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Le Réseau Associatif pour la Nature et le Développement en Tunisie (RANDET) et le Groupe Eco-constitution ALTERNATIVE (groupe d’écologistes militant pour l’intégration de lois environnementales et écologiques dans la Constitution tunisienne) ont envoyé, jeudi 25 avril, une lettre de protestation à l’Assemblée nationale constituante, dénonçant la suppression de l’Instance du développement durable et de la protection des droits des générations futures du projet de constitution (brouillon version 3).

Nous exprimons notre désapprobation de cet acte de la part de l’ANC et nous appelons fermement à garder l’instance de développement durable parmi les organes constitutionnels, eu égard à son importance en tant qu’instance de régulation et d’orientation des politiques publiques et des plans de développement vers plus de durabilité, économique, sociale et écologique.

Une constitution vide de sens?

Contacté le 27 avril, le député et président de la Commission de l’infrastructure et de l’environnement, Hmed Khaskhoussi, déclare ne pas être encore au courant de la démarche des deux organisations écologiques mais affirme néanmoins : « Nous ne pouvons que soutenir cette démarche qui va dans l’intérêt de la Tunisie et de ses citoyens, par tous les moyens que nous possédons ». Il précise également « qu’une nation sans la dimension de l’écologique et le développement durable ne pouvait survivre ».

« Ce serait une constitution vide de sens »

Il estime que le retrait de l’instance « n’est pas de bonne augure », mais ne s’étonne pas outre mesure, jugeant qu’il y a eu un « mauvais départ qui a tout faussé à l’ANC… même la coalition n’est pas basé sur des questions de principes mais de pouvoir. Il y a un aspect totalitaire. »
Il réaffirmant cependant sa volonté d’agir : « Nous allons faire de notre mieux pour empêcher cette omission, nous allons protester pour faire réviser cette position qui n’est pas saine. »

Enjeu de la constitutionalisation du droit de l’environnement

En novembre 2011, dans le cadre du workshop « Regards croisés sur l’intégration de l’environnement dans la nouvelle Constitution de la Tunisie », les deux organisations avaient déclaré que les élus de l’Assemblée nationale constituante (ANC) étaient à 80% pour le principe de constitutionnalisation des droits environnementaux. Un optimisme qui n’est malheureusement plus d’actualité.

Mounir Majdoub, président de l’Association « Alternatives » et coordinateur du Groupe Eco-Constitution avait souligné, lors du Forum Citoyen pour l’Environnement – le 13 juin 2012- que

« La constitutionnalisation du droit de l’environnement sera, sans doute, une mesure salutaire pour que l’environnement ne soit plus soumis aux aléas des politiques. Cependant, une simple insertion du droit environnemental dans la constitution ne sera pas suffisante si les conditions de base d’un Etat démocratique et décentralisé garantissant les droits fondamentaux du citoyen ne sont pas réunies.»

Ainsi, trois importantes propositions avaient été faites à l’ANC au niveau du préambule de la constitution , du chapitre relatif aux droits et libertés et aux institutions constitutionnelles, respectivement la mention explicite:

  • Des principes d’un développement économique, social et environnemental équilibré et d’une protection de la nature dans toutes ses composantes
  • Des droits du citoyen d’accéder à l’information environnementale et à participer aux décisions politiques pouvant avoir des impacts significatifs sur l’environnement
  • La création d’un conseil supérieur du développement durable

L’absence de contrôle des administrations centrales et locales

Depuis 2011, les deux organisations n’ont cessé de multiplier les appels à une action urgente concernant la continuelle dégradation de l’environnement en Tunisie et les risques auxquels sont exposées les ressources naturelles du pays mais aussi la santé des citoyens ;critiquant des organismes gouvernementaux « passifs et incapables » et « l’absence de prise de position de la part des partis politiques par rapport à la dégradation de l’environnement ».

Plus de deux-mille hectares de forêts tunisiennes ont été incendiés ou déboisés ; des parcs nationaux tels que Ichkeul, Bouhedma et Châambi ont été saccagés ; des champs agricoles et des établissements industriels déversent, sans traitement préalable, des rejets polluants dans la nature « profitant d’une quasi-absence de contrôle des administrations centrales et locales ».

« L’administration environnementale est appelée à assumer son entière responsabilité en matière de protection de l’environnement notamment, à travers le contrôle des infractions, la communication et l’information du public sur la gravité de la situation. » avaient–ils souligné lors d’un précédent communiqué.

Les deux organisations lancent également un appel à toutes les associations et citoyens désireux de protéger l’environnement et le développement durable de la Tunisie pour venir se joindre à cette protestation contre le retrait de l’Instance du développement durable et de la protection des droits des générations futures du projet de constitution.

Par Nadia Akari

Lire la lettre d’indignation des deux organisations

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