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Surtout ne laisser entrer personne. Cela pourrait un peu être le nouveau slogan de l’Europe. Aprés avoir mis en place un système semi-privatisé et quasi militaire de surveillance des frontières extérieur FRONTEX, le vieux continent réfléchit à encore plus de surveillance via deux initiatives : EUROSUR et Smart borders package. Une étude de la fondation allemande Heinrich Böll a évalué les coûts et l’impact sur les droits fondamentaux des citoyens de ces deux propositions.

L’Europe espace pensé pour la libre circulation et l’ouverture, ne s’emble que se fermer de plus en plus aux autres. EUROSUR, un amendement à la régulation Frontex, est une nouvelle initiative de l’Europe qui est un système de surveillance des frontières qui permet une plus grande surveillance des frontières maritimes et terrestres via l’utilisation des nouvelles technologies : drones, satelittes, radars… Ceci permetrait de filtrer les possibles « intrusions ». L’initiative Smart borders, quant à elle, s’occupe plutôt des entrées « par la porte » puisqu’il s’agit plutôt d’enregistrer les voyageurs non originaires de la zone Schengen (Registered Travellers Programme) et de relever leurs données biométriques.

L’étude réalisée par la fondation Heinrich Böll conclue que ces initiatives vont coûter cher, alors que la situation financière européene n’est pas au beau fixe, qu’elles vont engendrer des retards et des pertes de temps du fait de leur fonctionnement, qu’elles vont necessité le stockage de données personnelles des voyageurs, que leur efficacité n’est pas prouvée et enfin qu’il n’y a pas de demande de la part de la société pour de tels projets.

Ces propositions datent de 2008. Mais ce sont les flux migratoires engendrés par le printemps arabe de 2011 qui ont donné une nouvelle impulsion pour leur mise en place. Une décision qui a été prise de façon technocratique, sans concertation avec la population.

Par ailleurs un rapport de la Commission Européenne pointe du doigt le fait que les institutions européennes n’ont pas pris en compte les difficultés rencontrée par les USA dans la mise en place d’un système de sécurité équivalent. Le rapport de la Commission demande à ce qu’un débat public soit fait pour juger de la nécessité et du coût de ce programme alors que la situation économique européenne est à l’austérité.

Le système EUROSUR

Le but principal d’EUROSUR est d’améliorer la vigilance et la capacité de réaction des états membres et de FRONTEX pour prévenir la migration irrégulière et le passage irrégulier des frontières. Il s’agirait alors de surveiller 24h/24 et 7j/7 les frontières maritimes et terrestres de l’Europe. Ce qui pose alors l’obligation de porter secours à toute personne en détresse en mer, conformément au droit l’international de la mer. Mais rien ne concernant ce fait n’est inscrit dans la proposition.

Le premier point qui pose problème est le coût de la mise en place d’un tel système qui est estimé à 338 millions d’euros par la Commission européenne, mais qui pourrait être deux à trois fois plus important et tourner autour des 874 millions d’euros.

Par ailleurs la question du traitement des données personnelles est ouverte du fait de la surveillance des mouvements via l’utilisation de drones par exemple, ainsi que du fait de la collecte d’informations sur les voyageurs. Il peut également y avoir échange d’informations avec des pays tiers.

Smart Borders

Le système Smart Borders est une proposition qui doit améliorer le suivi des ressortissants de pays tiers entrant dans la zone UE. Les entrées et sorties seront contrôlées pour limiter la possibilité de séjour de migrants illégaux et pour repérer les dépassements. Il y aurait création d’une base de données européenne centralisée avec récolte de données biométriques, empreintes digitales et photo pour les ressortissants hors zone UE. Or ce type d’information ne peut être récoltée que pour des raisons sécuritaires qui ne semblent pas être justifiées pour le moment. Et la Commission Européenne n’a pas su démontrer la nécessité d’une telle démarche.
Ce programme aurait pour conséquence, entre autre, le stockage des données biométriques des voyageurs, un temps d’attente plus long et un traitement inégal des voyageurs puisque ceux enregistrés passeraient plus rapidement que ceux qui ne le sont pas.

Un des arguments de l’UE pour appuyer ce système est qu’il permettrait d’avoir plus de statistiques et d’informations permettant de mieux comprendre le phénomène d’immigration irrégulière afin de mieux le contenir.

Mais rien n’a prouvé que ce système soit efficace. Par ailleurs l’étude de la fondation Heinrich Böll souligne le fait que tout comme EUROSUR, le Smart Borders a un coût financier important.

Cette étude d’évaluation suggère qu’il n’est pas opportun pour l’Europe de lancer un nouveau système de contrôle des frontières, car même si l’efficacité de ces propositions est un jour démontrée il faudra encore être capable de prouver leur nécessité.

L’étude en anglais :

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