Le Cauchemar du Bathyscaphe est le dernier roman de Khaoula Hosni, sorti il y a à peine deux mois. Depuis 2012, la jeune auteure nous offre chaque année une œuvre qui mérite considération, ne serait-ce que par les prix d’honneur décrochés pour chacune de ses œuvres. Mais est-ce que cette belle tradition, cette marque de distinction va persister ? Est ce que l’œuvre va continuer à susciter la curiosité des lecteurs et les tenir en haleine jusqu’aux dernières pages ? Est-ce qu’ils vont prendre intérêt au plaisir de la découverte du roman et à réfléchir à la leçon morale qui se dégage de cet ouvrage ?
Le Cauchemar du Bathyscaphe ne se lit pas à petites gorgées mais d’un seul trait. D’une part, le style est nettement travaillé, le langage est maîtrisé, apte à retenir l’attention du lecteur sur toute la longueur de l’ouvrage. D’autre part, une histoire cauchemardesque est tissée habilement, profondément habitée par des créatures imaginaires.
Dès les premières pages, le lecteur est rapidement emporté par une narration qui l’enveloppe tout entier, qui, tel le déplacement d’un python, le fait glisser lentement dans la lecture. Page après page, le lecteur dévore les lignes dans un silence pesant, déchiré de temps à autre par un mouvement furtif, comparable à celui d’une créature étrange de la forme d’une araignée. Le lecteur ne réalise qu’après coup, qu’après avoir parcouru des centaines de pages, qu’il est emprisonné dans une œuvre panoptique qui offre une minuscule lueur de compréhension mais qui reste mystérieuse et difficile à déchiffrer.
Le Cauchemar qui se répète, les images de la violence la plus extrême qui se relayent et les expressions de la peur, tous ces effets peints avec un excès parfois poétique, meublent toutes les dimensions du livre. Quand ce n’est pas le cauchemar qui s’annonce, un vide entoure les personnages-clefs de l’œuvre. « Ainsi Carlier perdu dans sa contemplation se tourna vers le Lac immobile ». Un air romantique comparable au poème Le Lac de Lamartine.
Voilà ce qu’on peut ressentir à la lecture de l’œuvre de Khaoula Hosni. Mais on pourrait aussi interpréter ces rêves cauchemardesques. L’entrée en matière du livre se fait par une explosion et le premier chapitre annonce clairement la tourmente du personnage principal : «le processus de la peur». Pourrions-nous comprendre cette explosion comme une parabole de la Révolution Tunisienne qui a éclaté sans que personne ne s’en soit aperçue ? « Nous étions jetés au centre du panoptique… Enveloppés par le néant et le vide… ».
L’auteure voudrait-elle nous peindre l’environnement politique et social qui prévaut dans notre pays ? « Ils se nourrissaient de notre peur, la cultivaient ardemment et s’en armaient pour tuer tout espoir en nous… » : et voilà que l’auteure nous décrit ce climat de terreur induit par le terrorisme qui sévit chez nous. « Les créatures adoraient avoir toute l’attention de leur audience horrifiée ». C’est encore une fois cette dictature extrémiste. « Le venin de la vie… une existence dominée par la peur, l’échec et le silence… j’ignore qui a remporté le droit de décider de mon avenir à court terme… ». Le Cauchemar est le fruit de ce climat de peur et de terreur qui s’est installé dans notre territoire. « Rayen était la pièce manquante dans ce puzzle… ». Est-ce le symbole de l’espoir qui renaît pour cette jeunesse perdue et sans avenir ?
Ce n’est qu’une lecture personnelle de ce beau roman de Khaoula Hosni. Les lecteurs du groupe Nabeul Book Club attendent avec impatience l’auteure, leur invitée d’honneur, pour élucider ce Cauchemar. Bonne lecture et, même si le livre ne vous plait pas, ne mimez pas la grimace de l’auteure qui s’étale en page de couverture !
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