” Notre imagination a des mirages qui nous trompent. ”  [Antoine Albalat]

Sept mois après le fameux 14 janvier, moi un résident à l’étranger je découvre en frôlant le sol qui m’est si chère que finalement le changement espéré n’est probablement qu’un mirage. les gens du bled m’ont toujours dit que l’avantage d’avoir un regard externe sur la Tunisie est de garder la lucidité. Cette lucidité qui nous est vitale pour renflouer le moral des troupes qui sont noyées dans cet océan d’informations contradictoires et tiraillées par ces débats idéologiques qui éloignent les tunisiens des vrais enjeux de la révolution. Les tunisiens se sont soulevés en décembre 2010 pour rompre avec la dictature de  Ben Ali et la caste rcdiste et destourienne  l’injustice sociale qui a régné en Tunisie depuis près de 50 ans.  Les tunisiens ont réussis à faire tomber les tabous et ont bravé la peur qui les a enchaîné depuis l’instauration du parti unique PSD en 1964.  Les plus grands  symboles de cette dictature ”démocratique” furent:

  1. le PSD (parti socialiste démocratique) rebaptisé RCD (rassemblement constitutionnel démocratique) après le putch médicale du général ben Ali, ont instauré un vide sur la scène politique pour régner seuls;
  2. l’appareil répressif du ministère de l’intérieur que ses officiants comme disait Philippe Boucher ” ont toujours eu le sens de l’ordre avant celui de la légalité, le sens de l’état avant le souci du citoyen.”;
  3. le clientélisme qui régnait en Tunisie faisait en sorte que la loi était cousue sur mesure pour une certaine élite qui était complice du système  par son  silence;
  4. le pouvoir médiatique qui jouait un abrutissant jeu de miroirs en renvoyant aux thèses du pouvoir en place.

Aujourd’hui, le constat est accablant. Le système, toujours en place, a fait des ravages. Après des années d’expérience auprès du grand manitou, nos bourreaux se sont perfectionnés ! L’opinion publique totalement manipulé est hors du coup pendant que le système continue de jouer sale jeu en coulisse.

Le déroulement des évènements du 15 au 18

Profitant du séjour pour visiter la médina et jeter un coup d’œil sur ce qui se passe à la kasbah en ce vendredi 15 juillet, je ne peux accéder à la place du gouvernement et je me retrouve ainsi à 15h sur l’avenue Bab Bnet juste en face de l’hôpital Aziza Othmana. À première vue toute est calme : il y avait peut-être 300 personnes qui usaient de leur droit de manifester. Il y avait de toutes les couleurs (على كل لون يا كريمة : comme on dit chez nous) à l’image de la société tunisienne. Bref rien de tout ce que le communiqué du ministère de l’intérieure a présenté le lendemain en présentant des extrémistes ou des vagabonds et des voyous. Il y avait même une équipe de la télévision qui a filmé les manifestants et la présence des forces de l’ordre.

J’ai profité de cette ambiance pour sympathiser avec 4 personnes en civil en discutant de politique, besoins sociaux économiques des tunisiens. À chaque fois que j’essayais de débattre je fus étonné par leurs insultes pas contre personne mais plutôt contre les tunisiens en général (on mérite une dictature, on est bien, on aurait dû garder ben ali. Notre gouvernement est parfait, on n’a pas les moyens de satisfaire tout le monde)

Aux alentours de 16h après l’incident du policier qui a porté une pancarte (يحيا الشعب !! vive le peuple)  et qui fut intimidé par ces collègues la police a décidé de charger brusquement tout le monde. C’est là que j’ai réalisé que je discutais avec des policiers en civil (blague à part je me demande pourquoi ça existe encore : je pensais que le premier ministre provisoire BCE a promis que plus jamais un policier circulera en civil)

Retournons à nos moutons : Une partie des manifestants dont je faisais partie s’est retrouvée isolée du grand groupe et s’est retrouvée poussée jusqu’à l’entrée de rue dar el Jeld. Une mère de martyr fut insultée par la même bande avec qui je discutais et on lui a arraché sa pancarte sur lequel est inscrit le nom de son enfant Hilmi. Le gros du groupe s’est réfugié à la mosquée qui fut bombardée par les gazs à lacrymogènes.  Vu la grande présence policière au niveau de l’hôpital Aziza Othmana avec un petit groupe on a contourné la municipalité pour accéder à l’avenue 9 avril en espérant pouvoir rejoindre la mosquée de la kasbah où les gens se réfugièrent après la charge policière. C’est là que j’ai rejoint  une amie qui faisait un documentaire sur la révolution tunisienne. Un groupe de moutards l’ont prise en chasse pour lui confisquer son matériel. Heureusement une solidarité entre des inconnus s’est créée à l’instant même pour repousser la charge policière contre une jeune fille. De cette confrontation on a eu notre dose estivale de gaz (les passagers des voitures suffoquèrent, les taxistes qui se faisaient guidés par des passants pour éviter le nuage de gaz). Un instant la fuite s’est arrêtée pour sauver un vieillard mal-voyant qui s’est retrouvé dans la bataille.

La suite du témoignage de l’équipe du parti el majid réalisée le soir même aux urgences de Charles Nicole est sur le lien suivant

https://www.facebook.com/note.php?note_id=10150317197496539

Le lendemain le 16 juillet, on a assisté à un point de presse organisé par l’association liberté et équité. Une collecte de témoignages de la veille fut décidée.

Le témoignage de (Montassir jbeli) a choqué énormément de personnes et ce qui nous a choqué par la suite le nombre de communications télephoniques qu’a reçu Winston smith de nawaat de la part de Montassir menacé indirectement par la police politique le soir du 17 juillet  pour retirer le témoignage de ladite personne  de la page facebook de Nawaat, et les requetes de Montassir sont arrivées au point de passer au téléphone sa mère pour parler avec Winston Smith et lui demander de retirer la video de Nawaat…

La liste suivante est celle des personnes arrêtées le 15 juillet :

  1. bilel khmiri
  2. haithem thawadi
  3. aman allah mansouri (activiste facebook)
  4. jamel charfi
  5. abdelsallam nafati
  6. mehdi jifeni
  7. nader belhadj rhouma
  8. abdlehamid alsghair
  9. jamel ben ayed
  10. khaled kouhouli
  11. bara saadaoui
  12. moraad mihrzi
  13. hazem ben salem
  14. basem alrihani
  15. lotfi bouzidi
  16. lassad issaoui
  17. sofiene wichteti
  18. chrif ben ammar (employé du ministère des affaires étrangères )
  19. mohsen ajroudi
  20. hamdi ben saleh (allias :scandeli)
  21. ossama hizmi
  22. hamza ben salem
  23. mohamed amine ben nour (médecin)
  24. mahmoud ben said
  25. haythim ben ayed
  26. moaad bouchiba
  27. hamza Aissa (étudiant en médecine)
  28. ihsen ben mabrouk
  29. abdelwehed aousji (ingénieur élève ENIT )
  30. nabil ben taleb (dentiste)
  31. Mahdi Znagui, (étudiant à l’ISG tunis)
  32. sahib tarhouni (étudiant )
  33. mounir elfelih (architecte)
  34. karim abdelmelek
  35. wissem attrach
  36. ali rbaii
  37. tahar hamada
  38. mohamed toueti
  39. mounir chaabani
  40. slim elhamadi
  41. sofiene gharbi
  42. sami manaii
  43. saqir deli
  44. ismael belrjeb
  45. ahmed bou othman

 

Le 18 juillet on apprend à la dernière minute que 24 des 48  personnes arrêtées se faisaient présentés devant  le juge d’instructions du 12eme bureau du tribunal de première instance de Tunis.

la liste des 24 personnes :

  1. hamzaa aissa
  2. wissem atrach
  3. heythem ben ayad
  4. ali rbaii
  5. taher hamada
  6. mohamed toueti
  7. abdelwehed aousji
  8. mounir chaabani
  9. mohamed ben said
  10. moraad mihrzi
  11. mounir elfelih
  12. sofiene wichteti
  13. slim elhamadi
  14. sofiene Gharbi
  15. sami manaii
  16. cherif ben ammar
  17. saqir deli
  18. baraa saadaoui
  19. moaad bouchiba
  20. abdlehmid sghir
  21. sahib tarhouni
  22. nabil ben taleb
  23. hamza ben salem
  24. Mahdi Znagui

9 autres personnes se retrouvent enroulées de force à la base de menzel bourguiba (gouvernorat de bizerte):

  1. aman allah mansouri (sousse)
  2. khaled kouhouli(rgueb)
  3. nader belhadj rhouma (manar)
  4. bilel khmiri (cité hilel)
  5. laasad iasaoui (cité ettadhamon)
  6. ismail belrjeb (dwar hichir)
  7. ahmed bou othman (menzel tmim)
  8. jamel michrgi (sijnen)
  9. mahdi jifeni (kairouen)

si on fait les comptes: 12 personnes sont encore aux arrêtés et 3 autres personnes ont disparu mais pas ne sont  encore identifiées .

 

Concernant les incidents de menzel bourguiba 4 personnes sont aux arrêts (anis krifi, walid boujebli,haythem mejri, aymen ghrib) et une dizaine de personnes ont été relâché (mohamed gharbi, hafedh babouri, walid krifi, bechir krifi, majdi dhouib, nader kobtani, bechir saadani,khalil yaakoubi, khalil may). De même zaineb chebli (om Khaled) membre du bureau exécutif de l’association liberté et équité a subi un raid chez elle lors de son absence.

le 20 juillet les forces de l’ordre ont effectué une descente au quartier de essoujoumi à midi pour arrêter des ex prisonniers politiques.

hassan ben romdhan ben arbi lakhthir, aymen jemmi furent arrêtés tandis que saber sassi, arbi abid, ali laabidi, et adbelhmid outhini ont pris la fuite.

La question qui se pose où est l’amnistie général de tout cela??

où est le contre pouvoir médiatique dans tout cela??

où la volonté politique de rupture avec le passé??

Ce ne sont que des mirages ”Lorsqu’on n’a pas de vie véritable, on la remplace par des mirages.”