Caricature par Needall Garryani (ERevolution)

La Tunisie a subit une Kleptocratie pendant de trop nombreuses années. La conséquence en a été la suivante : des biens mal acquis. Certains d’entre eux sont actuellement à l’étranger. La question est de savoir comment est-ce qu’on peut les récupérer ?!

Une entrée en matière assez difficile

Tout d’abord il faut voir que les termes ‘’ biens mal acquis ‘’ posent problème, en effet, pour certains c’est tout bonnement un euphémisme pour d’autre cela peut relever de l’atteinte à la présomption d’innocence.
Quelques propos du bâtonnier Kilani rappellent que la procédure de restitution est lente et compliquée mais qu’il faut : ‘’ mettre un terme à cette injustice dont est victime le peuple tunisien à travers la mise en œuvre de procédures juridiques simplifiées et rapides propres à ouvrir aux Tunisiens la voie afin de récupérer leurs biens injustement spoliés par Ben Ali et ses acolytes». Il a ensuite ajouté que le pays avait besoin d’un ‘’ climat de paix social et d’un développement économique ‘’.

Maud Pedriel, déléguée générale de l’association Sherpa (ONG dont le but est de défendre et protéger les populations civiles contre les évasions fiscales) explique que trois jours après la chute de Ben Ali, l’ONG a lancé une requête au parquet de Paris pour geler les avoirs qui s’élevaient à 12 millions d’euros. Ce crime, selon elle, peut être qualifié de patrimocide, de crime de spoliation et de grande corruption. C’est même, toujours selon elle, « une kleptocratie que représentait Ben Ali et sa famille. »

Quelle est la procédure à suivre ?

Il faut savoir que la communauté internationale a prit conscience de ces dérives et a émit une convention des nations unies pour lutter contre la corruption en 2003.

Selon le chapitre 5 article 51 il y a deux façons classiques de restitution de biens : les mesures de confiscation passent soit par une dépossession par un gel des avoirs et un transfert au patrimoine de l’état, soit par la condamnation puis la confiscation suivies d’une entraide des pays concernés pour la récupération. Des poursuites pénales et administratives doivent être mises en place.

Cependant beaucoup d’obstacles surgissent alors comme les commissions et les retro commissions ; il s’agit également de voir si les avoirs étaient illicites en tant que tels. Les mesures de recouvrement posent aussi le problème dans le sens ou il s’agit de savoir quel a été l’impact de ces dommages sur le pays et comment aurait-il évolué sans ces crimes ?

Quelles sont les réactions à l’étranger ?

Christian Grobet, avocat au barreau de Genève (Suisse), montre quant à lui que son action a été louable, le lendemain de la fuite de Ben Ali il a prit contact avec l’association Tunisienne en Suisse en application de l’article 186 de la Constitution suisse, pour bloquer les fonds mal acquis de la famille Ben Ali & Co, suite à quoi selon lui, la Tunisie doit faire une demande d’entraide.

Il faut établir un comité d’entraide, cependant les délits effectués par Ben Ali, doivent être identiques en Suisse sinon les condamnations ne peuvent être retenues, et la restitution n’aura pas lieue.

Me Pierre André Dumont, avocat spécialisé en droit financier (Belgique) s’explique sur les difficultés procédurales pour récupérer les avoirs mal acquis à l’étranger. Il montre qu’une liste à été établie : « 48 personnes sembles être liées et pour une autre vingtaine de noms, ils se doivent de respecter une certaine vigilance ». Il explique que même si le processus s’avèrera être long (plusieurs années), il faut le dénoncer. Il a également mentionné le problème du blanchiment, en effet la saisie d’immeubles et d’appartements en Belgique reste un obstacle car les noms sont parfois incomplets, il y a de nombreuses sociétés écrans et il existe aussi le secret bancaire.

Et qu’en est-il maintenant ?

Au lendemain de la Révolution, il y avait en Belgique cinq dossiers ouverts, ce qui équivaut à 29,2 millions d’euros. La restitution des avoirs est une procédure longue car lorsque les avoirs sont gelés, il faut encore attendre la décision de l’Union Européenne qui elle même attend le conseil de sécurité.

La Tunisie doit faire des interventions pour faire bouger les choses, car les bénéficiaires de ces gels sont les Etats. L’efficacité de la procédure pénale s’élèverait au maximum entre 1 et 4% des fonds détournés. Il faut garder tout de même une pensée positive et prendre toutes les initiatives qui s’imposent pour assurer la bonne communication des informations.

Certains avocats tunisiens dénoncent les grandes puissances européennes qui peuvent en un jour geler les avoirs et les récupérer mais qui doivent attendre des années avant de pouvoir restituer une infime partie des fonds au pays victime.
Il y a urgence aujourd’hui, la situation dans laquelle se trouve le pays est loin d’être encourageante, le pays a grandement besoin de ces fonds pour se reconstruire.