application risque d’être très limitée, voire fictive dans certains domaines, tant que le législateur ne s’est pas penché de façon sérieuse et rapide sur la conformité des lois en vigueur, à l’esprit et à la lettre des nouvelles dispositions constitutionnelles.

Parmi les ambiguïtés les plus connues, on peut citer :

– Le cas de l’article 6 de cette nouvelle Constitution, qui interdit toute atteinte au « sacré », mais ne donne aucune précision ou indication sur ce qu’il faut entendre par « sacré ». Ce qui peut donner lieu à toutes sortes d’interprétations et de complications.

– De même, comment peut-on affirmer d’un côté « l’attachement du peuple aux enseignements de l’Islam » et, de l’autre, reconnaitre « la liberté de conscience et de croyance et le libre exercice du culte », sans ouvrir la porte à des interprétations divergentes, voire opposées, de l’intention réelle des constituants.

Quant à la conformité des lois à la Constitution, il suffit de rappeler, à titre d’exemple :

– Le problème de l’inégalité de l’homme et de la femme en matière d’héritage, dans la législation tunisienne actuelle (= A la femme la moitié de la part de l’homme !). Cette règle, absurde et désuète, constitue ici un très bon exemple, puisqu’elle est en totale contradiction avec les dispositions des articles 21 et 46 de la Constitution qui garantissent l’égalité des droits et la non-discrimination entre les citoyens et citoyennes. Que faut-il donc faire ? Appliquer la loi, conservatrice et rétrograde dans ce cas, ou se prévaloir du principe égalitaire et novateur consacré par la Constitution ? La hiérarchie des normes impose normalement la deuxième solution et l’abrogation pure et simple de la loi ou sa modification.

Dans tous les cas, cela montre l’urgence devant laquelle on se trouve par rapport à ce genre d’ambiguïtés et de contradictions, et prouve à quel point la nouvelle Constitution seule reste incapable de garantir une transformation réelle et profonde de la société tunisienne.

II- Un régime improvisé, hybride et incohérent

Pendant 50 ans, les Tunisiens n’ont connu qu’un seul régime dit présidentiel, mais qui n’avait de présidentiel que le nom et qui correspondait beaucoup plus à ce qu’on appelle un « régime présidentialiste ».

Il s’agissait, en fait, d’une déformation du régime présidentiel, basée sur le culte de la personnalité et donc une personnalisation à outrance du pouvoir au profit du chef de l’Etat (le combattant suprême, le père de la nation, le guide…) et au détriment du reste des instances de l’Etat : le Premier ministre était à la merci du Président (en somme « un fusible » qu’il faisait sauter à sa guise) et le Parlement une simple chambre d’enregistrement, dépendant en plus du Parti unique dont le chef n’était autre que le Président de la République lui-même, et les décisions de ce dernier étaient présentées comme indiscutables et ne souffrant aucune critique (« car tel est son bon plaisir », pourrait-on dire).

On comprend donc, dans ce cas, que les Tunisiens puissent être dégoutés d’un tel régime et qu’ils veuillent découvrir autre chose, pourquoi pas le régime parlementaire.

Conscients de cet état d’esprit général et voulant mettre en place un nouveau régime, les constituants de 2014 ne parvenaient pas à se mettre d’accord. Ils étaient partagés entre deux tendances : ceux qui voulaient mettre en place un régime parlementaire, avec un chef d’Etat élu par le Parlement et sans pouvoirs réels, et ceux qui voulaient instaurer un régime présidentiel avec un Président élu au suffrage universel qui serait chef d’un exécutif binaire inégalitaire, au détriment du chef de gouvernement.

Finalement, le texte constitutionnel retenu (et actuel) est né d’un compromis entre les deux, mais ne repose en fait sur aucune logique, si ce n’est celle d’essayer de concilier des choix et des objectifs diamétralement opposés à la base. D’où le caractère hybride, improvisé et peu rassurant du régime mis en place, puisqu’il n’est ni présidentiel ni parlementaire, mais un peu des deux, avec en plus un exécutif dont les 2 chefs risquent de se livrer à une concurrence sans merci, pouvant être préjudiciable au pays.

On est en fait en présence d’un pouvoir exécutif à deux têtes, partagé entre un président de la République élu au suffrage universel direct et un chef (ou président) de gouvernement investi de la confiance de l’Assemblée des Représentants du Peuple. Mais, quand on compare les pouvoirs des deux chefs de l’exécutif, on se rend compte que cette situation est à priori défavorable au président de la République : il n’a, en effet, que des attributions honorifiques et, même s’il a le pouvoir de « déterminer les politiques de l’Etat en matière de politique étrangère, de défense nationale et de sécurité intérieure et extérieure », il ne peut l’exercer qu’après consultation du chef du gouvernement (article 77).

On se demande alors à quoi sert au chef de l’Etat d’être élu au suffrage universel direct et d’avoir en principe une grande légitimité populaire si, en termes de pouvoirs, il a moins d’attributions que le chef du gouvernement qui n’est élu qu’au second degré par les représentants du peuple et dont la légitimité est donc inférieure à celle du chef de l’Etat.

L’incohérence du texte ne s’arrête d’ailleurs pas là, puisqu’il accorde paradoxalement au président de la République une sorte de « pouvoir de revanche » sur le chef du gouvernement, voire de « renversement de la vapeur en sa faveur », à travers les articles 89 et 98 : en effet, en cas d’affaiblissement du chef du gouvernement ou de divergence avec sa majorité parlementaire, le président de la République peut en profiter pour l’inciter à démissionner ou encourager le Parlement à lui retirer sa confiance (article 98).

Dans ce genre de situations, le chef de l’Etat retrouve en fait un rôle déterminant et de premier ordre, puisqu’il lui appartient alors de désigner comme chef du gouvernement une personnalité acceptable par la majorité parlementaire qui soit proche de ses propres idées ou qu’il pourrait facilement influencer. Beaucoup d’analystes et d’observateurs n’ont d’ailleurs pas hésité à aller dans ce sens et à évoquer ce cas de figure, à l’occasion de la récente chute du gouvernement Habib Essid et son remplacement par Youssef Chahed, présenté comme proche de BCE.

L’avenir nous dira, en tout cas, si un tel régime va pouvoir survivre à ses propres contradictions et perdurer, sans mettre le pays en difficulté et dans des situations d’instabilité récurrente.

III- Une révolution confisquée, détournée et éloignée de ses objectifs

Comme chacun le sait, la première phase de transition, basée sur le consensus, s’est soldée par une grande réussite à travers l’organisation des élections du 23 octobre 2011. Mais force est de constater que, paradoxalement, les résultats de ces élections ont mis le pays face à lui-même et à ses propres contradictions (ou démons ?).

Car (faut-il le rappeler ?) le seul bénéficiaire de cet événement historique n’était autre que le dernier venu, à savoir le camp des islamistes qui, sans y avoir participé, a su profiter de ce soulèvement populaire et surtout du manque de préparation (et de bonne implantation) des autres forces politiques, pour occuper le terrain et gagner la sympathie d’une population dominée par la peur, la pauvreté et prête à se jeter dans les bras de n’importe qui, à condition qu’il soit contre l’ancien régime. Comme, en plus, il se présentait comme le défenseur de l’Islam et organisait pour les familles nécessiteuses des cérémonies de mariage ou de circoncision collectives et gratuites, les masses appauvries, abandonnées à elles-mêmes depuis des décennies et n’ayant aucune formation politique l’ont suivi les yeux fermées. Et cela, les Nahdhaouis l’ont bien compris et en ont profité au maximum, notamment en utilisant les sommes d’argent faramineuses et d’origines plus que douteuses qu’ils recevaient de l’étranger, en dehors de tout contrôle.

On connait la suite des événements : devenu la première force politique du pays, le parti des frères musulmans « Ennahdha » n’a pas hésité un seul instant à reprendre les objectifs de la Révolution à son compte et à leur donner l’habit, la coloration et la connotation qui correspondaient le plus (et le mieux) à ses propres intérêts et objectifs à courts et longs termes.

Dès lors, les mots d’ordre « Liberté, dignité et travail » que scandaient les jeunes dans les villes tunisiennes en janvier 2011 n’avaient plus qu’un rôle de façade et de vitrine. Ils sont juste évoqués chaque fois que nécessaire pour rassurer les gens, ne pas perdre leur confiance et surtout leurs voix d’électeurs potentiels, le moment venu. Mais la priorité était désormais la transformation de la société (objectif primordial des islamistes), la remise en cause du modèle social existant et son remplacement par un autre inspiré par la pensée « wahhabite », la déstructuration progressive de l’Etat, la déstabilisation de l’économie et la préparation du pays à devenir une proie facile pour ses « prédateurs islamistes », et plus tard une partie infime d’un utopique et rétrograde « Califat islamique ».

D’ailleurs, contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire, ce plan et cette stratégie restent toujours d’actualité, même si les islamistes tunisiens (qui ont tiré des leçons de ce qui s’est passé avec les frères musulmans en Egypte), font désormais semblant d’être des « modérés » et de grands défenseurs de la démocratie.

Non, aujourd’hui, la situation n’est guère rassurante :

Sans vouloir être pessimiste, il faut reconnaitre que notre économie est en crise, que notre classe politique peine à convaincre et est en perpétuelle effervescence, et que notre jeunesse est désabusée et sans aucune perspective. Si des résultats probants ont été obtenus sur le plan sécuritaire, grâce au courage, aux sacrifices et à l’abnégation de nos forces armées, le problème du terrorisme est loin d’être résolu et continue malheureusement de gangréner notre société. Voilà ce qui caractérise la Tunisie d’aujourd’hui, celle qui est soumise (hélas) au pouvoir direct ou indirect du parti islamiste d’Ennahdha…

Encore une fois, l’espoir suscité par la chute de Ben Ali en 2011 a laissé place à une profonde désillusion et à une inquiétude par rapport à l’avenir du pays. Beaucoup d’éléments le prouvent :

  • Le nombre de demandeurs d’emploi n’a cessé d’augmenter et touche près de 700 000 personnes, soit un peu plus de 15% de la population active.
  • Les investisseurs ne font plus confiance à la Tunisie et lui préfèrent d’autres destinations plus sûres, comme le Maroc.
  • Les moyens de l’État sont de plus en plus limités et les sources de financements de plus en plus difficiles et coûteuses.
  • Le déficit budgétaire est en constante augmentation, suite notamment aux recrutements massifs et déraisonnables dans la fonction publique (sous l’influence et à la demande d’Ennahdha), à l’arrêt de la production et de l’exportation du phosphate, à la baisse des revenus fiscaux et aux différentes tensions sociales. En l’espace de 5 ans, ce déficit a presque doublé, passant de 6 à 13 milliards de dinars.
  • Selon certaines estimations récentes, les échanges dans le commerce parallèle entraîneraient un manque à gagner pour l’Etat de près de dix milliards de dinars par an !

IV- Que peut faire le Gouvernement d’Union Nationale ?

Ce gouvernement représente pour beaucoup celui de la dernière chance. Il a la particularité d’être dirigé par un jeune de 41 ans, Youssef Chahed, et compte parmi ses membres pas moins de 8 femmes. Ce qui est à priori un signe plutôt positif, mais pas forcément suffisant. Il part avec un préjugé favorable et un appui plus large que celui dont disposaient les gouvernements précédents. Mais rien ne lui sera pardonné, y compris au sein de sa propre majorité. Au contraire, pour engager et mener à bien les réformes qu’imposent les difficultés actuelles de la Tunisie, sa tâche ne sera guère facile et il devra sans doute faire face à beaucoup de résistance. Il lui incombe donc de faire preuve de beaucoup de détermination, de courage et d’autorité, pour affirmer « une réelle volonté politique de changement », remettre le pays au travail et contrecarrer les freins hérités de l’ancien régime et ceux qui sont nés après le 14 janvier 2011.

Dans cet ordre d’idées, beaucoup de choses peuvent être faites, comme par exemple :

  • Mettre fin à la situation d’anarchie généralisée et restaurer l’autorité de l’Etat, en imposant l’application de la loi à tous, partout, sans exception, et de façon juste et équitable.
  • Choisir les vraies solutions et non les plus faciles : au lieu de chercher de l’argent dans les poches de ceux qui n’en ont pas, à savoir les ouvriers et les petits salariés de la classe moyenne (si on peut encore parler de classe moyenne), il doit (nous semble-t-il) s’attaquer au portefeuille de ceux qui se vantent de ne pas payer d’impôts et qui ne déclarent même pas leurs revenus réels. Il doit également frapper fort sur la bourse des gros bonnets de la drogue, de la contrebande et du commerce parallèle qui, non seulement ne payent rien au fisc, mais portent atteinte à l’économie nationale et à ceux qui travaillent et agissent en toute légalité….
  • Diversifier et enrichir les programmes nationaux de lutte contre le chômage en général et celui des jeunes en particulier. Beaucoup de solutions peuvent être envisagées à l’instar de ce qui existe en France, par exemple. Sans rentrer dans trop de détails techniques et juridiques, on peut en citer deux :
    1. Le développement des contrats en alternance (contrats d’apprentissage ou contrat de professionnalisation d’une durée de 24 mois), qui permettent au demandeur d’emploi d’intégrer une entreprise quelconque sur un poste donné, tout en poursuivant une formation en relation avec ce poste et d’acquérir ainsi une qualification à la fois pratique (au sein de l’entreprise) et théorique (au sein d’une école ou d’un organisme de formation). Ayant le statut de salarié à part entière, la personne embauchée touchera un salaire dont le montant évoluera de façon progressive en fonction de son âge et de son ancienneté.
    2. La création d’ « Entreprises d’Insertion » subventionnées par l’Etat ou les collectivités locales, pour avoir une équipe de permanents professionnels confirmés dans leurs domaines et d’embaucher ensuite (mais uniquement) des personnes en difficulté d’insertion ou des demandeurs d’emploi de longue durée (plus de 12 mois de chômage). Le but recherché étant de mettre les salariés embauchés en insertion à mi-temps sur des postes de production, avec un encadrement qualifié (des tuteurs), et, pendant l’autre mi-temps, sur une formation théorique interne ou externe à l’entreprise, en lien avec le poste et la qualification qu’il nécessite. Pendant la durée de leur contrat (24 mois), les salariés en insertion seront encadrés, accompagnés et suivis par les professionnels permanents.

Avec « les contrats en alternance » comme avec « les contrats en entreprises d’insertion », l’avantage est de permettre aux personnes embauchées de bénéficier d’un encadrement individualisé, d’acquérir une qualification par la pratique (en étant salarié d’une entreprise), la formation théorique voire diplômante et de se préparer ainsi (une fois leur contrat terminé) à se mettre sur « le marché de l’emploi ordinaire » et à affronter ses exigences avec des moyens, des compétences et une expérience qu’elles n’avaient pas auparavant.

Mais l’Etat seul ne peut pas tout faire.

La plus grave erreur serait donc de croire que tout doit venir de l’Etat.

Sur le chômage :

  • Le chômage ne peut être résorbé en totalité par la fonction publique. Les entreprises du secteur privé ont aussi un rôle sociétal important à jouer et une responsabilité nationale à assumer, par la création de postes d’emplois là où elles se trouvent.
  • Les banques et autres organismes financiers peuvent également aider à la Création d’emplois par l’octroi de prêts, par exemple, à des groupes de personnes en insertion qui présentent ensemble (pour être plus solvables) des projets de coopératives viables et bien étudiés.
  • Des investisseurs privés ou des associations spécialisées peuvent s’inspirer du « système des microcrédits », pour aider des jeunes qui présentent des projets bien préparés en vue de se mettre à leur propre compte (en menuiserie, mécanique auto, plomberie, électricité, services à la personne, etc.).

Sur le manque de civisme

  • S’il est tout-à-fait légitime et normal qu’on puisse exiger de l’Etat de nous assurer des services publics efficaces (éducation, santé, emplois, routes, sécurité…), il est tout aussi normal qu’on soit nous-mêmes obligés de déclarer nos revenus réels et qu’on s’acquitte de nos impôts. Ce qui n’est pas normal, au contraire, c’est que seuls les salariés payent leurs impôts puisqu’ils leur sont retenus à la source, alors que le reste des contribuables font comme ils veulent.
  • Le problème de l’insalubrité de nos rues et quartiers n’est pas (et ne doit pas être) de la seule responsabilité des municipalités, mais d’abord et essentiellement de celle du citoyen lui-même et de son comportement au quotidien.
  • Le non-respect des règles de vie en société (Ex : emprunter un sens interdit, brûler un feu rouge, construire sans permis,…) favorise l’anarchie et l’insécurité et prépare le terrain aux malversations, à la corruption, à la contrebande et bien sûr au terrorisme.
  • La démocratie et la liberté ne signifient ni anarchie, ni gabegie. Cela nous donne des droits, mais aussi et surtout des devoirs et des responsabilités, afin que l’on puisse vivre ensemble en paix et en toute sécurité.

Bref, pour remédier aux difficultés du pays, et sans vouloir donner de leçons à personne, car cela nous concerne tous, chaque Tunisien doit d’abord partir de lui-même, pour se remettre en question et se débarrasser de ses propres défauts et insuffisances, avant de s’en prendre aux autres ou de tout mettre sur le dos de l’Etat.

La Tunisie a fait sa « Révolution », le Tunisien doit faire la sienne.