Il y a un peu plus de deux ans, deux dates ont marqué l’esprit des Tunisiens : le 17 décembre 2010 et le 14 janvier 2011.
Le premier événement s’est déroulé dans une région pauvre de l’intérieur, et les Tunisiens l’ont reconnu comme un appel pour la dignité. Le deuxième événement s’est déroulé dans la capitale, et a cristallisé une aspiration pour la liberté traduite par la fuite du dictateur. Ainsi, la dignité et la liberté sont symboliquement restaurées, au moins en apparence.
La suite des évènements depuis ces dates est connue de tous. Elle aboutit aujourd’hui à une situation de blocage où les choses semblent s’emmêler. On observe ainsi que les nouvelles instances n’ont su améliorer la condition morale et matérielle du peuple. Pire, ces conditions se sont aggravées et le sentiment d’injustice s’est accentué.
Le premier réflexe est donc d’accuser Ennahdha, qui n’a pas su manœuvrer dans une situation nationale difficile, un environnement régional et international compliquant la donne.
Ennahdha peut être considérée comme responsable pour le court terme, mais elle ne peut être pointée du doigt pour une situation générée par des dizaines d’années de dysfonctionnement à tous les niveaux.
Ennahdha a commis des erreurs mais n’est pas à bannir. Elle reste un acteur légitime de la scène politique, mais pas forcément au pouvoir pour ce qui reste de la période transitoire. Les élections décideront de la suite.
La question qui se pose en revanche est la suivante : l’équipe actuellement au pouvoir est-elle capable de faire en peu de mois ce qu’elle n’a pas réussi à faire depuis les dernières élections ?
La tâche était de :
1- Gérer la situation transitoire
2- Rédiger la constitution
3- Organiser les élections
Sur le premier point, on peut dire que l’équipe dirigeante aurait pu mieux faire, car les difficultés étaient connues et prévisibles. Mais rien n’a été vraiment anticipé, et on sent globalement qu’il y a un manque de volonté. Il y avait comme une ambiance de « attendez que je prenne tout en main, j’agirai après ».
Sur le deuxième point, tout le monde voit le fiasco. Car de quelle constitution s’agissait-il ? Une constitution pour les temps passés ?
Non : une constitution pour les 50 ans à venir avec une démographie tunisienne en berne sans une immigration prévisible (africaine ou autre). Elle ne doit exclure aucun Tunisien : ni les Tunisiens actuels ni ceux des 50 prochaines années.
On est dans un monde ouvert, interdépendant et dans lequel nous agissons, mais dans lequel on subit des contraintes lourdes liées à la liberté des autres. On n’est pas seuls dans le monde !
La constitution, en termes politiques et stratégiques, devrait donc encadrer, pour l’intérêt des Tunisiens, l’interdépendance, mais en restant ouverte dans l’esprit et dans la lettre.
Elle devrait prendre en compte le contexte mondial afin d’y participer conformément à notre taille et notre potentiel. La question, politiquement déclinée en quelques thèmes concernant les points non consensuels, n’est pas insoluble si on évite les détails et les querelles techniques. Tous les Tunisiens ont vu le niveau de civilité lors de certaines séances de l’ANC.
Une fois les questions politiques discutées et réglées par une recherche de consensus politiquement suffisant (et pas seulement techniquement suffisant), les détails iraient à des comités techniques d’experts, puis seraient enfin validés en retour dans leur forme définitive.
L’ANC a fait le contraire : elle a perdu tout son temps dans les détails techniques qui ne sont pas de son ressort et se retrouve aujourd’hui avec des questions politiques en suspens et sans consensus.
Pour le troisième point, le constat est encore plus décevant. Les élections repoussées de mois en mois, beaucoup ont perdu espoir dans une stabilisation politique rapide qui faciliterait un redémarrage économique.
Il ne s’agit pas de mettre en faillite le pays pour une constitution, élection ou démocratie, aussi parfaites soient elles ! La Tunisie malheureusement, c’est un fait vécu par tous les Tunisiens, ne peut plus supporter davantage de tergiversations.
Que faire maintenant ? Rentrer dans un processus de somalisation ? Non bien sûr ! On coupe l’enfant en deux comme dans le jugement de Souleyman et Daoud ? Non bien sûr !
Là c’est encore la responsabilité d’Ennahdha, car c’est à elle de négocier avec l’opposition des modalités d’un salut national qui permettrait de digérer les échecs de tout le monde.
La légitimité qui finirait par la famine et le désespoir n’en est pas une : c’est une légitimité technique. La légitimité politique peut encore se gagner en évitant au pays et aux Tunisiens plus de souffrances. C’est une question de dignité et de liberté !
Le problème c’est que une bonne partie du peuple tunisien ,certainement une majorité a perdu confiance Ennahda,sa sincérité ,son intégrité,sa capacité de diriger le pays.
faut-il donc de garder les gens d’ennhdha ne serait ce qu’en tant que partenaire juste par ce qu’ils sont arrivé à constituer une clientèle politique à l’instar de Ben Ali .
Pour après les pochaines élections, partenaires ou adversaires peu importe mais l’essentiel est qu’il n y est pas d’exclusion sous une forme ou une autre. Les tunisiens contents, mécontents ou déçus voteront librement.