Grandement impliquées dans la vie professionnelle, éducative ou encore dans les rendez-vous électoraux, les femmes restent, toutefois, mal représentées dans les médias audiovisuels. Le gap entre leur participation dans ces domaines et leur représentation médiatique est énorme. Le même déséquilibre qu’on peut constater dans la sphère politique décisionnelle. Le « quatrième pouvoir » est à l’image de la sphère politique. Les chiffres parlent d’eux-mêmes.

Les femmes représentent 28,2% de la population active en Tunisie. Le taux de scolarisation des filles est nettement supérieur à celui des garçons, à partir du deuxième cycle de l’enseignement de base et l’enseignement du secondaire. D’ailleurs, il est plus probable que les filles puissent terminer l’enseignement du secondaire plutôt que les garçons. La probabilité est estimé à 41,8% pour les filles alors  qu’elle n‘est que de 23,1% pour les garçons. C’est ce que révèlent les chiffres de l’Institut National des Statistiques (INS) en 2015. Activement impliquées dans la transition démocratique, les femmes représentent 47% des inscrits pour les élections de 2014. Elles constituent 49% des membres des bureaux de vote. Quant à l’observation des élections, les femmes représentantes de candidats se taillent 26% alors que celles membres d’organisations non-gouvernementales ont une part de 42,5%. Malgré leur apport dans la vie professionnelle, l’éducation et les consultations électorales, les Tunisiennes sont marginalisées par les médias. Ironie du sort : elles représentent plus de 60% du personnel y travaillant, selon Neji Bghouri, président du Syndicat National des Journalistes Tunisiens (SNJT).

Hors-champ, malgré la parité électorale

Lors des élections législatives de 2014, les femmes n’ont bénéficié que de 13% du temps d’antenne sur les chaines TV contre 87% pour les hommes. Presque les mêmes statistiques des radios où les femmes gagnent 1%. Lors des élections présidentielles, les femmes non-candidates n’ont eu que 9% du temps d’antenne. Les chiffres du rapport de monitoring de la Haute Instance de la Communication Audiovisuelle (HAICA) sur les élections de 2014 sont proches de ceux de l’Instance Supérieure Indépendante des Elections (ISIE) de 2011. Lors des élections de l’Assemblée Constituante, les hommes ont eu 90,07% du temps d’antenne à la télévision contre 9,93% pour les femmes. Dans les radios, les femmes ont eu à peine 10% du temps d’antenne. Une tendance générale qui ne se limite pas aux périodes électorales. En témoigne le rapport de monitoring de la HAICA sur le pluralisme politique dans les chaînes tv durant la période du 1er mars au 31 mai 2015. 89% du temps d’antenne va aux acteurs politiques masculins contre 11% pour les femmes. Le même constat est fait par le rapport du régulateur sur le premier trimestre de 2016 avec 8,9% pour les femmes et 91,1% pour les hommes à la télévision. A la radio, elles ont 10,67% contre 89,33% pour les hommes.

Des médias à l’image du politique

Si les pourcentages de temps d’antenne des femmes dans les médias sont nettement inférieurs aux chiffres de leur participation dans la vie publique en général, ils concordent avec les statistiques relatives aux postes décisionnels politiques. En effet, les femmes n’ont été placées en tête de liste que dans 10,9% des cas lors des élections législatives de 2014. Résultat : Malgré la parité dans les listes électorales, elles ne constituent que le tiers des députés. D’ailleurs, elles sont faiblement représentées dans le pouvoir exécutif, la formation gouvernementale d’Habib Essid n’inclut que 3 femmes, soit 6,7% des membres du gouvernement. Le gouvernement Chahed se montre moins déséquilibré avec 32 ministres dont 8 femmes, soit 20%. Autre indicateur intéressant relevé par l’INS : En 2015, la femme ne représente que 8% du corps diplomatique avec 6 femmes ambassadrices et une consule sur un total de 88 postes. Le paysage s’obscurcit quand on se focalise sur les partis politiques. La présence de la femme est extrêmement faible dans les postes de haute responsabilité (présidente, secrétaire générale). Parmi les partis représentés au parlement, aucun n’a une femme qui assume de tels postes. D’ailleurs, leurs instances internes sont généralement largement dominées par les hommes. Les femmes, ils s’en rappellent quand arrive l’heure de constituer les listes électorales. Parité oblige.