Alors que la grogne sociale gagne le pays, les réseaux sociaux jouent un rôle important en relayant images et vidéos des protestations. Outre Facebook ou Twitter, TikTok a fait une percée en Tunisie récemment, notamment lors du confinement décrété en mars dernier. Les images des accrochages avec la police déferlent sur la plateforme et sont largement visionnées par la communauté TikTok (ici ou ici). Le réseau social est notamment prisé par les plus jeunes. La même catégorie d’âge en première ligne dans les protestations qui secouent actuellement le pays.
Lancée en 2016 en Chine, la plateforme compte 800 millions d’utilisateurs actifs dans le monde. TikTok a ainsi dépassé les 2 milliards de téléchargements sur l’Apple Store et sur Google Play en 2020. Le réseau social est particulièrement apprécié par les jeunes. En Tunisie, il n’y pas de données sur le nombre d’utilisateurs de cette application, ni leur moyenne d’âge. Mais les statistiques à l’échelle mondiale montre que 41 % de ses utilisateurs sont âgés de 16 à 24 ans. Plus globalement, selon les données de 2020, le nombre des internautes tunisiens a atteint les 7,55 millions, ce qui correspond à 64.20% de la population locale. Entre 2019 et 2020, le nombre d’utilisateurs internet en Tunisie a grimpé de 48 milles.
Habiba Alaya, 27 ans, community manager, constate l’influence grandissante de l’application chinoise en Tunisie, notamment lors des protestations sévissant dans le pays actuellement. « Beaucoup d’utilisateurs partagent des chansons patriotiques ou des scènes de manifestations », affirme-t-elle à Nawaat. D’après elle, l’engouement pour cette plateforme en de telles circonstances est dû au fait qu’elle est «plus safe » par rapport aux autres médias sociaux. « Contrairement à Facebook ou Instagram par exemple, TikTok accorde une plus grande marge de liberté aux utilisateurs. Il n’y a pas de risques de censure ou de blocage des publications », explique-t-elle.
Autre différence avec les autres réseaux sociaux, TikTok permet de toucher un plus grand nombre d’internautes sans restrictions. C’est pour cette raison que le youtubeur Louay Cherni, alias Must Last, a choisi d’être présent sur cette application. « Avec TikTok, je peux atteindre beaucoup d’internautes qui ne sont pas forcément abonnés à mon compte », affirme-t-il à Nawaat. Il précise, en outre, que la plateforme ne lui permet pas de déterminer les catégories d’âges de son public mais il estime que ses abonnés ont entre 13 et 24 ans.
Ces jeunes seraient attirés par l’aspect divertissant de cette application. Permettant de poster de courtes vidéos accompagnées de musique, des scénettes, des danses et autres effets spéciaux, TikTok est « facile à consommer. Il n’y a ni écrits, ni publicités », précise Habiba Alaya. Cette caractéristique de la plateforme rend ses utilisateurs « plus addict », ajoute-t-elle. Les utilisateurs de l’application passent en moyenne 52 minutes par jour sur la plateforme. 90% d’entre eux se connectent à l’application chaque jour et à plusieurs reprises. L’activité des internautes sur TikTok varie. 68% d’entre eux visionnement des vidéos d’autres utilisateurs et 55% des autres utilisateurs postent leurs propres contenus.
La community manager insiste également sur la liberté de ton de mise sur TiKTok. « Il y a plus de liberté par rapport aux autres réseaux sociaux. Les utilisateurs ne guettent pas la vie privée. Il n’y a pas l’aspect voyeuriste qu’on trouve sur Facebook ou Instagram par exemple », dit-elle. D’ailleurs, une jeune utilisatrice de TikTok préférant rester sous couvert d’anonymat nous confie : « Toute ma famille et nos voisins sont sur Facebook. Mes parents, mes tantes, mes oncles… Ils y sont tous. Même ma grand-mère y est. Du coup, si je veux faire ce que je veux, c’est sur TikTok qu’il faut être ».
La liberté de création et la simplicité d’usage de l’application rendent n’importe quel utilisateur capable de devenir un créateur de contenus et de cartonner sur ce réseau social. Cependant, TikTok est depuis son ascension mondiale critiquée pour ses pratiques abusives concernant les données personnelles et certaines failles de sécurité. En Tunisie, l’Agence Nationale de Sécurité Informatique (ANSI) a recommandé, en avril dernier, de ne plus utiliser cette application suite à la révélation d’une faille de sécurité. « L’exploitation de cette faille permet à des cybercriminels de substituer des vidéos publiées par des utilisateurs avec cette application, utilisée massivement par les adolescents en cette période de confinement, par d’autres vidéos créées par le pirate », alerte l’agence.
Devenue objet d’un bras de fer entre les Etats Unis et la Chine, TikTok est aussi une arme politique. Plusieurs personnalités politiques à travers le monde ont débarqué sur la plateforme dans l’ambition d’atteindre un public plus jeune. Elle attise également la méfiance des politiciens craignant son impact, comme lors des récentes élections américaines.
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