La situation n’a rien de nouveau. Depuis plusieurs années, pas une seule réunion familiale sans que la question de la hausse des prix ne soit évoquée, pas un seul passage en caisse dans les grandes surfaces sans entendre un client se plaindre de l’état de son portefeuille, pas une course au marché sans voir les prix affichés augmenter d’une semaine à l’autre. Bref, avec un taux d’inflation qui tourne autour de 8% et des salaires qui ne progressent pas, ou très peu, le Tunisien voit son pouvoir d’achat s’éroder inexorablement. Mais il est loin d’être le seul à connaître une dégradation généralisée de son niveau de vie. Nos voisins marocains ont été confrontés au printemps dernier à une hausse des prix dans des secteurs clés. Résultat : un mouvement de protestation contre la vie chère a agité le pays, avec un appel au boycott des stations-service Afriquia, l’eau minérale Sidi Ali et le lait Danone, accusés d’abus de position dominante. Un appel, lancé sur les réseaux sociaux, et qui s’est aussitôt répandu comme une traînée de poudre. Selon un sondage réalisé par le quotidien marocain l’Economiste, 47% des marocains interrogés ont boycotté l’une de ces trois firmes. Au bout de quatre mois de boycott, et un recul de 40% de ses ventes, Centrale Danone a renoncé à sa marge en vendant le lait au prix coûtant, soit une baisse de 10% sur le prix initial. Une situation inédite qui donne à réfléchir sur l’action citoyenne et sa capacité à agir de concert.
Tensions sociales
Suffit-il d’une hausse des prix pour réussir à mobiliser autant de citoyens ? A priori, non. On l’a vu, à chaque Aïd el-Idha, c’est la même histoire : les prix des moutons sont si élevés que tout le monde jure qu’il n’en achètera pas cette année… pour au final en acheter un en catastrophe la veille ou l’avant-veille du jour du sacrifice. Même chanson pour les graines de pin d’Alep à l’occasion du Mouled : de nombreux appels au boycott circulent chaque année sur les réseaux sociaux, mais que nenni, le bol de zgougou finit toujours par orner nos tables. Au Maroc, il semblerait que trois facteurs principaux aient amené à une telle mobilisation : la cherté de la vie, donc, mais aussi les conflits d’intérêts et la présence de marques hégémoniques soupçonnées de faire la loi sur le marché. « On ne sait pas précisément qui est derrière cet appel au boycott, le mouvement était liquide, sans tête d’affiche », explique Mohamed Ezzouak, journaliste marocain et directeur du site d’informations Yabiladi, « mais s’il a rencontré un tel écho, c’est qu’il y a un véritable malaise au sein de la population, lié à la baisse du pouvoir d’achat et au ras le bol de la collusion business/politique ».
Pour Transparency Maroc, « le succès de l’appel au boycott exprime un malaise profond en même temps qu’une prise de conscience citoyenne », et de poursuivre : « l’analyse d’un tel mouvement à travers le seul facteur des prix est forcément réductrice », explique l’ONG, qui met en cause la gouvernance d’une économie « minée par la rente, la corruption et l’interférence du pouvoir politique avec celui de l’argent ». Et ce, dans un contexte où le chômage frappe plus d’un jeune sur quatre. L’économiste marocain, Najib Akesbi, affirmait pour Maroc Hebdo que « la crise est bien installée et est porteuse de beaucoup de risques. Tous les fondamentaux sont au rouge : la balance commerciale et la balance de paiement ont atteint des niveaux critiques jamais atteints par le passé et l’endettement public frôle les 90% du produit intérieur brut ». Or, les gouvernements successifs n’ont cessé de mettre en place une politique économique libérale sans instances de régulation fiables. « Qui donc va réguler le marché pour protéger le consommateur et préserver son pouvoir d’achat, sachant que les salaires ne bougent pas vraiment comparativement aux prix à la consommation ? », s’interroge Najib Akesbi.
Le boycott, un outil de résistance ?
C’est donc précisément ces tensions sociales, économiques et politiques qui ont permis à ce mouvement de s’amplifier. Mais c’est aussi sa forme : les Marocains ont exprimé à travers le boycott ce qu’ils ne peuvent pas dire dans les urnes ou dans la rue. En effet, relayés par des dizaines de milliers d’internautes au printemps, l’appel au boycott est né sur les réseaux sociaux. Sous le hashtag مقاطعون# (#NousBoycottons), l’on voit circuler des photos avec les produits en question barrés d’une grosse croix rouge, des vidéos de consommateurs refusant d’acheter tel ou tel produit mais aussi des slogans visant le gouvernement.
« Ce mouvement a réussi à renverser le rapport de force. Les consommateurs dans le maquis digital ont remplacé les manifestants dans la rue », explique le journaliste Mohamed Ezzouak. Au-delà de l’impact économique, la crise fut aussi politique. Le ministre des Affaires générales et de la gouvernance, Lahcen Daoudi, a présenté sa démission, après avoir assisté à un sit-in organisé par les ouvriers de Centrale Danone demandant aux marocains de cesser le boycott.
Face à un climat socioéconomique morose et un contexte politique particulièrement fragile en Tunisie, peut-on imaginer que ce mouvement de boycott, qui s’est avéré efficace, puisse faire des vagues jusque chez nous ? Pour Chafik Ben Rouine, président de l’Observatoire Tunisien de l’Economie (OTE), « le boycott est un niveau de conscience suprême du consommateur et ce qu’a connu le Maroc est véritablement inédit ». L’expérience marocaine a d’autant plus intérêt à être connue lorsqu’une rapide analyse de la situation économique du pays démontre que le pouvoir d’achat des tunisiens risque, encore, de baisser. « Avec la dévaluation du dinars, les prix continueront d’augmenter », prévient Chafik Ben Rouine. Si l’Etat continue de subventionner un certain nombre de produits et cherche à maitriser le prix des aliments de base, comme le pain, l’huile ou le lait, on remarque que parmi les produits administrés, certains ont sensiblement augmenté. Exemple : le prix de 4 œufs a été fixé par le ministère à 840 millimes, soit une hausse de 10,3%.
Une augmentation dénoncée par l’Organisation de Défense du Consommateur (ODC) mais aussi par des internautes, qui, sur les réseaux sociaux ont lancé une campagne intitulée #خليها_تفقس (Laissez-les éclore), appelant au boycott des œufs. Un appel, passé un peu inaperçu. Pourtant, devant cette poussée inflationniste, nous verrons peut-être des nouveaux modes de résistances entrer en scène et questionner nos modes de consommation.
Voilà un article/constat.Voilà un faux problème qui cache un vrai problème économique.Le boycott est un moyen inefficace, naif et donc inutile. Pire: Cet article est une exhgération militante d’un phénomène social éphémère. Il ne comporte aucune analyse et ne propose aucune solution au problème de la faible mobilisation des gens, ni celui de la hausse des prix.
1)L’utilisation du boycott ne peut qu’être limitée à une frange de la population qui peut se priver de certains produits durant plusieurs jours.Ceux qui ont besoins d’urgence de certains produits comme les produits de base ne peuvent rien boycotter.Ils achèteront de petites quantités et c’est tout.Quand à ceux qui ont beaucoup d’argent (ceux de la classe moyenne et les riches) ils peuvent acheter aux prix les plus élevés.Ces franges de la population ne voudront jamais donc utiliser des moyens de luttes plus radicales.
2) Quand à l’analyse de la hausse des prix il n’y a que l’analyse économique.A part l’influence directe du système économique neo libéral truqué et mafiosi, la hausse des prix est du principalement au grand nombre d’intermédiaires.
Comme il n’y a eu aucune réaction à mon commentaire, c’est que tous ceux qui ont lus et l’article et mon commentaire sont d’accord sur mon opinion. Ne dit-on pas que le silence est la signification à l’adhésion? Ou est la liberté d’expression? S’est-elle transformé en je-m’en foutisme?