Un feuilleton sur la sellette de la HAICA chaque année, celui diffusé sur El Hiwar Ettounsi, Wled Moufida. Ce matin, l’instance de régulation a adressé une mise en garde à la chaîne fondée par Sami Fehri l’invitant à ne pas diffuser ce feuilleton avant 22h30. La même décision appelle El Hiwar Ettounsi à intégrer la mention « -16 » tout au long de la transmission du feuilleton et de la précéder par un disclaimer. Son texte est le suivant : « Ce programme contient des scènes d’une violence inouïe qui pourraient influencer les catégories sensibles surtout les enfants ayant moins de 16 ans ».

Depuis au moins trois ans, les mises en garde concernant ce feuilleton sont identiques et motivées, en l’occurrence, par la prédominance de scènes violentes où il est question de consommation de drogue, de meurtre et de viols. En 2017, c’était la troisième saison de Wled Moufida. L’autorité de régulation des médias audiovisuels a adressé une mise en garde à la chaîne. Ce feuilleton contient « des scènes choquantes pouvant influencer un public sensible, à savoir les enfants de moins de 12 ans ». Conformément aux dispositions du décret-loi 116 régissant le secteur de l’audiovisuel, la Haica a ordonné à El Hiwar Ettounsi de décaler l’heure de diffusion à 22h ainsi que l’insertion de l’indication de « -12 ans ». En 2019, la Haica intervient de nouveau pour envoyer la même mise en garde à El Hiwar Ettounssi autour de la diffusion du feuilleton Wled Moufida à cause de propos « choquants ». En outre, la HAICA a exigé sa diffusion à 22h et l’intégration de la mention « -12 ans ».

Cette cinquième saison contient autant de scènes violentes que les précédentes. On y évoque le trafic du cannabis et de cocaïne mais aussi les travailleuses du sexe et la violence morale et physique à une heure de grande écoute, 19h45.

L’exercice des droits et libertés mentionnés aux articles 3 et 4 du présent décret-loi se fait sur la base des principes suivants : Le respect des conventions et pactes internationaux relatifs aux droits de l’Homme et aux libertés publiques (…), l’égalité (…). L’application de ces principes est soumise aux règles relatives au respect des droits d’autrui ou leur réputation et notamment : Le respect de la dignité de l’individu et de la vie privée (…), la protection de l’enfant (…).Article 5 du décret-loi 116

Autre production controversée de la chaine El Hiwar Ettounssi, la sitcom Denya Okhra. La saison 4 de cette sitcom a provoqué un tollé après la diffusion de scènes sur les handicapés ou encore les personnes noires. Intervenu sur les ondes de Shems Fm, le 27 avril, Houssem Aloui du Collectif tunisien pour la promotion des droits des personnes en situation de handicap a annoncé que le collectif portera plainte contre cette chaîne tv. Et ce, après la diffusion d’une scène de  Denya Okhra, le 24 avril courant, jugée «humiliante » envers les personnes handicapées. Aloui a fait savoir que cette plainte intervient après l’indifférence de la chaîne envers une demande formulée par le collectif d’une excuse envers les personnes handicapées. Diffusée juste après la rupture de jeûne, Denya Okhra « ne permet pas d’éduquer les plus jeunes au respect des différences », déplore Aloui.

Le représentant du collectif a fait savoir qu’une autre sitcom de la même chaîne, dénommée Qesmat wkhayen, diffusée la saison dernière, a usé des mêmes scènes « dégradantes » envers les personnes handicapées à travers le personnage d’un sourd. « L’année dernière, on s’est dit qu’il y n’avait pas assez de travail sur le personnage (…) mais là il s’agit bel et bien d’une récidive de la part de la chaîne ».

La même sitcom a provoqué l’indignation d’une frange de la société civile. Khawla Ksiksi, jeune active au sein de différentes organisations non-gouvernementales, a appelé, via Facebook, au boycott de la sitcom en dénonçant le « racisme » contenu dans des scènes d’une tribu africaine en train de préparer deux personnes blanches pour les manger. L’activiste a critiqué le « racisme, sexisme, xénophobie, régionalisme, grossophobie, body shaming, homophobie » interprétés par les acteurs pour faire rire.

De son côté, l’association Aswat Nissa a interpellé la HAICA, dans un communiqué publié, le 29 avril, sur la nécessité de réguler le paysage audiovisuel face à la multiplication de scènes contenues dans les sitcoms et feuilletons « dominées par la violence verbales et physiques sur les femmes, ce qui entrainera la banalisation de ce phonème ». Et d’ajouter « Les scènes dégradantes sur les femmes consacrent une conception biaisée de la place de la femme et de leur rôle dans la société ».