Conférence de presse des membres de la commission du 4 décembre non affiliés à Ennahdha et au gouvernement. 6 avril 2013. Tunis. Crédit photo Lilia Weslaty

Mise à jour : 18 avril 2013

Le groupe gouvernemental a achevé son rapport en concluant que “Nous n’avons pas pu identifier les responsabilités à cause de l’interruption du travail de la commission”. A plusieurs reprises, la faute a été alléguée au groupe syndical qui n’a pas “voulu rallonger la période de l’enquête”, délimitée à un mois par l’accord signé le 12 décembre 2012. Dans les 17 pages que nous avons pu avoir officieusement puisque ce rapport n’a pas été publié, le groupe gouvernemental mentionne que

La délimitation d’un mois « n’avait pour objet que l’incitation de la commission à finaliser son travail aussi rapidement que possible et non la considérer comme finie dans le cas où la commission ne fournisse pas son rapport dans le délai défini. »

Ainsi, le rapport du gouvernement explique que la date convenue d’un mois n’était qu’un mode d’incitation, pas plus, ce qui veut dire que le principe de respect de ce délai n’était que proticolaire, chose que la partie syndicale a refusé.

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Plusieurs données très importantes ont été présentées samedi 6 avril lors de la conférence de presse organisée par les membres de la commission du 4 décembre non affiliés à Ennahdha et au gouvernement. Suite à la division avec le reste de l’équipe et chargés d’enquêter sur les heurts du 4 décembre devant le siège de l’UGTT, ces derniers ont décidé de présenter leur rapport et ce dans le respect du délai promis à l’opinion publique suite à l’accord signé le 13 décembre 2012.

Censé être prêt un mois après la mise en place le 2 janvier 2013 de la commission, le retard de la publication du rapport est dû, selon la commission, aux différents événements qui ont secoué le pays, notamment l’assassinat du leader de gauche Chokri Belaid et la démission du chef de gouvernement Hamadi Jebali le 19 février dernier.

Afin de ne pas perpétuer la mauvaise tradition des rendez-vous manqués des promesses et enquêtes gouvernementales, à l’instar de celles du 9 avril et de l’attaque de l’ambassade des Etats-Unis à Tunis, le compte rendu a ciblé, avec des preuves, les acteurs de violence.

Méthodologie et travail de la commission :

Dès le début de la première réunion de la commission, il a été convenu d’ :

  • Etudier le dossier des dites “Ligues”
  • Visionnage de vidéos et enregistrements des incidents de violence
  • Audition des témoins et toute personne ayant une relation avec les incidents

Dès le lendemain de la mise en place de la commission, quatre missives ont été envoyées à au secrétariat général du gouvernement pour avoir le dossier des ligues, à la Présidence du gouvernement, à l’UGTT et au ministère de l’Intérieur pour avoir un rapport détaillant la chronologie des événements ainsi que les vidéos.

Concernant le dossier des ligues, ce n’est qu’après cinq jours que le SG du gouvernement a répondu avec les données vagues de 16 associations soucieuses de ” la protection de la révolution”, dont l’une porte le nom de “Ligue nationale de protection de la révolution”. Ce manque d’informations a entravé le travail de la commission supposée finir son rapport dans un délai ne dépassant pas les 30 jours.

Un groupe de la commission s’est donc déplacé le 10 janvier afin d’avoir le dossier complet. Les révélations sur les dites “Ligues de protection de la révolution”
ont été de taille. Il s’est avéré, au cours de l’enquête, qu’hormis les bureaux des villes de Kairouan et de Gabès, les autres ligues actives dans plusieurs villes de la Tunisie agissent dans l’illégalité la plus totale, à l’instar de celle du Kram, Cité Tadhamen, Zahraa et Hamam Ennef. Cependant, aucune instruction judiciaire n’a été entamée pour poursuivre ces ligues hors la loi.

Le rapport du ministère de l’Intérieur confirme l’implication des Ligues et de partisans d’Ennahdha dans des actes de violence

Sans mentionner le mot “violence” ou “agression”, le rapport du ministère de l’Intérieur confirme l’implication des Ligues et des partisans d’Ennahdha dans des actes de violence prémédités devant le siège de l’UGTT et ce le 4 décembre 2012. En effet, dans le récit chronologique, il est mentionné qu’à 13h15, plus de 200 personnes d’entre eux ont envahi la Place Mohamed Ali et ont déchiré les 20 pancartes des jeunes du Front Populaire.

En plus, la caméra de l’UGTT a démontré avec clarté, d’un angle bien visible, leur tentative de pénétration par la force, en usant d’une barricade, contre la porte principale de la centrale syndicale.(Cliquez ici pour voir la vidéo)

Le juge du Tribunal Administratif Ahmed Soueb, a aussi expliqué lors de la conférence que bien que les membres de la commission aient demandé les vidéos du ministère de l’Intérieur, ils n’ont pu l’avoir.

« Le cameraman du ministère de l’Intérieur n’a pas pu continuer à filmer les actes de violence devant l’UGTT » a déclaré Chafik Sarsar, professeur de droit à la faculté de droit et sciences politiques de Tunis

Les syndicalistes, en position d’auto-défense

Le rapport mentionne également le nombre de 26 blessés lors des affrontements entre les “envahisseurs” et les syndicalistes. Au sujet des bâtons que ces derniers portaient à la main, M. Soueb a précisé qu’il s’agissait de ceux des drapeaux.

Selon les membres de la commission, l’apogée des heurts a duré en tout 7 minutes. Le ministère de l’Intérieur a fourni à la commission seulement les vidéos filmées avant et après cette période en passant outre le moment crucial de l’attaque et ce à cause “du cameraman qui a eu peur et qui n’a pu poursuivre son travail.” d’après le ministère.

Les syndicalistes se sont donc retrouvés en position d’auto-défense, a expliqué le juge Soueb. De surcroît, le ministère de l’Intérieur a été prévenu de la marche annuelle qui allait avoir lieu de la centrale syndicale jusqu’au mausolée de Farhat Hached ce jour-là et ce depuis plus de 72 heures tel que le prévoit la loi a confirmé Mokhtar Trifi, président honorifique de la LTDH. Pourtant, la réaction des agents des forces de l’ordre a été bien tardive poussant les syndicalistes à se défendre eux-même contre l’invasion devant leur propre local.

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Pour pouvoir lire l’intégrale du rapport en arabe >>>

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