Commentant la mort de Saddam Hussein, lors du sommet de la ligue arabe tenu à Damas en 2008, le colonel Kadhafi disait in-extenso à l’adresse des chefs d’états arabes présents : « Saddam était l’ami des américains mais ils l’ont pendu…vous ou plutôt moi, qui suis l’ami de États-Unis, ils peuvent décider, un jour, de me pendre. ».

Lucidité ? Prémonitoire ? Fatalité ? Peu importe le mot car le message est si limpide : le sort de nos « leaders » est entre les mains des puissances étrangères.

Il se scellera, le moment opportun, par ou sans résolution onusienne, par ou sans coup d’Etat mais toujours pour des intérêts qui sont les leurs.

L’heure de Kadhafi a sonné le 17 Mars à New York. Le Conseil de Sécurité vient de « légiférer » des frappes militaires en Libye et il faut agir vite car les forces loyalistes sont aux portes de Benghazi, fief de la rébellion. La résolution 1973, doit-on le préciser, passée en boucle par les médias occidentaux, a été prise pour sauver la population d’un massacre imminent. Mais en filigrane, dans sa traduction la plus brutale, on vient juste de mettre fin à la mission de l’agent Kadhafi !!

Aussitôt voté, aussitôt exécuté car tout a été coordonné et planifié au plus petit détail. La tournée de la Secrétaire d’Etat des Etats-Unis, Mme Clinton, en France, en Egypte et en Tunisie en est l’illustration la plus manifeste.

En bon « élève » de l’OTAN, le « gaulliste » Sarkozy, quelle contradiction !!, se charge de la besogne. L’opération « Aube de l’Odyssée » est lancée. Elle n’a de poétique que le nom. La mort et la destruction sont au bout des missiles largués par les avions français et ceux tirés depuis les navires de guerre et les sousmarins américains et britanniques. Avant même que le sommet de Paris, tenu juste pour des besoins de communication, ne débute, des positions militaires libyennes ont été pilonnées et ce malgré la déclaration, prise unilatéralement par le régime de Tripoli, d’un cessez-le-feu et le respect de l’injonction onusienne.

Mais cela ne peut suffire à une coalition plus que déterminée à en découdre avec le colonel Kadhafi au plus vite. La peur de l’enlisement du conflit et le risque de dégâts collatéraux portant atteinte à la vie des civils sont les motivations de la stratégie préconisée par les mandataires de l’ONU. Mais peut-on croire qu’avec cette force de frappe présente dans les airs et en mer, il n’y aura pas de bavures, de victimes innocentes ?!! D’autant plus que le Guide libyen a toutes les raisons

pour que toute la région s’embrase et le conflit perdure. Pis encore, il fera tout pour que la coalition outrepasse sa mission. Il y va de sa survie.

Le plus étonnant, pour le moment, dans cette « drôle » de guerre est l’attitude de la rue arabe. D’habitude, très sensible à toute intervention étrangère en terre arabe, mais aujourd’hui, prudente, attentiste … La condamnation des « croisés » ou de l’impérialisme, selon le « background » idéologique auquel on se réfère, ne s’est pas manifestée… Et pourtant, l’opinion publique arabe n’est pas indifférente à ce qui se passe. Elle est prise dans ce dilemme : soutenir un dictateur ou approuver une intervention militaire ??!!

Kadhafi est, certes, indéfendable. Plus de quarante ans de pouvoir quasi absolu et que de richesses dilapidées, de droits bafoués, de fausses causes, de corruption, d’illusions… Il est, souvent, la risée des médias du monde entier.

Son régime est UNIQUE, inqualifiable. Sa longévité politique la doit à ses milices, ses comités révolutionnaires, de l’intérieur mais aussi à ses largesses financières envers l’Occident en ouvrant, notamment, les vannes des champs pétroliers aux sociétés multinationales et ses coups de barre à l’Ouest ce qui lui a valu le titre très convoité de personnalité fréquentable. Rappelez-vous ses visites, en grande pompe, à Paris, à Rome …

Tel est, ou à peu près, le bilan du maître de Tripoli.

Ses anciens « amis » veulent, à présent, le chasser du pouvoir directement ou en créant une nouvelle situation en faveur des insurgés qui se chargeront par euxmêmes de le renverser.

Une rébellion, fragile et en quête de légitimité, a déjà formé un Conseil National de Transition dont les membres sont d’anciens ministres et diplomates du régime de Kadhafi. Mais est-elle en mesure de porter les aspirations des libyens à bon port ? Ou elle n’est qu’une forme de pouvoir plus réceptive et plus docile aux intérêts du capitalisme mondial ?

Pour l’ensemble de son œuvre, Kadhafi n’a plus raison d’être. L’intervention militaire, quant à elle, ne peut être tolérée car c’est un acte de guerre. Elle ne peut être acceptée, non plus, car elle est mandatée par un organisme, hélas, adepte d’une politique de deux poids, deux mesures …

La Libye renaîtra de ses cendres par la volonté de son peuple.