“Benalisation” est un néologisme qui pourrait marquer la contribution tunisienne à la réflexion et aux débats induits par la mondialisation/globalisation et l’altermondialisme. Il s’inspire d’un autre concept, forgé par notre ami Chamseddine, la “prison-monde” [voir son roman Borj Erroumi XXL).
Le terme de benalisation en évoque deux autres : pénalisation et banalisation.
Coment peut-on entendre et définir ce terme ?

1° – En ces temps de globalisation, le moindre petit dictateur du plus petit et obscur pays peut se retrouver, grâce aux nouveaux moyens techniques et à la croisade mondiale contre “l’axe du mal”, au centre d’une toile d’araignée planétaire sur laquelle il va appuyer son pouvoir, et sans même avoir besoin de faire de trop gros investissements.

2° – Désormais, chaque dictateur-internaute peut agir pour les intérêts du capitalisme globalisé, de “l’Empire” sans avoir à solliciter des ordres directs des centres de pouvoir [Pentagone, Maison blanche etc.] mais uniquement en captant l’air du temps sur internet.

3° – Le pouvoir des petits dictateurs n’est plus seulement un pouvoir matériel, physique de coercition, mais aussi un pouvoir d’ingérence dans les aspects les plus intimes et les plus privés de la vie non seulement des citoyens restés au pays, mais de tous les citoyens éparpillés aux 4 coins de la planète, ce que j’appelle la “Tunisie planétaire”, ou “l’Algérie planétaire”, et aussi de celle de tous les non-Tunisiens concernés directement ou indirectement par le destin du peuple et de la nation tunisiens.

4° – La benalisation du monde, c’est l’effet en retour vers l’extérieur de l’ensemble des pratiques benaliennes à l’intérieur du pays [bien que, avec la globalisation, il est de plus en plus difficile de parler d’intérieur et d’extérieur, les frontières disparaissant progressivement, malgré tous les murs de béton et électroniques]. Benali est le concessionnaire-modèle de l’entreprise-monde chargée de la croisade contre l’axe du mal. Lui-même se charge de la “mise aux normes mondiales” de la Tunisie, sa société, son économie, sa culture. Ses expériences-pilotes et ses innovations sont et seront diffusées et reproduites par d’autres concessionnaires aux quatre coins de l’Empire.

Je pense donc que les défenseurs des droits humains, les opposants, les dissidents tunisiens et leurs amis, loin de tenter de faire un scandale lors du sommet du SMSI à Tunis en novembre 2005, devraient observer un silence sournois et rusé et laisser l’ensemble des délégués et invités faire leur propre expérience du benalisme sur le terrain. Seuls les crétins parmi eux n’y verront que du feu. La majorité d’entre eux pourront ainsi se rendre compte par eux-mêmes de ce qu’est le benalisme et se faire leur propre religion. Certains en reviendront avec une sainte colère, qui ne pourra être que favorable à nos combats.
Au contraire, la tâche la plus urgente de tous les individus et groupes engagés dans le combat contre la benalisation du monde me semble être la constitution d’un Congrès tunisien mondial. je reviendrai sur ce projet ultérieurement.