A quelques mètres de l’arrondissement municipal de cette région, se trouve une haute colline. Faouzi, un mécanicien installé juste en bas, nous confie que plusieurs habitants ont accaparé des terrains sur cette colline sans avoir obtenu des permis de bâtir. « Ils ont lancé des travaux de construction d’habitations de manière anarchique. Allez voir près de la forêt vous allez en découvrir davantage », dit-il.
Depuis Sidi Fathallah, quartier réputé de Djebel Jelloud, où est situé le mausolée du saint homme éponyme, l’accès à la colline n’a pas été aussi facile que nous l’avons pensé. En effet, nous avons choisi le chemin le plus risqué pour atteindre le sommet, mais au final, nous sommes arrivés. Des fragments de récipients jetés par terre, des eaux souillées coulant lentement sur la surface, des travaux de construction suspendus, mais personne ne circulait. Il était 9 heures du matin.
Pollution et bâtiments anarchiques
De l’autre côté de la colline, se trouve un large dépôt de ferraille. Là, nous avons rencontré Issam, un trentenaire diplômé en maintenance industrielle et à la recherche d’un emploi. «Nous sommes entourés par les ordures, la ferraille et les déchets. Djebel Jelloud est à un pas du centre ville de Tunis, mais les autorités nous ignorent toujours. Nous n’avons rien gagné des élections municipales. Ce sont les mêmes personnes qui gouvernent », soupire t-il. « Personnellement, j’ai obtenu un permis de bâtir depuis 8 ans, mais je n’ai pas encore un accès à l’eau et à l’électricité », ajoute t-il.
Vue d’en haut, Djebel Jelloud est envahie par des amoncellements de déchets industriels et domestiques. Des nuages de gaz sont évacués par les usines de la zone industrielle. De quoi s’interroger : y aurait-il un poumon permettant à la zone de respirer ? « Cette zone remonte à la période de la colonisation française. Rien n’a été construit depuis. La forêt demeure intacte. Personne ne l’a détruite ou massacrée », éclaircit Abderrazzek, un plâtrier dans la zone.
A Hay el-Fath, appelé aussi quartier du 14 janvier, est installée une agglomération d’habitations anarchiques, privées des moindres services essentiels. Selon Karim, un jeune habitant au chômage, ce quartier a été peuplé de façon illégale lors de la Révolution. En parcourant la zone et ses alentours, nous avons perçu un oued au bord de la route principale. Issam nous explique que la partie parallèle au passage des véhicules a été comblée lors des élections, alors que l’autre partie à gauche est toujours abandonnée et émet des odeurs désagréables.
A Hay Thameur, la situation environnementale n’est pas si différente, même si elle est moins grave qu’à Sidi Fathallah. Mais le problème de la pollution persiste. « Il faut que les habitants aussi payent le prix de leur indifférence. Il y a des poubelles partout, mais certains ne prennent pas la peine de jeter leurs déchets dedans », explique Faouzi, quinquagénaire retraité et habitant de la cité depuis son très jeune âge. « J’ai fondé une association avant la révolution pour entretenir notre quartier. Il n’y avait pas trop d’engagement pour la cause environnementale de la part des habitants », regrette t-il.
Une forêt abandonnée surplombe le quartier. Après une exploration sommaire, il s’est avéré que c’est un parcours de santé. Une grande enseigne l’indique, mais en réalité, il est clair que c’est un espace non exploité. Quelques barres fixes implantées, des haies de course alignées sur la surface l’une après l’autre et un mini stade quasi-caché. « C’est un espace vert qui pourrait être mieux exploité. La nuit, les lieux se transforment », nous indique Issam en allusion aux soirées arrosées.
Les autorités locales s’expliquent
Devant l’arrondissement municipal, six chiens errants se sont allongés pour s’abriter de la canicule. « Les habitants se plaignent toujours des chiens errants et voici que la municipalité les accueille chez elle », proteste un habitant qui se repose au bord de l’escalier. Le responsable municipal Salah Rebhi nous a reçus dans son bureau. « J’exerce mes fonctions ici depuis un mois. La situation est très compliquée. Nous sommes exposés aux contraintes administratives, d’une part, et aux exigences locales des habitants, d’autre part », se justifie-t-il.
L’arrondissement municipal de Djebel Jelloud n’est pas une direction centrale, car il est rattaché administrativement à la municipalité de Tunis, qui détient le budget et attribue les fonds aux projets locaux. Rebhi nous explique que l’arrondissement est ouvert sur les propositions des habitants et des associations locales, mais, selon lui, personne ne veut changer les choses. « Nous sommes entrain de réaménager le marché local de Djebel Jelloud. Nous avons entamé lundi les travaux. Le lendemain, tout a été remis dans son état initial. Nous avons pris des initiatives, mais les habitants ne sont pas réactifs », déplore-t-il.
Concernant les bâtiments anarchiques de Sidi Fathallah et d’autres quartiers, le responsable explique que l’administration locale a essayé de régler certaines situations. « Nous avons tenu une commission technique avec la mairie de Tunis et la délégation de Djebel Jelloud en présence des ingénieurs pour évaluer la nature des bâtiments, en l’occurrence les fonds de commerce, pour leur apporter les améliorations nécessaires. Nous ne voulons pas les démolir. Nous comprenons parfaitement les circonstances qui ont poussé les gens à s’approprier des terrains de manière illégale », enchaine le responsable municipal.
This feature was supported by the Rosa Luxemburg Stiftung with funds from the German Federal Ministry for Economic Development and Cooperation.
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